Le sang encore chaud dégoulinait des mains de Quatro lorsqu'il ouvrit la porte de la salle de purification. Il trébucha, haletant, mais n'avait pas le luxe de s'arrêter. Devant lui, deux gardes massifs se redressèrent aussitôt en voyant leur maître gisant à l'intérieur.
« Arrête-toi là ! » hurla l'un d'eux, dégainant son glaive.
Quatro, les muscles tendus par l'adrénaline, se saisit du bâton qu'il tenait toujours. Avant que le garde le plus proche n'ait pu l'atteindre, il plongea sur lui avec une violence incontrôlée, frappant sa tête à plusieurs reprises. Le deuxième, surpris, hésita un instant de trop. Quatro se retourna, esquiva une attaque maladroite et, dans un mouvement fluide, abattit le bâton sur le genou du soldat. Le craquement sinistre résonna dans le couloir, suivi d'un hurlement de douleur.
Sans perdre une seconde, Quatro s'élança dans le dédale des couloirs.
Son cœur battait à tout rompre, chaque pas résonnant sur le sol glissant. Les couloirs se ressemblaient tous, ornés des mêmes mosaïques éclatantes qui dissimulaient l'horreur du palais. Il tourna à gauche, puis à droite, mais se retrouva dans une impasse.
L'alerte fut déclenchée. Une cloche retentit, et un rugissement collectif envahit le bâtiment. Des centaines de pas résonnèrent soudain dans les couloirs, se rapprochant à chaque instant.
« Trouvez-le ! » hurla une voix autoritaire.
Quatro accéléra, chaque muscle de son corps hurlant de douleur. Il trouva enfin une grande porte ouverte qui semblait mener à l'extérieur. Sans réfléchir, il s'y engouffra.
Il déboucha dans une cour immense et nauséabonde. L'air y était si lourd et pestilentiel que même le masque qu'il portait ne suffisait plus à filtrer la puanteur. Quatro tituba, suffoquant légèrement, tandis que ses yeux s'adaptaient à la lumière blafarde.
Le spectacle qui s'offrait à lui était surréaliste. Des centaines de femmes nues, leurs corps amaigris et couverts de taches, déambulaient sans but. Leurs mouvements étaient lents, mécaniques, et leurs regards vides. Certaines murmuraient des mots incohérents, d'autres restaient immobiles, le regard fixé sur un horizon imaginaire. Une forte odeur de putréfaction et de parfums bon marché empoisonnait l'air.
Quatro avança lentement, choqué par ce qu'il voyait. Il comprit que ces femmes n'étaient pas seulement des esclaves ou des concubines : elles étaient brisées, droguées, réduites à l'état de coquilles vides.
Mais avant qu'il ne puisse analyser davantage, un mouvement attira son attention.
Des silhouettes imposantes émergèrent de l'ombre : les eunuques d'Axiome, gardiens impitoyables de ce lieu maudit. Leurs visages masqués par des heaumes d'or reflétaient une lumière inquiétante, et leurs torses massifs, nus et scarifiés, semblaient sculptés dans le marbre. Armés de longues hallebardes, ils avancèrent lentement, formant un cercle autour de Quatro.
« Toi ! » gronda l'un d'eux, sa voix grave et dénuée d'émotion. « Tu n'as rien à faire ici. »
Quatro recula instinctivement, cherchant une issue. Mais ils étaient trop nombreux, et leurs mouvements synchronisés rendaient toute fuite impossible.
La puanteur de la cour semblait s'intensifier, rendant chaque respiration plus difficile. Quatro resserra sa prise sur le bâton qu'il tenait toujours, son regard défiant malgré l'évidence : il était acculé.
« Je ne partirai pas avant d'avoir des réponses, » déclara-t-il, sa voix rauque mais ferme.
Les eunuques ne répondirent pas. L'un d'eux leva sa hallebarde, prêt à frapper.
Quatro se mit en garde. Si c'était ici qu'il devait tomber, il ne le ferait pas sans emporter quelques-uns de ces monstres avec lui.