Rose courait aussi vite qu'elle le pouvait pour garder le rythme avec Mathias et échapper à la portée d'Henry qu'elle perdait dans la foule.
En tant que soldat, Mathias devrait être capable de l'aider. Il aurait les moyens de vérifier le vrai prix pour lequel Graham l'avait achetée ou de l'aider à s'enfuir.
Pendant huit ans, elle s'était accrochée à une promesse, sans jamais perdre espoir un seul instant et maintenant, au moins l'un de ses amis était de retour.
« Mathias ! » appelait Rose, incapable de s'arrêter de prononcer son nom.
Dès l'instant où Mathias aperçut Rose lorsqu'elle cria son nom, il ne cessa de la regarder. Mathias la regardait comme s'il n'en croyait pas ses yeux qu'elle soit devant lui. Rose ressentait la même chose. C'était merveilleux de le voir bien vivant, et surtout de retour ici en ville.
Rose fit signe à Mathias qui secoua la tête comme s'il ne pouvait croire ce qu'il voyait.
Rose réussit à s'approcher de lui et tendit la main seulement pour être poussée au sol par un autre soldat.
« Attention autour du capitaine. »
Rose gémit, sa main gauche sur laquelle elle était tombée lui faisait très mal. Elle leva les yeux vers Mathias qui arrêta son cheval. « Mathias. C'est moi, Rose. »
Le soldat qui avait poussé Rose était prêt à la chasser du chemin, mais il devait confirmer qu'elle n'était pas une femme que le capitaine connaissait.
Mathias regarda en bas vers la fille qu'il n'espérait jamais revoir. Avec l'obsession de Graham pour elle dans le passé, il pensait qu'elle aurait été enfermée quelque part ou qu'elle se serait tuée pour échapper à ce que Graham voulait lui faire. Était-elle assez folle pour les attendre ?
Mathias regarda en arrière pour voir si Alexandre était proche. Les hommes avec lesquels voyageait Alexandre ne devraient pas être proches en ce moment. Alexandre serait heureux de la voir et oublierait les hommes autour, révélant joyeusement leur passé.
Rose était un rappel de leur passé. Comment ils ont failli être vendus comme esclaves. Mathias n'avait besoin que personne ne connaisse cela.
« Toi ! » Henry se pencha pour forcer Rose à se lever. « Tu misérable. »
Henry savait qu'elle allait le faire tuer en faisant une telle farce. Graham devrait lui permettre de lier une corde autour de sa main et la tirer comme les fermiers le faisaient avec leurs animaux.
Henry se tourna vers le soldat qu'elle avait offensé. « Excusez-la, monsieur. Elle doit avoir perdu la tête. »
« Elle connaît le capitaine, » dit le soldat qui avait poussé Rose.
Rose resta à regarder Mathias, ne croyant pas qu'il l'avait oubliée. Comment pouvait-il oublier l'une des personnes qui s'était enfuie avec lui ce jour-là ? « Mathias- »
Henry couvrit la tête de Rose avec le manteau pour que les soldats ne voient pas son visage. Graham le tuerait s'il savait que le visage de Rose avait été vu par beaucoup d'hommes.
« Bien sûr, elle me connaîtrait. Qui ne connaît pas mon nom ? Je ne connais pas cette femme. Contrôlez-la, » dit Mathias, détournant le regard de Rose pour stopper la croissance de la culpabilité.
Rose n'aurait pas dû se présenter devant lui. Il espérait qu'elle n'ouvrirait pas la bouche sur leur enfance. Aucun des hommes avec lesquels il marchait ne connaissait son passé à part Alexandre. Ils étaient montés bien au-dessus de ces jours pour qu'on leur jetât ça à la figure.
Henry tira sur le bras de Rose pour commencer à l'éloigner.
« Attendez ! Vous étiez là avec moi au mur avec Alexandre- »
Mathias donna un coup de pied pour frapper sa poitrine afin de la faire taire. Pourquoi ne comprenait-elle pas que cela ne devait pas être évoqué maintenant ?
Henry dégaina son épée alors que le soldat faisait l'erreur de toucher la propriété de Graham.
Mathias était confus de voir pourquoi l'homme était si rapide à défendre Rose au point de sortir son épée. Elle n'aurait pas pu devenir une sorte de dame. Quand Graham l'avait prise, elle aurait été placée au bordel. Ses vêtements avaient l'air un peu trop biens pour qu'elle vienne du bordel, mais les femmes recevaient des cadeaux des hommes.
Rose ne prêtait aucune attention à Henry et au soldat. Elle était plus concentrée sur la raison pour laquelle Mathias agissait comme s'il ne la connaissait pas alors qu'il l'avait reconnue plus tôt. Cela ne pourrait être qu'il avait honte de ce qu'elle était maintenant. À l'époque, ils connaissaient son sort si elle était attrapée par Graham.
« Poussez-vous du chemin, » dit Mathias, détournant le regard de Rose une fois de plus.
Rose toucha sa poitrine où Mathias l'avait frappée. La douleur était trop forte pour être ignorée. Pourquoi se comportait-il ainsi avec elle ? Rose le regarda s'éloigner à cheval. Elle s'était assez humiliée en l'appelant pour finir par être poussée au sol et frappée à la poitrine.
Rose ne croyait pas que Mathias ne se souvenait pas d'elle et si c'était le cas, pourquoi traitait-il une des personnes qu'il avait juré de protéger de cette façon ? Il était toujours l'un des hommes du roi donc il ne devrait pas blesser imprudemment les gens.
Le soldat suivit Mathias au lieu de chercher la bagarre avec Henry.
« Regarde dans quel problème tu nous as mis, » dit Henry, rangeant son épée maintenant que les deux étaient partis. « Laissez-moi voir- »
« Ne me touchez pas, » dit Rose, couvrant les premiers boutons de sa robe avec sa main droite.
Henry ne voulait rien de plus que de la traîner de retour au bordel. Pourquoi Graham l'appréciait-il ? Certes, elle avait un joli visage mais elle était problématique. « Vous feriez mieux de ne pas avoir de bleu. Si je suis blessé à cause de cela, je vous tuerai. »
Rose ignora l'avertissement. Elle avait d'autres choses à penser. Elle avait gardé l'espoir que ses amis reviennent vers elle pendant huit ans. Ils étaient tout ce qu'elle connaissait.
Rose ne pouvait pas se souvenir du visage de l'homme qu'elle croyait être son père et qui l'avait vendue ou à quoi sa mère aurait pu ressembler. Tout ce qui était au-delà du moment où elle était placée dans une chambre avec des enfants était flou.
« Je veux retourner, » murmura Rose.
Sa poitrine lui faisait mal et elle ne savait pas si c'était seulement à cause du coup.
« C'est la meilleure chose que vous avez dite depuis que nous sommes partis. Ne tentez pas de vous échapper de moi à nouveau, » avertit Henry. Il devait informer Graham de l'homme que Rose avait appelé. Si elle avait un amant secret tout ce temps, Graham pourrait enfin ouvrir les yeux et la traiter comme elle méritait d'être traitée.
Henry lui prit la main, sans se soucier de son aversion pour être touchée par d'autres. C'était le seul moyen qu'il avait de garantir qu'elle ne s'enfuirait pas à nouveau.
« J'ai dit… » Rose n'a pas terminé sa phrase alors que le monde devenait sombre.
Comme une fois auparavant, l'étrange souvenir d'un champ lui vint à l'esprit.