Quelques jours, après l'incroyable succès que fut sa suite, Fraya est désormais seule, totalement perdue, errant dans la forêt, dans la quête incessante de trouver quelconque trace de vie. Seuls quelques fruits la rassasient à peine. Afin de s'économiser, elle s'assoie près d'un arbre, l'esprit rivé vers le ciel.
« Tout consommateur doit rendre. Tout donneur doit recevoir. Ce qu'il faut comprendre dans ce proverbe sacré c'est que le ki est constant. Tout ce qui meurt rend l'énergie. Tout ce qui vit le reçoit. C'est un cycle parfait. Notre monde a été conçu ainsi, pour notre bien et celui des autres, vivant ou non. Lorsque ton talent s'éveillera, il faudra respecter cette loi fondamentale. Il en a été décidé ainsi. Tout équilibre doit être conservé. » résonne la voix d'un de ses semblables dans sa tête.
Après quelques instants de rude concentration, motivées par cette leçon du passé, son aura et le dessin unique en forme de lotus ressurgissent. Elle pose les mains au sol. La végétation présente sur un rayon d'une cinquantaine de mètres environ commence à flétrir et à pâlir. En résulte une brutale croissance de son aura. Elle met fin au processus après la désagrégation soudaine de toute vie sur tout le périmètre affecté. Une légère lueur grise clignote sur la paume de ses mains. Plus aucune sensation de faim. Plus aucune fatigue. Le temps est venu de mettre en pratique les mêmes techniques apprises par Kenshiro. Elle se met en place, prend de grandes respirations et serre les poings.
« Péopar... Ki ! » invoque-t-elle.
En décochant un poing dans l'air, une onde fonce à vive allure, arrachant trois arbres situés dans l'axe de tir. Le résultat la met dans un enthousiasme démesuré. Prise par l'excitation, la voilà lancée sur une série d'essais de toutes les techniques qu'elle devait apprendre. Pendant ce temps, à la salle du Conseil de Kigen, les deux conseillers ressentent d'étranges vibrations.
« C'est elle ! » s'exclament-ils en même temps.
Aritsune sort alors le même parchemin qui servira plus tard de moyen de communication avec Tetsuo. Le sceau présent dessus se met à scintiller.
« Candidat Yuko, ici le conseiller Aritsune.
- Je vous écoute. lui répond-il.
- La cible a été repérée. Je répète. La cible a été repérée.
- Si vous entendez un fort vent à l'Ouest, vous la trouverez. complète Daigaku.
- A vos ordres. »
Le sceau ne brille plus.
« Quelle idiote. lâche Aritsune.
- Sommes-nous obliger de la lui rendre ? demande son collègue.
- La question peut se poser en effet. Il serait préférable de faire croire que les recherches soient toujours en cours. Comme ça, si son talent paraît intéressant, nous pourrions nous l'approprier. »
A la sortie principale de Kigen, le Shirenai désireux de devenir mercenaire en réussissant cette mission se concentre. De légers traits jaunes apparaissent le long de ses bras et sur son visage. Il s'agit bel et bien de Rai, le sabreur manieur de foudre que récupérerons inconscient et amnésique Yoru et Rajik. Il entend alors, comme indiqué par ses supérieurs, un fort vent avec son oreille droite.
« Icalaraï ! »
Tel un éclair, il disparaît aussitôt après avoir prononcé ce mot. Entre temps, sur le lieu d'exercices improvisé par sa cible, plus aucune vie végétale ou animale dans le périmètre d'action délimité par sa première technique. Fraya est en position de sprint.
« Zéréyon ! »invoque-t-elle.
C'est à son tour de disparaître. Sur toute la circonférence de la zone définie, de plus en plus de poussière est élevée dans les airs. Après quelques secondes d'intenses efforts, Fraya réapparaît au centre, un peu essoufflée mais heureuse Cependant, la joie est de courte durée. Le ciel tourne soudainement à l'orage. Perturbée par la météo, elle croit tout d'abord qu'elle en est l'origine. C'est alors que le candidat au titre de mercenaire apparaît devant elle via un éclair.
« Fraya, j'imagine. La haute instance de Kigen m'envoie pour t'arrêter. Au nom des Shirenais, au nom de Faironne, je te prie de te rendre tout de suite. Ne me force pas à répéter. »
Cette déclaration de sa part titille les nerfs de sa cible. La Kiyuza serre les poings, motivée par les exploits qu'elle peut maintenant produire. Plus personne ne devra dicter sa vie. Plus jamais elle ne retournera là-bas. Voilà les seuls mots qui rythment ses pensées. Son ki se manifeste, à la grande surprise du sabreur manieur de foudre.
« Dois-je comprendre que tu oses nous défier ? Qu'il en soit ainsi. »
C'est au tour de son adversaire de laisser exprimer son énergie. Le ciel s'assombrit encore plus. Des légers et fins éclairs entourent la future zone de combat.
« Zéréyon ! » engage-t-elle avec ferveur.
Elle disparaît. Cela ne semble pas perturber le Shirenai qui ne bouge pas d'un poil. Malgré le brouhaha généré par le déplacement accéléré de la Kiyuza, il perçoit des sons semblables à de brefs vents provenant de toutes les directions. Au bout de quelques secondes, l'attaquante apparaît dans son dos, poing chargé.
« Péopar Ki ! » crie-t-elle.
Alors qu'elle allait l'atteindre, il s'efface sous ses yeux. Elle n'a pas le temps de comprendre par quel miracle il a réussi une telle chose qu'elle subit un violent choc électrique. Soudain, la lame du katana de Yuko se glisse sous son cou.
« Dernière sommation. déclare-t-il après être réapparu intégralement derrière elle.
- Qu'est-ce qu'on t'a dit sur moi ? » ose-t-elle lui demander la voix tremblante de terreur.
Pleinement concentré dans sa tache, son adversaire ne répond pas. Reviennent en tête, à une cadence insupportable, tous les mauvais moments qu'elle a passé à cause de son père. Ceci réactive le dessin correspondant à son talent encore non-identifié. Le Shirenai ressent soudainement une fatigue l'envahir progressivement. Fraya profite d'un instant d'inattention de sa part pour se dégager. Consciente qu'elle ne peut lui faire face, elle concentre son ki vers ses jambes.
« Zéréyon ! »
Elle réussit à prendre la fuite. Le manieur de foudre reste désorienté par ce qu'il vient de se passer. Ce cuisant échec lui coupe l'envie de prendre le parchemin servant de moyen de communication avec le Conseil, préférant alors revenir dans son quartier général. Plus tard, alors qu'il empruntait un sentier au milieu d'un forêt, il aperçoit un homme encapuchonné, carte en main, semblant chercher quelque chose. Son attitude un peu agitée interpelle le prétendant au titre de mercenaire.
« Bonjour Monsieur, vous avez un souci ? » engage-t-il.
Ce dernier ne répond pas, cessant son activité effrénée. L'homme à la capuche envoie un projectile de feu légèrement violacé à vive allure vers le Shirenai, manquant alors de se le prendre au tout dernier moment. Cette action force le candidat à dégainer son katana, aura active.
« Au nom de mon peuple, au nom de Kigen, je vous arrête pour attitude belliqueuse envers l'autorité ! Rendez-vous immédiatement !
- Oh... Tu viens de là-bas ? » répond narquoisement le tireur.
Il enlève sa capuche. Il s'agit d'Alnor.
« Bizarre, je ne t'ai jamais vu.
- Jetez votre arme tout de suite !
- Oh ?... Tu veux parler de ça ? »
Il dévoile alors le bracelet d'Orzlon accroché à son bras gauche. L'aspect de l'objet consterne le sabreur.
« Désolé de te décevoir, petit. Mais il en est hors de question.
- Enijiakku, je ne me répéterai pas. Lâchez ça immédiatement !
- Comment m'as-tu appelé ? »
Sous la colère, Alnor laisse exprimer une partie de son aura rouge.
« S'il y a bien une chose que je ne supporte pas, c'est ce mot. Une insulte envers ce que je suis, un outrage envers les miens. Je compte bien rétablir la vérité que les tiens ont caché aux yeux du monde entier. Je détruirai vos mensonges ! »
Curieux par ce qu'il raconte, le Shirenai baisse sa garde, adoptant une posture neutre.
« De quoi parlez-vous ? »
Un silence s'installe entre eux. L'étrange comportement du candidat au titre de mercenaire intrigue l'ouvreur de failles, absolument convaincu qu'il ne vient pas du Continent central. Il en déduit alors qu'il a sans doute été recruté et que, par conséquent, les probabilités qu'il ne sache rien de la sombre affaire menée par le Conseil avec ceux qui se font appelés Enijiakkus.
« Tu ne sembles pas au courant... Très bien. »
Le porteur du bracelet d'Orzlon met fin à l'expression de son énergie.
« Puisque tu me sembles correct, je vais tout t'expliquer. Il y a deux cents ans eût lieu une guerre sans merci entre mes ancêtres et les tiens. Le plus grand d'entre nous fit une incroyable découverte. Une énergie venue d'ailleurs, aux pouvoirs encore mystérieux à ce jour. En réponse, l'autre fondateur de Kigen mit la main sur une autre énergie à l'origine également inconnue et à la force encore inexpliquée. Lorsque mon peuple perdit face aux tiens, il fut chassé de ces terres, insulté et massacré jusqu'au dernier. Au moins, c'est que pensaient les Shirenais de ce temps-là. Comme tu peux le constater, ils avaient tort. Depuis ce jour, Kigen opprime, tue et rabaisse n'importe quel affilié aux éléments n'usant aucune lame. J'en fais partie. Il y a peu de temps, je vivais là-bas. Quand j'ai compris ma vraie nature, j'ai récupéré ce merveilleux Obujepawa, une des innombrables inventions de mes ancêtres. J'ignore qui tu es mais sache qu'on t'a menti. Si tu m'aides à mettre la main sur ses deux énergies, je te garantirai protection et confort. Me crois-tu, oui ou non ? » affirme-t-il en tendant sa main droite.
Le Shirenai semble perturbé par ce qu'il vient de raconter. En effet, là d'où il vient, personne ne lui a mentionné les actions menées par l'autorité présenté à Kigen après ce sombre événement. Il se souvient notamment du sort qu'ont subi Endalia et sa famille. D'autant plus qu'ils faisaient partie de la tribu depuis cet incident et qu'ils n'avaient fait rien de mal depuis. Les accusations portées par Alnor lui résonnent alors comme étant justifiées et justifiables. Il range alors doucement son katana et s'avance vers le Zigrik.
« Sais-tu où elles se trouvent ? » demande-t-il.
Cette question ravit le futur meneur du Kirioku au plus haut point.
« Tu es bien conscient que tu seras traité de déserteur, n'est-ce pas ? »
Le regard froid et déterminé du guerrier le convint.
« J'ai bien ma petite idée pour l'une d'elles. Suis-moi. »
Ils s'en vont côte à côte. Quelques jours plus tard, ils sont interceptés par une patrouille. Le nouveau compagnon de voyage d'Alnor ne laisse pas le temps aux siens ne serait-ce que de prononcer un mot qu'il les tue quasi-instantanément. Le Zigrik au bracelet réalise alors qu'il est tombé sur un allié de poids. Même la vue de ses frères d'armes mourants ne le fait pas changer d'avis. Il exécute. Encore plus tard, ils se trouvent au milieu d'un vieux temple en ruines, envahi en grande partie par la végétation locale.
« Si j'en crois ce que j'ai appris chez eux, la première énergie se trouverait ici. Si tu vois quelque chose d'inhabituelle, appelle-moi.
- Entendu. »
Ils se séparent pour plus d'efficacité. Au bout de plusieurs dizaines de minutes, après avoir arpenté plusieurs couloirs, le Shirenai déserteur arrive dans une pièce circulaire, coiffée de toiles d'araignées et de lianes. Au centre de celle-ci, se dresse un autel sur lequel semble trôner un objet brillant. Le sabreur s'en approche délicatement, manquant au passage de tomber vu l'état des pavés, bien cabossés et rongés par le temps et l'humidité. Lorsqu'il atteint sa destination, il découvre alors un pendentif sur lequel une pierre d'un blanc légèrement nacré est incrusté. Ignorant s'il s'agit bel et bien d'une des énergies convoitées par Alnor, il décide de se l'accaparer et l'attache autour de son cou. Aussitôt, un œil unique, violet et inversé se présente à lui.
« Janyaberon, kamtel dalwer. Té orazu bekazel sanar faé oklaé-ed okmel sebenaraél. Vumazu té idanaz. Watazorat-ad té oklaé amtar kugenbilé. » (= Salutations, petit être. Tu as mis la main sur une de mes œuvres. Laisse-toi guider. Viendra à toi une force incommensurable.)
Le phénomène s'évanouit tout juste après le dernier mot qu'il entend. N'ayant rien compris à ce qu'on vient de lui dire, il rebrousse chemin, tout en prenant soin de bien cacher sa trouvaille sous sa chemise en lin de couleur beige. Plus tard, il retrouve Alnor là où ils se sont séparés.
« Tu as trouvé quelque chose ? interroge l'ouvreur de failles.
- Rien du tout. ose le Shirenai, avec l'air le plus naturel possible.
- Bon... Juste une légende donc... Quelque part, ça ne m'étonne guère.
- Pourquoi dîtes-vous ça ?
- Désolé de te dire ça mais, les inventeurs, c'est nous. Pas vous. On ose, on explore, on crée. Alors que vous, avec vos dogmes archaïques, vous préférez rester bloqués. Allons récupérer le second artefact. Lui existe. »
Alors qu'ils venaient à peine de quitter les ruines, Fraya se présente à eux. Elle et le Shirenai se reconnaissent instantanément. Alnor cache en partie son visage. La Kozana focalise son ki au niveau de ses jambes, ne prêtant pas du tout attention à la présence du Zigrik au bracelet.
« Tu la connais ? » demande Alnor.
Tous les deux ne se quittent pas du regard.
« Hé ! Je t'ai posé une question !
- Avant notre rencontre, on m'a chargé de la capturer. J'ignore toujours pourquoi. Tout ce que je sais d'elle, c'est qu'elle utilise une énergie qui m'est totalement inconnu.
- Ah oui ? »
Il dégaine son katana.
« Oh, pour que tu fasses ça... Je tiens à voir. » poursuit Alnor.
Tout à coup, un fort vent se lève, signe de l'accumulation de puissance de Fraya. Lorsqu'il la regarde attentivement, le Zigrik ressent une onde de chaleur intense provenir d'elle. Sur le moment, il croit qu'elle est une pyromancienne. Son lotus réapparaît. Les deux hommes en sont étonnés.
« Qu'est-ce que c'est ? demande l'électromancien.
- Je... Je l'ignore. Peut-être un genre inconnu de sceaux. Reste sur tes gardes. Je veux en apprendre plus. » répond son associé.
La Kozana exécute une courte chorégraphie.
« A quoi joue-t-elle ? » s'étonne Alnor.
A la fin de celle-ci, Fraya se met en garde, prête à attaquer. Un peu d'électricité vient se déposer sur la lame du katana. Quand, tout à coup, la Kiyuza disparaît subitement. Alnor regarde le sol de manière frénétique, incapable de tracer sa chaleur si particulière. Cela l'amène même à penser qu'elle serait affiliée à la foudre d'une manière ou d'une autre. Le sabreur, malgré l'impressionnante démonstration de force de son adversaire, finit par lâcher un sourire. Quelques secondes plus tard, elle apparaît subitement à quelques centimètres de lui.
« Péopar Ki ! »
Alors qu'elle décochait son poing, un éclair s'abat pile sur elle, en plein milieu du dos la plaquant violemment au sol. Il lui donne un coup de pied sur son flanc droit, la poussant sur quelques mètres avant d'être allongée face vers le ciel. Ce qu'elle vient de subir brise la confiance qu'elle avait gagné suite au succès de sa fuite. Le visage de son père lui revient brièvement en mémoire. La présence d'Alnor lui paraît maintenant évidente. Il est là pour l'aider à la capturer. Cette déduction l'angoisse au plus haut point. Le Zigrik l'observe, un peu déçu de sa prestation.
« Trop prévisible... » avoue le Shirenai en soupirant.
Il se dirige vers elle.
« Ce pouvoir est sans doute une copie défectueuse de sceaux, dessinée différemment. Quelle déception... Achève-la. Nous avons autre chose à faire. exige l'ouvreur de failles.
- Non. rétorque son associé.
- Pourquoi tu t'intéresses subitement à elle ? Elle ne fait pas le poids face à un Shirenai. Et ce serait sans doute le même résultat avec moi, voir pire... Elle n'est rien. Elle n'est qu'un être insignifiant ! Comme tous ceux qui n'ont pas comme nous ! Ignore-la. »
Ces mots, d'un cinglante et cruelle vérité, la blessent encore plus.
« Je veux comprendre comment elle fait ça sans utiliser une énergie élémentaire. Toi même ne sait pas ce que c'est. Ça vaudrait tout de même la peine de s'y pencher.
- Oh... Ton discours porte des ressemblances fortes avec nos valeurs, très cher compagnon. Ça me plaît beaucoup. »
Malgré la douleur, la fille de Ki-Igno mobilise de l'énergie errant dans les alentours, qu'elle extrait grâce à son talent. Grâce à ça, elle parvient à se relever. Le Zigrik remarque alors l'état de la végétation affectée. L'hypothèse d'une affiliation classique à un élément est donc à exclure.
« Tu ne me feras jamais revenir là-bas ! » hurle-t-elle.
Cette interjection surprend Alnor. Encore plus de ki vient s'agglomérer vers les jambes de la Kozana.
« Zéréyon ! »
Elle prend la fuite, avec, cependant, moins de vitesse qu'avant.
« De quoi parlait-elle ? » demande Alnor.
Le Shirenai ne lui répond pas. A la place, des lignes translucides apparaissent dans sa main droite. L'étrange chaleur qui s'en dégage attise encore plus la curiosité débordante de son associé, visant alors dans la direction qu'a pris sa cible.
« Firaïzer ! »
Un nouvel éclair, plus fin, est tiré. Les distançant déjà de quelques centaines mètres, elle réussit à l'éviter au tout dernier moment.
« Tu peux m'expliquer tout ça ? »
Le manieur de foudre refuse encore de répondre, fléchissant les jambes.
« Tu sais quoi ? Ça commence à m'agacer. Si elle a quelque chose à avoir avec ceux qui allaient t'implanter tous leurs mensonges, je te prierai de bien vouloir laisser ça de côté. Définitivement. Allons chercher le second [...]
- Icalaraï ! »
Coupant court au défilé de paroles de son associé, il part à la poursuite de la Kozana grâce à une propulsion d'électricité. Malgré l'attitude irritante dont fait preuve son compagnon à la lame, le Zigrik garde toujours en tête ce qu'il représente pour lui. Le besoin précieux qu'il représente le pousse à sortir son bracelet une nouvelle fois.
« Ingosol. » invoque-t-il.
Il emprunte la faille qu'il vient de créer. Pendant ce temps, Fraya est soudainement prise de forts frissons. Comprenant que l'ancien candidat au titre de mercenaire la chasse, elle engage plus d'énergie dans l'augmentation de sa vitesse. Les graves paroles de son paternel résonnent une nouvelle fois en elle.
« Tu auras réellement intérêt à faire des preuves le moment venu !... Il est hors de question que notre lignée s'efface ! Tu entends ?! Alors bouge-toi ! Tu veux finir comme cet hérétique ?!... Tu m'exaspères Fraya... »
Des larmes de douleur s'écoulent sur son visage, malgré la vélocité dont elle fait preuve. Soudain, le Shirenai se dresse devant elle, lui barrant le passage.
« Nous sommes sensés poursuivre l'héritage du grand Ki-Ramen, pas la nier. Notre famille a reçu l'approbation ultime. Tu es la suivante. Ne l'oublie pas... Encore une déception. Bien habituelle venant de toi de toute façon... »
Refusant catégoriquement de se résigner au triste sort qui l'attend en cas d'échec, elle dégage plus de ki dans ses jambes. En deux pas, elle change brutalement de direction. Une faille s'ouvre à la gauche du sabreur. En ressort Alnor.
« Elle est pitoyable offensivement mais faut croire que, dans le domaine de la vitesse, elle commence à te grignoter, cher compagnon. »
La taquinerie ne l'ébranle absolument pas.
« C'est bon ? Tes observations sont terminées ? »
Le futur ami de Yoru et Rajik répète la même action, tel un prédateur bondissant sur sa proie.
« D'accord... J'ai compris. Lorsque tu en auras assez, la vérité te fera revenir sur le bon chemin. »
La fugueuse se remémore alors ce qu'elle a vu sur sa précieuse trouvaille. C'est à ce moment précis que l'entité du Kirioku décide alors de mettre fin à son voyage au cœur des souvenirs de Fraya. Rien n'a changé par rapport à la dernière fois qu'elle l'a laissée. Dans le présent, le groupe mené par Alnor patiente toujours. Endalia dort profondément. Quand à Arito, il continue à expérimenter de nouveaux sceaux pour ses cartes. Le mercenaire Tetsuo est debout, les mains tenant son épée plantée devant lui. Le corps de Fraya a été soigneusement placée sur le sol, les bras sur le long.
« Elle en a encore pour longtemps ? » geint le porteur du bracelet ouvreur de failles.
Il la regarde. Soudain, de légers traits noirs apparaissent depuis les coins de ses yeux. Alnor, surpris, active son aura et pointe son arme vers elle. L'énergie qu'il dégage réveille immédiatement l'invocatrice. Arito met fin à ses activités. Seul le Shirenai géomancien reste de marbre.
« Que se passe-t-il ? demande-t-elle, la tête encore un peu groggy.
- En garde ! Tout de suite ! » ordonne le chef Zigrik à ses soumis.
Endalia sort son gant muni de lames en acier et son collègue garde la main sur son paquet de cartes, prêt à dégainer à tout instant. Tout à coup, Fraya ouvre les yeux. Lorsqu'elle aperçoit ses compagnons de voyage prêts à l'attaquer, elle fait mine de ne rien remarquer et se relève, tournée vers l'ouvreur de failles.
« Nous pouvons repartir, maître. » annonce-t-elle calmement.
Son attitude perturbe les deux Zigriks soumis.
« Pardonnez-moi, il fallait absolument que je fasse ceci. Soyez rassuré, j'ai obtenu ce que je voulais. Je vous présente mes excuses les plus sincères. » poursuit-elle tout en baissant la tête, afin de prouver sa sincérité.
« Bien. Si tel est le cas, allons trouver le dernier artefact. Nous avons perdu trop de temps. »
Il entame la marche, suivi de près par son acquisition et Tetsuo. Les Zigriks restent sonnés.
« J'avoue. Je ne sais plus quoi penser. Peut-on vraiment lui faire confiance ? » affirme Arito.
L'invocatrice ne réagit pas.
« Tu m'écoutes ?
- Pardon... Ça m'a rappelé une situation beaucoup trop familière pour moi.
- Oh... Euh... Voyons le bon côté des choses. Ne faire que marcher, ça va bien un moment, mais ma passion ce n'est pas la randonnée.
- C'est vrai. Ça m'a permis de bien me reposer. affirme-t-elle avec un soupir.
- Et moi, de récolter un peu d'énergie. Je pense que je vais en avoir besoin pour la suite. complète son homologue.
- Tu as trouvé d'autres sceaux pratiques à utiliser ? » lui demande-t-elle.
Il ne répond pas mais l'expression de son visage suffit.
« Hé ! Vous deux ! Pressez le pas ! leur ordonne Alnor.
- Oui maître ! lui crient-ils à contre cœur avant de fermer la marche.
- Tu ne l'as sans pas remarqué vu que tu pionçais mais, lui là, je le trouve de plus en plus bizarre. Il est beaucoup trop calme. Pour moi, c'est sur. Il prépare quelque chose. note le Zigrik tireur de cartes après quelques secondes.
- Si c'est vrai, je le tue dans le dos et je prendrais son corps direct. Son énergie est plus développée qu'un rejeton de Kigen classique.
- S'il ne t'a pas tué avant, évidemment. »
La remarque de son confrère la fait doucement sourire. Cependant, ce dernier garde les yeux fixés sur le mercenaire, absolument convaincu que quelque chose ne va pas dans son comportement, craignant le pire. Alnor, qui se trouve en tête de gondole, se demande pendant ce temps ce que le Kirioku a bien pu faire et, surtout, ce que les traits apparus peuvent bien signifier. Est-ce une preuve d'une quelconque augmentation de puissance ? Rien n'est moins sûr selon lui car la chaleur qu'il sent émaner d'elle n'a point changé. Ses pensées sont désormais concentrées sur elle.