Chereads / Fulgur - Le don de bravoure / Chapter 11 - la salle des vérités

Chapter 11 - la salle des vérités

Tout le monde me regarde. J'ai vraiment eu peur.

Lui s'est éloigné un peu mais il me dévisage avec un regard insistant. S'il avait le même don que mon père, je suis sûr qu'il essaierait, à ce moment précis, de lire en moi. Une chance pour moi, c'est un brave. Je sais qu'il n'a pas fait ça pour me faire peur, mais pour m'aider...

- Excusez-moi, monsieur... Dis-je gênée.

Je suis même plus que gênée. Je suis sûre d'être écarlate, de la tête aux pieds. Je baisse les yeux, humble en espérant qu'il ne m'en veuille pas trop. Le silence dur, je relève la tête pour essayé de juger une réaction dans ses yeux. James fronce les sourcils et il se retourne pour faire une déclaration à la classe.

- Le cours est terminé pour aujourd'hui, vous pouvez rentrer. J'ai des choses importante à faire.

Il ne nous regarde pas et à l'air de très mauvaise humeur quand il range ses affaires. Je ne me fais pas prier... Je suis la dernière à sortir. Je suis devant la porte.

- Pas toi, Kristen. Je veux que tu restes, m'ordonne t-il.

Aurore et moi nous regardons avec des grands yeux.

Je sais qu'il va me reparler de ce qui s'est passé et je le comprend, il m'avait dit que ça barderait la prochaine fois que j'agirai comme ça avec lui, surtout devant tout le monde.

- Je ne...

Je ne veux pas rester ! Il ne me frappera pas... Enfin, j'espère !

James lève un sourcil comme pour me dire : « Tu veux vraiment me défier ? ».

- Oui, monsieur.

Seigneur, Andalis, par pitié, j'ai besoin de vous. Peu importe les croyances, les idéaux, j'ai besoin de vous pour m'éviter ça.

Aurore sort et je referme la porte blanche derrière elle. J'ai l'impression que l'immense salle des combats se referme sur moi pour m'engloutir. Je sens le regard lourd de reproche de James me transpercer et je ne peux pas l'en blâmer. Il me faut énormément de volonté pour faire face à James, dans la position de brave.

Encore une fois, je sens que je vais me faire tuer. Je déteste cette sensation. De toute ma vie, c'est la première qu'une personne me reprend autant sur ma façon d'agir et bien sûr, il a fallu que cette personne soit celle qui me plaît.

- James... Me corrige t-il. Je m'appelle James.

Je baisse la tête, timide, écarlate, mal à l'aise...

- Viens avec moi. Me dit-il posément.

Je relève la tête et vois à ses yeux, qu'il n'est pas énervé. Il est calme et composé, ses yeux émeraudes me prouvent qu'il ne m'en veux pas pour ma remarque déplacée. Il me tend la main mais rien que ce contact me fait peur. Je ne cesse de regarder James, sans bouger.

- Si tu me donnes ta main, je ne vais pas la casser, ricane t-il.

- Je sais, mais je ne préfère pas.

Le regard de James s'étrécit en scrutant mon visage. Lorsqu'il comprend que je ne lui prendrait pas la main, il la laisse retomber le long de son corps.

- Pourquoi as-tu peur d'un geste si simple, si naturel ?

- Pour moi, ça n'a rien d'un petit geste et il n'a rien de naturel non plus.

- Donne moi au moins une raison.

- Ce petit geste, je l'ai naturellement avec mes parents et mon frère. Je ne ressens pas le besoin de l'avoir avec quelqu'un d'autre. Que celui-ci soit amical, rassurant ou une marque de respect... Peu importe.

- Tu veux dire que personne à part ses trois membres de ta famille ne te touche ?

- J'ai attrapée la main d'Aurore vendredi, lui signalé-je.

- Oui, toi ! Elle, elle ne t'a pas touchée, tu lui a pris la main d'une façon qu'elle ne puisse pas te rendre ce geste. Je me trompe ?

- C'est plus compliqué que ça, dis-je dans un haussement d'épaules.

- Explique-moi.

- Comme je viens de vous le dire, c'est compliqué.

- Je suis sûr pouvoir le comprendre. Et puis « compliqué », peut vouloir dire long à expliquer et j'ai tout mon temps.

- Je suis certaine que vous pourriez le comprendre. Même si cette histoire est aussi longue que le temps que vous avez à me consacrer, je ne veux pas en parler.

James et moi ne nous lâchons pas du regard, pour voir lequel va céder en premier. Je suis très douée à ce « jeu ». Au bout d'un long silence, il tranche.

- Viens, allons ailleurs.

James se dirige vers la porte, l'ouvre. Il descend les escaliers, je suis ses pas, je le suis du regard. Où m'emmène t-il ? Ma question trouve bien vite une réponse car James m'ouvre la porte de la salle des souvenirs et m'invite à y rentrer, une fois dans cette pièce inondée de miroirs, je vois par l'intermédiaire de l'un deux, James entrée et fermer la porte en lui verrouillant derrière lui.

La première fois que je suis rentrée ici, j'ai trouvée cette pièce rassurante, mais avec James, aujourd'hui, je l'a trouve... Intimidante, angoissante. Ou c'est lui que je trouve comme ça... En même temps, je ne sais pas pourquoi je ressens tout ses... sentiments contradictoire pour lui, ou pourquoi j'ai des sentiments tout court pour lui.

Le fait que James est fermée la salle à clé ne me rassure pas. Oubliant la hiérarchie, oubliant délibérément les ordres muets de James, je pars déverrouiller la porte. Je soupire de soulagement de l'avoir fait et aussi que James ne m'en ai pas empêcher.

- Je ne voulais pas te faire peur en fermant à clé. Je ne te veux aucun mal Kristen.

Je ne sais pas pourquoi, ni comment ça se fait. Mais j'entends à sa voix que je peux lui faire confiance. Je me retourne, James est près du fauteuil central. Je m'approche timidement.

- Qu'est ce qu'on fait là ? Le questionné-je

- Assieds toi, je vais te mettre les fils...

Je comprends ce qu'il veut. Il veut savoir pourquoi j'ai peur de son toucher, du sien ou d'un autre d'ailleurs. Avant de m'emporter, je vais vérifier.

- C'est quoi le but de cette expérience ?

- Je veux savoir d'où vient ton blocage.

- Je ne comprend pas ? Dis-je en jouant les idiotes.

James est entrain de faire des manipulations sur l'ordinateur, dès qu'il s'arrête il me regarde, l'air grave.

- Puisque tu refuses d'en parler je vais le regarder. Je fais ça pour t'aider à le surmonter et...

- Non, non, je refuse de revivre ça !

Je secoue la tête pour appuyer mon refus, je m'écarte du siège, de l'ordinateur, des fils, de James. Quant à lui, il me regarde, perplexe et surpris par mon refus. Il ne s'attendait certainement pas à une réaction pareille, aussi violente, aussi appuyée.

J'ai envie de m'enfuir en courant mais je sais qu'il pourrait atteindre la porte avant moi.

- Si tu ne dépasses pas cette peur, tu rateras ton examen, argumente-il.

- Mais je m'en fiche ! Et puis, qu'est ce que ça peut vous faire ? Pourquoi vous vous préoccupez de moi ?

- Tu es ma seule préoccupation, avoue t-il, presque dans un remord.

- Je ne suis pas un bébé sans défense !

Ma dernière phrase m'a échappée, James m'a entendu puisqu'il se sent attaqué.

- Je ne te considère pas comme telle, mais tu es brave et tu dois avancer avec tes souvenirs, les bons comme les mauvais et si je veux t'aider c'est parce que tu me... Fascine.

Sa voix est grave, je sais pouvoir lui faire confiance mais je n'y arrive simplement pas. Du moins pas assez pour revivre, parler ou montrer ça. Me braquant, je décide que la meilleure défense est l'attaque.

- Je vous fascine ? Mais bien sûr. Je pense simplement que vous prenez votre pied à me tourmenter, dis-je en l'incriminant de façon plutôt convaincante.

- Au début, ça sera peut-être de la torture, mais tu dois affronter ça et je ne prend pas mon pied en le faisant.

- Je ne veux pas ! Insisté-je.

- C'est un ordre Kristen.

- Vous vous croyez malin à vous servir de votre position pour m'obliger à revivre ça ?

Il perd patience.

- Kristen, ça suffit.

- Ne me dites pas ce que je dois faire !

James et moi nous affrontons comme deux ennemis. Il ne veut pas céder, moi non plus.

- Je veux t'aider, je suis ton entraîneur, je suis là pour ça. Tu peux bien croire que je profite de ma position, que j'ai envie de te torturer ou je ne sais quelle autre stupidité qui peut te traverser l'esprit. En attendant, tu exécutes mon ordre...

- Non ! Et pour ce qui est des « stupidités » qui peuvent me traverser l'esprit je les trouvent assez cohérentes.

Je m'en fou, qu'il soit le prof, l'homme. Je REFUSE de faire ça !

- Quel secret me caches-tu ?

- Aucun et qui plus est, j'aurai un secret, je ne trouve pas très correct que vous vous serviez de votre rang pour me forcer à avouer.

- C'est vrai, mais c'est moi qui donne les ordres ici. Tu savais que tôt ou tard...

- Et je vous ai répondu que le plus tard serait le mieux.

- Et moi j'ai décidé que ça sera aujourd'hui, immédiatement, c'est un ordre.

Voilà, encore ce prof dictatorial...

Je regarde James froidement, à ce moment précis, je le considère comme le plus dangereux de mes adversaires car il a l'avantage de la force et de la position en tant que professeur.

- Bien, monsieur. Acquiesce-je la mâchoire serrée.

- James. Je m'appelle James.

- Vous venez de me faire comprendre sans équivoque que vous étiez mon supérieur en ce moment. Donc, c'est monsieur. D'ailleurs je m'en tiendrai à monsieur dans n'importe quel circonstance.

Il marmonne quelque chose. Je grimace car j'ai horreur des gens qui font ça.

- Je déteste les gens qui marmonnent, assez fort pour qu'on sache qu'ils parlent mais pas assez pour que ce soit compréhensible. Vous n'assumez pas vos dires, monsieur ?

- J'ai dit... « Tu changeras d'avis ».

- Je ne crois pas.

- Bon sang, tu es têtue. Déclare t-il en se frottant nerveusement la nuque en se retournant vers sa machine.

Sans arriver à contenir la remarque qui se trouve au bout de ma langue, je crache à l'homme devant moi.

- Et vous vous êtes impossible à suivre.

James me lance un regard que je ne connais pas encore mais qui ne me plaît pas du tout.

- Si tu réfléchissais un peu tu aurais déjà compris, depuis un moment même, crache t-il à son tour.

Des reproches ? Son regard est plein de reproches ? Non mais je rêve ! Pour qui est-ce qu'il se prend ?

La colère bouillonne en moi. Normalement quand nous nous regardons, un sentiment tout à fait différent m'apparaît. Aujourd'hui, ce n'est pas de l'électricité qui traverse mon corps mais un volcan en ébullition. Je sens même mes joues rougir de colère. Sur la défensive je résume la situation.

- Voyons... Depuis que vous êtes mon professeur, j'ai été une enfant qui joue avec le feu, une idiote ayant des idées stupides qui me passe par la tête, une personne qui n'en vaut pas la peine, également quelqu'un de têtue et j'en passe. Maintenant vous me dites que je ne réfléchis pas. Ne vous en faites pas, j'ai parfaitement compris... Alors votre air supérieur, je m'en fiche, votre position également et vos commentaires, j'ai su m'en passer jusque là, je vais continuer à vivre sans. Au revoir, monsieur.

Il hausse les sourcils, je pense l'avoir choqué. Je commence à partir.

Ce mec me plaît autant qu'il m'énerve et vu comment il me voit, je ne suis pas sûre que ce que je ressens soit réciproque, j'en suis même certaine. Mais au moins, j'ai une excuse pour partir.

- Kristen, je ne t'ai pas donné l'autorisation de sortir de cette salle. Si tu veux qu'on joue à ça toi et moi, tu es officiellement encore en cours, donc sous mes ordres.

Bon là, c'est sûre, il m'énerve au delà de tout !

À nouveau, je me tourne vers James, toute marque de respect oubliée.

- Je ne veux pas vous montrez ça. Insisté-je.

- Pour quelle raison ?

En guise de réponse, je hausse les épaules.

- Si tu me donne une bonne raison, je ne te brancherai pas.

- Il n'y a aucune bonne raison, je ne veux simplement pas revivre un moment comme ça, je l'ai déjà vécu une fois, ça me suffit.

- Donc tu as peur ?

Plus James me pose des questions, plus il s'avance vers moi.

- Bien sûr, j'ai peur de ce qui s'est passé, j'ai peur que vous voyez ce que j'ai vécu et que vous prenez pitié encore plus.

- Je n'ai pas pitié de toi, peut importe ce que je verrai, je ne pense pas que ça va changer, ni mon comportement, ni ma façon de te voir. Pour ce qui est de ta peur, elle doit être vraiment horrible pour ne même pas vouloir penser à l'affronter... Mais tu dois quand même le faire.

- Qu'est ce que vous avez a y gagner à m'aider ?

- Rien, je veux t'aider, c'est tout, me dit-il au bout de quelques secondes de silence.

Je commence à sangloter.

- Je ne veux pas revivre ça, j'ai eu peur hier, j'ai peur aujourd'hui et je sais que j'aurais peur demain.

- Je ne veux pas t'obliger à faire ça pour te torturer, je veux t'y obliger pour que tu l'affrontes, pour que tu vois ça avec du recul. Me dit-il calmement. C'est mon travail de te l'enseigner.

Ah, le professeur... Et dire que je croyais avoir affaire à James.

Je soupire et secoue la tête.

- Bien, monsieur.

- Je m'appelle... Laisse tomber. Soupire t-il.

Au bout d'un moment, je m'approche de James. Lorsqu'il mime le geste de me mettre les fils, j'ai un mouvement de recul et prend moi-même les fils. James et moi n'avons aucun contact pendant cet échange. Je souris soulagée et lui sourit mais j'ignore pourquoi.

- Tu es prête ? Me demande James.

Je me relis au fils, consciente qu'après cette question, mon sourire idiot aux lèvres s'est envolé.

- Non, mais je ne pense pas avoir le choix.

À nouveau, il soupire et moi je m'installe sur le siège en déglutissant difficilement.

- Ne t'en fais pas, ça va bien se passer.

- Vous n'en savez rien alors ne parlez pas, c'est préférable. Lui dis-je crûment.

Je grimace par cette remarque déplacée, je n'aurais pas dû. Il m'a dit ça pour me rassurer pas pour me provoquer. Il me regarde méchamment. Je n'arrive même plus à respirer normalement.

Je sais que je ne lui ai pas bien parlé, mais je suis si angoissé...

- Désolée, je suis un peu... anxieuse.

- Ce n'est pas grave, allez on y va. Me dit-il avec son sourire en coin.

- Comme est-ce que ça marche ?

- J'ai demandé à la machine de te renvoyer à ta peur du contact, lorsque j'appuierais sur ce bouton, dit-il en désignant le gros bouton vert, tu t'endormiras et... Bon tu connais la suite.

James me regarde et me demande en silence si il peut appuyer, j'acquiesce d'un hochement de tête. Je m'endors en revoyant, en revivant cet affreux souvenir.

« Je sors de l'école, un jeune homme blond commence à devenir trop entreprenant alors que je n'ai pas 15 ans, je ne le connais pas. Un autre jeune, métisse cette fois me prend les bras par derrière, il me tiens fort, je me débats mais n'arrive pas à le dégager, je hurle. Le blond m'arrache ma chemise et commence à me toucher, le ventre puis remonte vers ma poitrine. Je lui donne un grand coup de pied entre les jambes. Le métisse me maintiens toujours, je n'arrive pas à le repousser, le blond se relève et me frappe, sur le visage, puis dans le ventre. De nul part un troisième homme surgit et fait fuir les deux premiers. Une fois partis, mon sauveur me couvre de son manteau et me ramène chez moi en me portant un bras dans mon dos, l'autre sous mes jambes. Mes bras sont enroulés autour de son coup et je pleurs. Il me répète que ça va aller. »

- Je n'en peux plus. Laissez moi sortir ! Hurlé-je dans mon souvenir.

Je sors instantanément de mon souvenir. James a dû intervenir, je pense. Je m'arrache les fils tant bien que mal. Je me griffe comme pour enlever leurs mains sur moi.

- C'est de la torture ! Aboyé-je.

Je pleurs, je me sens salle. Je sens leurs mains, le froid du vent sur mon corps.

- Calme toi, Kristen, calme toi.

C'est à ce moment là que je vois James s'approcher de moi. Je me lève du siège prête à le contourner, à m'enfuir. James me prend par les bras, d'une poigne de fer, j'essaie de le repousser, mais il est trop fort. Je le regarde droit dans les yeux, sans le voir vraiment, mes yeux sont remplis de larmes.

- Je te déteste, je déteste le prof dictatorial. Je déteste le fait que tu m'obliges à revivre ça, surtout en me disant que tu es mon professeur. Je te déteste. Lâche-moi.

Je continue à frapper James en plein thorax en vain. Je ne veux pas vraiment lui faire mal, je veux surtout qu'il me lâche.

- Kristen... Me dit-il presque paniqué par ma réaction.

- Tu me lâches ! Ne me touche pas ! Hurlé-je.

Enfin il cède et me lâche. Je vois dans son regard, une chose nouvelle sans trop savoir à quoi ça correspond.

La pitié peut être. Ce qui m'est arrivé... Je considère toujours que c'est de ma faute, sans savoir pourquoi, mais je sais que c'est de ma faute.

Je met ma main devant ma bouche pour ne pas éclater en sanglot ou pour ne pas vomir, je ne sais pas et me précipite hors de la salle.

- Kristen... Kristen, attends.

Je continue à courir, il me suit, mais je m'en moque, je continue, aussi vite que je peux pour échapper à ces horribles images.

Je dois trouver Raven, il faut qu'il sache qu'il s'est trompé, je ne suis pas celle qu'il prétend que je suis, je ne suis pas l'Élue. Un Élu peut sauver les autres mais il peut également se sauver lui-même mais j'en suis bien incapable.

- Hé, attends.

- Arrêtez de me suivre ! Imposé-je.

- Non, attends, écoute-moi, Kristen.

Je m'arrête de courir, quand il me rattrape et puis je n'en peux plus. Je pose mes mains sur mes genoux. James se place devant moi.

- Bon sang, tu cours vraiment vite. Me dit-il haletant.

Je me redresse.

- Je rentre chez moi.

- Non, tu reviens avec moi, dans la salle des souvenirs.

- Jamais.

Je le contourne.

- Ce n'est pas un ordre, ce n'est pas le professeur qui te parle mais moi... Juste moi et je te demande de revenir avec moi.

Oh, le garçon en tant que James, je l'aime bien. Mais ça ne change rien.

J'enroule mes bras autour de moi, comme pour me réchauffer, me protéger. Je vois dans ses yeux que je peux lui faire confiance. Je n'ai jamais accordée ma confiance à personne exceptée ma famille, il est la seule exception. Aurore je l'adore, c'est ma meilleure amie mais je ne lui fais pas encore confiance, totalement.

- Je ne retournerai pas dans ce souvenir, murmuré-je.

- Si. Tu vas le faire... Tu le dois.

- Pourquoi moi ?

Il ne me répond pas, mais je crois le voir un peu rougir. Je continue de lui poser des questions.

- Vous avez une peur, une peur tellement horrible que vous ne pensez même pas pouvoir la combattre un jour ?

- Non, je suis arrivé à affronter ma peur la plus grande, sans pour autant la surmonter. Mais il faut que tu saches. Selon les événements que tu vis, tes peurs changent.

- C'était quoi ?

Je vois qu'il hésite, mais je m'en fiche.

- Je te la monterais un jour. Me déclara t-il sans conviction.

- Bien, allons revoir cet abominable... souvenir.

Ma voix est éraillée, James et moi retournons à la salle des souvenirs. Cette fois-ci, cette salle m'oppresse, je la déteste, plus qu'aucune autre, avec ou sans James, j'ai horreur de cette pièce, je déteste tous ces miroirs qui me rappellent combien je suis lâche.

- Rassieds-toi sur le siège.

Je suis faible. Faible et à bout de force. Dehors, je pensais pouvoir le ré-affronter mais maintenant, dans cette pièce, je sais que c'est impossible.

James me tend les fils, je les regardent, incapable de les saisir.

- Je ne vais pas y arriver. Je ne suis pas une brave, ils ont du faire une erreur.

Bien sûr que si, tu es une brave. Nous avons tous une peur panique d'au moins une chose. Certaines peurs, comme la tienne, sont paralysantes. Il n'y aurait pas de courage sans peur. Le courage c'est être capable de l'affronter.

Les larmes coulent sur mes joues, je me laisse tomber sur le siège et positionne les mains sur ma tête.

- Oui, mais cette peur... Je n'arriverai jamais à la surmonter, à cause d'eux, j'ai peur des contacts physique. J'ai peur quand on me touche parce que je ne sais pas si c'est une chose bien ou non...

Il ne répond pas. Comme si il repassait mes paroles dans sa tête.

- Monsieur ?

Je l'appelle, pour l'inciter à me dire quelque chose. N'importe quoi. Au bout d'un silence que je trouve interminable, il tranche, les yeux noirs, dur.

- Rentre chez toi...

Il doit me prendre pour une... fille légère, lâche, sans intérêt... Une évidence me tombe dessus comme un mur de brique... Je suis amoureuse de ce garçon et avec ce qu'il a vu, avec la peur que j'ai, il sait que jamais je n'avancerai. Il va vouloir autre chose que ce que je peux lui offrir et il va rencontrer une autre fille et tomber amoureux. Oh comme j'ai mal.

Je n'arrive pas à retenir mes larmes, elles coulent sur mes joues sans que je ne puisse y faire quelque chose.

- Alors ça y est ? Maintenant que vous avez compris, j'ai tout bousillé ?

Encore une fois, il reste silencieux. Je me lève du siège et me précipite pour sortir.

- Parfait.

J'essaie de prendre une voix neutre et contrôlée, mais sans succès.

Je suis morte de honte, je ne peux plus affronter ni son silence, ni son « non-regard ». Je vais partir, je veux partir, je dois partir, en plus d'être lâche, il va me prendre pour une éponge si je continue à pleurer comme ça.

Lorsque j'atteins la porte et commence à l'ouvrir, il l'a referme d'un coup sec et me retourne. Quand il me regarde dans les yeux, avec ses yeux émeraudes, remplit d'une lueur que je ne reconnais pas, que je n'avais jamais vu... Je suis déstabilisée.

Cet homme me... m'éblouit, il m'intimide et j'ai peur qu'il me touche de façon trop... entreprenante.

- Comment ? Murmuré-je.

Mais qu'est-ce que je dis ?

Il essuie mes larmes. Bizarrement, se contact me soulage, je le trouve apaisant. Si apaisant que je lâche un soupir d'extase en fermant les yeux.

J'ai confiance en lui... Je crois que... Non j'en suis sûre... Je l'aime... J'aime cet homme.

Avec son pouce, James dessine sur ma lèvre inférieur. Une vague de chaleur m'envahit et ce lien invisible entre nous refait surface dès que j'ouvre les yeux pour plonger mon regard dans le sien.

- Arrête de pleurer. Ces horreurs... Rien n'était pas de ta faute. Et tu n'as rien bousillé du tout. Ce que je ressens pour toi est intact si ce n'est renforcé.

Ce qu'il ressent pour moi ?

Je me raidi. Je l'aime mais j'ai peur aussi parce qu'il est vraiment très près de moi et je ne sais pas ce qu'il veut faire. Il a son visage, son corps, si prêt de moi que nous respirations le même air, que nos cœurs battent à l'unissons.

- Tu as peur de moi, maintenant ? Dit-il avec une voix douce.

- J'ai un peu peur mais, c'est vous alors, ça va.

« C'est vous alors, ça va ? » Putain mais arrête de parler, tout de suite.

J'ai envie de t'embrasser mais je ne veux ni t'effrayer, ni te forcer. Je veux que tu en ai envie toi aussi.

Sa voix est rauque, magnifique. Son odeur masculine, mélangé avec de la transpiration. J'ai comme une sensation de déjà vu, mais aussi de plénitude.

Hum. Oh merci ! J'en ai envie aussi mais je ne sais pas comment on s'y prend.

- Je n'ai jamais...

Je ne finis pas ma phrase en espérant qu'il comprenne.

- Été embrassée ?

Je lui répond « non » en secouant la tête.

- Jamais ? Demande t-il, comme s'il était perplexe.

- Non, murmuré-je.

Je baisse les yeux, un peu honteuse.

En même temps, au point où j'en suis...

Il prend mon visage à deux mains en me disant clairement dans les yeux :

- Tant mieux.

Sur ce, il pose délicatement ses lèvres sur les miennes. Je suis un peu maladroite, je ne sais pas comment je dois m'y prendre. Je suis tellement ensorcelée par son baiser... C'est une sensation agréable. Je passe mes mains autour de sa nuque pour qu'il ne cesse pas de m'embrasser puis j'agrippe ses cheveux. Il me plaque contre la porte et continue de m'embrasser, sa langue s'introduit dans ma bouche. Je sens une de ses mains sur ma taille, la seconde sur ma nuque. Je ne savais pas qu'il était possible d'autant désirer quelqu'un. Ce baiser m'effraie parce que je ne sais pas où il peut nous mener mais en même temps, je suis avide de plus. Lorsque ce baiser se termine, nous sommes à bout de souffle.

Notre premier baiser était... Parfait !

- James. Murmuré-je.

Je fronce les sourcils lorsque je sens James sourire.

- Je te fais rire ? Demandé-je vexée.

- Non.

- Donc, j'embrasse mal ?

- Non. Ricane t-il.

Il m'embrasse encore, je met mes mains sur son torse, tandis que sa main droite se pose sur mes reins.

- Enfin, tu m'appelles James. S'extasie t-il.

- C'est plus... normal après ce baiser, non ?

- C'est parfait. Tout est enfin parfait.

Il m'embrasse à nouveau. Je le repousse délicatement.

Je n'ai plus peur de lui. Je sais maintenant qu'il ne va pas me faire de mal, que son touché est une bonne chose mais quand même...

- On peut y aller doucement, s'il te plaît ?

- Bien sûr et je trouve ça très bien. Je ne veux pas aller vite non plus. Allez on y retourne. Il faut que tu t'entraînes.

- Mais c'est trop dur, je...

- Hé, je suis là, OK ? Me rassure t-il en caressant tendrement ma joue.

- Non, je n'y arriverais pas...

- Mais tu ne risque rien.

- James...

- Kris, tu vas y arriver...

Kris ? J'ai toujours détesté ce surnom, ça fait très « garçon manqué », mais dans sa bouche à lui, j'ai l'impression d'être une femme.

- Je t'assure, tu vas y arriver, reprend-il.

- Non, j'en suis incapable, je...

- J'ai confiance en toi.

Je le regarde droit dans les yeux, son pouce continue de dessiner sur ma lèvre inférieur et je vois qu'il dit la vérité.

Il a vraiment confiance en moi. Mais pourquoi ? Moi je ne me fais pas confiance, il devrait en faire de même.

- D'accord.

James me tend les fils. Je m'installe sur le siège et écarte mes cheveux pour qu'il me branche. James me sourit, me branche et dépose un petit baiser sur ma joue. Je le regarde appuyer sur le bouton et je m'endors. C'est horrible.

« Ça va aller, ça va aller. »

Lorsque j'émerge de mon souvenir, James est a genou devant moi.

- Ça va aller.

- James ?

C'était lui ? Le brave ? Il faudra que je lui demande un jour, pour l'instant je suis un peu trop secouée.

- Je suis là, Kristen, ça va aller.

- James ?

J'éclate en sanglots, ça fait tellement peur, tellement mal... Je suis toujours assise sur le siège, mes mains sur mon visage. Lorsque James retire les mains de mon visage, je constate qu'il ne me regarde toujours pas avec pitié, il attend simplement que je me calme, que je reprenne mes esprits. Je sens toujours son odeur, de sueur, de propre, cette masculinité merveilleuse, séduisante, paradisiaque. Elle me rassure comme celle du brave qui m'a sauvée, mais je me fais peut être des idées.

- Arrête de pleurer Kristen, ça va aller, je t'assure. Tu t'es mieux débrouillée cette fois-ci que la première fois.

- C'est vrai, comment tu peux le savoir ?

- Parce que les fils auxquels tu es reliée mesure aussi ta tension et ton rythme cardiaque.

- Et alors ?

- Alors, ta tension était beaucoup moins élevé que la première fois et ton rythme cardiaque est resté normal.

James me fait affronter sans cesse ce souvenir pour pouvoir le gérer afin de ne pas perdre de combat. Contrairement à ce que je croyais, plus j'affronte ce souvenir, moins il m'effraie.

- Tu as assez explorée ce souvenir, maintenant, on va s'entraîner, toi et moi, il faut que tu apprennes à être touché, si on peut dire ça comme ça.

- OK, on essaie.