Chereads / J'ai prétendu être la Mort, mais elle m'a tenu tête. / Chapter 32 - Je suis sûre que c'est elle.

Chapter 32 - Je suis sûre que c'est elle.

Au moment où Hosoda Chiho avait posé cette question à Hana puis s'était tournée vers elle, le sang de la jeune femme s'était presque glacé dans ses veines.

Elle ne pensait pas que la jeune femme l'avait reconnue après tout ce temps, et elle ne voulait pas lui donner satisfaction.

Aussi, elle tenta de garder son calme, comme toutes les fois où elle avait imaginé dans son esprit ce possible scénario. Puis, feignant l'ignorance, elle répondit à la question avec une voix nette.

« Ça ne me dit rien du tout, vu que je n'était pas scolarisée dans cette zone, » sourit-elle doucement. « Pourquoi cette question ? »

Chiho avait toujours les bras croisés, et la réponse d'Hana dût lui déplaire car elle fronça légèrement les sourcils tout en se mordant la lèvre supérieure. Puis, elle se mit à sourire à son tour.

« Pour rien... » Dit-elle en balayant l'air de sa main. « Je me demandais si on avait pas suivi les mêmes cours vu que votre visage me disait quelque chose, mais j'ai dû vous confondre avec quelqu'un d'autre. »

Hana poussa intérieurement un soupir de soulagement, ne s'étant pas rendu compte qu'elle avait presque oublié de respirer durant ces dernières secondes.

Chiho fouilla dans son sac et lui tendit alors un fin classeur rigide, avant de lui expliquer la suite des évènements.

« Bon, le principe est que nous faisons du porte à porte dans différents quartiers où nous savons que nous avons une influence direct, » dit-elle d'une voix détachée. « On évolue donc dans la zone de chalandise de l'immeuble, si on peut dire ça comme ça. »

Hana avait du mal à saisir certains mots que sa collègue utilisait. Elle n'avait pas fait de diplôme se rapportant au commerce… Toutefois, elle pouvait tout de même en deviner le sens en fonction du contexte de la phrase.

Chiho donna ensuite à la jeune interne une liasse de papier qu'Hana trouva plutôt lourde et épaisse.

« J'avais déjà commencé à recenser nos concurrents directs présents sur la zone, donc ton rôle sera avant tout de consigner ces résultats, compris ? » Demanda-t-elle sans vraiment regarder Hana.

Elle était occupée à chercher autre chose dans son sac, et finit par en sortir des brochures publicitaires.

« Le gros problème de ce foutu Département, c'est que notre produit d'assurance n'est pas obligatoire, donc les clients s'en tapent un peu, » dit-elle en grimaçant. « Et généralement, ils détestent qu'on leur mette sous le nez de la publicité qu'ils n'ont pas sollicitée. Le but est donc de leur glisser en toute discrétion nos brochures. »

« En toute discrétion ? » Demanda Hana.

« Tu le poses sur leur comptoir ou une table de leur boutique sans qu'ils s'en aperçoivent, » éclaircit Chiho, qui encore une fois, était plus occupée à regarder des messages sur son téléphone, plutôt que de prêter attention à la jeune femme.

Puis, relevant enfin le nez de son écran, elle rangea son portable dans son sac.

« Des questions ? » Demanda-t-elle en regardant Hana comme si la vue de la jeune femme l'insupportait.

Hana avait ressenti l'animosité de sa collègue envers elle, et n'osa rien dire. Elle se contenta de secouer négativement la tête en évitant de regarder son interlocuteur, ce qui lui valut un regard en coin de sa part.

« Bon, j'veux finir ça avant la fin de la journée, donc allons-y, » déclara nonchalamment Chiho. « Suis-moi. »

La femme qui avait une année d'expérience en plus qu'Hana commença alors à marcher vers l'arrêt de bus le plus proche, et se mit à attendre une des lignes qui servait l'arrêt en question.

Rapidement, un nouveau bus arriva, et Chiho monta à l'intérieur, suivie de près par Hana qui se hâtait pour ne pas être laissée derrière.

Elle avait la sensation que si elle traînait trop, sa collègue ne l'attendrait pas. Le fait que celle-ci ne regardait même pas derrière elle pour vérifier que a jeune interne la suivait tendait d'ailleurs à confirmer ce pressentiment.

Chiho, quant à elle, n'en démordait pas.

Certes, leurs noms de famille étaient différents. Leurs comportements aussi.

Pourtant, elle avait reconnu le visage de la jeune femme.

Au départ, elle avait pensé à une simple coïncidence, en la voyant de loin. Peut-être que ces deux personnes avaient des visages similaires, et des prénoms identiques, mais que ce n'était pas la personne qu'elle avait connu au lycée.

Après tout, elles étaient bien loin de leur ville d'origine, et être employées dans la même entreprise à une année d'intervalle dans la même ville aurait été plus qu'un simple hasard.

Toutefois, durant toute la semaine, Chiho avait silencieusement observé la jeune femme en gardant une certaine distance.

À chaque fois qu'elle voyait la jeune femme sourire, Chiho grinçait des dents. À chaque fois que la jeune femme ramenait ses longs cheveux derrière ses oreilles, elle ressentait sa mâchoire se serrer et se desserrer avec un petit craquement osseux. À chaque fois que la jeune femme se levait et s'asseyait de son siège avec bonne humeur ou sérieux, elle avait l'impression qu'elle aussi voulait se lever pour partir.

Il y avait vraiment des similitudes troublantes, et plus Chiho en voyait, plus elle doutait ; un sentiment d'inconfort s'emparant peu à peu de son corps.

Et si c'était bien la même personne ? Que venait-elle faire ici ?

Est-ce qu'elle avait suivi Chiho jusqu'ici ? Et dans quel but ?

Cherchait-elle à lui mettre la pression ? Ou à la dénoncer pour ce qui s'était passé des années avant ?

Elle n'était employée à plein temps que depuis quelques mois, alors si Hana balançait tout ce qu'elle avait fait à l'époque, Chiho pouvait non seulement se faire ostraciser par ses collègues, mais aussi se faire renvoyer. La société actuelle ne pardonnait pas facilement ce genre de chose. Il n'était donc pas exagéré de dire qu'Hana représentait une menace pour elle.

Tout naturellement, Chiho avait voulu s'assurer de l'identité de la jeune femme. Elle lui avait posé cette question directement, de façon à voir la réaction d'Hana, prise de court.

Toutefois, la jeune femme en face d'elle n'avait pas du tout réagi comme elle l'avait espéré. Pas de réponse innocente de sa part, ni de peur ou de gêne. Shinohara Hana avait répondu avec calme et assurance, comme si elle n'était réellement pas concernée et n'était pas la personne que Chiho avait cru reconnaître.

Alors Chiho s'était mise à douter, la confiance de la jeune femme étant plutôt désarmante.

Elles avaient continué leur chemin en silence, le bus desservant plusieurs arrêts, avant que les deux jeunes femmes ne descendent près d'un quartier commercial où plusieurs boutiques et ateliers se côtoyaient dans des rues étroites où une seule voiture pouvait passer à la fois ; quand la rue n'était pas transformée en zone piétonne.

Hana suivit de près Chiho, tandis que cette dernière dernière consultait dans un organiseur en tissu la liste des adresses à visiter. Puis, apercevant au loin leur première cible, Chiho fit signe à Hana de la main.

« Nous allons visiter ce magasin de photographie, » annonça Chiho, sans même prendre la peine d'attendre une réponse de la part d'Hana pour continuer de marcher.

Elles arrivèrent toutes les deux devant la boutique, qui devait faire à la fois du développement photo et de la vente de matériel, et au moment d'entrer, Chiho sentit une vibration dans la poche de sa veste.

« Entre en premier, je te rejoins dans dix minutes vu que j'ai un appel à passer, » prétexta Chiho.

Au départ réticente, Hana hocha de la tête et entra pour patienter à l'intérieur sous le regard inquisiteur de sa collègue.

Quant à Chiho, elle sortit son téléphone de sa poche et lut le message qu'elle venait de recevoir, avant de sourire.

[Hey Chiho ! Qu'est-ce que tu deviens ? Et pourquoi ces questions sur le lycée ? Ça fait un bail!]

Quelqu'un avait répondu, et avec un peu de chance, elle pourrait rapidement obtenir les informations dont elle avait besoin.

Avec entrain, elle composa un nouveau message en réponse à celui qu'elle venait de recevoir.

[Ça va, et toi ? Dis moi, tu te souviens de la mytho ?]

Une nouvelle vibration, et une nouvelle réponse arriva.

[Ah, tu veux parler d'elle ? Quoi ? Ça te manque de plus pouvoir passer tes nerfs sur elle? Je retourne travailler là, mais on s'appelle dans la semaine si tu veux !]

Chiho grimaça. Elle devrait sûrement attendre quelques jours avant que son ancienne amie du lycée ne lui réponde. Pour l'instant, elle devrait s'assurer d'observer les moindres faits et gestes de cette Hana, même si ses propres souvenirs lui faisaient défaut.

Elle n'avait pas l'habitude de chercher à se rappeler des gens qu'elle détestait, après tout.

Satisfaite par le fait d'avoir trouvé une source d'information fiable, Chiho s'apprêtait à ranger son téléphone dans son sac, quand il se mit à vibrer à plusieurs reprises.

Un peu surprise, elle fixa un instant son écran qui affichait un numéro qu'elle ne reconnaissait pas, et quelque chose lui revint à l'esprit : la femme qu'elle avait rencontré quelques jours plus tôt dans le hall de Marline était en train de l'appeler.

Chiho se souvenait avoir échangé quelques mots avec cette femme plus âgée qu'elle et habillée de façon élégante, alors qu'elle l'avait croisée à l'intérieur de l'immeuble Marline. Il n'avait pas fallut bien longtemps pour que Chiho se rende compte qu'elle avait une héritière de conglomérat devant elle, et avait été surprise que cette dernière lui propose d'échanger leurs coordonnées.

'J'aime beaucoup les jeunes femmes qui prennent en main leur carrière, et j'aimerais vous soutenir, en échange d'un petit service à me rendre,' avait-elle dit en souriant à Chiho en lui posant une main sur l'épaule. 'Je serai bientôt votre patronne à tous, alors la moindre des choses est de soutenir les gens que je trouve intéressants.'

Puis, elle lui avait donné sa carte de visite mentionnant son nom et son poste de Vice-Présidente du groupe Pyramid, avant de s'excuser et d'aller rejoindre l'homme que Chiho savait être le Président de Marline Insurance.

Était-ce juste un coup de chance, ou cette femme l'avait-elle repérée avant ce jour-là ? Chiho ne savait pas, mais si cette personne l'appelait déjà, c'est qu'elle voulait lui demander un service. Dans ce cas, qu'est-ce que Chiho pouvait gagner dans l'échange ?

Intriguée, elle décrocha enfin, et porta son téléphone à l'oreille.

« Hosoda-san ? C'est Mademoiselle Yamada à l'appareil. Je ne vous dérange pas ? » Demanda directement la voix féminine à travers le haut parleur.

« Non, bien sûr que non. Je peux faire quelque chose pour vous ? » Demanda poliment Chiho.

« Absolument, » répondit franchement Yamada Kiyo. « J'aurai un service à vous demander. »

« Un service ? » Répéta Chiho, impatiente de savoir ce que la femme plus âgée lui voulait.

« Bien sûr, je vous renverrai l'ascenseur, » ajouta Kiyo. « Je pourrai sûrement vous mettre à un poste à responsabilité dès mon arrivée dans l'entreprise, en tant qu'héritière du groupe Pyramid et future épouse du Président de Marline. Mais pour cela, j'ai besoin que vous fassiez quelque chose pour moi. »

Cette femme allait vraiment occuper un poste clé dans l'entreprise, et si Chiho jouait bien ses cartes, elle pourrait être cadre supérieur bien plus tôt qu'elle ne l'espérait. Elle pourrait s'assurer un poste clé sans avoir à fournir trop d'efforts.

« Qu'est-ce que vous attendez de moi ? » Demanda-t-elle après un bref silence.

« Oh, rien de bien compliqué. J'aurai besoin d'informations concernant certains employés de Marline, et en particulier de votre Département. » Expliqua Kiyo.

« Des informations ? » Dit Chiho, perplexe devant la facilité de cette tâche. « C'est tout ce dont vous avez besoin, et après vous m'assurerez un poste de gestion ? »

« Absolument, » dit la voix à l'autre bout de la communication. « Vous restez ma source d'information à l'intérieur de l'entreprise jusqu'à mon arrivée. Plutôt simple, pas vrai ? »

C'était un peu contraignant de devoir lui fournir des informations jusqu'à ce qu'elle soit en poste, mais si fournir ces efforts supplémentaires par jour permettaient à Kiyo de devenir Chef, ou même placé plus haut dans les postes à responsabilité, elle ne pouvait pas passer à côté de cette offre.

Et qui sait, si elle devenait assez proche de cette femme, elle pourrait elle aussi lui demander des services.

« Que voulez-vous savoir ? » Demanda Chiho, décidée.

Il y eut un court silence, puis la voix souriante de Kiyo se fit à nouveau entendre ; et le nom qu'elle prononça n'était pas inconnu à la jeune femme.

« Kobayashi Shinsuke. Je veux avoir le plus d'informations possibles sur lui. »

Chiho se demanda comment mademoiselle Yamada pouvait bien connaître le nom de cette personne sans jamais avoir mis les pieds plus loin que le hall dans les locaux de Marline. Toutefois, l'autre femme l'avait aussi abordée comme si elle savait déjà qui elle était.

Anxieuse, la jeune femme réalisa qu'elle n'était probablement pas la première personne que la riche héritière avait approchée.

Se pouvait-il qu'elle ait quelqu'un d'autre au sein de l'entreprise l'informant déjà ?