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Chapter 6 - 6- Sur les traces d'une étrange entité

"Alors, tu es prêt ?"

Adonis avançait lentement vers lui, tirant doucement son cheval au seul moyen de sa main gauche. Ce dernier était équipé d'une selle banale, quoique robuste, ainsi que d'un carquois muni de plusieurs flèches de splendide qualité. Quant au Roi, celui-ci portait une tenue en cuir ainsi qu'un arc accroché sur lui en bandoulière.

"Quand tu veux !" Lui répondit Ajax, rangeant ses deux lames dans leurs fourreaux respectifs.

Au-dessus d'eux, la nuit battait son plein de même que la lune semblait pleine. Malheureusement, les étoiles, elles, n'étaient point au rendez-vous. Lorsqu'Ajax eut finalement bouclé les derniers préparatifs de sa monture, tous deux enfilèrent ensuite de longs manteaux noirs munis de larges capuches. Ils se dirigèrent pour poursuivre, non pas vers la herse principale, mais vers un lieu aussi atypique que reculé, non loin du Capitale Nord.

Après s'être assuré une dernière fois qu'ils n'étaient pas suivis, les deux compagnons entamèrent leur affaire. Devant eux, un haut mur, recouvert de plantes jusqu'au sommet, leur faisait face. Adonis tendit ensuite sa main.

"Grace des Braises Ardentes..." Pensa le Roi alors même qu'une faible lueur blanche se dégageait de celle-ci.

Cependant, ladite étincelle ne subsista point davantage, emportant néanmoins avec elle une infime partie du feuillage présent devant eux. A la place, se devinait une étrange porte en bois prenant la forme d'un arc de cercle. Cette dernière grinça fort lorsqu'Ajax tenta de l'entrouvrir à tel point que l'on entendit même, dans le noir profond de la nuit, les stridents cris des corbeaux résonner au loin.

L'accès donnait sur un long couloir aux parois rocheuses, sur lesquels étaient disposés, à intervalle régulier, de multiples torches allumées. Les pierres, quant à elles, étaient d'un rouge pale, celles-ci même recouvertes de nombreuses traces de saleté, témoignant de ce fait d'une faible utilisation de ce passage.

Au bout de deux minutes passées à cheminer dans celui-ci, les deux frères aboutirent sur un petit grillage aux barreaux épais qu'Adonis s'empressa d'ouvrir à l'aide d'une clé dissimulée dans ses vêtements. À l'extérieur, malgré l'obscurcissement qui dominait les cieux, ils pouvaient apercevoir un petit sentier menant vers la frondaison. Une fois dépassé de plusieurs mètres la citadelle, les deux camarades de voyage montèrent rapidement, puis galopèrent à vive allure jusqu'au cœur de la forêt.

Ici, malgré la lanterne qu'ils avaient apportée, se repérer demeurait chose très difficile d'autant plus que l'atmosphère devenait de plus en plus lugubre à mesure de leur avancée. Ils pouvaient notamment relever ici le cas des arbres dont les formes paraissaient de plus en plus effrayantes ou encore celui des hiboux, dont le résonnement des hululements leur procurait des sueurs froides par moment.

"J'imagine que tu vas enfin me dire ce qu'on fait ici, à une heure pareille, demanda Ajax.

— Je te pensais plus aventurier que cela mais soit. Si j'ai décidé de venir ici, c'est que, depuis plusieurs jours, des villageois vivants dans les environs se plaignent d'apparition suspectes. J'ai donc décidé d'y jeter un coup d'œil. Enfin ça, c'est la première raison.

— Et la seconde...

— Je te l'expliquerai plus tard."

Au bout d'un certain temps qu'ils jugèrent pour le moins indéterminable, Adonis fit un ferme signe de main à son frère, intimant ainsi celui-ci de stopper son avancée. Quelque chose n'allait pas. Ajax l'avait également remarqué. C'était comme si tout autour d'eux devenaient, à leur yeux, étrangers, distants, par ailleurs hostile, voire dangereux. Un net sentiment d'insécurité, devenant de plus en plus pesant alors même qu'il ne subsistait rien aux alentours si ce n'était le vent froid de même que le silence de mort régnant sur place. C'était effectivement là une sensation bien désagréable.

"A vrai dire, se dit Ajax, j'avais déjà ce ressenti à l'entrée dans cette forêt, mais l'on se trouve à présent à un point où l'on ne peut faire mine de l'ignorer. Quoi qu'il s'agisse nous devons rester sur nos gardes car, pour l'instant, nous sommes à la total merci de ce lieu."

Ici, l'énergie qui s'en dégageait ne correspondait pour le coup pas de l'énergie mystique, ou du moins pas complètement. Bien que l'on pouvait en discerner une petite parcelle dans cette étrange atmosphère, l'essentiel de cette dernière demeurait tout autre comme si...

"Ajax, s'écria alors Adonis, fais bien attention à ce qui t'entoure. Il semblerait qu'un corps étranger se repend par le biais de l'énergie mystique des environs bien que je ne puisse identifier précisément sa nature ni ses effets.

— Très bien. Dans ce cas, je propose que l'on poursuive à pied pour plus de vigilance. De toute façon, les chevaux sont eux aussi tétanisés par la situation et je doute qu'ils daigneront continuer la route dans ces conditions.

— Dans ce cas, procédons ainsi. "

Par conséquent, les deux aventuriers descendirent de leur monture, les attachèrent à un arbre non loin en prenant le soin d'emporter l'équipement nécessaire, pour finalement reprendre la route de plus belle.

Au passage, Ils se rendirent, par ailleurs compte que marcher s'avérait être ici tout aussi laborieux que de voyager à cheval. En effet, lorsqu'ils ne se prenaient pas une branche qu'ils n'avaient pas vu, soit ils glissaient faute du terrain, soit ils se faisaient surprendre par la faune nocturne des alentours.

"Bon, maintenant que l'on a un peu de temps, je vais pouvoir t'expliquer la deuxième raison, dit soudainement Adonis.

— Je t'écoute.

— J'imagine que tu te souviens de cette "fameuse lettre."

Ajax acquiesça.

"Eh bien, j'ai quelques doutes quant à son origine. En effet, quand on y repense, ça ne pouvait pas être les istareks. Si ça avait été le cas, cela aurait gâcher leur attaque surprise et, dans le cas contraire, où ils auraient respecté les termes de la lettre, ils nous auraient laissé un peu de temps afin de rassembler leurs propres troupes en nombre suffisant et leur assaut se serait conclu par pire qu'un bain de sang...

— Donc ? Où veux-tu en venir ?

— Ça me paraît évident, non ? La lettre venait de quelqu'un d'autre.

— Cela, je l'avais bien compris. Ce que je veux dire c'est, est ce que tu as une idée de qui cela pourrait être ?

— Tu brules les étapes, petit frère. Les gardiens de cellule m'ont néanmoins signalé la disparition de Malkir. La logique voudrait qu'on commence par là. Et devine qui va se charger d'enquêter sur lui..."

— Putain, tu sais que tu me soûles des fois." Conclut son frère la mine niaise.

A partir de là, les deux vissariens furent de nouveaux surpris par l'allure soudaine que prenait à présent le terrain.

"Qu'est-ce que c'est que ce bordel..." S'étonna alors Adonis.

En amont, tous arbres, sur un rayon d'environ cinquante, voire soixante mètres au plus, demeuraient complétement détruits, ne laissant sur ce vaste espace dégagé que débris éparpillés, ou carbonisés. Plus loin encore, pouvait être perçut une forte et putride odeur de mort, aussitôt accompagnés de dizaines de cadavres, tantôt écartelés, tantôt brulés, à l'instar de la flore rencontré antérieurement. La chair de ces malheureux s'avérait cela dit encore fraîche, ce qui ne manqua pas aux charognards de se disputer les nombreux organes en décomposition, dans ce qui semblait à leurs yeux, être un festin de roi. Malheureusement, Lorsque les sombres volatiles s'aperçurent de la présence des deux guerriers, ceux-ci s'empressèrent de déguerpir, laissant l'immonde trésor à même le sol.

"Quand les villageois parlaient d'apparition suspectes, je ne pensais pas que ce serait aussi grave que ça, dit soudainement Ajax.

— En tout cas, la créature qui a fait ça ne se trouve pas très loin et est visiblement très grosse. Si on poursuit vers le sud, on tombera sur un petit village. On tachera d'en apprendre plus une fois là-bas." Dit le Roi en s'engageant de nouveau dans la forêt d'un pas cette fois-ci plus prudent.

Tandis que les deux explorateurs continuaient d'avancer, le regard attentif aux environs, ces derniers se mirent soudain à entendre un hurlement d'une perçante sonorité. Il fut tout aussi brutal que saisissant, rock et puissant, qui plus est bien supérieur en termes de portée, et ce malgré sa similarité avec bon nombre d'espèces environnantes. Le simple fait de l'entendre les paralysa sur place, d'autant plus que celui-ci se manifesta au summum d'une nuit d'un noir quasi total.

"On approche à ce que je vois." Dit alors Adonis.

Et pour cause. Plus ils s'approchaient dudit lieu, plus ils discernaient significativement cette mystérieuse énergie empoisonnée perçut plus tôt. Mais ce ne fut point là tout. Il est vrai, Adonis remarqua également que celle-ci, au fil de leur déplacements, prenait une forme de plus en plus spécifique, bien que cette dernière demeurait encore vraisemblablement méconnaissable. Cela dit, après moultes minutes à suivre les singulières traces, les deux finirent par tomber sur ce qu'ils auraient coutume de nommer une monstruosité. Bien que dans un premier temps, décontenancés, les guerriers vissariens en furent par la suite fort réjouis car il s'agissait sans nul doute là de la fameuse créature recherchée depuis maintenant un long moment.

Il s'agissait là d'une sorte de loup d'environ deux mètres cinquante de haut pour cinq mètres soixante de large. Ses yeux brillants, malgré leur teint bleu azur, ne masquaient cependant point son abondante et épaisse salive, distinguable même par-delà les buissons derrière lesquels ils demeuraient tapis. Pour finir, ses crocs acérés, telles d'aiguisées lames de poignards, s'accordaient habillement avec le bout de sa queue de laquelle s'y distinguait de multiples piques dont les pointes ne permettaient le doute quant à leur efficacité.

La créature décrivait, de façon générale, des cercles, allait et venait sans arrêt, tout en poussant des dizaines de cris, tous plus stridents et monstrueux les uns que les autres. De ce fait, les deux guerriers vissariens sautèrent sur l'occasion, profitant de cette agitation afin de l'encercler de façon discrète.

Arrivée à mi-chemin de sa position initialement prévue, Ajax senti soudain le vacarme derrière lui cesser de manière aussi soudaine qu'inattendue. Il savait pertinemment ce que cela voulait dire : la créature avait, de son côté, senti quelque chose. Il devait rester prudent. Un seul faux pas mènerai sans l'ombre d'un doute à l'échec du plan, ce qui en toute logique, ne semblait point une option. Il dégaina alors ses deux lames de manière délicate, tentant de même d'avancer à pas de velours tel un prédateur face à sa proie.

Cependant, la monstruosité, se mit alors à cracher de sa large et effrayante gueule une colossale quantité d'énergie de couleur noire- presque invisible pour le coup à l'œil nu- dans un premier temps de façon rectiligne, avant de finalement décider de la répandre à plus grande échelle en décrivant des cercles sur elle-même de manière précipitée. Au bout de plusieurs secondes, le puissant jet finit par s'estomper donnant à présent à l'ensemble de l'espace une épouvantable apparence de par ses hautes flammes distinguables de toutes part.

Adonis vit, pour sa part, les flammes se propager à une vitesse ahurissante parmi les plantes et les arbres favorisant ainsi la propagation de l'immense brasier.

"Merde. Pour le coup, peu d'option s'offre à nous, se dit le Roi. Je peux toujours utiliser la terre, mais à quoi bon. Ou bien concentré une masse suffisante d'énergie mystique. Non, non, non, qu'est-ce que je raconte, cela serait absurde. Ou peut-être que... attends, énergie...concentrer...je crois que j'ai trouvé la solution idéale !!"

Après quelques instants d'intense concentration, les flammes alentours se virent par la suite comme attirées vers le point de convergence qu'était Adonis -ou plutôt l'énergie mystique qu'il matérialisait- alors même que ce dernier s'évertua de donner à celles-ci une forme sphérique, pour le coup grandiose. Ce dernier, sans perdre une seconde de plus, la propulsa, une fois achevée, de vive allure au moyen d'une puissante onde de choc, afin que celle-ci, s'abatte sur la créature, provoquant alors une explosion des plus spectaculaire. Cela étant, une épaisse fumée recouvrant les parages fit tout naturellement son apparition. À travers elle, les éléments environnants s'avéreraient très difficiles à distinguer, voire impossible à percevoir, pour certains.

Adonis, après cela, tenta d'observer les mouvements du monstre depuis sa nouvelle cachette. Malgré le fait qu'il ne pouvait absolument rien voir dans ce nuage opaque, il arriva néanmoins à la localiser à partir de l'énergie qu'elle émanait. Visiblement, l'animal s'affolait dans tous les sens, essayant de toute évidence de retrouver ses repères, mais malheureusement, c'était là une bien veine tentative.

"Tout a fonctionné comme prévu. En concentrant une gigantesque masse de feu à l'aide de l'énergie mystique pour ensuite la faire déferler sur la créature cela nous aura permis de nous débarrasser des flammes trop proches mais également de générer ce brouillard. Désolé pour toi. Je vais maintenir cette brume avec l'aide de mon énergie mystique que j'ai déployée dans l'air. Vu ce que tu es déjà capable de faire, il vaut mieux se méfier."

A l'intérieur même de l'épais nuage de fumée, tandis que le loup géant pivotait sur lui-même pour la énième fois, Ajax, tel un assassin, fonça par derrière lui, lames déployées, regard rivé sur sa cible, la mine imperturbable. Flanc, thorax, épaule, bas ventre, rien ne semblait visiblement échappé aux prodigieuses lames du fin bretteur, tant sa vitesse, sa puissance, mais également sa maitrise du terrain, paraissaient étonnante, qui plus est sans faille. Au bout du compte, le guerrier vissarien tenta d'achever cette altercation en déposant cette fois ci un de ses estocs au niveau de son cerveau. Malheureusement pour lui, la tentative échoua, donnant ainsi à la créature la possibilité de riposter violement à l'aide de sa monstrueuse queue, profitant de la position aérienne qu'adoptait alors Ajax.

Ce dernier voltigea alors au loin d'une vitesse phénoménale, ne stoppant finalement celle-ci qu'à l'aide d'un gigantesque arbre situé plus loin derrière lui. Au même moment, alors que la brume se mettait progressivement à disparaître, il aperçut, du coin de l'œil, Adonis accourir dans sa direction.

"Comment ça va ?" Lui demanda-t-il en premier lieu.

C'est alors qu'Ajax se rendit compte de la présence de deux piques légèrement enfoncés dans son abdomen ensanglanté. Celui-ci se contenta alors de les retirer bien que la douleur ressentie tenta de le persuader du contraire.

"Ça peut aller..." Lui répondit-il en prenant une grande inspiration.

Maintenant que le nuage de fumée avait intégralement disparu, le loup géant était désormais complètement visible. Sur sa peau, plusieurs dizaines de coupures étaient discernables, dont la plupart, loin d'être bénignes, laissaient également entrevoir de gigantesques quantités de sang, coulants sans discontinu.

"Waouh, en tout cas, tu ne l'as pas raté celui-là !" S'exclama Adonis.

Cependant, devant eux, le monstre ne paraissait point montrer de quelconques signes de douleur par rapport à ses blessures. Il paraissait d'ailleurs particulièrement calme. Au même instant, sous les yeux étonnés d'Ajax et Adonis, une grande quantité de sable jaillit soudainement du sol puis vint se poser délicatement sur le corps du loup géant, plus précisément sur ces multiples blessures. Cette poudre terrestre s'engouffra ensuite peu à peu dans sa peau, effaçant en un temps record toutes traces d'hématomes.

"Je vois, commença Adonis. D'après tout ce qu'on vient de voir jusqu'à présent, on peut relever deux choses majeures par rapport à cette créature, ou plutôt par rapport à "cette substance". D'une part, le corps étranger recouvrant la zone détint visiblement sur l'aspect physique des animaux.

— Et d'autre part, il agit également sur l'organisme de ces derniers, en modifiant leur constitution interne. Avec ça, on passe d'un loup banal à une monstruosité capable de débloquer plusieurs facultés de manière arbitraire.

— Ce qui fait de cette créature un puissant adversaire ! Pour ma part, je la dis classe A.

— En effet. Mais ce n'est pas un problème, car nous aussi on a du réponda...

Ajax fut alors coupé au milieu de sa phrase. Devant lui, une gigantesque sphère, d'une couleur s'apparentant cette fois-ci à un plus sombre violet fonçait au même moment sur eux, décrivant une trajectoire étonnamment précise. Fort heureusement, ce dernier, de son impressionnante réactivité agit presque aussitôt, se servant pour le coup de la distance crée -encore raisonnable- afin de générer à l'aide de son énergie restante une haute barrière faite de terre et de branchages. Par la suite, la sphère, au moment du heurt, vit alors sa puissance considérablement divisée sur l'entière surface de la paroi, donnant ainsi à l'explosion une force d'impact si faible que seules quelques volutes de fumée purent témoignées de sa présence.

Seulement, le problème ne restait point résolu car, en effet, il subsistait encore, au cœur de la barrière, une source d'énergie certes infime, mais néanmoins fortement compactée, ce qui s'avérait en l'occurrence particulièrement dangereux.

A ce titre, Ajax alerta son Roi sans tarder, permettant ainsi aux deux de s'extirper à environ trente mètres de haut par la voie du ciel au moyen d'une sorte de plateforme solide faite d'air. De là, les deux purent tout naturellement observer le spectacle, de toute évidence ébahis par ce qui se produisait sous leurs yeux. Au-dessous d'eux, le minuscule point perçut préalablement, se mit à grossir aussi singulièrement que rapidement, à tel point que l'on ne vit bientôt plus qu'une colossale et vive lumière dorée dominer l'espace aux détriments du reste des éléments bien infimes en comparaison. Mais ce ne fut pas le plus impressionnant. De cette même lumière, jaillirent, tout aussi promptement, plusieurs dizaines, voire centaines d'éclairs à la seconde de manière continue. Ces petits fils électriques se dispersèrent alors dans toutes les directions possibles, s'étendant par conséquent sur un large rayon, détruisant, sur leur passage, toute faune ou flore ayant le malheur de se trouver sur le périmètre indiqué.

"Voilà qui est très astucieux. La boule d'énergie que mon barrage a aspirée n'était qu'une feinte. La réelle attaque venait de son noyau. Pas étonnant, dans ces cas-là, que certains villageois soit tombé dans le piège." Pensa Ajax alors même qu'en dessous de lui, l'attaque diminuait progressivement, jusqu'à ce qu'il ne subsiste d'elle que le néant.

"Regarde, Ajax, débuta Adonis. Je pense qu'il vient là de nous montrer ce dont il est réellement capable. Je t'avoue que cela me surprend beaucoup. Mais il se trouve que son attaque la plus forte représente également un gros point faible pour lui.

— Développe...

— Pas besoin, je suis sûr que tu as parfaitement compris. Aller, à toi de jouer ! "

Après cela, le Roi chercha du regard un endroit à couvert où se poser. C'est ainsi que, deux secondes plus tard, celui-ci se dirigea à toute allure vers un arbre situé quelques mètres plus loin. Bien que ce dernier eût, par miracle, résister à l'explosion, il en conservait néanmoins d'importantes traces de meurtrissure.

Pour sa part, Ajax se contenta, dans un premier temps, d'observer en contrebas les mouvements de la créature. Celle-ci s'était pour sûr remis à tourner en rond, sans doute persuadée de la mort de ses puissants opposants. Cependant, au même moment, Ajax fut pris d'un soudain étonnement. En effet, lorsque celui-ci prit de nouveau le temps d'examiner la mystérieuse énergie émanant de l'affreux être, il se rendit brusquement compte d'un détail qu'il avait jusque-là omis, et qui pourrait, fort heureusement, changer l'issu des choses.

"Je vois où tu voulais en venir Adonis. Puissant de l'extérieur, mais vulnérable intérieurement..."

Il descendit ensuite à sa rencontre d'une mine sereine. Non mieux, d'une mine énergique, prête à en finir ici même et sans tarder. Une fois qu'il mit pied à terre, le jeune guerrier frotta frénétiquement ses lames entre-elles, comme pour signifier sa présence. Le loup géant, à la suite de cet appel provocateur, fit subitement volte-face, surpris de retrouver son vieil ennemi en face de lui. Ajax, en réponse à cela, jeta alors ses deux épées au loin.

"ON RÉGLERA ÇA À ARMES ÉGALES !!"

La bête, de son côté, se contenta de serrer les dents, exposant ainsi ses crocs acérés. Ajax se mit, après coup, en garde, dévisageant cette dernière d'un regard froid et meurtrier. Au même moment, une fine, mais intense aura violette, se dessinant progressivement aux contours de son corps, fit à son tour son apparition.

Une seconde après, comme si ce dernier s'était volatilisé, Ajax disparu, puis reparut devant le monstre, poing serrer, prêt à porter la frappe. Cette dernière, envoyée d'une violente impulsion, atterrit directement sur la mâchoire gauche du loup, de laquelle s'en dégagea plusieurs traces sanglantes, la propulsant de même sur quelques cinq ou dix mètres.

Après quelques instants, cette dernière se releva, visiblement en pleine possession de ses moyens. Elle chargea donc par la suite Ajax d'une allure assassine, crocs et griffes déployés. Malheureusement pour elle, Ajax, de par sa pleine puissance, para aisément l'évidente attaque, interposant son bras gauche entre sa propre tête et la gueule de la créature, tout en immobilisant, l'espace d'un bref instant, ses rapides et violents mouvements. C'était là, l'occasion idéale. Celui-ci profita alors naturellement de celle-ci afin de lui assener un autre coup de poing, cette fois-ci au niveau de l'œil, dégageant de ce fait l'immondice, qui pour sa part, se mit à tituber, quelque peu sonnée.

Ne lui laissant manifestement aucun répit, Ajax poursuivit dans sa lancée, tendant subséquemment ses deux mains. Deux orbes d'une blancheur extrême apparurent alors devant lui, immédiatement propulsées en direction de l'adversaire, lui endommageant sévèrement ses pattes antérieures.

"Nous y voilà..." Se dit Ajax tandis qu'en face de lui, la créature chargeait une seconde fois cette dévastatrice attaque.

"MAINTENAAAAAAAAAAANNNNT", s'écria-t-il soudain.

Derrière lui, une flèche fendit alors l'air, se précipitant par ailleurs sur le guerrier vissarien. Arriver à quelques centimètres de lui, Ajax, d'une rapidité hors norme, se décala ainsi sur sa droite, laissant l'aiguille poursuivre sa trajectoire. Finalement, cette dernière transperça la sphère d'énergie de même que son noyau destructeur.

"Pas deux fois... " Pensa alors Ajax tout en s'efforçant de s'éloigner le plus possible de la portée de l'attaque.

Au final, au bout de plusieurs secondes d'intenses explosions, il ne subsista de l'attaque qu'une faible fumée se dégageant du sol, alors même que devant eux la créature n'était plus, tant sur le plan physique qu'énergétique. Entre-temps, la flamme écarlate qui, précédemment, entourait Ajax, avait, quant à elle, également disparue, marquant ainsi, officiellement, la fin de cet étonnant affrontement, aussi épuisant qu'enrichissant.

Bien plus tard dans la nuit, les deux combattants finirent par tomber sur ce fameux village recherché, du nom de Nansir, qui, sans grande surprise, demeurait profondément endormi. Les quelques personnes encore debout ne dépassaient pour sûr pas la dizaine, comprenant, il est vrai, quelques hommes particulièrement ivres, mais également un duo de filles de joie, dont le service autorisait sans doute de courtes pauses avant la reprise. En se dirigeant de ce fait vers ledit bâtiment, ces derniers constatèrent, en premier lieu, une large pancarte en bois, soutenue de robustes chaînes, indiquant alors : "L'auberge du Bois aux loups". Plus haut encore, pouvait également être observé un étage, muni de plusieurs fenêtres, dont certaines, encore éclairées, laissait aisément spéculer quant aux activités qui s'y pratiquaient.

L'atmosphère, une fois l'entrée franchie, se révéla, à son tour, à l'image de ce qu'ils avaient pu facilement s'imaginer. En premier point, et loin des plus subtil, les deux relevèrent une certaine quiétude régnant sur place. Bien que quelques peu pesante au fur et mesure du secondes, celle-ci s'avérait par ailleurs fort agréable en comparaison de ce qu'ils avaient ressenti à l'entrée de la forêt. De plus, mis à part le plan de travail de l'aubergiste situé au fond de la salle, seules quelques tables étaient mises à disposition, faute de place. Pour finir, plusieurs bougies étaient dispersées dans la pièce, et, s'étant habitué à l'obscurité de la nuit, Adonis et Ajax furent quelque peu déstabilisés par ce brusque changement de luminosité, bien que cela ne fut que de courte durée.

Comme il n'y avait que peu de monde, les deux n'eurent de difficulté à trouver une table à leur convenance. Après qu'Ajax eut intimé à son Roi de prendre place, ce dernier alla quémander une boisson à l'aubergiste. Quelques instants plus tard, celui-ci revint avec deux grosses chopes, emplies de vin à l'aspect alléchant.

"Sacré combat, dit Ajax en avalant une gorgée.

— En effet. Je reconnais bien là la façon d'agir d'Alastyn. En ce qui concerne les plus petits villages, il ne déploiera pas une trop grande quantité d'hommes, les jugeant bien trop insignifiants pour se permettre un tel effort. Néanmoins, il lui reste une solution : imposer sa domination par la torture.

— je vois...

— Avec ce que l'on vient d'affronter, il peut contenir facilement les populations qu'il cherche à dominer tout en leur laissant une certaine liberté. Pour lui, ce n'est pas une question d'effusion de sang, mais bien de corruption.

— Et si jamais cela venait à perdurer, ce pays ne serait bientôt plus qu'un gigantesque cimetière, dit Ajax en marquant une courte pause, le temps de se resservir une lampée.

— Peu de temps après l'invasion, Morgan m'avait convoqué en privé dans les jardins du château. Une fois sur place, il me fit alors part de ses découvertes menées avec Cugeon aux sujets d'anciennes et mystérieuses ruines. Selon lui, en apprendre plus sur celles-ci nous permettrait sans aucun doute de prendre un radical avantage sur les istareks.

— Il serait donc au courant...

— Pour cela, je n'en sais rien.

— Peu importe, tu as bien fait de me parler de tout ça. Je crois qu'Alessio aussi aura une importante mission sur le dos..."