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Chapter 22 - Prison de Bois

Le regard d'Ophélie se pencha vers Eiji une dernière fois. Elle l'approcha et tendit ses mains vers lui.

"Bien que ma magie ne soit pas encore totalement régénérée, je devais encore pouvoir t'aider."

La concentration de mana dans ses mains augmenta tant qu'il se manifesta physiquement sous forme d'une légère lueur bleue. Le mana entoura Eiji tout en tourbillonnant, et pénétra son corps. Après quelques secondes, quelques murmures sortirent de la bouche d'Ophélie : "Restauration".

Enfin, elle se releva, tout en fixant Eiji du regard. Elle ravala sa salive avant de lui sourire.

"Je viens de te lancer un sort de restauration. Contrairement aux sorts de guérisons, les sorts de restauration peuvent uniquement soigner les altérations légères, comme le manque de sommeil ou d'énergie. Malheureusement, sur les corps, son effet n'est pas immédiat, mais tu seras capable de bouger rapidement et tu seras complètement remis sur pied d'ici quelques jours."

Elle s'éloigna du jeune homme et rejoignit Tahrren qui l'attendait déjà à la porte. Les deux saluèrent le convalescent avant de fermer la porte et s'en aller.

Il se dirigèrent l'un et l'autre vers la sortie du village.

"Bien. La stratégie est simple. Nous reprenons là où vous vous êtes arrêtés hier, toi et Eiji. Nous nous séparons, afin de couvrir une zone plus importante, et nous nous dirigeons en cercle par rapport à la ville. Une fois que nous nous recroisons, nous ferons chemin inverse mais cette fois-ci un peu plus éloigné de la ville encore. Nous ferons ainsi jusqu'à ce que nous trouvions le Père Andréa."

Ophélie hocha de la tête, et les deux se dirigèrent là où les recherches durent abandonnées hier. Comme prévu, ils se séparèrent. Tous les cent mètres environ, ils lancèrent leur sort de recherche, traquant toute source de mana anormale dans les environs.

Ils procédèrent ainsi pendant trois jours, tandis qu'Eiji se reposait calmement dans la chambre de l'auberge. Bien que le temps leur semblât passer rapidement, ils ne purent s'empêcher d'être las de ces recherches. Utiliser ainsi des sorts toute la journée était fatiguant, surtout lorsque ceux-ci ne donnaient pas le résultat souhaité.

De plus, ce jour-là, ni brillant soleil ni ciel céruléen, qui se voyait plutôt couvert de menaçants nuages grisâtres. L'humide atmosphère et les quelques rafales qui arrachaient de temps à autres des branches d'arbres couvertes de bourgeons annonçaient une tempête naissante.

Avant même la douzième heure de la journée, les premières gouttes de pluies tombèrent et le sol, sec en surface, se gorgea rapidement d'eau. La terre transformée en boue ralentissait l'avancée des recherches, notamment pour Ophélie qui ne possédait pas de tenues idéales pour ce genre d'excursion.

Heureusement, ils avaient déjà couvert les premiers kilomètres autour de la ville : s'il y avait quelque chose à découvrir, ils en étaient proche. Il était peu probable que le Père Andréa se soit aventuré plus loin, notamment à pied. Après tout, il n'était ni aventurier, ni explorateur. Jamais il ne se serait éloigné de plusieurs heures de marche de la ville.

Et le temps donna raison à leur logique. Alors que Tahrren s'adonnait au sort de recherche une énième fois, il détecta cette fois-ci un étrange mana. La source était si ténue que d'autres auraient pu passer à côté. Mais le mana était certes faible, mais présent en quantité somme toute importante. Suffisamment importante pour appartenir soit à un monstre, soit à un être humain.

Attiré, Tahrren se dirigea vers la source, paré à tout combat si nécessaire : lame en main, il scrutait les environs et avançait pas à pas. Il ne pouvait faire autrement de toute façon, la forêt était si dense dans les environs que la visibilité était faible et le sol couvert de branches et de racines.

Après s'être faufilé entre ces obstacles pendant quelques secondes, il fut enfin suffisamment proche pour apercevoir de ses yeux ce que son sort avait détecté.

Là, au milieu des arbres, se retrouvait perché un homme, immobilisé par d'innombrables branches. Celles-ci serpentaient autour de son corps, lui empêchant ne serait-ce que de bouger une articulation.

"Une prison de bois… Pourquoi avoir usé d'un tel sort pour emprisonner un homme ?"

Suffisamment proche, Tahrren déduit, au moins par la soutane portée par le prisonnier et par sa stature, qu'il s'agissait bien du Père Andréa. Tahrren s'approcha du prêtre et posa sa main sur les liens de bois. À peine ses premières phalanges apposées sur le bois qu'il sentit son mana absorbé. La voracité des liens était telle qu'il perdit un dixième de son mana presque instantanément.

"Modifier ce sort de cette façon… Quel monstre faut-il être pour laisser gire ainsi un homme."

Tahrren dégaina son épée et trancha habilement les liens. Il en extirpa le Père Andréa, et vérifia ses signes vitaux dans la foulée. Bien que faible, le cœur du Père Andréa battait toujours et sa respiration, bien que fébrile et inconstante, prouvait qu'il était encore vivant. Tahrren n'y vit qu'une explication : cela ne faisait que quelques heures, deux jours tout au plus qu'il était séquestré dans cette prison de bois.

Ce dernier leva les yeux au ciel. Il tendit son bras et envoya dans les airs un vif signal lumineux qui illumina les environs. Après quelques minutes seulement, une jeune femme accourue.

"Ophélie, te voilà enfin ! Nous l'avons enfin trouvé. Le Père Andréa !"

Réjouie, Ophélie s'approcha rapidement du prêtre et s'agenouillait à côté de lui. Elle vérifia à son tour l'état de santé du disparu.

"Que lui est-il arrivé ? Il est si faible." Dit-elle en se relevant. Elle croisa le regard de Tahrren, curieuse de la réponse.

"Il était séquestré dans une prison de bois modifiée, qui absorbait le mana du prisonnier."

Ophélie ferma les yeux et se concentra. Après quelques secondes, elle les rouvrit, analysa le flux de mana du Père Andréa.

"La situation est critique. Son corps a été vidé de presque tout son mana."

Tahrren acquiesça.

"En effet. Je pensais que tu serais capable de le soigner."

Ophélie réfuta cependant ce que Tahrren avançait.

"Non. Malheureusement, les sorts de guérison et de restauration n'ont aucune influence sur le flux de mana, seulement sur les blessures et la fatigue physique. Il existe bien des sorts de transmission de mana, mais ceux-ci sont complexes et risqués car ciblent directement le cœur de mana. Sachant que je ne maîtrise pas ces sorts, si une étape de la procédure est mal réalisée, nous ne ferons qu'aggraver la situation. Cela pourrait même le tuer. Malheureusement, le seul remède qui me vient à l'esprit, c'est le repos. Heureusement, le Père Andréa est un nain. Avec le peu d'affinité qu'ils ont avec la magie, il devrait vite récupérer. Peut-être même sera-t-il capable de parler d'ici demain."

Tahrren sourit légèrement. Tout n'était pas parfait, mais il était soulagé car tout allait dans son sens. Grâce au Père Andréa, ils allaient enfin pouvoir avoir les réponses qu'ils cherchaient tant. Que se passait-il donc au sein de la Ville Sainte ? Où se cachait donc l'immortel qui était à l'origine de ces attaques de monstres ? Pourquoi un prêtre avait-il donc attaqué Eiji ? Tant de questions qui le travaillaient depuis voilà quelques jours maintenant.

Il s'accroupit à côté du prêtre, le leva et le porta sur son dos.

"Allons-y, Ophélie. Rentrons avant que la nuit ne tombe et laissons le Père se reposer. Les informations qu'il dispose nous serons capitales.