Les hommes froncèrent les sourcils, penchant la tête sur le côté. Cependant, malgré la confusion qui se lisait clairement sur leurs visages, tous obéirent immédiatement et retirèrent leurs capes.
« Donnez-les-moi », ordonna Gavriel et une fois encore, les hommes se regardèrent les uns les autres, à l'exception de Samuel qui n'avait pas quitté des yeux le prince vampire.
Un par un, les hommes s'approchèrent du carrosse, en file indienne, et remirent leurs capes qu'ils avaient préalablement secouées pour enlever toute poussière et saleté, et soigneusement pliées, à leur prince. Le visage du prince vampire était tellement sérieux que personne n'osait demander ce qu'il allait en faire. Les hommes ne pouvaient qu'attendre de voir ce qu'il avait l'intention de faire de toutes ces capes. Et puis, ils l'observèrent attentivement et lentement emmitoufler la jeune fille humaine avec leurs capes.
Leurs yeux s'écarquillèrent de surprise choquée, la bouche béante sans pouvoir prononcer un mot. Leur prince bougeait tellement lentement que pour eux, une tortue se déplacerait plus vite que lui. Les vampires se déplacent rapidement et il n'en allait pas autrement pour ce prince. En fait, la vitesse du Prince Gavriel était en réalité inégalée alors le voir maintenant se déplacer si atrocement lentement les faisait presque haléter comme s'ils allaient avoir des crises cardiaques. Pourquoi ? Pourquoi avait-il besoin de bouger d'une manière si exagérément lente comme ça ?
Aucun des hommes n'arrivait à justifier l'action de leur prince, ils ne comprenaient pas. Ils savaient que les femmes humaines étaient fragiles, mais n'était-il pas un peu trop protecteur ? Ou avait-il peur de la réveiller ? Mais pourquoi aurait-il peur de la réveiller ? Ils ne trouvaient pas de réponse logique à cela.
Les cinq vampires bien portants affichaient tous une moue renfrognée en restant immobiles, observant le spectacle ô combien lent devant eux. Ils n'auraient jamais cru que quelque chose comme ça puisse les frustrer à ce point. Même s'ils étaient juste spectateurs.
Après ce qui sembla une éternité, le prince finit enfin par placer la dernière cape autour de la jeune fille humaine. Les vampires expirèrent silencieusement et collectivement le souffle qu'ils avaient retenu, c'était comme s'il y avait un « enfin » inaudible qui avait été simultanément libéré, dans leurs esprits.
Maintenant complètement enveloppée dans des vêtements épais et tous noirs, Gavriel vérifia de nouveau pour s'assurer que la fille était correctement couverte de la tête aux pieds avant de finalement lever son visage. Il sortit du carrosse avec la fille dans ses bras et parla.
« Nous voyagerons lentement, » ordonna-t-il et avec cela, il bondit. Ses hommes le suivaient de près, heureux de bouger à nouveau enfin.
Mais ensuite, après quelques minutes, ses hommes se mirent à nouveau à bouder à propos de leur situation. Ils ne pouvaient pas s'en empêcher. C'est parce que le « lentement » mentionné par leur prince n'était même pas la sorte de lenteur que eux ou tous les vampires connaissaient. C'était… incroyablement, horriblement lent...
« Mon dieu… qu'arrive-t-il à Son Altesse ? Serait-il en train de penser que la fille mourrait s'il accélérait un peu ? » l'homme d'apparence joviale du nom de Levy disait ces mots à ses camarades par le regard. Il n'oserait pas murmurer, car le prince entendrait certainement. Les vampires pouvaient communiquer entre eux par télépathie dès lors qu'ils regardaient directement dans les yeux de l'autre.
Les camarades de Levy haussèrent simplement les épaules, mais leurs expressions montraient qu'ils étaient tous traversés par les mêmes pensées. Ils étaient parmi les meilleurs guerriers vampires – l'élite. Jamais, au grand jamais, ils n'avaient voyagé ou bougé aussi lentement de toute leur vie ! Ils ne savaient même pas que quelque chose comme cela pouvait les frustrer autant, avant maintenant qu'ils le voyaient et l'expérimentaient de première main.
« Bon sang ! Zolan, dis à Son Altesse que la fille n'allait certainement pas mourir si on accélérait un peu ! Pour l'amour du ciel. C'en est trop ! » Levy se plaignit encore.
« Pourquoi ne le lui dis-tu pas toi-même ? » répondit Zolan avec un regard désinvolte.
Frustré, Levy tourna son regard vers son camarade à l'air stoïque du nom de Luc, qui eut la même réaction.
« Pff, vas-y Reed ! » dit Levy au plus jeune d'apparence mais l'homme nommé Reed cligna innocemment des yeux et détourna son regard, ignorant Levy.
« Son Altesse agit bizarrement ! Qu'est-ce qui lui est arrivé ? Est-ce que les humains lui ont fait quelque chose ? L'un d'entre nous aurait dû au moins l'accompagner quand il a mis le pied sur la terre des humains ! » Levy continua de se plaindre, sautant ou rebondissant en arrière tout en faisant face à ses camarades.
« Ce n'est pas comme si c'était la première fois que Son Altesse mettait les pieds sur la terre des humains. Il avait même atteint l'empire du Sud à quelques reprises, » répondit Zolan.
« Mais c'est la première fois qu'il s'attarde à l'intérieur d'un château humain. Et si – »
« Arrête Levy, Son Altesse n'est pas un imbécile pour laisser quelqu'un faire une chose pareille. Et penses-tu vraiment qu'un humain pourrait faire quelque chose à Son Altesse ? »
« Mais… » Levy serra les lèvres et secoua la tête de frustration alors qu'ils continuaient le voyage le plus frustrant qu'ils aient jamais connu dans leur vie.
…
Lorsque Evie ouvrit les yeux, elle fut quelques doux instants dans une ignorance bienheureuse. Elle avait l'impression de s'être réveillée d'un sommeil très profond. Elle cligna des yeux, regard bovin, sans bouger pendant un moment et lorsqu'elle se retourna, elle se raidit immédiatement.
Un homme était allongé à côté d'elle, et il était… nu. Les yeux d'Evie s'écarquillèrent alors qu'elle se levait. Elle allait pousser un cri d'alarme mais lorsque son regard se posa sur le visage de l'homme, elle se figea.
La mémoire lui revint en flot. Tout depuis la nuit de son mariage, le sang et la terreur, jusqu'à ce qu'elle s'évanouisse dans le carrosse. Sa poitrine se serra si fort qu'elle dut tirer l'air désespérément dans ses poumons.
Lorsque respirer lentement devint plus facile, Evie avala difficilement en fixant l'homme, le visage de son mari vampire. L'apparence de celui-ci quand il avait ces terrifiants yeux rouge sang surgit soudainement dans son esprit, et un frisson parcourut son échine. La pensée de vouloir s'enfuir et s'échapper lui vint à l'esprit, mais son esprit l'écarta aussitôt, lui rappelant qu'elle n'avait nulle part où fuir et qu'elle ne pouvait rien faire.
Elle prit une profonde respiration, cherchant à reprendre le contrôle alors que ses yeux restaient fixés sur le visage de son mari. Plus elle le regardait, plus Evie avait l'impression que cela l'aidait à se calmer. Elle ne savait pas comment mais il semblait que sa beauté avait miraculeusement apaisé la peur dans son cœur. Était-ce parce qu'il semblait si paisible, innocent et inoffensif dans son sommeil ?
Evie mordit ses lèvres en essayant de se forcer à ne plus être hypnotisée par la beauté du prince vampire. Mais avant qu'elle puisse détourner son regard de lui, elle fut rappelée à sa nudité et ses yeux firent une fois encore le tour. Son visage s'empourpra tandis que ses yeux littéralement descendirent de son visage à son cou, puis à son torse musclé et svelte, et ensuite à ses abdominaux parfaits qui étaient à moitié couverts par la couverture. Les lèvres d'Evie s'entrouvrirent inconsciemment, totalement distraite et hypnotisée jusqu'à ce que quelque chose dans son esprit fasse partir le sang de son visage.
Ses yeux se dirigèrent vers elle-même et lorsqu'elle vit qu'elle était entièrement vêtue, elle lâcha finalement le souffle qu'elle ne savait pas qu'elle retenait.