Tetsuo est dans la salle des archives du Conseil des Shirenais. Il est en train de fouiller, visiblement contrarié par le fait qu'il ne trouve pas ce que lui réclame Alnor.
« Bon sang... Où est-ce parchemin ?... »
Il focalise sa recherche ailleurs.
« Pas là-dedans. »
Et encore ailleurs.
« Là non-plus... Bon sang, c'est quoi cette organisation ? Personne ne s'occupe de cet endroit ? Il faudra en témoigner auprès du Conseil. »
Il se dirige vers un autre rayon. Entre temps, Tencubo entre à son tour en douce dans la salle. Il est à la recherche de documents faisant référence aux trois artefacts de la légende. Après s'être un peu promené, il remarque que des parchemins divers sont sortis de manière désordonnée. Intrigué, il en ramasse certains, les lisant brièvement. Finalement, Tetsuo finit par trouver ce qu'il est venu chercher pour Alnor, ne pouvant se retenir de lâcher un sourire. Il le range soigneusement et s'apprête à partir. Du côté de son collègue pyromancien, ce dernier entend soudain quelque chose que vient de faire tomber, maladroitement, Tetsuo.
« Il y a quelqu'un ? » demande le jeune gradé.
Cette interrogation surprend le géomancien, pourtant absolument certain qu'il était bel et bien seul. Reconnaissant la voix du son collègue et comprenant qu'il peut compromettre la tache à laquelle il est assigné., Tetsuo perd un peu sang froid. Tencubo se dirige vers là où le bruit se fit entendre. Le mercenaire expérimenté contourne le pyromancien. Sauf que, malgré sa grande prudence, Tencubo, en ressentant une chaleur se déplacer vers la sortie, le remarque.
« Mercenaire Tetsuo ? » s'étonne-t-il.
Son interlocuteur ne répond pas et s'enfuit. Le jeune gradé, déduisant que la situation se présentant devant lui est beaucoup trop louche, se met à le poursuivre. Plusieurs instants plus tard, ils sortent tous les deux d'un creux présent sur la muraille entourant Kigen, bien caché par de la végétation à base de lierre. Ils pénètrent dans une forêt voisine. Toujours en train de lui courir après, constatant que Tetsuo commence à lui échapper, Tencubo dégaine son arme.
« Gibaréfaï ! »
Une vague de feu est propulsée en direction du fuyard. Ce dernier la remarque à temps pour l'esquiver, s'inquiétant sur le risque que sa précieuse marchandise soit atteinte par l'attaque de Tencubo. Le géomancien vérifie son état, heureusement pour lui intact.
« Qu'avez-vous dans les mains ? » lui demande le jeune gradé.
Son collègue ne répond pas, regagnant son calme habituel.
« Donnez-moi ça. Ceci est la propriété du Conseil. Vous serez condamné s'ils se rendent compte que tu l'as subtilisé sans leur accord.
- Mercenaire Tencubo, ceci ne te concerne pas.
- Qu'est-ce que vous comptez en faire ? »
Un silence.
« Cher collègue, ceci fait partie de ma mission. Je n'ai nullement droit de te révéler quoique ce soit.
- Vraiment ? Alors pourquoi me fuyez-vous avec autant d'efforts ? Si vous êtes effectivement en mission, vous auriez pu me le dire dans la salle des archives. Excusez-moi, mais, ce comportement de votre part est beaucoup trop étrange.
- Je comprends pourquoi tu as intégré nos rangs. La recommandation venant de ton continent n'est pas usurpée. Tout ce que tu dis est parfaitement logique. Cependant, et je te le répète, ce que je viens de te dire est vrai. Je suis en mission. D'ailleurs, quelle est la tienne ?
- Protéger Faironne. » répond Tencubo à la seconde, avec vigueur.
Cette réplique fait légèrement sourire son interlocuteur.
« Évidemment. Je ne parlais pas de ça.
- Je vous le répète à mon tour. Ma mission actuelle est de protéger notre monde. Le Kirioku est libéré. Nous devons agir. Quitte à ce que je subisses l'exil même si mes actes ne plaisent pas au Conseil. Les nôtres seront en sécurité.
- Tu me rappelles quelqu'un. Ton sentiment est noble. Mais il faut que tu intègres rapidement quelque chose, tu ne peux comprendre la portée de mon action. Surtout que je sais enfin tout de ton Shirenai mystère. »
L'affirmation du mercenaire expérimenté subjugue Tencubo.
« J'ai tout ce qu'il me faut pour que le Conseil t'inculpe alors que toi tu n'as rien contre moi. Alors, ceci sera la seule fois où je te le demanderai poliment, ne viens pas m'entraver dans ma mission. Si tu persistes, tu me verras dans l'obligation de te considérer en tant qu'opposant au Conseil. »
Déduisant que Tetsuo vient de mentionner Kenshiro, le jeune gradé commence à comprendre ce dernier. La passivité du Conseil vis-à-vis du Kirioku en activité le pousse à activer son aura, teintée d'un rouge orangé.
« Gibaréfaï ! »
Il projette une seconde vague de feu.
« Oder Taï ! »
Un mur de terre apparaît vient bloquer la vague. Tencubo place son épée en arrière, y condense plus d'énergie et la relâche d'un seul coup pour se propulser au-delà du mur. Son adversaire dégaine son arme. Après des échanges intenses entre leurs deux lames, ils reculent.
« Tu n'es pas l'un des nôtres pour rien. Tu as bien été entraîné. Rien à dire. » approuve Tetsuo.
Tencubo, n'ayant que faire des compliments de son opposant, reste concentré.
« Mais, malgré ça, tu es loin de me dépasser. »
Cependant, cette provocation le pousse à amplifier son émanation d'énergie. Sa lame s'enflamme intensément.
« Laisse-moi te donner un aperçu de la force d'un Shirenai expérimenté. » lance Tetsuo, d'un ton calme.
La terre se met à trembler autour d'eux. Tencubo l'assaille de toutes ses forces mais se voit paré. Les coups s'enchaînent et s'arrêtent lame contre lame.
« Tu crois vraiment que tu peux me battre ? poursuit le géomancien.
- Si je suis obligé d'en arriver là pour vous faire changer d'avis, j'en serai capable !
- Idewer. »
Un rocher apparaît derrière Tencubo. Son adversaire se retire. Le jeune mercenaire se retourne. Peu surpris, il tranche le rocher en deux. Le Shirenai expérimenté en profite pour lui assener un coup dans le dos. Cependant, le nouveau gradé le remarque à temps et s'écarte, profitant d'une ouverture pour attraper le parchemin.
« Amépan ! »
La pesanteur invoquée affecte lourdement le pyromancien, le planquant face contre terre.
« Il y a des choses qui te dépassent en ce monde. J'ignore quelle éducation tu as reçue dans ton pays. Ce qui est sur, c'est qu'elle est loin de la réalité. Un jour, les émotions qui t'animent te coûteront la vie. Il n'y a qu'en ça que tu incarnes bien ton élément.
- Je... Viens de comprendre... Tu sers les intérêts de cet Alnor, n'est-ce pas ? » lui demande Tencubo.
Tetsuo récupère le parchemin.
« Tu manques de discernement. J'aurais aimé continuer la conversation mais... J'ai d'autres priorités. Tu m'en vois le premier désolé.
- Tu crois vraiment qu'il va te laisser repartir ?... Te laisser l'opportunité de prévenir le Conseil ?
- Le Conseil sait ce que je fais. »
Cette révélation choque le Shirenai plaqué au sol.
« Alors... La passivité du Conseil... Est explicable ?
- Parfaitement. » affirme implacablement le mercenaire expérimenté.
Le sol sous le Shirenai de feu commence à s'assécher au fur et à mesure que son camarade de terre amplifie son aura.
« Tu n'es qu'un mercenaire fraîchement titré. Tu n'as pas le niveau. Laisse-moi faire mon travail correctement. »
Des lignes vertes apparaissent sur les bras du géomancien, intriguant fortement son adversaire.
« Umzer Isilaber »
Son corps se transforme en sable et retombe au sol. Tencubo ne ressent plus la chaleur distinctive de son collègue. Il reste ainsi pendant quelques secondes avant de comprendre que Tetsuo est parti.
« Comment arrive-t-il à faire ça sans utiliser son arme ? » se demande le jeune gradé, toujours sous le choc de la puissance qu'a dégagé son adversaire.
La pesanteur imposée sur le jeune mercenaire disparaît, lui permettant de se relever. Son regard dévoile un doute profond. Entre temps, du côté du groupe d'Alnor, Endalia semble mourir d'ennui. Arito joue avec son Obujepawa. Le voyageur dimensionnel est encore à l'écart.
« Une partie de cartes, ça te tente ? propose-t-il à l'invocatrice.
- Euh non merci. Aucune envie que tu me carbonises avec l'une d'entre elles. D'ailleurs comment as-tu fait pour que certaines puissent utiliser des éléments différents ?
- Bien content que tu me poses la question. J'ai mis au point un sceau de transfert énergétique. Je l'ai utilisé sur quelques-unes de mes cartes. Grâce à lui, j'ai pu voler quelques attaques des Shirenais.
- Ah bon ? Pas mal. Drôle d'Obujepawa aussi. Je ne le connais pas. Tu l'as eu où ?
- Je l'ai créé. »
Cette aveu étonne fortement la géomancienne. Arito se tourne vers Fraya.
« Et vous ? lui demande-t-il.
- Quoi ? répond-elle.
- Une petite partie de cartes ? »
La surprenante propose de l'ennemi de Yoru rend perplexe le Kirioku.
« Pour passer le temps. complète-t-il.
- Jouer avec les éléments comme s'ils étaient de vulgaires jouets et rien d'autre, c'est vraiment ridicule et honteux vis-à-vis de ton peuple. répond-elle d'un ton condescendant.
- J'ai vraiment l'impression d'entendre cet enfoiré de vieux lorsqu'il a voulu m'enseigner la maîtrise des éléments. se remémore Arito.
- Pourtant, c'est lui qui t'a tout appris. lui fait remarquer Endalia.
- Oh tais-toi. Ce fossile m'interdisait d'explorer de nouvelles possibilités. C'était juste un profond crétin.
- Voilà le sens de notre existence. Explorer. affirme Fraya.
- Notre ? s'étonne Arito.
- Qu'est-ce que tu veux dire par là ? » demande l'invocatrice.
Le Kirioku ne donne aucune réponse, préférant fermer les yeux.
« Tu serais en réalité... un ancien Enijiakku ? » suggère Arito.
Son interlocuteur reste muet, surtout à cause du qualificatif qu'il vient d'utiliser.
« On t'aurait enfermé dans ce bijou piteux il y a deux cents ans. Qui t'a fait ça ? poursuit le tireur de cartes.
- Mais alors, si tu es des nôtres, je préfère te suivre plutôt que ce type portant le bracelet d'Orzlon ! » affirme Endalia.
Fraya persiste dans son mutisme, détendue. Alnor ressent soudainement une chaleur s'approcher de leur position.
« Tue ce type tout de suite et libère-nous ! Si tu fais ça, mes invocations seront à tes services ! »
Le créateur de faille rejoint ses asservis. Endalia le regarde, motivée en partie par de la colère.
« Préparez-vous. Ma commande arrive. » leur confirme-t-il.
Il croise les yeux de l'invocatrice.
« Qu'y a-t-il ? » demande-t-il.
Après s'être rappelée du sceau qu'il a implanté en elle, malgré la révélation de la vraisemblable origine de l'entité du Kirioku, sa colère s'évapore, ne sachant pas quoi faire. Tetsuo arrive non loin du groupe, en toute discrétion. Il sort le parchemin possédant le sceau qui lui avait permis auparavant d'ouvrir une communication avec le Conseil.
« Ici mercenaire Tetsuo. Vous me recevez ?
- Affirmatif. Une avancée dans l'opération ? répond Aritsune.
- Affirmatif. J'ai récupéré le document demandé. Cependant, le mercenaire Tencubo a voulu couper court à l'opération et a failli détruire le colis.
- Quoi ? Décidément, celui-là aime fourrer son nez là où il ne le faut pas ! s'insurge Daigaku.
- Poursuivez l'opération. ordonne Aritsune.
- Compris. Je pars le lui donner tout de suite. Prise de contact avec les cibles et remise de l'appât en cours. Terminé. » conclut le Shirenai.
Il range son moyen de communication et part rejoindre la bande d'Alnor. Ressentant son approche, l'Enijiakku au bracelet et les autres se tournent vers lui.
« Son énergie a diminué. remarque Fraya.
- Ah oui ? s'étonne Endalia.
- Il a dû se battre récemment pour arriver dans cet état. en déduit Arito.
- As-tu ce que je t'ai réclamé ? » demande Alnor.
Tetsuo lui révèle le parchemin en le déroulant. Sur celui-ci, un collier enfermé dans un cercle blanc est séparé d'une bague enfermée dans un cercle noir par un trident. Des symboles ça et là complètent le tout. Arito et Endalia sont subjugués devant ce qu'ils découvrent. Fraya, quand à elle, laisse un dégoût mêlé à de la haine découler de ses yeux.
« C'est bien ça ? » répond le Shirenai.
Il le donne au voyageur dimensionnel. Ce dernier le lit. Après un bref instant, il se met à rire.
« Parfait ! J'ai entre mes mains toutes les informations nécessaires pour mettre la main sur le troisième artefact ! » s'émerveille-t-il.
Le mercenaire reste impassible devant la joie déployée par sa cible.
« Sauf que, évidemment, elles ne sont pas précises. Ceux qui étaient derrière le confinement de l'énergie noire avaient tout de même prévu une sécurité. »
L'entité du Kirioku, à l'évocation de ce qu'il subit, tourne le dos. Alnor replie le parchemin et le range.
« Rassurez-vous. Ceci n'est qu'une question de temps. Dis-moi, Shirenai, aucun autre document évoquant cette légende ?
- Je jure sur l'honneur que seul ceci en fait référence. Si vous ne me croyez pas, tuez moi immédiatement. »
Sa réponse étonne Arito et Endalia. L'Enijiakku au bracelet essaye de décrypter ce que pense le Shirenai.
« Dois-je en déduire que monsieur est totalement satisfait de mes services ?... Bien. Permettez-moi de [...] »
Tetsuo n'a pas le temps de terminer sa demande qu'Alnor active le sceau en présent en lui, l'emprisonnant dans une paralysie similaire à celle que peut subir Fraya.
« Hors de question que tu t'échappes ! lui hurle-t-il.
- Mais, je... Je ne comprends pas. Je vous ai fourni ce que vous vouliez ! se plaint le mercenaire.
- Tu es un Shirenai. Tu serais tout à fait capable de déployer ton élément pour donner ma position. Il est donc largement logique que ça m'oblige à te garder sous la main. Et, surtout, d'après ce que j'ai pu découvrir en première lecture, tu me seras encore utile pour casser cette foutue barrière élémentaire gardant le troisième artefact. »
Les deux autres Enijiakkus composant le groupe qu'il s'est crée sont surpris par la déclaration d'Alnor.
« Neutralise-moi ton collègue de feu. Pas la peine de le tuer. Par contre, en ce qui concerne ses complices, arrange-toi de me débarrasser du Shirenai de foudre.
- Hé ! J'ai ma revanche à prendre contre lui ! Il est à moi ! » s'insurge Endalia.
Il réactive le sceau présent dans le corps de l'invocatrice, lui faisant subir des vertiges.
« Et moi je dois détruire ce nul de Yoru ! » poursuit Arito.
Alnor réalise la même opération sur le tireur de cartes.
« Vous tous ! C'est la dernière fois que je le répète alors gravez bien ça dans vos crânes ! Je suis le maître ici ! Vous n'avez strictement rien à faire à part m'obéir ! Et si l'un d'entre vous ose la ramener, je l'efface de la surface de Faironne ! Compris ? » leur menace-t-il.
Un silence.
« Shirenai, tu peux partir. Pas de coup fourré. Compris ? »
Tetsuo obéit. Lorsqu'il est absolument certain que personne ne puisse voir son visage, il laisse s'échapper un léger sourire. L'énergie noire le regarde partir, air méfiant.
« Cet interlude fini, nous pouvons passer à la phase suivante. Trouver le troisième artefact. déclare Alnor.
- Que comptes-tu faire une fois que tu l'auras entre tes mains ? lui demande Fraya.
- Ça t'intéresse ? » s'étonne-t-il.
Ils se regardent.
« Quelle curieuse question. Pour te donner une réponse, je ne sais pas encore. Je verrais bien sur place. Quittons les lieux maintenant. » acquiesce-t-il d'un air nonchalant.
Il part en premier. Les autres le suivent en retrait. L'invocatrice reste extrêmement frustrée par l'ordre qu'Alnor a donné envers Tetsuo en ce qui concerne Rai. Elle traduit ce sentiment en baissant la tête, dents serrées. Pareil pour Arito. Il garde en permanence une main sur son Obujepawa, comme s'il voulait dégainer en permanence, le regard rivé sur Alnor. L'entité du Kirioku ne cesse de penser au troisième artefact. Elle semble même le craindre. Après avoir mûrement réfléchi sur le pourquoi Alnor tient absolument à l'obtenir, elle s'arrête brusquement.
« Je n'irai pas plus loin ! » exige-t-elle d'une forte voix.
Les trois autres cessent de marcher à leur tour, les deux Enijiakku en aucun cas sereins envers l'exigence de Fraya. Alnor reste impassible.
« Vous voulez faire quoi avec cet artefact ? J'exige de le savoir !
- Pourquoi ? Tu en as peur ? Kirioku ? répond le créateur de failles, ponctué d'un air narquois.
- Je ne vous suffis pas, c'est ça ?!
- Qu'est-ce que tu nous fais là ? Une crise de panique ? » poursuit Alnor, toujours avec le même air, encore plus marqué cette fois.
Sa provocation la désarçonne.
« Si tu veux savoir pourquoi je le veux aussi, donne-moi ton nom. Ton vrai nom. » exige-t-il.
Un silence. Arito et Endalia sont focalisés sur elle, impatients d'enfin connaître l'identité complète de ce qui habite le corps de Fraya.
« Toujours déterminée à entretenir le mystère ? Bien bien. Je continuerai aussi.
- Rien à voir avec ça mais, qu'allons-nous devenir une fois que vous aurez tout entre vos mains ? demande à son tour l'invocatrice.
- Je vous ai promis de vous libérer au bout d'un an. Cependant, si Kigen tombe, il est possible que je vous garde au chaud des rôles disons particuliers.
- Ah oui ? Lesquels ? » questionne Arito.
Alnor ne répond pas.
« Vous entretenez aussi ce mystère ? Bien, dans ce cas, il y a quelque chose que j'aimerais soulever. »
Le tireur de cartes regarde Fraya.
« Le sceau que vous avez installé dans le corps de cette femme n'est pas ordinaire. Sa disposition énergétique est complètement différente de celles utilisées sur des sceaux classiques. Même Kigzir n'a jamais dévoilé un tel sceau. »
Cette remarque ne déstabilise pas Alnor.
« Une telle connaissance est quasiment impossible à acquérir. Je peux en témoigner avec mes nombreux échecs à en créer. Vous cachez quelque chose, c'est une certitude.
- Je vois… C'est une mutinerie que vous me faîtes ? leur demande Alnor.
- Non, c'est une réclamation. répond Arito.
- De toute façon, avec vos mystères à la con à droite à gauche, qu'est-ce que vous en avez à foutre de nous ? Absolument rien. Alors, il vaut mieux qu'on le sache. Surtout si vous avez vraiment prévu de nous jeter ! » complète Endalia.
Il ne répond pas.
« Si vous ne dîtes rien, dans ce cas, je vais vous dire ce que vous êtes réellement. » déclare Fraya.
Ceci captive l'attention des deux suiveurs mais pas Alnor.
« Tu bluffes. » déclare ce dernier.
Il fait sourire Fraya.
« Absolument pas. affirme-t-elle.
- Dis-nous. demande Arito.
- Arito, Endalia, vous n'êtes pas des Enijiakku. Qui vous appelle comme ça ? Les Shirenais ?
- Oui. confirme Endalia.
- Vous faîtes partie du second peuple sachant utiliser les éléments, les Zigriks. »
Un petit silence.
« Jamais entendu parler. avoue l'invocatrice.
- Vous êtes capables d'utiliser les sceaux, contrairement aux Shirenais. Donc, notre cher chef Alnor qui se tient devant vous en est aussi un. C'est même étonnant de sa part qu'il ne vous a pas dit la vérité à ce sujet, n'est-ce pas ? » poursuit l'entité du Kirioku, en lui retournant l'intonation narquoise qu'il avait utilisé contre elle.
- C'est bon ? C'est tout ce que tu as à avouer pour le moment ? » répond-il.
Elle ne répond pas.
« Les Zigriks vaincront les Shirenais pour de bon. Grâce à moi et personne d'autre. Suivez-moi ! » affirme-t-il avec virulence.
Il reprend la marche.
« Nous sommes des Zigriks ? Le nom que papa utilisait pour qualifier mes ancêtres ? J'ai toujours cru que c'était des conneries. » avoue Endalia.
C'est au tour de Fraya de suivre Alnor, toute souriante, satisfaite du basculement émotionnel qu'elle a provoqué chez lui. Les deux autres Zigriks finissent par reprendre la marche aussi.
« Arito, tu connaîtrais par hasard des Zigriks célèbres ?
- Non, pourquoi tu me demandes ça ?
- Parce que, d'après ce qu'on sait sur le Kirioku, c'est quasiment sûr que c'est un ancien Zigrik qui a été enfermé dedans. Alors, si par hasard, tu en connaîtrais un, il serait possible que ça soit cette personne qui possède le corps de cette femme.
- Ton raisonnement se tient. Mais, à part ce connard de Kigzir, j'en connais pas des masses. Tu sais, nous sommes si peu nombreux à cause de ces chiens de Shirenais.
- Tu as raison. Ils ont sans doute effacé toute trace de nos ancêtres. Raison de plus de les écraser. Je me demande aussi comment ce vieux Zigrik a fait pour concevoir une énergie aussi dingue que la noire. Elle n'a rien en commun avec les éléments. C'est trop bizarre. T'imagine si on pouvait faire pareil ? J'écraserai Yukito sans problème !
- Tu es bien bavarde aujourd'hui dis donc !
- Quoi ? Ça te gêne ? répond-elle, vexée.
- Non, non. Je n'ai pas l'habitude. Et pour répondre à ta dernière question, avec toutes les expériences que j'ai réalisé, j'aurais sans doute trouver le moyen de la concevoir. Donc, il ne l'a pas obtenu comme ça. »
Ils regardent Fraya de dos.
« Si seulement je l'avais obtenu, Yoru n'existerait plus. Même plus besoin de ce grimoire. poursuit-il, poings serrés.
- Si elle le tue, je la suis, c'est sur. Et toi ?
- Peut-être... »
Du côté d'Alnor, il se triture l'esprit à savoir quelle identité se cache derrière le Kirioku, irrité après les multiples piques qu'elle lui a lancées. Se souvenant de sa brève carrière au sein de Kigen, l'image de la statue brisée aperçue auparavant par Rai et Rajik commence à l'intriguer. Il a beau essayer de se rappeler ce qu'il a découvert dans les archives, aucun nom spécifique ne lui vient. Comme aucune autre piste ne se dessine, il reste concentré sur le mystère de la statue détruite. Pour le moment, il s'imagine Kigen en feu, troisième artefact dans les mains, Fraya déchaînant l'énergie noire sur les Shirenais restants, Arito et Endalia derrière lui, sous l'entrave des sceaux qu'il a implanté en eux. Lui revient alors à l'esprit la voix de son défunt père.
« Fiston, j'espère qu'un jour, si nos ancêtres peuvent nous voir actuellement, nous réussirons à récupérer la place qui nous revient.
- Papa, je dois vraiment y aller ?
- Comprends que je n'ai pas le choix que t'envoyer à Kigen. Si je ne le fais pas, ils te tueront aussi. »
Il regarde son bracelet, légèrement ému par la réminiscence de son passé.
« J'y arriverai. » dit-il à voix basse.