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Chapter 23 - Chapitre 22 : Chaînes Brisées.

Herman riait à gorge déployée, trouvant le spectacle devant lui ridicule. Il s'avança jusqu'au bord de l'étage, savourant son triomphe. "Vous m'aurez au moins fait rire avant de mourir. Qu'est-ce qu'il pensait faire, cet imbécile ?"

Il s'apprêtait à jeter Carolina dans le vide, mais une légère résistance l'empêcha d'avancer. Intrigué, il tourna la tête par-dessus son épaule.

Bojan, pourtant transpercé par la chaîne, se tenait toujours debout. Ses mains ensanglantées, agrippaient celle-ci avec ce qu'il lui restait de force, retenant le directeur malgré ses blessures béantes.

"Je ne te laisserai pas faire quoi que ce soit…" murmura Bojan, la voix tremblante de douleur. Du sang coulait de sa bouche.

Herman le fixa, surpris. "Tu crois vraiment que ça va m'arrêter ?"

Alors qu'il s'apprêtait à l'achever, une étrange sensation émana du sol. une énergie puissante. Cela ne devait pas être possible, vu le peu de magie restante dans la forteresse après tant d'abus. Il détourna le regard, cherchant l'origine de cette sensation, mais fut pris par surprise. Une masse sombre se précipitait vers lui à grande vitesse.

Bojan, malgré son état, insuffla une légère étincelle de magie dans la chaîne, désorientant assez Herman pour le déstabiliser.

"Qu'est-ce que…?"

Herman n'eut pas le temps de comprendre. La masse informe de magie le heurta en plein visage, le projetant suffisamment en arrière pour qu'il lâche Carolina. La jeune fille, qui ne lâchait toujours pas l'épée, constata enfin grâce sa chute, qu'elle venait de fendre les chaînes à cause du poids exercé sur l'épée qui était bloquée entre elles. 

Elles se brisèrent et tombèrent sur le sol en trombe avant de se dissiper une fois qu'elles n'étaient plus en contact avec leur créateur. Il avait finalement perdu la source de sa force. Ses muscles se rétractèrent, jusqu'à ce que son corps soit devenu plus frêle qu'avant le combat. Le changement de gabarit fut si brusque qu'il en vomissait en criant de douleur et de frustration.

La chaîne dans le corps de Bojan disparaît également et sa force le quitte en tombant sur le dos, gémissant de douleur. La jeune femme, quant à elle tomba de l'étage tandis que l'épée s'évapora, mais la masse sombre la rattrapa in extremis avant de disparaître en douceur une fois au sol. 

"Cette couleur… c'est…?" murmura-t-elle, regardant autour d'elle. 

Le directeur, quant à lui, encore debout malgré son affaiblissement, tentait de reprendre son souffle. Ses mains couvraient son visage ensanglanté.

"Qui… Qui a fait ça ?!" Il s'avança vers le bord, cherchant l'origine de l'attaque. Ses yeux s'écarquillèrent en découvrant Armand, debout.

C'était bien lui, il s'était miraculeusement relevé et la dernière fiole de soin qui lui restait était à ses pieds, vidée de son contenue. Son aura était épaisse et ses yeux ainsi que celle-ci étaient d'une couleur qu'il n'avait jamais revêtis auparavant, un violet intense.

Il ne semblait pas comprendre lui-même ce qu'il se passait et encore moins comment utiliser cette nouvelle capacité. Ses yeux ont à nouveau saigné comme la première fois qu'il avait essayé mais furent aussitôt soignés grâce au soin du liquide. 

Cependant, toute cette nouveauté ne fut que de courte durée. Son aura reprit une couleur neutre petit à petit et il en vallait de même pour ses yeux qui redevenaient gris.

"Je ne sais pas vraiment ce qui s'est passé… c'est comme si ça s'était activé tout seul," murmura-t-il, les yeux rivés sur ses mains. "Mais au moins, je me sens enfin revivre."

Quelque chose glissa de son cou, et il le rattrapa de justesse dans sa main. C'était un morceau de sa gourde magique, qu'il avait caché dans sa capuche tout ce temps. Lors de sa chute, elle avait explosé, amortissant l'impact sur sa tête. Le morceau se volatilise ensuite comme le reste de la gourde encore dans sa capuche.

"Finalement, je l'avais peut-être pas si bien conçue que ça," murmura-t-il en souriant. "Avec tout ce que je me suis pris sur la tête ce soir, elle n'a cédé que maintenant. J'avais presque fini par l'oublier." Son expression redevint sérieuse en levant les yeux vers Herman, toujours posté en hauteur.

"Il avait une réserve d'énergie cachée ? Où a-t-il appris une telle technique ?! Un sort de cette envergure ne peut être transmis qu'à un haut gradé de la garde… ou même à un noble." 

Une fois la gourde détruite, l'énergie qu'elle contenait restait suspendue autour de l'être vivant qui l'avait brisée, rendant l'aura d'Armand exceptionnellement dense. 

Les premières lueur de l'aube illuminaient désormais totalement le ciel tandis qu'il était désormais entièrement revigoré. Il se mit en position de là où il était pour faire face une ultime fois contre le directeur, affaibli mais dont la rage ne faisait que croître. 

"Herman ! Finissons-en maintenant !" cria-t-il pour se faire entendre par son adversaire.

Du haut de l'étage, celui-ci se sentit pour la première fois en position de faiblesse. Il n'y avait plus aucune once de magie au sein de la forteresse et il connaissait suffisamment les propriétés de la gourde magique pour savoir qu'il courrait un réel danger.

Cherchant désespérément un plan, il recula d'un pas, mais un son venu du sud de la cité le fit sursauter. Un cri strident, malgré la distance qui déclencha une réaction en chaîne puis plusieurs échos moins intenses, se mirent à résonner partout dans Auroria.

"Hein ? Une alerte ?!"

C'était les cyanocrius alarmistes postés aux quatre coins de la cité qui s'étaient réveillés au premier cri et se mettaient à piailler en chœur, couvrant toute Auroria, excepté autour de la forteresse. Ceux autour de celle-ci avaient fui ou étaient encore endormis. Il comprend alors ce qui se passe et commence à crier, espérant se faire entendre. 

"Arrêtez de piailler, maudits piafs ! C'est ici qu'il fallait sonner l'alerte !" hurla-t-il en vain. "Comment se fait-il qu'aucun renfort de cette fichue garde ne soit encore venu, bon sang."

Armand, dont l'aura vira brusquement au bleu, profita de cette distraction pour bondir à grande vitesse vers lui. Il frappa Herman à l'abdomen d'un coup de pied, le projetant plus loin dans l'étage. Le directeur affaibli ne l'avait pas vu venir et recrachait sa salive avant de se redresser. 

"Espèce de sale…" grogna-t-il en se tenant le ventre avant de dessiner un sourire forcé sur son visage qui était cette fois, dénué de toute confiance.

"Tu me fais bien rire, gamin. Tout à l'heure, tu me faisais la morale sur la force et maintenant te voilà, parfaitement en forme et tu es le seul à pouvoir utiliser la magie grâce à un tour de lâche !" 

"La ferme," lui répliqua-il tout en avançant calmement vers lui. 

Herman recula mais se retrouva dos au mur très vite. Dans un geste désespéré, il tenta tant bien que mal de rassembler de la magie dans sa main, ne serait-ce que pour un coup de poing, mais rien ne lui parvenait. 

"Tu l'as dit toi-même non ? Tu semblais pourtant être si sûr de toi pourtant. La fin justifie les moyens, c'est bien ça ? Et maintenant, te voilà à espérer de l'aide de ceux que tu méprisais il y a un instant. Sans la force des autres tu n'es rien d'autre qu'un minable sans honneur."

"Je… je t'interdis de me donner une leçon, sale vermine !" s'écria le directeur en se jetant sur Armand pour l'attaquer à mains nues. 

Le jeune homme s'arrêta et attrapa son poing d'un geste vif et sans effort. 

"Tu devrais changer de disque, ça devient lassant," répliqua-t-il en serrant fermement son poing dans sa main. 

Herman vit le regard du jeune homme se transformer : ses yeux, d'un bleu marin, virèrent au rouge vif, et son aura se mit à chauffer, la chaleur montant à mesure que sa colère grandissait. Il se débattit en vain, incapable de se libérer de sa poigne, il était complètement à sa merci. 

"Cette fois, je vais te faire payer, pour Bojan, pour Carolina, et pour tous ceux que tu as martyrisés toutes ces années !" lança-t-il en pivotant son corps prêt à le balancer dans les airs.

Il le souleva avec une facilité déconcertante et créa une orbe de magie rougeâtre dans sa main libre qu'il vint écraser contre son abdomen. Il le lâcha alors et l'orbe propulsa Herman dans le ciel. Il hurla alors qu'il se faisait projeté et, sans qu'il ne s'en aperçoive, l'orbe changea de couleur.

Elle explosa en une fumée indigo qui ne le blessa pas, cependant,plus rien ne le propulsait et il commençait à chuter sans pouvoir y faire quelque chose. 

La fumée se dissipa, révélant une brèche au sein de laquelle Armand apparut, déterminé à en finir. Ses yeux étaient maintenant orangés, ses mains étaient collées l'une à l'autre et son corps semblait maintenu par une corde d'une lueur orange elle aussi venant de l'autre côté de la brèche qui l'empêchait de tomber. Celle-ci était rattachée à un pilier de la forteresse. Il savait qu'il devait faire vite avant que la brèche indigo ne disparaisse vu qu'il venait de changer de couleur. 

"HERMAN ! Voici un dernier cadeau pour toi !" s'écria-t-il en séparant ses mains. 

Une longue chaîne orange jaillit de sa paume tandis l'autre main tenant fermement l'extrémité de la chaîne qui était ornée d'une pointe aiguisée. Il se concentra ensuite pour y insuffler une aura bleue puis la lança à une vitesse fulgurante pour rattraper Herman dans sa chute. 

Celui-ci aperçut la chaîne, similaire à celle qu'il avait utilisée pour transpercer Bojan, fonçant vers lui. Elle le rattrapa en un instant et l'empala en plein torse. Il grogna intensément de douleur, il n'avait jamais ressenti une telle souffrance.

Armand arrêta d'étirer la chaîne qui continuait de se créer dans sa paume et l'attrapa avec ses deux mains pour venir le tirer comme un pêcheur qui pêcherait une grosse prise. Il s'enveloppa à nouveau de son aura rouge et tira le directeur meurtri avec toute sa force. Le surélevant haut dans le ciel, pile au-dessus de lui. 

Herman ouvrit les yeux, alors que son corps semblait flotter au-dessus du vide et qu'il s'apprêtait bientôt à retomber. Son regard se perd dans le paysage d'Auroria qu'il n'avait jamais vu d'une hauteur aussi vertigineuse. Il donnait l'impression d'accepter son destin, se rappelant de ce qu'il avait dit tout à l'heure lorsqu'il lui promettait un magnifique panorama avant de mourir. Tout ceci semblait se retourner contre lui. Il referma les yeux lorsqu'il sentit que son corps chuta.

Armand l'attendait, le poing enveloppé d'une aura rouge enflammée, si intense que sa mitaine brûla dévoilant la marque des légendes sur le dos de sa main qui s'illumina. Au moment où il fut à portée, le jeune héros le frappa de toutes ses forces à la mâchoire. La violence était telle qu'il fut projeté vers le sol à pleine vitesse.

L'angle de l'attaque n'était pas laissé au hasard, il l'envoya s'écraser au pied de la tour centrale de sa forteresse, traversant plusieurs murs sous la force de l'impact.

Le jeune homme haleta, regardant d'en haut le résultat de son plan qui avait finalement fonctionner. Herman semblait enfin hors d'état de nuire. Il se laissa tomber en arrière dans sa brèche qui était sur le point de se refermer et il tomba sur le sol de l'étage. Regardant le ciel nuageux avec satisfaction. Mais le moment n'était pas propice au repos.

"Bojan !" s'écria-t-il en bondissant, il scruta l'endroit où il l'avait vu pour la dernière fois. Mais Bojan avait disparu.

Il aperçut une trace de sang qui menait aux escaliers, il s'approcha du bord de l'étage et vit Bojan allongé au sol à l'extérieur de la forteresse, entouré de quelques prisonniers et de Carolina, qui l'avaient aidé à descendre pendant qu'il se battait encore.

Il poussa alors un soupir de soulagement, mais celui-ci fut de courte durée. Un frisson parcourut tout son corps en entendant un bruit fracassant derrière lui, là où Herman était tombé. Il se retourna en se mettant sur ses gardes et ses yeux s'écarquillèrent en le voyant. 

Il émergea des décombres, son corps entièrement désarticulé et sa mâchoire était sur le point de se décrocher. Il cria d'une voix cassée alors que son corps ressemblait à celui d'un mort vivant.

"C'est pas vrai…," murmura Carolina en entendant les cris monstrueux du directeur. 

Il marchait péniblement au milieu des gravas, traînant une jambe sur le sol. Les murs de la tour s'effritaient de plus en plus et des morceaux du plafond s'écrasaient autour de lui. 

Armand observa cette scène et se redressa, réalisant que cela n'en valait plus la peine. C'en était fini de lui. Ce n'était plus qu'un homme au bord de la mort, dans son ultime folie. Un fou qui suivait l'instinct qu'il avait suivi toute sa vie : celui de se battre pour prouver qu'il était au-dessus de tous. 

La tour continuait de se dégrader et était sur le point de céder. Dans un dernier rugissement, il semblait crier : "Personne ne… Personne ne me…vaincra…" avant de disparaître sous les pierres de la tour centrale qui s'écroula, provoquant un fracas si violent que toute la cité trembla. Les restes de la forteresse s'enveloppèrent d'une fumée de poussière. Armand réussit à s'éloigner juste à temps, se réfugiant sur un toit plus éloigné.

Les prisonniers à l'extérieur éclatèrent de joie en voyant la forteresse se détruire. Bojan, inconscient et dans un sale état, ne put assister à la scène, mais Carolina, elle, vit tout. Cette tour où elle avait passé tant d'années enfermée, cet endroit où ses espoirs et ses rêves s'étaient éteints, s'effondrait sous ses yeux.

À cette distance, elle ne pouvait pas le voir, mais son livre qu'elle avait dessiné enfant, le dernier symbole de ses rêves, tombait également au milieu des débris. Il se perdit dans les ruines, se noyant parmi tous les autres souvenirs. Elle ne put contenir ses larmes, elle était maintenant libre. 

La fumée retomba, et elle, ainsi que les prisonniers, purent voir clairement les ruines de la forteresse. Bojan ouvrit alors enfin les yeux et aperçut une silhouette triomphante sur un toit face au soleil. Il s'agissait d'Armand qui se retourna vers eux et leur fit signe en souriant. C'était définitivement la fin de la forteresse d'argent.

Fin du chapitre 22.