Les hommes en uniforme, sous l'influence de la bouillie de maïs enchantée, furent habités par une force et une vitalité extraordinaires.
Guidés par Baba, l'homme de main par intérim du commandant en chef Babida, ils construisirent avant le coucher du soleil la moitié du pont au-dessus du marigot qui longeait la porte occidentale d'Okundé.
Le ciel était maintenant complètement assombri et les soldats impériaux avaient droit à un bon repas ainsi qu'à du repos après leur dur labeur dans la journée.
L'aide-de-camp intérimaire Baba les renvoya donc à la caserne et ordonna au cuisinier du quartier général de leur distribuer les meilleurs aliments dont il disposait ainsi que des boissons énergisantes.
Les hommes en uniforme reçurent des haricots rouges avec de la pâte de manioc huilée et du jus de mangue frais. Ils dînèrent et furent rassasiés.
Ils allèrent ensuite se coucher alors que la soirée ne faisait que commencer, car ils étaient extrêmement épuisés et devaient reprendre la construction du pont le lendemain matin.
La nuit continua son cours et Babida le bûcheron se tint tout seul sur le balcon du siège administratif, et pensa à toutes les nombreuses choses qui s'étaient produites récemment.
L'image de la jeune femme Suzie pleurant et serrant le cadavre de l'oncle Bibi contre elle, tarauda son esprit.
Il se demanda comment les funérailles de son compagnon et ancien commandant se déroulaient dans la cité impériale, Ékulé.
Néanmoins, il fut réconforté par le fait que l'aide-de-camp Polo s'y trouvait et était aux côtés de la nièce malheureuse, Suzie.
Il regretta par contre de ne pouvoir se rendre sur place pour assister la jeune femme car il avait une mission impériale à accomplir à Okundé et surtout le moment était hautement critique.
En effet, le bûcheron préparait le retour au village des trois volontaires de la montagne interdite et espérait les voir être poursuivis par le bébé monstre.
Il tourna son regard vers le côté ouest et aperçut au milieu de la nuit le pont en construction et fut très satisfait de l'avancée des travaux en une seule journée.
Babida le bûcheron fit une courte prière pour remercier les ancêtres de leur faveur sur ses hommes et lui, puis il quitta le balcon et se rendit directement dans la chambre principale pour invités du quartier général qu'il occupait toujours et s'assoupit.
Un nouveau jour se lèva sur Okundé.
Les soldats impériaux étaient déjà prêts à poursuivre la construction du pont au-dessus du marigot le long de la frontière ouest du village, sous la supervision de Baba, l'homme de main intérimaire du commandant en chef, Babida.
Pour montrer la voie à suivre, le jeunot planta la première pelle de la journée dans le tas de ciment.
Et sans plus attendre, les hommes en uniforme commencèrent à bâtir la moitié restante de l'infrastructure.
Ils étaient toujours sous l'influence de la potion magique qui fut versée dans le bouillie de maïs qu'ils mangèrent la veille au petit déjeuner.
Ils assemblèrent sans répit tous les éléments clés du pont en arc et, à midi, les trois quarts de l'infrastructure étaient faits.
L'aide-de-camp intérimaire Baba proposa alors aux hommes d'honneur de prendre une petite pause pour se déshydrater et avaler quelques petits biscuits au chocolat préparés par le cuisinier du quartier général avant de reprendre la construction du quart restant.
Et alors qu'ils se désaltéraient et se nourrissaient, un énorme hurlement retentit, faisant frissonner les hommes en uniforme.
Huuuuuuuuuuuuu
Ce fut le son qu'ils entendirent.
Ils regardèrent vers l'endroit d'où cela provenait et constatèrent avec effroi que ce n'était nulle part ailleurs que de la montagne interdite.
Le commandant en chef Babida, qui se trouvait dans le bureau du quartier général, sortit précipitamment pour évaluer la situation.
Ayant compris que le grand cri émanait de la colline maudite, le bûcheron courut immédiatement vers la porte occidentale d'Okundé pour voir à quel niveau le chantier du pont se situait.
Arrivé au pied de l'infrastructure, il trouva son aide-de-camp Baba les nerfs à vif, et faisant pression sur les combattants impériaux pour qu'ils terminassent les derniers mètres au plus vite.
Le commandant supérieur de l'armée imperiale Babida rejoignit son homme de main par intérim et ensemble, ils poussèrent les hommes d'honneur dans leurs derniers retranchements.
Finalement, le pont fut prêt juste avant le coucher du soleil, mais alors au détriment des soldats impériaux dévoués qui étaient extrêmement rouillés et avaient retrouvé leur état normal, car les effets de la potion magique s'étaient dissipés.
Et soudain…! Le sol se mit à trembler.
Brrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrr