Le soleil dardait ses rayons sur les toits de tôle rouillée, créant une chaleur étouffante qui écrasait le quartier populaire où vivait Mounir. L'air, lourd de poussière et d'humidité, semblait suspendu, presque étouffant. Assis à même le sol dans sa chambre exiguë, il parcourait une énième fois les offres d'emploi sur son vieux téléphone à l'écran fissuré. Les notifications de rejet s'étaient accumulées au fil des semaines, un triste rappel de l'impasse dans laquelle il se trouvait.
« Ils veulent tous de l'expérience, mais où veux-tu que je la trouve ? » murmura-t-il en soupirant, les yeux fatigués. Il se laissa tomber en arrière sur son lit usé, les bras écartés comme pour mieux se laisser engloutir par la frustration. À cet instant, le monde semblait être un puzzle dont il ne parvenait pas à trouver les pièces.
Sa mère entra dans la pièce, son visage doux marqué par la fatigue, mais toujours empreint d'une bienveillance inaltérée. Elle s'assit sur le bord du lit, posant une main rassurante sur l'épaule de son fils.
— Mounir, viens manger. Il faut que tu prennes des forces.
Il hocha la tête, mais son regard restait plongé dans le vide, comme si la simple idée de manger n'avait plus de sens. Depuis des mois, la routine était la même : il se levait, vérifiait ses emails, envoyait des candidatures, attendait des réponses… et obtenait rien.
— Ta mère a raison, dit la voix de son père, depuis la porte. Tu ne peux pas te laisser aller comme ça. C'est ton avenir qui est en jeu.
Mounir soupira. Son père, toujours droit et ferme, était une figure d'autorité, mais cette autorité devenait pesante. Il savait que son père ne comprenait pas. Il ne comprenait pas la pression constante de la recherche d'un emploi dans un pays où le chômage frappait aussi durement. Tout ce que son père voyait, c'était un fils qui stagnait, qui n'arrivait pas à se réaliser.
— Je vais manger plus tard, répondit Mounir, la voix résignée.
Il se leva et se dirigea vers la fenêtre. Il avait besoin d'air. Besoin de s'échapper de cette atmosphère de désespoir.
À l'extérieur, les rues étaient pleines de vie : des enfants jouant au ballon, des vendeurs ambulants proposant leurs produits, des taxis klaxonnant dans un vacarme incessant. Mais pour Mounir, tout cela semblait être une scène figée. Il se sentait étranger à tout cela. Les autres avaient l'air de vivre, mais lui était coincé dans une impasse.
Il s'apprêtait à retourner dans la chambre lorsque son regard fut attiré par une silhouette au bout de la rue. Un homme grand et élancé, vêtu d'un costume sombre, marchait d'un pas assuré. Il semblait totalement déconnecté de l'agitation autour de lui, comme si le monde ne pouvait pas l'atteindre.
Cet homme, c'était Ali. Mounir ne savait pas pourquoi, mais quelque chose dans la manière dont il se déplaçait capturait son attention. Il avait l'air... différent. Comme s'il appartenait à un autre monde. Un monde plus grand, plus vaste. Un monde que Mounir n'avait jamais vu, mais dont il sentait la présence, prête à l'engloutir.
Ali s'arrêta juste sous le réverbère, jetant un regard furtif dans la direction de Mounir. Il sourit.
— Vous êtes Mounir, non ? dit-il d'une voix calme et posée, presque chaleureuse.
Mounir sursauta. Comment cet homme pouvait-il savoir son nom ? Ils ne s'étaient croisés que brièvement, et encore, Ali n'était qu'une silhouette floue dans la mémoire de Mounir. Un flash. Mais cet homme semblait tout savoir.
— Oui, c'est moi. Mais... comment vous me connaissez ?
Ali fit un geste amical, comme pour balayer la question.
— Je suis quelqu'un qui s'intéresse aux gens. Et j'ai vu que vous êtes un homme de talent, mais que vous avez du mal à trouver votre place dans ce monde.
Un frisson parcourut la colonne vertébrale de Mounir. Il ne savait pas pourquoi, mais il avait l'impression que ce n'était pas une simple rencontre. Il y avait quelque chose de plus derrière cette discussion banale. Quelque chose de... lourd.
— Je... je cherche juste du travail, répondit Mounir, la voix teintée de frustration. Rien de plus.
Ali le fixa intensément, comme s'il scrutait son âme.
— Et si je te disais que je peux t'offrir une opportunité bien plus grande que ce que tu pourrais imaginer ? Une opportunité qui va changer ta vie à jamais ?
Les paroles d'Ali résonnèrent en Mounir, comme une promesse d'évasion. Mais à quel prix ? Mounir hésita, un doute grandissant dans son esprit. Il avait entendu des rumeurs sur des gens qui s'étaient laissé séduire par des propositions alléchantes, avant de se retrouver piégés dans des situations où ils ne pouvaient plus revenir. Mais Ali, avec son regard perçant et son sourire envoûtant, semblait être un homme qui savait exactement ce qu'il faisait.
— Je n'ai rien à perdre, murmura Mounir plus pour lui-même que pour Ali.
Ali sourit encore plus largement, un sourire qui n'atteignait pas tout à fait ses yeux.
— C'est exactement ce que je voulais entendre. Tu n'as rien à perdre, mais tout à gagner. Viens, suis-moi, et je te montrerai un monde qui t'attend. Un monde où tes rêves les plus fous peuvent devenir réalité.
Mounir se sentit soudainement pris dans un tourbillon. Il avait l'impression de se retrouver à un carrefour de sa vie, et Ali représentait la voie la plus excitante, mais aussi la plus incertaine. D'un autre côté, il y avait son père et ses principes, qui le tenaient prisonnier dans une réalité morne et sans espoir.
Il prit une profonde inspiration et, sans savoir exactement pourquoi, suivit Ali.