Dans la salle servant de lieu de jugement à Kigen, Aritsune et Daigaku, ravis de leurs dernière prise, s'affairent à consulter divers documents déposés devant eux. Le Shirenai qui a servi à la capture du mentor de la bande à Rai entre dans la pièce et s'incline devant eux comme le stipule le protocole en place.
« Chers membres du Conseil, l'ex-mercenaire est à présent enfermé dans la cellule de neutralisation énergétique. leur annonce-t-il.
- Bien. Mercenaire Tetsuo, le Conseil tient d'abord à vous féliciter. lui signale Aritsune.
- Ce n'était que mon devoir. Veuillez m'excuser pour mon insistance. Est-ce réellement bon de laisser Tencubo et ses acolytes dans la nature ?
- Arrêtez de vous inquiéter pour ça. Nous vous avons indiquer que ça n'affectera en rien le bon déroulement de notre plan. » lui répond Daigaku.
De peur de vexer sa hiérarchie, le Shirenai pose ses genoux à terre pour se prosterner, tout en fermant les yeux, gardant son calme malgré le silence qui s'installe.
« Mercenaire Tetsuo, voulez-vous, comme nous, vous débarrasser des énergies artificielles ? lui demande Aritsune.
- Affirmatif. répond-il du tac au tac.
- Dans ce cas, ne posez aucune question et agissez.
- Votre prochaine mission est la suivante. Gardez un œil sur le Kirioku. L'ex-recrue Alnor va se rendre aux ruines du temple de Ki-Ramen. indique Daigaku.
- L'Hoshaku s'y rendra également. Dès que ces deux artefacts seront réunis, nous enclencherons le processus de neutralisation. Ainsi, Faironne ne connaîtra plus de telles menaces. C'est ce que vous voulez n'est-ce pas ? poursuit son homologue Aritsune.
- Absolument. J'honorerai ma mission. leur affirme-t-il après s'être immédiatement relevé, en les regardant l'un après l'autre, doté d'une détermination sans faille.
- Le Conseil voudra tout de même interroger l'ex-mercenaire Kenshiro afin d'anticiper les mouvements futurs de groupe dissident du Shirenai de foudre. poursuit Daigaku.
- Mercenaire Tetsuo, vous pouvez disposer. »
Après les avoir de nouveau salué, il se retire. Une fois certains d'être totalement seuls, les représentants de l'ordre suprême de Kigen se regardent, ne pouvant s'empêcher d'arborer de grands sourires d'extase.
« Les choses ont été réalisées à moitié, malgré mon respect pour le plus grand d'entre nous. Enfermer dans de piètres objets ces énergies de l'Interdit était insuffisant. dénote Aritsune.
- Et pourtant nous ne pouvons que nous incliner pour le prix qui a été payé pour ça. poursuit son homologue, se balançant légèrement en arrière, les yeux rivés vers le plafond, comme s'ils voulaient le percer pour se perdre dans l'immensité du ciel.
- Interrogeons ce perturbateur. Lorsque le moment viendra, nous devons penser à prendre tous les documents. Nous en aurons besoin pour la suite des événements. »
Daigaku se remet droit et remarque que son confrère a la tête ailleurs.
« Que se passe-t-il ? lui demande-t-il.
- C'est tout de même dommage pour ce pauvre Tetsuo... Il est si serviable. Pourquoi ne sont-ils pas tous comme lui ? Comme par exemple, ce crétin de Shipé.
- Il est l'incarnation parfaite de ce que nous voulons supprimer. affirme Daigaku en serrant un poing.
- On aurait pu les dissuader à poursuivre dans leur pratique des énergies, à mieux respecter Faironne. déplore Aritsune.
- Ce Tetsuo possède de grandes qualités. C'est indéniable. Cependant, il reste un opposant à nos idéaux. Nous devons avoir aucune pitié pour aucun peuple élémentaire. Ne l'oublions pas. »
Pendant ce temps, les quatre protégés de Kenshiro sont dans une auberge située non loin de l'intervention surprise passée du mercenaire de terre. Ils ne sont pas dans leurs assiettes. Personne n'a fini son plat, même pas Rajik.
« C'est bien la première fois que tu ne termines pas. souligne Yoru.
- En même temps, il y a de quoi être dans cet état-là. » poursuit Tencubo avant de prendre une gorgée.
La réaction de l'ancien mercenaire revient dans la mémoire de Rai, arrivant presque à le faire pleurer.
« Je n'en reviens pas de ce qu'il a fait pour nous c'était... C'était...
- Héroïque. complète Rajik, la voix tremblante, dénotant une colère profonde.
- Je n'aurais pas dit mieux. » poursuit Yoru en buvant à son tour.
Tencubo partage le même souvenir que Rai. Après un instant d'une profonde réflexion, dans la tentative deviner les intentions de Tetsuo, il ne sait plus quoi réellement faire. Perdu dans les nombreuses leçons qu'il a reçu une fois recruté à Kigen, il entame une profonde remise en question des valeurs qu'on lui a inculqué.
« Un véritable Shirenai. avoue-t-il.
- Moi me demander quoi eux lui faire en ce moment. » dit Rajik, les poings serrés, prêt à se défouler sur n'importe quoi.
Rai, ne cessant de se rappeler l'enchaînement des événements, se triture l'esprit à se demander ce qu'il aurait pu faire pour sauver son mentor.
« Je l'ai mal jugé. C'est lui qui avait raison. » avoue Tencubo devant ses trois compagnons, en baissant un peu la tête.
A une autre table à côté d'eux se trouve la personne qui a vendu la carte à Fraya et qui avait conclu un marché avec Arito : Shiki, le Négociant. Il aperçoit Tencubo à ce moment- là, le reconnaissant immédiatement. Au lieu de prendre la fuite, il préfère observer sa compagnie. Il identifie quasi-instantanément la nature Zigrik de Yoru et la présence du ki en Rajik, peu étonné de ces découvertes. Cependant, lorsqu'il scrute le Shirenai de foudre, il voit deux courants circulant à contre-sens l'un de l'autre en lui. La première énergie qu'il identifie est celle que Rai a depuis la naissance. Cette situation semble familière au Négociant, lui faisant décocher un sourire teinté de nostalgie au passage. Il se concentre alors sur la seconde. Une éclatante couleur blanche se révèle à lui qui l'estomaque devant ses associés, inquiets de l'expression se dessinant sur son visage, légèrement en sueurs.
« Qu'allons-nous faire maintenant ? demande Rai.
- Eux avoir Kenshiro ! »
L'interjection de Rajik choque le Négociant.
« Nous avons fait tant de progrès grâce à lui. Je me sens tellement coupable de l'avoir laissé. J'aurais dû l'aider. déclare le Shirenai de foudre avec une certaine douleur notable dans la voix.
- Pour te faire avoir aussi ? Non, il ne fallait pas que tu y ailles. Mais sa capture n'arrange pas la situation, c'est sûr. » ajoute Tencubo.
Cette dernière déclaration de la part du mercenaire pyromancien est la goutte de trop pour l'observateur. N'en pouvant plus d'apprendre des mauvaises nouvelles l'une après l'autre, il se lève pour venir les aborder, capuche abattue en avant.
« Messieurs, excusez mon indiscrétion quelque peu gênante mais... C'est bien de Kenshiro dont vous parlez ? leur demande-t-il en dévoilant son visage.
- Le Négociant ! s'étonne le Shirenai de feu en sursautant, prenant par surprise par la même occasion ses trois compagnons.
- Oh pardon, j'ai écouté votre discussion et je ne me suis pas présenté. J'ai l'habitude que ça soit l'un de mes associés qui prenne contact avant de me dévoiler. Je m'appelle Shiki.
- Plus connu sous le surnom du Négociant. Un être réputé pour son marché illégal et ses trocs frauduleux ! souligne avec intensité Tencubo.
- Vraiment ?! s'étonne le Zigrik.
- Frauduleux... Voyons, c'est un peu fort comme terme. Mais, oui. Je suis bel et bien le Négociant. Vous parliez d'un Shirenai exilé par le Conseil, n'est-ce pas ?
- En effet, mais qui êtes-vous pour le savoir ? lui demande Yoru.
- C'est mon ami d'enfance. »
Cette révélation scotche les quatre autres.
« Je l'ai connu quand il commençait à apprendre les bases de la maîtrise des énergies. Lui et moi étions camarades de division. Nous avons fait nos armes ensemble en tant que patrouilleurs. Mais, par la suite, nous ne sommes perdus de vue lorsqu'il a postulé pour devenir mercenaire.
- Et vous étiez au courant lorsqu'ils l'ont […]
- Exilé ? Oui. Vous savez, les informations de ce genre me parviennent assez rapidement grâce à mon large réseau commercial. Que s'est-il passé ? Un guerrier de son envergure ne se fait pas attraper facilement. C'est inconcevable ! s'étonne-t-il après avoir interrompu Rai.
- Je les ai stoppé en plein entraînement. J'avais trouvé une affiche de lui recherché par le Conseil publiée peu de temps après la catastrophe qui s'est produite à Safaiatera. lui confirme Tencubo.
- De quoi parlez-vous ? demande Shiki.
- Le Kirioku a été libéré. Il est entre les mains d'un Enijiakku du nom d'Alnor. lui explique Yoru.
- L'artefact de la légende ?! Mais alors, la carte que j'ai vendue l'autre fois était vraie ? Mince !
- Un instant ! Vous avez vendu le moyen de la trouver ?! Mais alors, le véritable responsable de sa libération c'est vous ! » accuse Yoru.
Tous les quatre le fixent du regard. Inquiets d'une possible intervention physique, les associés de Shiki s'approchent de leur patron. Ce dernier lève la main droite pour leur indiquer de ne rien faire pour le moment.
« Calmez-vous. Je ne savais pas que cette carte disait la vérité. N'ayant jamais pris les trucs qu'on nous racontait à Kigen au sérieux, si j'y avais cru, j'aurais pu demander un prix plus fort !
- Et maintenant Alnor est en route pour mettre la main sur le dernier artefact restant sans possesseur. ajoute Tencubo.
- Le dernier ? Il y en a un autre ? lui demande le Négociant.
- Trois au total. Rai a le premier. » indique le Zigrik.
Le Shirenai de foudre le lui montre. A la seconde où il l'aperçoit, ses yeux brillent de mille feux d'émerveillement et de bonheur.
« Quel est ton prix ? s'avance instantanément Shiki.
- Vous êtes fou ! Jamais je ne le vendrai ! lui répond Rai.
- C'est le seul moyen de contrer le Kirioku. Faironne est en danger. » complète Tencubo.
Lorsque le Négociant, en prenant un petit peu de recul, voit à nouveau l'énergie blanche circuler dans le corps du Shirenai amnésique, il en déduit qu'elle provient bien de son collier.
« C'est pour ça qu'il faut savoir où se trouve le troisième. lui confirme Yoru.
- Et puis réfléchissez-bien. Que va devenir votre somptueux marché s'il prend les commandes de notre monde ? »
La remarque du mercenaire de feu fait légèrement sourire Shiki.
« J'ai toujours été hors du système mais c'est vrai quand y repensant... Une telle situation, si elle devait se produire, risquerait de me gêner.
- Et nous devoir sauver Kenshiro !
- Pour ça, ça peut s'arranger. »
Son affirmation surprend les quatre alliés.
« Vous pouvez le libérer ? lui demande Rai.
- Ai-je l'air de mentir ?
- Vous pouvez réellement le sortir de là-bas ? insiste Yoru.
- Mais puisque je vous le dis. En tout cas, pas en mains propres. Un de mes fidèles associés s'en chargera.
- Peu importe les conditions, si ça permet à notre maître d'être à nouveau libre, je dis oui. s'avance Rai.
- Mais... Réputation oblige. Un service demandé au Négociant n'est pas gratuit. »
Ce détail met court à l'espoir qui naissait dans l'esprit de Rai et ses amis.
« Vous vous foutez de nous là ! Vous réclamez un prix même lorsqu'il s'agit de libérer votre propre ami d'enfance ! s'insurge le Zigrik.
- Hé ! J'ai une notoriété à entretenir.
- Je rêve là... ajoute Yoru, la main sur la visage, consterné par l'attitude du Négociant.
- Votre prix ? lance Tencubo.
- Parce que vous comptez le payer quand même ?! C'est une manie chez vous à Kigen de traîter vos proches de cette manière ?! s'étonne l'aquamancien.
- Vous êtes quatre alors je dirais, pour rembourser les frais de déplacement, cinq cents Fairos chacun.
- Cinq cents vous dîtes ? On a que deux cents à nous trois. Y a-t-il possibilité de réduire la facture ? » déclare Yoru après avoir fouillé pendant quelques secondes dans sa besace et ses poches.
Le Négociant fait mine de réfléchir.
« Attendez ! J'ai une proposition à vous faire. Est-ce possible de remplacer les fairos manquants ? s'avance le mercenaire de feu.
- Oui avec des objets de bonne valeur, de préférence ancienne.
- Alors, j'ajoute à la place des deux cents fairos des documents rares que je pourrais vous dégoter dans la salle des archives du Conseil. »
Cette proposition étonne Rai et Yoru. Quand à Rajik, il se contente juste d'écouter sans ne capter quoique ce soit de ce qu'il se passe.
« Qu'est-ce qui te prend ? Tu veux ajouter des accusations supplémentaires sur toi ? lui lance le Shirenai amnésique.
- L'avenir de Faironne en dépend. Nous devons porter secours à Kenshiro. Peu importe le prix. Aucune réclamation ? »
Personne n'ose remettre l'implacable déclaration du pyromancien en question. Passé un petit silence, tous les quatre se tournent vers le Négociant.
« Ça me va. Allons pour deux cents fairos avec quelques documents. confirme ce dernier pour conclure l'échange.
- Parfait. Nous allons pouvoir sauver Kenshiro. Tu es rassuré Rajik ? questionne Rai.
- Oui ! Moi avoir hâte lui être parmi nous à nouveau.
- Tu es bien un Enijiakku toi ? sollicite Shiki envers Yoru.
- Oui pourquoi ?
- Sors ton Obujepawa.
- Si c'est pour le vendre, c'est hors de question !
- Non, non, tu n'as pas à t'inquiéter pour lui. Même si, j'avoue, il y aurait possibilité que nous négocions juste après. Toi et le mercenaire de feu, venez avec moi. Je vais avoir besoin de vous. »
Yoru et Tencubo se lèvent de table. Eux et le Négociant sortent de l'établissement. Le Shirenai de foudre semble tiraillé. Rajik remarque le malaise de son ami.
« Toi pas aller bien ?
- Entre le fait que notre maître se soit sacrifié pour nous, cet homme qui menace notre monde, cette femme entre ses griffes, le fait que je ne maîtrise pas l'Hoshaku et mon passé d'assassin, je suis désorienté. Qu'adviendra-t-il de nous si nous échouons ?
- Toi pas t'en faire pour ça. Moi avoir bonne intuition.
- Comment peux-tu rester aussi détendu avec ce danger qui se profile ?
- Moi avoir connu plein de situations difficiles. Moi avoir frôlé la mort plein de fois et moi m'en être toujours sorti vivant. Moi avoir compris que quand toi avoir situation compliqué, toi avoir toujours moyen de t'en sortir. Juste toi devoir garder espoir et rester fort.
Pour Rai, ça reste facile à dire. Mais, ne souhaitant pas rendre l'ambiance encore plus lourde, il préfère ne pas remettre en cause la psyché de son ami. Après tout, s'ils veulent battre le Kirioku, il faudra être fort à la fois physiquement et mentalement. En même temps, dehors, Shiki, accompagné d'un de ses associés, Tencubo et Yoru sont face à face.
« Ouvre-le. » demande le Négociant au Zigrik.
Yoru obtempère. Shiki fouille dans sa poche et en sort des pierres précieuses. Tencubo reconnaît immédiatement les dernières arcanes qu'Arito a fourni à son acheteur.
« Voilà mon plan. Il est fort probable que le Conseil ait emprisonné Kenshiro dans la cellule de neutralisation énergétique. Celle-ci a la particularité d'avoir une sorte de serrure élémentaire. Si je me souviens bien, il te faudra utiliser l'énergie de l'eau, en espérant qu'ils n'aient pas modifié l'élément d'activation. Malheureusement, mes arcanes contiennent uniquement l'énergie de la terre.
- Laissez-moi deviner, vous voulez que je modifie l'élément enfermé à l'intérieur ?
- Exactement. Vue l'ancienneté de ton livre, tu dois avoir une instruction expliquant comment réaliser des transferts d'énergie, n'est-ce pas ? »
Yoru tourne les pages. Effectivement, dans ce dernier se trouve le phénomène voulu par le Négociant. Il tend une main vers les arcanes. Son aura bleue émane de sa main. Une autre émanation d'énergie verte, provenant des pierres, s'échappe, tombant lourdement au sol. L'aura du Zigrik est projetée sur elles. Les arcanes brillent alors d'un bleu azur. Après un court instant, elle s'estompe.
« Ça devrait faire l'affaire. » affirme-t-il.
L'éclaireur s'approche de son patron qui les lui donne.
« Comment on s'en sert ? demande le Shirenai.
- Mon associé les utilisera pour déverrouiller la cellule où est enfermé Kenshiro. Il t'accompagnera aussi pour veiller à la bonne tenue de notre accord. Quant à toi, Enijiakku, je te remercie de ta contribution. Les fairos, s'il te plaît.
- Non, ne les donne pas, la valeur des documents suffira pour que tu n'aies à payer. Va nourrir nos amis avec. » lui recommande Tencubo.
Confiant des propos tenus par le pyromancien, Yoru rejoint Rai et Rajik dans l'auberge.
« Si tu es si sur de leur valeur, c'est que tu as un service à me demander, n'est-ce pas ?
- Parfaitement. Il me semble que tu as marchandé ces arcanes-là avec un Enijiakku l'autre fois.
- Je confirme. Je faisais des échanges fréquemment avec lui. C'était un fournisseur courtois quoique un peu dur en affaire parfois.
- Serait-il possible que tes éclaireurs retrouvent sa trace ?
- Tout à fait. Afin de veiller sur la bonne foi de mes interlocuteurs, nous procédons à la signature d'un contrat qui émet une trace énergétique particulière. J'en garde toujours une copie. Je peux demander à ce qu'ils la suivent pour le retrouver. Je compte sur la qualité de ce que tu m'apporteras. Elle a intérêt à être à la hauteur de ce que tu prétends.
- Je préfère, en toute honnêteté, que ces documents soient entre vos mains qu'entre celles du Conseil. Je vais aller remplir ma part. Et vous, qu'allez-vous faire ?
- Je vais ailleurs. Je n'aime pas traîner avec mes clients. C'est déplacé. N'oubliez pas votre accompagnateur ! Et, avant toute autre chose, demande exclusive du Négociant, libérez mon ami. lui exige-t-il en tendant la main.
- J'y tacherai. » lui répond-il en la prenant.
Après une belle poignée teintée de promesses, Tencubo s'en va avec l'éclaireur. Rai ressort de l'auberge.
« Il ne vient pas manger avec nous ? s'étonne-t-il.
- Non. Le devoir avant tout je suppose. Dis-moi, tu es bien un Shirenai toi aussi ? Je ne te reconnais pas. C'est bien un katana que tu as, l'arme des assassins.
- Pour être honnête, j'ai perdu la mémoire. Avec l'aide de mes amis, je cherche à rassembler les éléments de mon passé. A première vue, pas très glorieux. Et puis cet artefact sur moi…
- Crois-moi si tu le veux ou non mais je vais te raconter quelques chose. La seule rumeur, que j'ai entendu il y a fort longtemps à son sujet, narre que l'Hoshaku augmenterait de manière significative la maîtrise élémentaire de son porteur. »
Reviennent alors en tête du manieur de foudre toutes les techniques qu'il a utilisé jusque maintenant. Cette affirmation tend à confirmer pourquoi il peut réaliser de telles prouesses. Puis, il se rappelle de la voix lui répétant inlassablement le même mot lorsqu'il se trouve dans des situations très particulières.
« Personne ne veut me croire quand je dis ça mais j'entends quelqu'un qui me parle juste avant que mon énergie soit amplifiée. J'entends tout le temps « Fargresaz ». J'ignore ce que ça signifie.
- Ça veut dire « amplifier ». Ça confirme ce que je viens de dire. Peut-être que c'est celle de son tout premier porteur. Il paraîtrait que cette personne était un Shirenai tout comme toi.
- Ah oui ? Peut-être que… C'est justement parce que nous sommes pareils qu'elle me parle dès que je veux me surpasser. Peut-être que... D'autres personnes ont cherché ce collier aussi mais n'ont pas eu de résultat et que, finalement, elle m'aurait choisi ?
- Choisi non. »
La réponse sans équivoque de la part de Shiki déçoit un peu Rai.
« Il arrive souvent aux gens d'en rajouter et de déformer ce qu'ils entendent. J'ai horreur du concept de destinée, c'est trop facile. Avoir une vie déjà toute tracée ? Trop peu pour moi. Kenshiro et moi avons des points de vue assez similaires. C'est pour ça qu'on s'est vite rapproché. D'autres personnes auraient pu effectivement trouver l'Hoshaku, mais c'est toi qui le porte. S'il a vraiment cette propriété, il faudra le surveiller. Quand à l'énergie noire, d'après ce que j'ai pu glaner dans la salle des archives, dévore les énergies. Elle crée une carence. L'énergie blanche amplifie les énergies. Elle crée un excès. Dans les deux cas, si une seule survit, elle peut fragiliser et briser l'équilibre. Et dans les deux cas, son utilisateur devra être extrêmement vigilent par rapport à son utilisation. Fais-en bon usage, heureux chanceux.
- Merci du conseil. Merci beaucoup. Et vous, qu'allez-vous devenir ?
- Je suis le Négociant, non ? Je n'ai pas à devenir quelqu'un d'autre. Tu sais, je change très souvent d'endroit. Le Conseil ne m'a jamais attrapé et, crois-moi, ce n'est pas demain que ça arrivera. Mon réseau couvre la majorité du continent central. Tu n'as pas à t'en faire pour moi. Va plutôt rejoindre ceux qui auront réellement besoin de toi. »
Ils se regardent droit dans les yeux, Shiki voulant faire comprendre à son interlocuteur qu'il lui fait confiance. Après l'avoir salué d'un hochement de tête, Rai rejoint ses compagnons. Une fois de retour dans l'établissement, il s'assoie à leur table.
« Ça va ? lui demande Yoru.
- Oui, ne t'en fais pas. Profitons plutôt de ce moment ensemble. Nous devons être prêts !
- Toi avoir bien parlé ! Nous manger !
- J'apprécie ce trait d'optimisme chez toi. Tu as parfaitement raison. Nous devons être en pleine forme pour combattre. Je crois en la réussite du mercenaire Tencubo. Si cet Alnor avait déjà mis la main sur le dernier artefact, sans doute que Kigen aurait déjà été ravagé. Or, les conseillers en personne ont tenu à capturer notre maître. Tout tend à dire que rien n'est encore joué.
- Tu as raison. Nous pouvons encore faire quelque chose. »
C'est sur ces mots, remplis d'espoir, de courage et de détermination, qu'ils entament un repas gratuitement offert par le Négociant. En témoigne une note posée sur la table leur disant qu'ils peuvent se remplir l'estomac autant que nécessaire. Rien de mieux ne pouvait arriver pour Rajik, hâte de déguster toutes les spécialités du coin. Malgré l'illégalité de ses actions, Yoru change d'avis sur ce Shiki. Personnage tout aussi particulier que son ami. Tout ce qui se ressemble, s'assemble.