Note : Lorsque vous voyez "~" cela annonce une pensée de personnage. Bonne lecture !
Quelques heures passèrent.
~Quelle est cette chaleur que je ressens dans le creux de ma paume ? Et ce poids sur mon torse ?~
J'ouvris les paupières et découvris qu'Anzu s'était assoupi sur moi, ça… sa main posée sur la mienne.
~Que fais-je dans un lit ? Je sommeillai ?~
Je secouai doucement son bras.
— Réveille-toi Anzu, réveille-toi.
— Ça va mieux Kinari ?
— Oui, ça va déjà beaucoup mieux. Mais qu'est-ce que tu fais là, Anzu ?
— Je souhaitais veiller sur toi, Kinari. Mais je crois que je me suis endormie aussi. Tu t'es assoupi sur le canapé alors on t'a porté jusqu'ici. Tu sais… la dernière fois à l'infirmerie, c'est toi qui as pris soin de moi, je voulais te rendre la pareille.
~Rem.~
— Merci… Anzu.
~Quelle gentillesse, c'est bien le premier coup que quelqu'un appliquait autant d'attention sur moi.~
Nous sortîmes de la chambre et rejoignîmes nos camarades. Chizu leva les yeux dans ma direction et prévint les autres.
— Grand frère est debout !
Je regardai par la baie vitrée et découvris un crépuscule embrasé.
~Combien de temps ai-je dormi ?~
Notre présidente du club s'approcha de moi et me murmura discrètement.
— Accompagne-moi dehors, on doit récupérer les feux d'artifice.
Elle avait raison, le moment était venu de les mettre en place. Nous progressâmes prudemment vers le rocher.
~Elle les a vraiment cachés à un endroit pareil ?~
Nous les déposâmes sur le balcon. Nous rentrâmes dans le chalet et indiquâmes à nos camarades de nous rejoindre.
Masuko et moi distribuâmes à chacun, un feu d'artifice.
— Des feux d'artifice ? C'est toi qui as eu cette idée, Masuko ?
— Pas du tout, c'est Kinari qui y a pensé.
Chizu s'approcha de moi, et me murmura.
— Tu n'es pas si bête que tu en as l'air, idiot.
~Pourquoi me traites-tu d'idiote après m'avoir complimenté ? Idiote.~
— J'ai hâte de l'envoyer dans le ciel celui-là !
~J'ai donc vu juste en les achetant, c'est bien le genre d'activité que les adolescents faisaient entre eux.~
— On commence, Kinari ?
~Comment ça marche, ce truc ? Une notice existe-t-elle ?~
Masuko s'avança, et alluma en première son feu.
~C'est comme ça que ça fonctionne ?~
Je brûlai la corde du mien, puis nous reculâmes.
Nos deux fusées partir loin, loin, très loin. Ils traversèrent ce ciel nocturne. La fulmination illumina d'une beauté sans égale, cette nuit rougeâtre.
~Cet univers en 3D est incroyable.~
Chizu et Anzu contemplèrent l'explosion, puis s'écrièrent.
— Wouah ! C'est magnifique.
Des frissons me caressèrent, lorsque le regard de notre présidente croisa le mien. Elle sourit, puis nous levâmes nos pouces l'un vers l'autre pour montrer notre réussite.
— C'était parfait, Kinari.
Chizu, Inoue et Anzu s'avancèrent et allumèrent ensemble leurs feux d'artifice.
La fumée monta dans le ciel.
~Quel est ce sentiment ? Ce n'est pas de l'adrénaline, qu'est-ce que je ressens ?~
L'explosion était magistrale.
~C'est agré… agréable ?~
— C'était magnifique !
~Magnifique ? réfléchis-je.~
Nous nous assîmes les uns à côté des autres.
~Pourquoi je me retrouve encore encerclé par toutes les filles de ce chalet, soupirai-je.~
~Elles… Elles ne sont pas trop proches de nous ? chuchota Kinari timide dans un coin de ma tête.~
Elles rêvassèrent.
— Merci pour ce soir, Kinari.
~Tu essaies de sourire, là ? marmonna Kinari blasé au fin fond de mon esprit.~
— C'est quoi cette tête, Kinari ?
Les filles rirent aux éclats.
— Tu es un sacré otaku, soupira ma sœur.
— C'est clair, on ne peut plus rien pour lui.
~Laissez-moi tranquille.~
~Tu es vraiment un idiot, me confia Kinari blasé.~
~Tu n'as pas tort, méditai-je.~
Yamaguchi coupa ma discussion avec moi-même.
— Les amis, vous ne voulez pas qu'on crie à tour de rôle quelque chose qui nous tient à cœur ?
~Qui nous tient à cœur ? Que suis-je censé dire, exactement ?~
Ils semblèrent tous plus ou moins exciter. Le côté positif était que, par chance, je passai normalement en avant-dernier.
~Réfléchis, me répétai-je.~
Yamaguchi commença en premier. Il leva son menton à environ cent vingt degrés, puis cria.
— Je suis désolé d'avoir volé le téléphone de Yamazaki-kun pendant notre voyage scolaire.
Il tourna la tête en direction de Maeda, et lui fit signe que c'était à lui.
— Je suis navré de m'être moqué de Yamazaki-kun à plusieurs reprises !
C'est gênant, là, pensai-je intérieurement en remontant mon écharpe au-dessus de mes lèvres.
Chizu se leva, le sourire aux lèvres.
— Je ferais tout pour me faire encore des tas de souvenirs avec vous tous !
~Chizu… Cette puissance dans tes mots… tu as si peu changé. Tu es resté la même depuis tout ce temps, et ne cherches qu'une chose, des souvenirs et encore des souvenirs. Tu es quelqu'un d'exceptionnel, avec une force et un courage que j'admire, méditai-je.~
Aneko se tint debout, croisa mon regard, leva la tête en direction du ciel embrasé et hurla d'une voix intense.
— J'ai eu un coup de foudre pour un garçon, mais je me pose des milliers de questions !
Ce cri me donna des frissons.
Plus un bruit, comme si la tempête s'était arrêtée.
~De qui parlait-elle ? Yamaguchi ? Maeda ?~
Je me penchai en arrière pour vérifier la réaction de Yamaguchi et Maeda.
~Inoue les intimide tant que ça ? De vrais idiots ces deux-là.~
Masuko se leva, puis, à son tour, hurla d'une voix profonde.
— Je suis a…
Elle agita sa tête, puis avala sa salive.
~Tu vas y arriver, Masuko.~
— Je suis jalouse d'Anzu d'être aussi proche de Kinari !
En entendant ça, mon cœur rebondit dans l'ensemble de mon corps, on est si complice que ça, Anzu et moi ? réfléchis-je.
~Je nage dans le lac de l'amour me confia Kinari amoureux.~
Je me mis deux claques pour le faire taire.
C'était mon tour.
~Quelque chose qui nous tient à cœur, me répétai-je. Évidemment ! Pourquoi n'y ai-je pas pensé avant ?~
Je m'avançai jusqu'au balcon, regardai les nuages, puis inspirai avant d'inhaler un grand coup.
~Même Menma entendra ma voix.~
— Je ne veux plus jamais… Plus jamais perdre ma sœur !
— Grand frère…
Elle accourut vers moi et plongea dans mes bras.
— Je t'aime, grand frère !
— Moi aussi, Chizu
~Sèche tes larmes, me souffla Kinari sérieux.~
~Mes larmes ? Pourquoi pleurai-je ?~
Nous nous agenouillâmes, c'était au tour d'Anzu.
Intimidée, elle se leva et se plaça, de mon point de vue, juste sous la lune.
~Elle ressemble énormément à la princesse Kaguya, rêvassai-je.~
Elle hurla d'une voix emplie de remords.
— Je suis… je suis amoureuse de quelqu'un depuis dix ans, mais je n'ai jamais, jamais pu lui déclarer ma flamme, moi-même !
La lune étincela grâce à ces mots.
Ces paroles firent briller une relique perdue en moi.
~Qu'est-ce que j'ai entendu ? Anzu est amoureuse de quelqu'un depuis tant d'années ?~
Chizu brisa ce silence en s'écriant.
— Une étoile filante, les amis, regardez !
~C'est la première étoile filante que je vois de mes propres yeux. C'est réconfortant ? Apaisant ?~
Yamaguchi et Maeda se levèrent.
— On va se coucher nous deux, à demain !
Aneko suivit en expliquant à ma sœur.
— Tu peux venir dans notre chambre, Chizu ?
— Oui, oui, j'arrive, Aneko !
— À demain, les amis.
~Les… les amis ? Ils me considéraient comme leur ami ? C'est d'une complexité les relations en 3D.~
Nous n'étions plus que trois sur le balcon. Je remarquai qu'Anzu était en incapacité d'entretenir une conversation, elle semblait terriblement intimidée. Quant à Masuko, elle retourna dans sa chambre, silencieusement.
Je me tournai vers la jeune fille.
~Je veux des réponses me chuchota Kinari curieux.~
— Pourquoi ne m'en as-tu jamais parlé ?
Aucun mot, elle restait cruellement discrète.
~Que faire, me répétai-je.~
~Réfléchis, idiot.~
~Lui raconter mon passé ? Peut-être que ça lui changerait les idées.~
J'inhalai tout l'air possible, puis expirai.
~Je me lance.~
— Tu sais, Anzu, à l'école, lorsque j'étais petit, j'ai toujours été seul. Les autres enfants s'amusaient au parc après nos leçons, moi, je rentrai chez mes parents, seul. Quand ils jouaient dans la cour de récréation, j'étais dans mon coin et lisais des manga. Pourquoi ? Parce que je ne souhaitais pas que quelqu'un soit triste par ma faute. Tu ne crois pas qu'en restant non accompagné on reste libre ?
Elle garda le silence. Je décidai de continuer mes explications, espérant que ça l'intéresse, ne serait-ce qu'un petit peu.
— Je ne voulais pas ressentir de colère, de mélancolie, ou tout un tas d'émotions inutiles en ayant des amis. Lorsque j'avais quatorze ans, Chizu tomba… malade et mes parents ne purent l'accepter. Ils nous demandèrent de quitter la maison en nous laissant vivre avec notre tante. Mais cette dame était toujours en voyage à l'étranger. Alors j'étais seul. J'ai dû prendre soin de Chizu, elle passait avant tout.
Elle me regarda de ses yeux émeraude, l'air triste.
— Je ne pouvais pas rejoindre de club, ou même sortir avec mes camarades de classe, car Chizu était seule à la maison. À cause de sa… maladie, ça fait maintenant neuf ans qu'elle parle à personne mise à part moi. Elle ne va plus à l'école, non plus. C'est aussi pour cette raison-là que j'ai toujours été quelqu'un de solitaire. Tu sais Anzu, deux mois auparavant, j'étais encore coincé dans ma bulle, jusqu'à la rentrée des classes. Depuis ce jour-là, j'écoule la plupart de mon temps avec toi, c'est notre rencontre qui me bouscule tant.
— Rencontre… bégaya-t-elle sinistrement, merci de m'avoir confié ton passé Kinari. Je… je dois admettre que j'en connaissais déjà une partie. Ce garçon solitaire m'a énormément intrigué. On souhaite tous se fondre dans la masse pour rester semblable à nos camarades de classe par peur qu'on se moque de toi, c'est sans doute pour cette raison que ça me rend si nostalgique.
~Qu'est-ce qu'elle me raconte ? Je dois être fatigué.~
Le froid commença à congeler mes muscles.
— On rentre ?
— Oui.
— Je vais jeter un coup d'œil dans la chambre de Masuko, elle m'inquiète un petit peu.
Elle hocha de la tête.
— Je t'attends dans le canapé, à tout à l'heure.
Je montai les escaliers et surpris malencontreusement une conversation entre Aneko et ma petite sœur. Je m'approchai de la porte.
— Tu te souviens de ce que j'ai hurlé tout à l'heure, Chizu ?
— Oui, que tu n'avais jamais osé dévoiler tes sentiments à un garçon, c'est ça ?
— C'est ça. Ce garçon-là, c'est ton frère, Chizu… j'ai eu un coup de foudre pour Kinari lors de notre voyage scolaire.
~Qu'est-ce que c'est, un coup de foudre ?~
~En plus d'être un otaku, tu es débile, soupira Kinari blasé.~
— Inoue-senpai, c'est si touchant !
— Il a tellement la classe… Tu sais s'il a une copine ?
— Grand frère ? Bien sûr que non, ricana-t-elle en se roulant par terre.
~Elle n'est pas obligée d'en faire des tonnes celle-là…~
— J'ai… J'ai le droit de tomber amoureuse de lui, alors ?
— Inoue-senpai, tu es adorable ! Évidemment que tu peux !
~Je n'ai jamais entendu cette conversation, me répétai-je.~
~Je nage dans l'océan de l'amour me confia Kinari amoureux.~
~Je peux le tuer m'expliqua Kinari énervé en sortant deux khukuris.~
~Ce n'est pas le moment vous, fermez-la.~
~Faisons mine de rien et continuons notre chemin, me convainquis-je.~
Je progressai en toute discrétion pour ne pas me faire remarquer par les filles. Après avoir fait un seul pas, un couinement me stoppa. J'analysai le sol.
~Je viens de marcher sur une peluche ? Je suis bien plus maudit que Ganta Igarashi.~
Elles se retournèrent vers moi.
~Là, je suis mort.~
J'observai les pourpres d'Aneko qu'elle tentait de cacher avec sa couette. Chizu s'approcha de moi, puis me chantonna d'un air moqueur.
— Grand frère le tombeur, grand frère le tombeur.
Elle referma la porte.
~Reprends-toi, idiot.~
Masuko m'inquiétait plus que tout, j'avais une sorte de pressentiment assez douteux. Je rentrai dans sa chambre et la découvris dans un coin de la pièce, les larmes aux yeux. Je m'approchai d'elle silencieusement puis la serra dans mes bras.
~Je crois que c'est ce que je dois faire.~
— Je suis là, Masuko, je suis là, ça va aller.
Elle posa son visage contre mon épaule puis me souffla.
— Je suis jalouse d'Anzu, très jalouse.
Je devais en savoir davantage.
— Pourquoi ?
Mélancoliquement, elle enchaîna.
— Je veux être à sa place, je veux visiter le parc d'attractions avec toi, je veux voir un aquarium, je veux qu'on s'offre des cadeaux. Je veux que tu sèches mes larmes, je veux que tu me tiennes la main, je veux que tu veilles sur moi. Je veux être beaucoup plus proche de toi, Kinari !
~Elle ressemble à Zenitsu Agatsuma version shōjo, soupirai-je.~
— Tu sais Masuko, on naît tous différents, avec nos qualités, nos défauts, nos forces et nos faiblesses. Tu n'as rien à envier d'Anzu. Tu es très bien telle que tu es, restes toi-même. Moi, je t'adore comme tu es !
~Qu'est-ce que je viens de dire ?~
Elle garda le silence, un sourire se dessina au fur et à mesure de mes mots.
— Alors, ne raconte pas de bêtise ! Nous formons un duo tous les deux. N'oublie pas que tu as des qualités uniques qu'Anzu n'a pas. Et tu as tes propres défauts qu'Anzu ne possède pas.
~Je ne sais même pas ce que dis, je me suis juste inspiré d'une scène que j'avais lue dans mes manga.~
~Tu es le pire otaku qui soit, Kinari.~
— Merci, Kinari… je ne me laisserais plus faire désormais. Tu verras, je redoublerais d'efforts pour être plus proche de toi.
Son épaule se colla à la mienne, puis elle embrassa ma joue.
— Je lui aurais au moins volé une première fois.
Bouleversé, mes joues s'empourprèrent
~Mon cœur… mon cœur bat si vite. Je suis à deux doigts de faire une crise cardiaque, là. Inspire, expire, inspire… oh! Cette odeur, c'est son parfum ? Il sent si bon… cet arôme envoûtant de pamplemousse, d'orange et d'ananas, c'est si subtil et si doux.~
~Cette scène me dépasse, on est à des années-lumière du premier chapitre, soupira Kinari blasé.~
Je balançai rapidement ma tête de gauche à droite pour retrouver mes esprits.
— Je… euh je dois rejoindre Anzu, elle m'attend dans le canapé.
Elle attrapa mon bras, et déclara.
— Je t'accompagne, darling.
~Darling ? Darling… les shōjos me manquent tant, que j'entends des voix, rêvassai-je.~