Chapter 7 - Chapitre Sept

Ron parlait et parlait encore. Il parlait des romans qu'il avait lus et des merveilleuses créatures qu'ils contenaient. Il parlait du fonctionnement du cerveau et combien il était amusant d'imaginer tant de choses. C'était incroyable de simplement inventer des trucs et de les rendre réels dans la fiction.

Tout le monde s'ennuyait et souhaitait pouvoir le faire taire. Peu importait qu'ils ne répondent pas à ce qu'il disait. Le Prince Ron était très doué dans l'art de parler tout seul. Il racontait des mauvaises blagues et en riait lui-même. Quand il trouvait que rire seul était trop ennuyeux, il forçait les serviteurs à rire en menaçant de les punir en leur faisant transporter du crottin de cheval à leur retour à Ashenmore.

Ensuite, il les obligeait à chanter.

Pauvres serviteurs. Après deux heures, le prince n'avait toujours pas fini alors Leo pensa à la seule chose qui pourrait le faire taire. Le mettre dans la calèche avec la princesse. Si tout le monde coopérait, le Roi ne le saurait même pas.

"Prince Ron", l'appela-t-il. "Je pense que vous pouvez entrer dans la calèche maintenant. Je vous laisserai sortir après quelques heures"

Ron, qui s'amusait à torturer les serviteurs, refusa clairement. "Pas question. Vous ne voyez pas qu'on s'amuse beaucoup ? Ne soyez pas rabat-joie, Leo"

Les serviteurs gémissaient intérieurement. Ce n'était vraiment pas amusant !

Ron remarqua que Leo s'approchait de lui. Il le regarda avec suspicion. "Qu'est-ce que c'est ?"

Leo sourit. "Prince Ron, vous transpirez énormément et votre peau semble plus sombre. J'ai peur que si vous restez plus longtemps au soleil, votre peau perde son éclat"

Tout le monde était stupéfait. N'était-ce pas ce garde qui disait que rester au soleil était bon pour le prince ?

Le Prince Ron était horrifié. Il plaisantait juste avant. Son mensonge était-il devenu réalité ? "Vraiment ? Vous êtes sûr ?"

Leo hocha la tête sérieusement. "Oui, Prince Ron. Je crois que vous devriez rester quelques heures dans la calèche avec la princesse. Vous n'avez vraiment pas l'air bien"

Rien de plus n'était nécessaire. Ron sauta de son cheval et s'envola dans la calèche en un clin d'œil. Sa belle peau ! Comment pourrait-il affronter son bien-aimé dans le Nord si elle était abîmée ?!

Les serviteurs se réjouirent intérieurement. Dieu bénisse Leo !

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Ron soupira bruyamment pour la centième fois, agaçant la princesse qui essayait de dormir. Il trouvait que rester assis dans la calèche était encore plus ennuyeux que de monter à cheval mais il avait peur que le soleil ruine sa peau, alors il s'obligeait à rester là. Ils s'étaient reposés un moment, avaient déjeuné puis avaient continué leur voyage.

Ses pensées étaient remplies de son homme aux cheveux argentés, tenant la tête sanglante de ce brute comme un héros sombre. Sa main alla au collier sur son cou qui était couvert par ses vêtements. Pourquoi le Nord était-il si loin ? Il soupira de nouveau.

C'en était trop. La Princesse Rose saisit son éventail, l'objet le plus proche d'elle, et le lança sur Ron qui l'esquiva à la dernière minute. Il tourna brusquement la tête vers Rose, se sentant lésé. "C'était pour quoi, ça ?!"

"Arrête de soupirer tout le temps ! C'est agaçant" dit-elle en colère. "Donne-moi mon éventail"

Ron regarda l'éventail par terre. Il le ramassa à contrecœur et le lui donna. Il croyait que, en tant que cadet, il devrait au moins être obéissant, surtout puisque sa sœur allait le laisser seul dans quelques jours.

"Pourquoi soupires-tu, au fait ?" demanda Rose, inquiète. "Tu as l'air vraiment misérable"

"Ma très chère sœur, on est toujours misérable sans son bien-aimé" dit Ron, appuyant son menton sur le dos de sa main. "N'est-ce pas une des raisons pour lesquelles tu te maries ? Parce que tu aimes le Roi de Netheridge et que tu veux toujours être avec lui ?"

Rose n'entendit même pas la dernière partie. Elle était encore bloquée sur la première. "T-Tu es amoureux ?" demanda-t-elle, horrifiée.

Ron acquiesça. "Oui. Je suis amoureux et ma bien-aimée me manque terriblement. Pourquoi fais-tu cette grimace affreuse ?"

"Je plains la pauvre fille, c'est pour ça. Elle a vraiment un grand cœur pour aimer un fauteur de troubles comme toi"

"Pour ton information, je suis très facile à aimer." dit-il, offensé. Oui, il n'avait pas encore avoué son amour à sa bien-aimée et celle-ci ne lui avait rien dit concernant l'amour, mais il était confiant de pouvoir la conquérir. Qu'est-ce qui n'était pas aimable chez lui ?

Rose éclata de rire. "Toi, aimable ? Cette fille doitêtre aveugle ou sourde. Peut-être même muette, c'est pourquoi elle ne peut pas te dire en face qu'elle ne t'aime pas"

Ron était en colère. Sa sœur voulait-elle dire que seule une personne handicapée pourrait l'aimer ? Quelle insulte ! Le pire, c'est qu'il n'avait même pas de réplique ! "Et toi ? Et ton futur mari ? Je parie que c'est un vieux bedonnant et ventripotent !"

"Ha ! Tu crois que je me marierais avec ce genre d'homme ? Père ne le permettrait même pas, peu importe à quel point il est riche et influent. D'ailleurs, je l'ai vu moi-même quand il est venu demander ma main. Il est très très grand et beau. Tu verras quand nous arriverons là-bas"

"Eh bien le mien devrait être encore plus bea -tousse- belle. Mille fois plus belle !"

Rose ne semblait clairement pas d'accord. "Je ne le crois pas et Ron..." sa voix passa d'enjouée à carrément sérieuse. Même l'atmosphère devint solennelle.

"En tant que ta grande sœur, laisse-moi te donner un conseil. Mets un terme à cette relation bientôt. Ne lui fais aucune promesse et ne laisse jamais père l'apprendre. Tu peux t'amuser autant que tu veux. Tu es un homme maintenant. Père ne s'en souciera pas, mais ne prends aucune relation au sérieux et protège toujours ton cœur. Père ne te laissera pas épouser qui tu veux. Je suis sûre que tu le sais déjà, mais sois quand même très prudent. Je ne veux pas te voir blessé"

Ron en était bien conscient, mais se le rappeler faisait chuter son humeur. Il acquiesça mais ne parla plus.

Au lieu de cela, il maudit son sort intérieurement. Pourquoi devait-il être né prince ? Pourquoi avait-il des devoirs et des obligations qu'il ne voulait pas remplir ? Pourquoi ne pouvait-il pas avoir le plein contrôle de sa propre vie ?

Une fois de plus, il fut rappelé à quel point il est pathétique.