Au milieu de la nuit, Ale fut brusquement réveillé par des hurlements de terreur et le fracas du métal s'entrechoquant. Ouvrant les yeux, il aperçut des lueurs vacillantes et des ombres mouvantes non loin de là.
Les aventuriers engagés plus tôt par les marchands pour assurer leur protection étaient en train d'attaquer les autres voyageurs. Leurs visages étaient déformés par une expression malveillante, et leurs mouvements trahissaient une agressivité anormale. Les marchands et les réfugiés, pris de panique, tentaient de fuir ou de se défendre avec les moyens du bord
Solia, Bam et Tim se réveillèrent en sursaut.
« Qu'est-ce qui se passe ? » s'écria Solia en saisissant son épée.
« On dirait que les aventuriers ont perdu la tête ! » répondit Tim, les yeux écarquillés.
« Ils attaquent tout le monde ! » ajouta Bam, la voix tremblante.
Les gardes postés sur les remparts observaient la scène, mais malgré les supplications des marchands et des réfugiés, ils refusèrent d'intervenir.
« Aidez-nous ! Ils vont nous tuer ! » implora un marchand.
Le capitaine de la garde, impassible, déclara : « Nous ne pouvons pas ouvrir les
portes ni intervenir. Ordres du vicomte Alaric de Montclair. Il pourrait s'agir d'une ruse pour infiltrer la ville. »
Ale comprit qu'ils devraient affronter cette menace par eux-mêmes. Il observa les assaillants. Bien qu'il ne puisse déterminer leur classe exacte, il sentait qu'ils étaient plus forts et expérimentés que la moyenne. Leur aura était intimidante, et leur maîtrise du combat était évidente.
« Nous devons les arrêter avant qu'ils ne fassent plus de victimes, » déclara Ale avec détermination.
« Mais ils sont trop forts pour nous ! » protesta Tim. « Que pouvons-nous faire ? »
Solia serra les poings. « Nous ne pouvons pas rester là sans rien faire. Ale, as-tu un plan ? »
Ale hocha la tête. « Nous allons les affronter ensemble. Si nous combinons nos
forces, nous avons une chance. »
Bam prit une profonde inspiration. « Très bien, je suis avec vous. »
Les aventuriers rebelles s'approchaient, leurs regards fixés sur le groupe.
« Regardez qui voilà ! Des novices qui pensent pouvoir nous arrêter ! » ricana l'un d'eux.
Ale murmura à ses compagnons : « Tim, couvre-nous avec ton arc. Bam, utilise ta force pour les déstabiliser. Solia, reste à mes côtés, nous allons les affronter de front. »
« Compris ! » répondirent-ils à l'unisson.
Le combat s'engagea. Tim recula légèrement, trouvant une position surélevée pour tirer. Il banda son arc et décocha une flèche qui vint frapper l'épaule d'un des assaillants, le faisant vaciller.
« Bien visé ! » s'exclama Bam avant de charger avec son marteau de guerre. Il frappa le sol avec force, créant une onde de choc qui déséquilibra deux des aventuriers rebelles.
Solia profita de l'ouverture pour attaquer l'un d'eux, leurs épées s'entrechoquant dans une série d'estocades rapides. « Tu ne passeras pas ! » lança-t-elle avec détermination.
Ale, quant à lui, concentra son énergie magique. Voyant que les assaillants étaient dispersés, il décida d'utiliser ses sorts pour les neutraliser.
« Ignicercle ! » murmura-t-il en pointant sa main vers un des aventuriers rebelles. Un cercle de feu jaillit du sol, entourant l'ennemi et l'emprisonnant dans une barrière de flammes tourbillonnantes.
« Qu'est-ce que... ? » s'écria l'homme, incapable de franchir le mur de feu sans se brûler.
Un autre assaillant se précipitait vers Tim, déterminé à le neutraliser. Tim, surpris, eut juste le temps de parer avec son arc, mais l'adversaire était trop fort.
« Bam ! » cria Tim.
Bam intervint, interceptant l'assaillant avec un coup de marteau puissant. « Ne touche pas à mon ami ! » rugit-il.
Pendant ce temps, Ale repéra un autre aventurier rebelle qui s'approchait dangereusement de Solia. Il incanta rapidement : « Pétraliane ! »
Des lianes de pierre surgirent du sol, s'enroulant autour des jambes de l'assaillant et le figeant sur place. « Impossible ! » hurla-t-il en tentant de se libérer.
Solia, voyant l'opportunité, désarma l'ennemi avec une habile parade. « C'est terminé pour toi. »
Un des aventuriers, réalisant qu'ils étaient piégés, cria avec frustration : « Pourquoi t'opposes-tu à nous ? Ces marchands transportent des richesses incroyables ! Ils ne méritent pas ces trésors ! »
Ale le regarda droit dans les yeux. « Cela ne justifie pas la violence et le vol. Vous avez prêté serment de les protéger. »
L'aventurier baissa la tête, honteux. « Je... Je ne sais pas ce qui m'a pris. En voyant toutes ces marchandises de luxe ... une envie irrésistible de m'en emparer m'a submergé. J'ai perdu la raison. »
Les autres aventuriers semblaient également reprendre leurs esprits, réalisant la gravité de leurs actes.
Les marchands et les réfugiés, voyant que les assaillants étaient neutralisés,
exprimèrent leur soulagement.
Les premières lueurs de l'aube commençaient à poindre à l'horizon. Le combat était terminé. Les marchands et les réfugiés, soulagés, remercièrent chaleureusement Ale et ses compagnons.
Les gardes, témoins de la bravoure du groupe, décidèrent finalement d'ouvrir les portes. Le capitaine s'approcha.
« Vous avez fait preuve d'un grand courage. Au nom de la ville d'Eldoria, je vous remercie. »
Ale inclina légèrement la tête. « Nous avons simplement fait ce qui était juste. »
« Nous allons prendre en charge ces aventuriers rebelles, » déclara le capitaine.
« Ils répondront de leurs actes devant la justice. »
« Merci, jeune homme ! Vous nous avez sauvés ! » Le marchand qu'ils avaient sauvé s'approcha d'eux. C'était un homme élégant, vêtu de vêtements raffinés, typiques du quartier des riches.
« Je ne sais comment vous remercier, » dit-il avec un sourire chaleureux. « Je m'appelle Edwin Luxor, marchand de tissus de luxe. Vous avez sauvé ma vie et mes précieuses marchandises. Permettez-moi de vous inviter dans ma boutique, située dans le quartier Saint-Velarys. Je vous offrirai une réduction exceptionnelle de 80% sur des vêtements d'une valeur de 100 pièces d'argent du Lunaris. »
Solia, entendant cela, s'exclama : « C'est très généreux de votre part, monsieur Luxor ! Nous passerons vous voir. »
La monnaie de l'Empire, le Lunaris, était divisée en trois unités principales : 100 pièces de bronze équivalaient à 1 pièce d'argent, et 100 pièces d'argent équivalaient à 1 pièce d'or.
La médiane des revenus par famille était d'environ 20 pièces d'argent et 50 pièces de bronze par mois. Son grand-père, en vendant leurs herbes médicinales, gagnait en moyenne 25 pièces d'argent par mois, ce qui leur permettait de vivre modestement.
Comparant cela au prix des vêtements de luxe, Ale sentit un écart énorme entre les classes sociales. Il réalisa que même avec la générosité du marchand, il ne pourrait se permettre de telles dépenses.
Au petit matin, après une nuit mouvementée, Ale et ses compagnons franchirent enfin les portes majestueuses de la ville d'Eldoria. La cité s'étendait devant eux, baignée par les premières lueurs du soleil. Les bâtiments en pierre blanche reflétaient la lumière matinale, créant une atmosphère à la fois sereine et vibrante.
Eldoria était une ville aux multiples facettes. Au nord-est, le quartier de Saint-Velarys abritait les riches marchands, les nobles et l'élite de la société. Les rues y étaient bordées de manoirs élégants, ornés de jardins florissants et de fontaines artistiques. Des carrosses luxueux circulaient, transportant des dames et des messieurs vêtus de tenues somptueuses.
Au nord-ouest, le contraste était saisissant avec le quartier des bidonvilles. Des habitations de fortune s'entassaient les unes sur les autres, formant un labyrinthe de ruelles étroites. Malgré la pauvreté apparente, une énergie débordante émanait de ce lieu. Les rires des enfants résonnaient, et les odeurs alléchantes des échoppes de rue flottaient dans l'air.
Le centre de la ville était occupé par les quartiers populaires, où se mêlaient artisans, commerçants et aventuriers. Les marchés étaient animés, les étals regorgeant de produits venus des quatre coins de l'empire. Les conversations, les cris des marchands vantant leurs marchandises, et le bruit des outils des artisans créaient une symphonie urbaine unique.
Non loin de là se trouvait le quartier religieux en sud-est. De majestueuses cathédrales et des temples s'élevaient vers le ciel, leurs clochers dominants l'horizon. Les fidèles affluaient pour assister aux cérémonies, et les chants sacrés résonnaient dans les rues adjacentes.
Au cœur de la cité, la place principale s'étendait, ornée d'un imposant beffroi. Cette tour, symbole de la ville, abritait une horloge dont les carillons rythmaient la vie des habitants. La place était un lieu de rassemblement, où se tenaient fêtes, marchés et annonces importantes.
Dominant Eldoria, au nord-centre et perché sur une colline, se trouvait le château du vicomte Alaric de Montclair. Cette forteresse imposante surveillait la ville et ses environs, rappelant la puissance et l'autorité du seigneur local.
Ale, émerveillé par la diversité et la grandeur de la ville, se tourna vers ses compagnons. « Eldoria est encore plus impressionnante que dans mes souvenirs. »
Bam, dont l'estomac gargouillait bruyamment, s'exclama : « J'ai tellement faim ! Que diriez-vous d'aller dans une taverne pour prendre un bon petit déjeuner et célébrer notre victoire de cette nuit ? »
Tim sourit. « Excellente idée. Après tout ce que nous avons vécu, nous l'avons bien mérité. »
Solia acquiesça. « Je connais un endroit pas trop cher dans le quartier des artisans. Allons-y. »
Ale accepta l'invitation avec plaisir. « Je vous suis. Ce sera l'occasion de mieux faire connaissance. »
Ils se dirigèrent vers une taverne nommée "Le Griffon Doré", un établissement chaleureux aux murs décorés de tapisseries colorées. Une douce odeur de pain frais et de ragoût embaumait l'air.
Installés à une table près de la fenêtre, ils commandèrent un copieux petit déjeuner : pain chaud, fromage, charcuterie et une boisson chaude épicée.
Bam entama la conversation entre deux bouchées. « Dis-moi, Ale, j'ai été impressionné par tes sorts hier soir. Tu maîtrises la magie du feu et de la terre avec une aisance incroyable. Où as-tu appris tout ça ? »
Tim ajouta : « Oui, c'est vrai. Dans l'Empire de Valoria, on n'enseigne que les sorts de feu. Les autres magies sont interdites ou réservées à l'élite. »
Ale prit un moment pour réfléchir. Il savait qu'il ne pouvait pas révéler la vérité sur Nyxion, l'esprit des Ténèbres. Personne ne le croirait, et cela pourrait attirer des ennuis. Il sourit légèrement. « J'ai grandi près de la frontière. Mon grand-père m'emmenait souvent dans différentes contrées pour vendre des herbes médicinales. J'ai eu l'occasion d'apprendre des sorts variés lors de nos voyages. »
Solia le regarda avec admiration.
« C'est fascinant. Tu as dû voir tellement de choses. J'aimerais pouvoir en dire autant. »
Bam tapa joyeusement sur la table. « C'est génial ! Tu pourrais nous apprendre quelques sorts ? »
Ale esquiva poliment. « Peut-être un jour. Mais pour l'instant, parlons de vous. Comment êtes-vous devenus aventuriers ? »
Bam, toujours enthousiaste, commença. « Je viens d'un village non loin d'ici. Mon père est boucher. Depuis tout petit, j'ai une force surhumaine. » Il montra ses bras musclés. « J'ai décidé de devenir aventurier pour utiliser cette force à bon escient. Je suis ce qu'on appelle un tank, un guerrier spécialisé dans la défense. »
Tim prit le relais. « Je suis le voisin de Bam. J'ai toujours eu une bonne vue, et j'aimais tirer à l'arc. Bam m'a encouragé à devenir archer pour aider notre village. Nous avons rejoint la guilde ensemble. »
Solia baissa légèrement les yeux avant de parler. « Mon histoire est un peu différente. Je suis née dans une famille riche du quartier de Saint-Velarys ici à Eldoria. J'ai découvert que j'avais un don pour la magie et une réserve de mana assez importante. J'ai commencé à étudier au temple du quartier religieux, où j'ai appris les bases de la magie et du combat rapproché. »
Elle marqua une pause, ses yeux reflétant une certaine tristesse. « Mon père était un riche marchand, mais il a tout perdu lorsque son bateau a sombré en mer. Sans ressources, j'ai dû quitter l'école. Peu de temps après, mon père... s'est suicidé, laissant ma famille dans la pauvreté. Pour subvenir à nos besoins, je suis devenue aventurière. »
Ale ressentit une profonde empathie pour elle. « Je suis désolé pour ta perte, Solia. Tu fais preuve d'un grand courage en aidant ta famille ainsi. »
Elle lui sourit faiblement. « Merci. Je fais de mon mieux. »
Après un moment de silence respectueux, Bam tenta de raviver l'ambiance. « Eh bien, ensemble, nous formons une bonne équipe, non ? »
Tim acquiesça. « C'est vrai. Et avec toi, Ale, nous serions encore plus forts. »
Solia posa son regard sur Ale. « Nous allions justement au guilde des aventuriers pour rendre compte de notre mission. Tu devrais nous rejoindre. Tu es le plus puissant aventurier que nous ayons rencontré. Nous pourrions accomplir de grandes choses ensemble. »
Ale réfléchit. L'idée de rejoindre la guilde était intéressante, cependant, il avait d'abord l'intention de visiter le marché principal.
« Je vous remercie pour votre proposition, » répondit-il avec sincérité. « Je dois d'abord me rendre au marché pour chercher des informations sur mon grand-père. Mais je serais ravi de vous rejoindre plus tard. »
Bam hocha la tête avec enthousiasme. « Parfait ! Nous t'attendrons au guilde. N'hésite pas à nous y rejoindre quand tu seras prêt. »
Tim ajouta : « Si tu as besoin d'aide dans tes recherches, n'hésite pas à nous le faire savoir. »
« Je n'y manquerai pas, » assura Ale.
Après avoir terminé leur repas, ils réglèrent l'addition. Solia, remarquant qu'Ale fouillait dans sa bourse modeste, proposa de payer sa part.
« Considère cela comme un remerciement pour ton aide hier soir, » dit-elle avec un sourire.
Ale déclina poliment. « C'est gentil, mais j'insiste pour payer ma part. »
Ils quittèrent la taverne et se séparèrent devant la fontaine de la place centrale.
« À bientôt, Ale ! » lancèrent-ils en chœur.
« À bientôt, » répondit-il en les regardant s'éloigner.
Se retrouvant seul, Ale se dirigea vers le marché principal, il ne put s'empêcher de repenser à la proposition de ses nouveaux amis. Rejoindre la guilde des aventuriers pourrait être une opportunité précieuse. De plus, il appréciait leur compagnie et sentait qu'ensemble, ils pourraient accomplir de grandes choses.