Deux jours après l'altercation entre Shipé et Alnor, ainsi que l'arrivée de Tencubo, Rai, Rajik et Yoru marchent au beau milieu d'un village rupestre dont les maisons sont constituées principalement de chaux. Ils viennent de quitter une autre auberge. A en juger l'état de Rajik, il est facile de comprendre qu'ils sont bien rassasiés. C'est alors qu'ils aperçoivent quelques villageois regroupés à la sortie du village en plein entretien avec trois Shirenais armés.
« Qu'est-ce qu'il se passe là-bas ? » demande Rai.
« Encore une patrouille. Ils doivent certainement être en récolte d'infos ou en mission. » répond Yoru.
« S'ils veulent faire comme ceux que nous avons vu la dernière fois, nous devons les arrêter. »
« Sans vouloir être contradictoire, c'est supposé être tes collègues. Et ça a failli mal tourner la dernière fois. Ne nous faisons pas remarquer cette fois et tout ira bien. Continuons notre route. Rajik, tiens-toi bien. Je te donnerai plus de nourriture si tu respectes ça. »
« Moi pas oublier ».
En toute discrétion, après avoir pris soin de bien cacher son katana pour Rai, et son grimoire pour Yoru, ils passent à côté d'eux. Se croyant en toute sécurité, un malheureux courant d'air balaye le trio, dévoilant alors l'arme blanche du manieur de foudre. Un des patrouilleurs le remarque. Son aspect ne le laisse pas indifférent. Jamais il n'a vu une chose pareille. Une partie du précieux ouvrage de l'aquamancien est également visible. Serait-ce un écrit volé ?
« Les gars. » murmure-t-il à ses collègues.
« Quoi ? Qu'est-ce qu'il y a ? »
« Regardez ceux-là. Y en a un qui a un fourreau trop bizarre et l'autre sans doute un bouquin de sorts qu'il aurait pu piqué. Ils peuvent être les types que le Conseil recherche ! »
« T'en es sûr ? » interroge l'autre.
« T'en connais toi des types non-déclarés portant des armes comme les nôtres ? Pas moi en tout cas. »
« C'est qui le gars qui les accompagne ? Ils sont trois maintenant ? Personne n'a mis le signalement à jour à Kigen ? »
« Peu importe. Dans le doute, vérifions. »
D'un pas ferme, la main frôlant l'épée, la patrouille se dirige vers le trio d'amis, prêt à dégainer au moindre mouvement brusque. Après quelques secondes, Rai se rend compte de ce qu'il se passe derrière eux.
« Nous sommes repérés. » relève-t-il.
« Restons calme. Ayons l'air le plus naturel possible. Partons. »
« Partir ? Non ! Ça sentir la [...] »
Rai cesse immédiatement l'élan de son ami adepte au corps-à-corps en le prenant par le bras droit. La fuite désormais évidente, la patrouille part à leur poursuite.
« Moi vouloir me battre ! »
« Sérieusement Rajik... La ferme ! »
Peu habitué à entendre ce jargon sortir de la bouche de son ami, Rajik se calme instantanément. L'Enijiakku ouvre son grimoire avec pour objectif d'élaborer rapidement un stratagème pour ne plus être dans leur ligne de mire. Le patrouilleur au fourreau rouge dégaine son arme, qui s'enflamme dans le mouvement.
« Hi No Kabe ! »
Un jet de feu contourne le trio avec suffisamment de vitesse pour bloquer leur avancée et se changer en un mur de feu d'une dizaine de mètres de haut. Yoru, malgré son affiliation élémentaire, ne peut rien faire contre à cause de sa spécialisation. L'obstacle rappelle de mauvais souvenirs à Rajik, l'empêchant ainsi d'agir. Quand à Rai, son manque d'expérience dû à son amnésie le paralyse.
« Vous deux-là. Veuillez-nous suivre ! » ordonne celui qui les a repéré.
« Pourquoi ? Nous n'avons rien à nous reprocher ! » répond l'aquamancien.
« Regardez la forme de son fourreau. On dirait un katana ! Qu'est-ce que ça fout là ? » s'étonne le Shirenai de feu.
« Sa tête ne me revient pas. Il ne doit pas être déclaré. C'est peut-être le complice du déserteur ! »
L'étrange affirmation du dernier membre de l'escouade attise la curiosité du manieur de foudre. Guidés par cette dernière, les soldats s'approchent d'eux. Un jeu de regards entre le seuls aptes à créer des phrases cohérentes dans le duo témoigne une demande d'aide de la part de Rai et une absence totale de solution pour l'autre.
« Toi là ! Où as-tu eu cette arme ? » interroge le créateur du mur de feu, ignorant totalement le sort accablant son interlocuteur.
Le mutisme délivré par ce dernier pendant plusieurs secondes commence à irriter les nerfs des soldats, confirmant par la même occasion l'hypothèse selon laquelle Rai serait le Shirenai qui accompagnait Alnor.
« Et toi là ! Où as-tu eu ce truc que tu portes sous le bras ? » exige de savoir celui qui a tout lancé.
« Je le tiens de l'Enijiakku que vos supérieurs ont supervisé pendant des années. Je le tiens de Kigzir. » annonce Yoru avec sobriété et retenue.
« Castagne ! »
Assez de paroles, assez de passivité, Rajik s'élance aveuglément contre le détachement armé de Kigen. Son ami de longue date a à peine le temps de concentrer un peu de glace autour de lui. Le pyromancien présent sur les lieux ordonne à son mur de revenir pile au milieu entre lui et l'agresseur, l'empêchant ainsi d'utiliser l'un de ses coups fétiches. L'un des deux autres patrouilleurs dégaine son arme et, en l'espace de trois secondes, arrive à cinq mètres à peine de lui, prêt à lui asséner une attaque nette et précise. Lors de son déplacement quasi instantanée aux yeux de Yoru, Rai entend un drôle de bruit, ignorant totalement qu'il s'agit d'une décharge. L'amplitude perçue le pousse à imiter ce mouvement et intercepter la lame du soldat, à sa grande surprise.
« Où as-tu eu cette arme ? Réponds ! » lui demande son adversaire.
« J'en sais rien. »
« Tu es vraiment un Shirenai ? »
« Oui ! »
« Alors que fais-tu avec cet Enijiakku affirmant sans retenue qu'il aurait sur lui une possession d'un de nos surveillés ? »
« C'est mon ami. Et de quoi parles-tu ? Pourquoi surveillez-vous des gens qui ne représentent aucune menace pour vous ? »
Les deux épéistes s'écartent. L'action précédemment réalisée par son ami convint Rajik de reculer. Le mur de feu cesse d'exister. Le troisième patrouilleur décide à son tour de dévoiler son équipement.
« Cher inconnu, à quel point es-tu prêt à trahir l'autorité de ton peuple ainsi que les valeurs qu'ils portent ? Si tu es réellement l'un des nôtres, tu es au courant de toutes nos règles. Or, je ne te connais pas. Alors, si tu tiens à la vie de tes compagnons, je te conseille vivement de déballer la vérité. »
« Je sais que c'est difficile à croire pour vous mais, oui, je suis Shirenai sans l'être. En aucun cas je ne vous trahis. Les seules personnes que je ne trahirai pas ce sont eux. Est-ce clair ? »
« Dans ce cas, au nom du Conseil, je déclare toi et tes complices en état d'arrestation ! »
Soudainement, les trois soldats de Kigen activent leurs auras en même temps. Ainsi, de par leurs couleurs, la nature de leurs éléments est clarifiée : feu, eau et terre. En partant de cette base, Yoru tente d'élaborer une stratégie. Quand, tout à coup, les frères d'armes de Rai l'attaquent en même temps. Contre les assauts multiples et très bien coordonnées auxquels il doit se confronter, le pauvre amnésique rencontre bon nombre de difficultés. Rajik essaye au passage de lui venir en aide en ciblant l'un d'entre eux. Malheureusement, le géomancien du groupe, en plantant brièvement la pointe de son épée dans le sol et en prononçant « Zunatar », crée une secousse afin de le reculer.
« Ular Ilwaï ! »
Yoru avec sa pluie de morceaux de glace cherche à forcer au moins un assaillant à reculer. Cependant, l'adepte du feu, ayant vu sa technique du coin de l'œil, les fait fondre avec une seule projection. Anticipant d'autres gênes à venir, les deux Shirenais qui les ont interceptés viennent attaquer les amis de Rai, incapable de les intercepter à cause de son adversaire poursuivant son échange de coups avec lui. En peu de temps, le pyromancien détruit tout projectile crée par le Zigrik. Dès qu'il arrive à sa hauteur, il lui fait lâcher son ouvrage, tomber au sol et le vise de sa lame. Le géomancien, en prononçant « Amépan », plaque Rajik au sol. Cette situation fait directement écho dans l'esprit du sabreur. La même configuration connue face à Endalia. Encore.
« Nous ferons la clarté sur vos identités et, s'il s'avère que vous êtes les hommes recherchés, vous connaîtrez une terrible sentence ! Le retrait définitif des maîtrises élémentaires et consignation aux travaux publics à vie minimum ! » lance son adversaire après avoir arrêté l'attaque pendant un moment.
« Vous faîtes erreur ! Mes amis n'y sont pour rien ! »
« N'essaye pas de couvrir tes complices ! »
Sur ces mots, il active son aura. Le ciel s'assombrit.
« Majar Raïsila ! »
Un éclair vient recouvrir sa lame sans affecter son propriétaire. Rai s'efforce à mémoriser ce qu'il vient d'entendre.
« Un conseil, rends-toi. »
« Firaizer ! »
Le patrouilleur se contente juste de dévier cette piteuse tentative.
« Ah, tu es bien de foudre. Je n'en étais pas certain lorsque tu es venu protéger ton associé. C'était quoi ça ? Tu m'as bien dit que tu étais un Shirenai. A croire que non ! » lance-t-il avant de s'esclaffer de rire.
L'entraînement improvisé par ses amis après la mésaventure Endalia lui revient en tête. Ainsi, il entame une phase de concentration rythmée par de grandes respirations. Son homologue élémentaire ne comprend pas du tout dans quoi il se lance. Enfin, au bout de quelques instants, il parvient à matérialiser son aura. Ses amis ont les yeux rivés sur lui, de peur que le même phénomène vécu auparavant avec lui ne se reproduise.
« Toujours décidé à ne rien balancer ? »
Rai tend sa lame en l'air, de la même manière utilisée par son frère d'élément. Confiant qu'il va foirer, ce dernier le laisse poursuivre. Un éclair vient frapper sa lame sans la recouvrir. Cet échec cuisant achève le duelliste dans ses éclats de rire.
« Tu n'arrives même pas à exécuter cette technique correctement. Et tu oses porter un fourreau ! Regarde-toi ! Tu n'es pas digne d'être l'un des nôtres ! Tu n'es qu'un pâle imitateur sans talent !... Seule conclusion à tout ça, tu n'es qu'un misérable Enijiakku ! »
Ses collègues le suivent dans son enthousiasme en se moquant de lui allégrement. Le pyromancien remarque l'étrange expression sur le visage de Yoru, incapable de déterminer si c'est de l'impuissance ou de la peur pure.
« J'avoue... Je suis impressionné par autant de médiocrité... Bon, ça suffit maintenant. »
De la pointe de sa lame baignée par de la foudre, le soldat de Kigen le vise.
« Abandonne. Si toi ou tes complices ne font rien pour aggraver la situation, tout ira bien. Puisqu'il est évident que vous n'êtes pas de taille. »
Rajik, énervé par ces paroles débordant d'arrogance, engage toutes ses forces pour s'extirper de la pesanteur qui l'affecte. Sentant sa puissante grandissante, le géomancien lui coupe l'herbe sous le pied en insufflant plus d'énergie.
« Reste à terre toi ! » ordonne vigoureusement le Shirenai.
« Rai ! Toi pas abandonner nous ! Rai ! Faire quelque chose ! Toi éclater eux ! »
Suite à cette supplication, un sourire émerge sur les lèvres de son geôlier.
« Comment peux-tu continuer à croire que quelque chose d'extraordinaire sortira de lui, surtout après le triste spectacle qu'il vient de nous offrir ? »
Yoru capte plus d'humidité. Malheureusement pour lui, la différence de température que cela implique le crame. Le patrouilleur qui le tient en otage enflamme sa lame et la pose à quelques centimètres à peine de sa gorge. A cause de la chaleur, Yoru commence à suer anormalement.
« Si tu bouges... Je te brûle ! »
« Je pense avoir compris... »
Pendant ce temps, Rai s'acharne à répliquer la technique déployée par son homologue.
« Rends-toi. C'est la meilleure chose qui puisse t'arriver. Tu te fais du mal pour rien. J'aurais presque pitié pour toi. Lâche ton katana. Je te rassure, nous lui trouverons une place bien au chaud chez nous. Il serait possible que j'allège mon rapport pour que la mort ne soit pas obligatoire. Alors ? Que vas-tu faire, faux Shirenai de foudre ? »
Persuadé que tout ce qu'il vient d'annoncer n'est que du vent, il ne répond pas. La peur que l'inexplicable voix réapparaisse l'étreint dans sa prise de décision. Saura-t-il avoir le contrôle total sur ses actions ? Et pourtant, personne ne semble remarquer que l'air devient de plus en plus électrique aux alentours. Lassé de cette situation tenant trop en longueur, le pyromancien amplifie son aura.
« Prêt à disparaître ? Enijiakku ? » lui lance-t-il d'un ton sarcastique, limite sadique.
« Yoru ! » crie son ami baraqué.
Tout à coup, des éclairs s'abattent dans le décor. La patrouille et les amis de l'amnésique sont surpris face à ce déchaînement.
« Stop ! » hurle leur auteur.
Les patrouilleurs se tournent vers lui.
« J'ai dit stop ! »
Il lève son arme une nouvelle fois en l'air.
« Si vous bougez ne serait-ce que d'un poil, vous le regretterez. »
Le changement de ton dans sa voix terrifie Yoru et Rajik. Aucune réaction concernant les autres Shirenais, peu impressionnés. Le géomancien amplifie la gravité sur sa victime. Le sol sous lui craquelle à cause de ça. Le pauvre combattant à mains nues hurle de douleur. Ses cris fendent le cœur du Zigrik. Soudain, Rai perçoit des échos de son passé.
« Un Shirenai, quel qu'il soit, a un seul et unique but : porter secours à celui qui en a besoin. Peu importe la réputation qui nous est portée là-bas, si un jour tu réussis à faire parler de toi, tu leur rappelleras ce que nous devons être. » lui dicte une voix paternelle.
Rassuré par ces propos, celui qui ne connaît pas encore son vrai nom reprend ses esprits. C'est à ce moment qu'il entend une nouvelle fois « Fargresaz ». Il se dit sur le moment que ce mot n'est pas là pour le menacer. Un verrouillage psychique brisé, son collier émet une légère onde blanche sur lui. Aussitôt, Yoru perçoit le flux associé à cette dernière. Les sens du géomancien, du pyromancien et de son homologue de foudre s'en retrouvent perturbés. Un œil violet et unique réapparaît brièvement aux yeux de Rajik. L'onde arrive à l'arrière de son coup, pile à l'endroit où Fraya l'assomma brutalement.
« Majar Raïsila ! » invoque Rai, grâce à une reconstitution partielle de sa mémoire conférée par son collier.
L'éclair vient frapper sa lame, réussissant enfin à la couvrir d'énergie, beaucoup plus que celui qui lui fait face. La quantité déployée impressionne la patrouille et ses amis. Est-il resté lui-même ? La voix qu'il ne cesse d'évoquer a-t-elle agit ? Voici les premières questions débarquant dans la réflexion du Zigrik.
« Laissez-les ! » leur ordonne-t-il, d'un ton menaçant., les yeux aussi bleus que le ciel.
« Quelle aura... » lâche le spécialiste de la glace.
« Rai... »
Les deux geôliers s'étonnent des réactions de leurs victimes. Comment peuvent-ils être dans cet état s'ils sont complices ? Un léger doute commence à prendre racine en eux.
« Bravo ! Tu as réussi à m'imiter ! Bravo ! Et puis quoi ? Tu te crois encore capable d'être meilleur que nous ? J'ignore qui tu es mais ce qui est sûr c'est que tu vas perdre ! » répond son frère d'élément, préférant omettre sa crainte intérieure.
L'orgueil évident chez lui n'ébranle pas Rai.
« Ça n'empêchera pas que mon collègue va brûler ton complice ! Vas-y ! »
Alors qu'il allait exécuter l'ordre, il est brutalement interrompu par Rai qui, par un mouvement éclair, éloigne Yoru de la mort. Quoi ? Comment a-t-il fait ça ? Ni l'affilié au feu ni celui qui vient d'être sauvé n'ont compris ce qu'il vient de se passer. Rajik et les deux autres patrouilleurs s'en rendent compte trois secondes à peine plus tard. Comprenant le danger qu'il représente, l'affilié à la terre fonce vers Rai en tentant de l'attaquer dans le dos. Rai se souvient subitement d'un de ses entraînements contre d'autres de ses camarades dans son pays d'origine. Grâce à sa lame électrique, d'un mouvement bref et précis, il pulvérise l'épée de l'agresseur qui s'était renforcée pendant son déplacement.
« Impossible ! » s'interloque le Shirenai à la lame brisée.
« Comment a-t-il […] ? »
« Gibaraï ! »
Le pyromancien n'a pas le temps de terminer sa phrase que Rai envoie une onde électrique pour le repousser.
« Quelle force ! » s'étonne le géomancien.
Yoru et Rajik, constatant le changement brutal chez leur ami, sont désarmés. Mais qui est-il bon sang ? D'où tient-il une telle puissance ? Tout ce qui a été raconté sur la maîtrise des éléments ne serait que pur mensonge ?
« Yoru ? »
« Oui ? »
« Que nous devoir faire ? »
« Je... J'en sais rien. »
Sans plus attendre, Rai se rue vers l'affilié au feu. Par pur réflexe, la proie ne trouve que des vagues de feu à balancer, dans l'espoir que cela suffira à le dissuader de s'en prendre à lui. Contre toute attente, le Shirenai au collier range expressément son katana, guidé par un autre écho de son passé. D'étranges lignes jaunes translucides viennent couvrir le poing qu'il prépare dans le mouvement.
« Ikolamaréfai ! » invoque la future victime dans la précipitation en plantant son épée.
A peine la colonne de feu jaillissante du sol, l'assaillant passe au travers, ignorant presque la force impliquée.
« Kameraï ! »
Il lui colle un poing bien placé en plein ventre qui l'envoie valdinguer. Le guerrier adepte de l'énergie de la terre vient le charger de manière brouillonne. Ses attaques ressemblent fortement à celles qu'il avait exécuté face à Rajik lors de leur premier duel. Ainsi, il est aisé pour lui de les esquiver sans broncher. Dès qu'il en a l'occasion, il réitère la même technique contre lui, l'envoyant dans la même direction dans laquelle a été envoyé sa première victime. Le dernier membre encore debout de l'escouade tremble de terreur. Lorsqu'il croise le regard de Rai, il lâche son épée immédiatement. Tout son corps témoigne de l'effroi qui le paralyse. Avec une telle puissance, il peut le tuer à tout moment ! Rajik et Yoru observent avec attention l'attitude que prend leur ami. C'en est trop pour le soldat qui se décide à quitter le corps armé de Kigen et part rejoindre ses collègues afin de les convaincre de faire même. Le manieur de foudre restant le laisse partir. Après quatre secondes, il retrouve une apparence normale.
« J'ai peur qu'ils n'aient retenu nos têtes. Si c'est le cas, ils vont nous mentionner à leurs supérieurs. Voilà ce que je voulais éviter ! » se plaint Yoru.
« As-tu fait attention à son comportement ? Tu crois vraiment qu'il le fera vu comment il a détalé ? »
L'argument avancé désarçonne temporairement celui qui, pourtant, trouve toujours une explication, un contre argument ou quelque chose à dire pour conclure une conversation.
« Toi être trop fort. Moi te promettre que moi redoubler d'efforts pour calmer toi. Moi prouver que moi capable de combattre les gens comme vous ! »
« J'ai réussi à récupérer quelques souvenirs. »
« Ah oui ? Alors, qu'as-tu appris ? »
« Elle me répète sans cesse le même mot. 'Jalgresaz', non, 'Varpretaz', non... Quelque chose qui y ressemble. Ça te dit quelque chose Yoru ? »
« A priori, la terminaison en -az m'indique qu'un verbe t'est soufflé. Mais tu peux être sur que je vais poursuivre mon enquête. Dès qu'on mettra le doigt dessus, je pourrais te le traduire. Autre chose sinon ? »
« Non malheureusement... Je n'ai rien reconnu. Ni les lieux, ni mon vrai prénom. Je suis vraiment désolé les amis. »
« Moi être sûr que ça revenir à toi un jour. Et quand ça arriver, toi dévoiler ta vraie force et moi affronter toi ! »
Cette étrange affirmation dérange celui qui la reçoit.
« Mes amis, je n'en suis pas encore totalement certain mais j'ai l'impression que cette voix est là pour m'aider. Quand je l'entends, je me sens plus fort ! »
« Donc toi tricher en fait ! »
La lucidité étonnante de la part de l'homme baraqué désarçonne à son tour l'auteur de la démonstration de force auquel il a assisté. Seul Yoru ne semble pas suivre son ami de foudre. Tant que l'identité derrière elle ne sera pas dévoilée, un doute subsistera sur sa véritable influence sur son récepteur.
« Nous devrions partir d'ici au plus vite. Des mercenaires risquent de les remplacer et je n'ai nullement envie de me confronter à eux. Ils sont d'un tout autre niveau. Je peux en témoigner avec ce que j'ai pu voir avant de rencontrer Rajik. »
« Dommage moi avoir tant voulu assister à ça ! »
« Prie Faironne qu'ils aient bel et bien oublié nos têtes. Je ne voudrais pas hériter d'une vie uniquement axée sur l'anonymat extrême ! Planquons-nous. C'est notre seule chance. » conclut le Zigrik.
Là-dessus, tous les trois reprennent leur route. Le Shirenai s'efforce encore à se rappeler ce qu'il a pu entendre. Rajik reproduit bêtement le coup de poing qui a ébranlé la patrouille. Yoru note tous les mots qui auraient la même phonétique que ceux évoqués précédemment. Les voilà se dirigeant vers l'inconnu, ignorant totalement les forces en mouvement au sein de l'univers dans lequel ils évoluent.