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Chapter 5 - Chapitre 4

Lâchant un soupir mêlé de fatigue et d'agacement, je m'allongeai sur le sol dur et poussiéreux de la zone d'entraînement, le regard perdu dans un ciel où l'aube finissait de mourir.

Mon corps protestait au moindre mouvement, chaque muscle endolori par l'effort.

'Cet instructeur est vraiment sadique… ' pensai-je en étouffant un grognement de douleur.

Avec peine, je me redressai et adossai mon dos au mur froid, observant les autres cadets. La plupart étaient affalés, incapables de bouger, comme des cadavres après une longue bataille, murmurais-je en les voyant dans cet état lamentable.

Seuls quelques-uns semblaient déjà remis…

"Ils utilisent du mana ?" soufflai-je, intrigué.

Après tout ce n'était pas vraiment interdit, alors pourquoi s'en priver ?

Prenant une inspiration, je relâchai une fine couche d'énergie dans mon corps. Une chaleur apaisante se diffusa lentement, soulageant mes muscles…

Avant qu'un frisson ne me parcoure. Puis une migraine brutale me frappa, semblable à celle de la veille.

La douleur enfla, montant en vagues dans mon crâne, pulsant comme un cœur affolé…

Comme si elle se nourrissait ?

Je sortis brusquement de ma méditation, haletant, et ouvris les yeux.

Un regard pesant s'était posé sur moi.

L'instructeur.

Il ne disait rien, ne fronçait pas les sourcils, ne haussait pas la voix… Il observait. Depuis combien de temps ?

Par réflexe, j'interrompis aussitôt le flux de mana, autant à cause de la douleur que de cette attention dérangeante.

L'ombre d'un sourire passa sur son visage avant qu'il ne reporte son attention ailleurs et ne se dirige vers le bâtiment administratif.

Un simple regard. Pas un mot.

Mais pourquoi avais-je l'impression qu'il venait de confirmer quelque chose à mon sujet ?

Je restai figé, plus par épuisement que par intérêt pour ces structures austères où se terraient les êtres diaboliques qu'on appelait instructeurs. J'étais encore perdu dans mes pensées lorsqu'une voix retentit tout près de mon oreille.

Beaucoup trop près.

Je sursautai violemment, m'éloignant dans un réflexe paniqué. Malheureusement, mon corps perclus de courbatures ne suivit pas, et je me retrouvai à quatre pattes, haletant de douleur à quelques mètres de ma place initiale.

" Wow, quelle agilité !" lança une voix amusée.

Je levai les yeux sur un garçon aux cheveux bruns coupés court et aux yeux verts rieurs.

Erca.

L'un de mes camarades de chambre. Mon aîné de deux ans à peine.

"Frère ?!" grognai-je avec un sourire agacé.

"Ça fait combien de fois que je te fais le même coup ? Et pourquoi tu continues de m'appeler comme ça ?"

"Parce que t'es vieux", dis-je en détournant le regard vers le centre du terrain.

Comme tous les enfants nés avec du sang Vritra, j'avais été enlevé très tôt à ma famille et placé dans un environnement propice à l'éveil de mon potentiel. Mais contrairement à ce que j'imaginais… nous n'avions pas été adoptés par des hauts sangs. Pas de foyer, pas d'éducation raffinée, et encore moins l'attention d'une famille noble.

Et pour une raison ou une autre, je m'étais retrouvé ici.

Dans un centre du Dominion central, avec tous ces autres enfants.

L'intégration n'avait rien eu d'évident. Dès mon arrivée, les regards insistants des autres avaient été une constante. Certains étaient curieux, d'autres méfiants.

Et mon apparence n'aidait en rien : une peau plus pâle que la moyenne, des yeux d'un bleu inégal… et ce comportement réservé qui me gardait à l'écart.

Dans un environnement où la force et l'ambition régnaient, la solitude était souvent perçue comme une faiblesse.

Erca fut le premier à briser cette barrière.

Sans me laisser le choix, il s'était assis en face de moi lors d'un repas et avait commencé à parler, d'un ton léger. Ce jour-là, je ne répondis rien, me contentant de l'ignorer.

Mais il revint.

Le lendemain, puis le jour suivant.

À chaque fois, il ponctuait ses phrases d'un grand sourire et finissait par me tendre un morceau de pain piqué dans son propre plateau, sous prétexte que je ne mangeais pas assez.

Et un jour, sans trop savoir pourquoi, je le pris.

Ce simple geste marqua le début d'une étrange camaraderie.

Laim, lui, avait une approche bien différente. Plutôt que de me parler, il s'arrangeait pour que je le suive naturellement, que ce soit pour les tâches quotidiennes, les entraînements ou les rares sorties en ville. Il agissait comme si mon intégration était une évidence, me donnant des ordres ou des recommandations sans jamais me demander mon avis.

Un jour, après une séance d'entraînement particulièrement éprouvante, il lâcha distraitement :

"T'essaies d'être un fantôme ou quoi ? Si t'as du mal, dis-le. On est pas là pour se bouffer entre nous."

Direct, mais honnête. Il ne me forçait pas à parler, juste à comprendre que je n'étais pas seul.

Les jours passèrent, et d'autres suivirent.

Un garçon du nom de Tyrel me corrigea sur ma posture au combat. Une fille, Mirei, partagea son manteau avec moi lors d'un entraînement sous la pluie battante.

Petit à petit, à force de ces interactions anodines…

J'avais fini par m'intégrer, sans même m'en rendre compte.

Même si une part de moi restait toujours en retrait, une autre commençait à comprendre.

Je n'étais plus complètement seul.

Un sourire idiot m'échappa, ce qui fit éclater Erca de rire. Il essuya une larme au coin de son œil en se relevant.

"Allez, viens, l'instructeur va former les binômes pour les duels."

" D'accord." J'ai finalement dis en lui prenant la main.