Ma journée d'anniversaire, que j'avais imaginée lumineuse, s'est avérée bien plus sombre et éprouvante que je ne l'avais anticipé. Après les cours, je me suis rendue à la maison de la meute pour aider mes parents, comme je le fais souvent. Ce rituel quotidien m'apportait un réconfort simple et stable. Dans ce lieu, je pouvais être moi-même, loin des regards hostiles du lycée, loin des attentes de la meute. C'était mon cocon, mon refuge.
La maison de la meute était déjà remplie d'une activité intense. L'odeur de la viande grillée et des herbes fraîches emplissait l'air. J'ai enfilé un tablier et me suis immédiatement attelée à la préparation des repas, mes mains s'activant machinalement, comme si cette tâche répétitive pouvait apaiser l'agitation qui bouillonnait en moi. Je tentais désespérément de repousser les souvenirs de la confrontation brutale avec Jace, de ne pas penser à ses mots tranchants et à l'indifférence glaciale dans ses yeux.
Mais le destin n'était pas prêt à me laisser tranquille. Alors que je m'apprêtais à sortir pour aider avec les tables à l'extérieur, une voix méprisante et aigre parvint à mes oreilles, m'arrêtant net. Je levai les yeux et tombai face à face avec Avery et Jasmine, les deux filles les plus populaires de la meute – et les plus cruelles. Leur mépris pour moi ne datait pas d'hier, mais aujourd'hui, quelque chose dans leur regard semblait plus sombre, plus pernicieux.
Avery s'approcha, un sourire cruel étirant ses lèvres. Ses yeux brillaient d'une haine mal dissimulée, comme si elle se délectait déjà de la douleur qu'elle s'apprêtait à infliger.
— « Tu penses vraiment que Jace va se lier avec toi ? » siffla-t-elle, chaque mot chargé de mépris. « Comment la déesse de la Lune a-t-elle pu te lier à lui, toi ?! »
La surprise m'immobilisa un instant. Elle savait. Comment était-ce possible ? La seule explication était que Jace lui avait tout raconté, ou qu'elle avait découvert ce lien par elle-même. Une vague de colère et de tristesse m'envahit. Alors c'était ça, ma vie ? Être la risée des autres pour un lien sacré que je n'avais même pas cherché ?
Mais je ne pouvais pas leur donner le plaisir de me voir brisée. Avec un calme feint, je répliquai :
— « La déesse de la Lune a de l'humour, on dirait, » dis-je en haussant les épaules, tentant de masquer la colère et l'humiliation qui me brûlaient de l'intérieur.
Avery avança d'un pas, se rapprochant dangereusement de moi, son sourire se tordant en une expression presque malsaine.
— « Écoute-moi bien, Ava, » murmura-t-elle, sa voix baissant d'un ton pour devenir un murmure venimeux. « C'est moi qui serai la future Luna. Peu importe ce que ce lien signifie pour vous deux, il te rejettera. Et quand il le fera, tu n'y survivras pas. »
Son ton était glacial, empreint d'une certitude cruelle. Je sentis une vague de rage monter en moi, un feu que je ne pouvais plus contenir. Tout mon corps se tendit sous l'emprise d'une force nouvelle, bouillonnante, comme si une part de moi-même, longtemps enfouie, se réveillait. Je n'eus même pas le temps de réfléchir à ce que je faisais ; mes mains se levèrent et je l'attrapai par le cou, serrant avec une fermeté que je ne me connaissais pas.
— « Si tu cherches ma mort, méfie-toi, Avery. Je pourrais être plus rapide que toi, » susurrai-je, ma voix froide et déterminée.
Avery, surprise, commença à paniquer, ses mains se débattant pour échapper à mon emprise. Son visage passa d'une arrogance tranquille à une peur palpable. Après quelques secondes, je la relâchai, réalisant enfin ce que je venais de faire. J'étais abasourdie, autant qu'elle.
Avery recula, chancelante, les yeux écarquillés, avant de me lancer un dernier regard empli de peur et de haine. Puis, elle tourna les talons et s'enfuit en courant, laissant derrière elle un silence pesant. Jasmine, restée en retrait, ne dit pas un mot, me lançant un regard mêlé d'effroi et de dédain avant de partir à sa suite.
Je restai là, le cœur battant à tout rompre. Que venait-il de se passer ? Cette force qui avait jailli en moi, cette colère viscérale… D'où venait-elle ? Ça avait toujours été Avery qui me blessait, qui me piétinait, et pour la première fois, les rôles s'étaient inversés. Cette sensation de puissance m'avait fait peur autant qu'elle m'avait apaisée.
Mais la satisfaction de l'avoir fait taire fut de courte durée. Je savais qu'elle ne lâcherait pas l'affaire. Son regard en disait long ; elle n'abandonnerait pas son objectif de devenir Luna, et elle n'hésiterait pas à m'écraser pour y parvenir.
Un poids immense s'installa dans ma poitrine. En quelques heures, j'avais été confrontée à Jace, rejetée par celui qui aurait dû être mon compagnon, et maintenant, humiliée et menacée par Avery. L'idée que mon lien avec Jace puisse être connu de tous me glaçait le sang. Une humiliation publique, un rejet devant toute la meute… étais-je prête à endurer ça ?
Je quittai la maison de la meute, la gorge serrée, tentant de réprimer les larmes qui menaçaient de couler. J'avais toujours pensé que devenir adulte signifierait trouver des réponses, une forme de paix intérieure, mais tout ce que je ressentais aujourd'hui, c'était un poids croissant de responsabilités et de douleurs. Ma louve, Sloan, restait silencieuse dans mon esprit, comme pour me laisser affronter ces épreuves seule.
Dehors, le ciel s'assombrissait, les étoiles commençant à percer l'obscurité naissante. Je levai les yeux, cherchant une réponse silencieuse dans l'immensité de la nuit. Je ne savais pas ce que l'avenir me réservait, mais une chose était sûre : je ne pouvais plus me permettre d'être faible. Les jours d'indifférence et de résignation étaient derrière moi. Désormais, j'allais devoir affronter ce que je redoutais le plus – que ce soit Jace, Avery, ou même moi-même.