Une brume matinale enveloppait la vaste cour du Quartier Général de la Guilde des Chasseurs. Plus d'une centaine de candidats s'étaient rassemblés, les yeux emplis d'ambition ou d'inquiétude.
Moi, Kael, je me tenais au milieu de cette foule serrée, le cœur battant à tout rompre.
— Il y a autant de monde… ? murmurai-je en jetant un œil autour de moi.
Certains semblaient parfaitement à l'aise, d'autres affichaient un air sérieux ou un peu trop confiant. Je sentais déjà la tension monter.
Face à nous, trois examinateurs se tenaient côte à côte. On les disait tous extrêmement puissants.
Seran Veyra : un homme imposant, dont la simple présence vous mettait la pression. Ragnar Dorn : un colosse, la peau tannée et un regard qui semblait jauger chaque candidat. Raven Thalor : une femme à l'expression froide, comme si rien ne pouvait l'émouvoir.
Lorsque Seran prit la parole, son timbre grave résonna dans toute la cour :
— La première épreuve sera une course. Vous devrez rejoindre cette tour en ruine, là-bas, sur la colline.
Il désigna du doigt une silhouette sombre au loin. Le chemin traversait une forêt dense et des pentes escarpées.
— Tous les coups sont permis, ajouta Ragnar en balayant la foule du regard. À la Guilde des Chasseurs, seule compte la force de votre Aura… et votre détermination à l'exploiter.
— Allez-y, conclut simplement Raven.
Un cor retentit. Le sol vibra sous la foule qui s'élça en désordre. Certains partirent en trombe, d'autres contournèrent la masse pour gagner du temps.
Je restai en arrière. Je savais que je n'étais pas le plus rapide, ni le plus fort. La prudence, pour moi, était une stratégie.
— Regarde, c'est Draven !
Le nom siffla dans l'air. Draven Veyra. Lié à Seran. Redouté.
Il se déplaçait avec une grâce féroce. Son Aura du Vent formait des bourrasques qui projetaient les autres sans effort.
— Sérieusement… Il est monstrueux… soufflai-je.
Plus loin, Mira Tolwyn avçait avec élégance. Son Aura d'eau dansait autour d'elle comme un bouclier fluide. Elle semblait glisser plutôt que courir.
Soren, lui, n'était qu'éclairs et silence. Discret, rapide, efficace. Son Aura de foudre l'enveloppait en un souffle de vitesse.
Et moi… ? Je n'avais même pas encore compris la nature de mon Aura. Juste une étincelle, fugace, timide. J'évitais les affrontements, empruntais des détours, et contournai la route directe.
Mais soudain, une tornade. Draven surgit devant moi.
— Oh… tiens, un petit nouveau, dit-il, moqueur.
Il leva la main. L'air ondula. Un souffle déchira l'espace où je me tenais.
Par pur réflexe, je plongeai au sol.
Une bourrasque passa au-dessus de moi, criblant le sol de débris. Je roulai, tremblant, mais debout.
Draven m'observa, esquissa un sourire narquois, puis tourna les talons.
— J'ai eu de la chance… soufflai-je.
Je repris la course. Les bruits de combat se mêlaient aux éclats d'Aura. Foudre, vent, eau, feu… Un vacarme d'éléments en furie.
Enfin, la tour apparut.
Essoufflé, épuisé, je franchis l'entrée. Draven, Mira et Soren étaient déjà là, conversant calmement avec les examinateurs.
Peu à peu, d'autres candidats arrivèrent. Quand Seran annonça les meilleurs, seuls trois noms sortirent : Draven, Mira, Soren. Pas le mien.
Je ne fus pas disqualifié. Mais j'étais invisible.
Une douleur sourde. Un pincement au cœur.
— Je n'ai pas montré grand-chose… mais je suis encore là.
La nuit tomba sur la tour. Couché sur un sol froid, les yeux ouverts vers les pierres noires du plafond, je répétais en silence :
— Je ne resterai pas dans l'ombre. Je deviendrai fort. Assez pour qu'on m'entende. Assez pour que plus personne ne m'oublie.