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Chapter 39 - Chapitre 39

Dans la clairière, une lumière blafarde émanait du cercle de protection tracé par Marceau. La vingtaine de soldats et mercenaires restant, essoufflés et terrifiés, s'étaient regroupés en son sein, tentant de reprendre leur souffle. Roche, son visage éclaboussé de sang, ajustait son fusil, tandis que Marceau se tenait immobile, concentré sur le maintien de son sortilège.

— Tenez vos positions, ordonna Roche d'une voix dure. Ce cercle est notre dernier bastion. Tout ce qui entre doit mourir.

Les marrons, eux, observaient de loin, incapables de franchir cette barrière invisible. Ceux qui avaient essayé s'étaient écroulés, vidés de leur énergie, comme si la magie de Marceau les rejetait. Ils tiraient des flèches et lançaient des pierres, mais ces attaques, bien que gênantes, n'étaient pas suffisantes pour briser la défense organisée des chasseurs.

Aniaba, seul, avançait lentement vers le cercle, sa respiration lourde mais régulière.

Dans la grotte, Nyala et Marie-Louise ressentaient l'effet de la magie de Marceau. L'influence de leur propre rituel s'effaçait dans la zone entourant le cercle de protection. Nyala fronça les sourcils, posant une main sur le sol comme pour mieux comprendre.

— Il utilise une magie différente, murmura-t-elle. Une magie d'érudit, froide et méthodique. C'est la première fois que je rencontre ce genre de magie.

Marie-Louise serra son grigri, inquiète.

— Que pouvons-nous faire ? Si cette barrière reste intacte, Aniaba sera isolé. Il ne pourra pas tenir longtemps, même avec les Loas à ses côtés.

Nyala réfléchit un instant, puis son visage s'illumina d'une idée.

— Nous ne pouvons pas détruire son cercle de protection. Mais nous pouvons changer la cible de notre sort. Les ombres qui protègent les marrons doivent devenir l'extension d'Aniaba. Elles le rendront invincible, même face à cette magie.

Marie-Louise hocha la tête et s'agenouilla à côté de la mambo. Ensemble, elles entamèrent un nouveau chant, leurs voix s'entremêlant dans une harmonie sombre et puissante. Les ombres qui s'étaient dispersées autour des marrons commencèrent à converger vers Aniaba, se regroupant autour de lui comme une armée silencieuse.

Les ombres dansaient autour de lui, se tordant et se contorsionnant comme des entités vivantes. Il n'était plus seulement un homme, mais une force en mouvement. Chaque pas qu'il faisait semblait amplifié par une énergie qui le dépassait. Il sentait une puissance croissante en lui, une fureur irrépressible alimentée par les vies qu'il avait prises.

Les soldats dans le cercle observaient, terrifiés, les ombres se rassembler autour d'Aniaba.

— C'est quoi ce… ? balbutia un mercenaire, son arme tremblant dans ses mains.

Marceau, bien qu'encore concentré, ouvrit un œil et analysa la situation. Il comprit immédiatement ce que Nyala et Marie-Louise avaient fait.

— Intéressant, murmura-t-il. Ils ont adapté leur magie. Je n'aurais pas cru cela possible aussi rapidement. Ce n'est pas une forme de magie aussi primitive que je le pensais.

Roche, lui, n'avait pas besoin d'explications. Il releva son mousquet et visa Aniaba.

— Peu importe ce qu'il est, grogna-t-il. Tout peut saigner.

Il tira, mais une ombre jaillit devant Aniaba, interceptant la balle. Le projectile disparut dans un tourbillon noir avant de toucher sa cible. Aniaba, quant à lui, continua d'avancer, un sourire cruel étirant ses lèvres.

Les ombres qui l'entouraient devinrent une extension de lui-même. Lorsqu'un mercenaire s'approcha pour tenter de l'abattre, une ombre surgit pour saisir son bras, le tordant avec une force surnaturelle avant de le briser net. D'autres ombres semblaient anticiper les attaques, bloquant les lames, détournant les coups de feu, et enveloppant Aniaba dans un manteau d'obscurité qui le rendait presque invisible par moments.

Aniaba se déchaîna au milieu des soldats. Chaque coup qu'il portait était amplifié. Il n'abattait plus simplement ses ennemis : il les écrasait, les réduisait à l'état de carcasses mutilées. Chaque vie prise semblait nourrir cette puissance grandissante en lui. Ses mouvements devinrent plus rapides, plus précis, et ses attaques plus brutales. Seulement à chaque vie prise sa colère grandissante obscurecissait un peu plus son esprit le rapprochant de la bête sauvage sans stratégie.

Dans le cercle, Marceau sentit une sueur froide descendre le long de sa colonne vertébrale. Même avec son cercle de protection, il percevait une force qu'il n'avait jamais affrontée auparavant.

— Il devient quelque chose de plus que simplement un homme, murmura-t-il.

Roche, cependant, était imperturbable. Il essuya le sang de son visage, son sourire sadique s'élargissant.

— Tant mieux. Je préfère un adversaire qui se bat vraiment, dit-il en dégainant ses couteaux de chasse.

Aniaba entra dans le cercle, brisant la ligne des soldats comme un ouragan. Les ombres autour de lui dévoraient la lumière du sortilège de Marceau, leur présence perturbant même les protections magiques. Les soldats, pris de panique, tentèrent de s'enfuir, mais Aniaba ne leur en laissa pas le temps. Il les faucha un par un, son sabre éclatant d'une fureur presque divine.

Roche chargea, ses couteaux prêts, tandis que Marceau préparait un sort complexe pour tenter d'immobiliser Aniaba. Mais plus Aniaba tuait, plus il devenait rapide, puissant et imprévisible. Ses coups étaient des explosions de rage maîtrisée, ses cris de guerre résonnant comme un tambour de jugement dernier.

La bataille atteignait son paroxysme. Aniaba, entouré des ombres et alimenté par leur puissance, incarnait une vengeance implacable. Les soldats s'effondraient les uns après les autres, victimes de leur propre terreur et de la fureur d'un homme transcendé. Même Marceau, avec tout son savoir, commençait à douter de leur capacité à l'arrêter.

Et pourtant, au cœur de cette destruction, Cadet Roche, un sourire carnassier sur le visage, continuait d'avancer. Les lames dans ses mains commencèrent à luire du lueur rougeâtre. Il sentait alors une force incommensurable se rependre en lui.

_ Viens là sale chien de nègre, vocifera Roche dans un cri de défi, voyons comment tu t'en sors dans un combat équitable.

La confrontation ultime était inévitable.