Chereads / La Grande Fracture / Chapter 2 - Chapitre 1 - Partie 1

Chapter 2 - Chapitre 1 - Partie 1

Un tintement clair et sourd retentit, rapidement suivi de plusieurs autres en rythme. Des êtres aux formes diverses étaient alignés dans une galerie éclairée seulement par quelques flambeaux. Les différents individus présents étaient tous des mâles et étaient enchainés les uns avec les autres aux pieds. Equipés de pioches, ils frappaient avec force contre les parois de la caverne et, de temps en temps, ramassaient des morceaux de roches qu'ils jetaient dans un grand chariot. Lorsque celui-ci était rempli, d'autres personnes enchainées le tiraient et poussaient vers l'extérieur. Asgorath, comme bien d'autres esclaves démoniaques, travaillait dans cette mine de fortune près de dix-huit heures par jour. Depuis qu'elle était ouverte, cette mine avait tué plusieurs dizaines de démons. Mais leurs camarades ne pouvaient ni les aider, ni même s'en inquiéter à cause de leurs propres soucis. Quant aux humains, moins il y avait de démons, moins il y aurait de travail à faire pour eux. Et, de toute manière, si la quantité de minerai obtenue venait à diminuer parce que trop de démons mourraient, personne ne s'en soucierait et les supérieurs se contenteraient de leur envoyer plus d'esclaves. Ce genre de racaille n'avait aucune valeur ! Asgorath regardait ses camarades d'infortune tout en travaillant, évitant ainsi les coups de fouet de leur garde.

Cela faisait désormais seize ans qu'Asgorath Strÿnkar était arrivé dans ce monde. 'Le temps est passé étrangement vite,' songea Asgorath. Durant ces huit dernières années, il ne cessa de s'entraîner dans les voies de la magie et du combat.

En huit ans, son physique avait bien changé. Il était assez différent de son dernier également. Sa taille était désormais d'un mètre quatre-vingt-trois. Etonnamment, le fait de ne pas manger avait rendu ses muscles endurants et secs tout en les empêchant de trop se développer. Malgré tout, il restait famélique, même si son entraînement magique lui avait permis d'accumuler de l'énergie, l'empêchant d'avoir le corps brisé. En effet, l'utilisation d'énergie magique lui permettait de garder une assez bonne forme physique. Elle agissait comme un remplacement pour les nutriments. Ses cheveux, à l'instar de ses yeux, étaient bruns. Ses écailles étaient étranges comparées à celles des autres membres de sa race : elles étaient peu marquées, la peau étant presque comme celle des humains. De plus, elles étaient noires avec une légère teinte rouge, contrairement aux écailles noires habituelles. Ses ailes et ses cornes n'avaient pas encore poussé car il était encore en phase de croissance physique. Sa mère lui avait expliqué que quand il serait physiquement mature, elles pousseraient, et ses ailes sortiraient quand il le voudrait. Un autre point de divergence avec les autres membres de sa race, les Kzhan'La, était les griffes possédées au niveau des mains qui étaient rétractables, contre toute-attente. Cette mutation n'apparaitrait selon sa mère que chez un Kzhan'La dans un groupe de plusieurs dizaines de millions.

Après s'être entraîné toutes ces années, son physique s'était amélioré au niveau des capacités de ses muscles et de leurs endurances. Il n'avait pas appris de techniques de combat, mais ses duels avec son maître Kranir, bien que non à mort, laissaient souvent Asgorath dans un état déplorable. Grâce à cela, il avait gagné la capacité de s'adapter au style de combat adverse et développé un fort instinct guerrier.

De plus, le jeune démon possédait de grandes dispositions envers la magie, bien plus que ce que les Kzhan'La avait généralement. Or les Kzhan'La était naturellement très doué comparé aux humains. Leur affinité avec les arts arcaniques étaient parmi les meilleurs, sans compter un intellect très développé. Bien plus développé que celui des humains en général. Cela venait de leurs cerveaux. Ils étaient bien plus développés que celui des humains.

Le cerveau d'un Kzhan'La enregistrait bien mieux et bien plus facilement les informations. Sa mémoire était dix fois meilleure que celle d'un humain. Non seulement ça, mais les capacités de réflexion, toutes les capacités cognitives en réalité, étaient bien supérieures. C'était particulièrement flagrant pour Asgorath comme il avait vécu en tant qu'humain. Il avait testé ses capacités cognitives en réalisant des calculs et des exercices mémoriels. Il avait par exemple calculé le nombre pi au centième chiffre après la virgule sans difficulté et calculait des problèmes de couche limite de tête à l'aide des connaissances de sa vie précédente.

C'était choquant. Pour Asgorath, comparé le cerveau d'un Kzhan'La à celui d'un humain 'classique' était comme comparé un ordinateur des années 1990 avec le dernier superordinateur. Ou bien un ordinateur banal avec le réseau Skynet dans Terminator. Il s'imaginait pouvoir résoudre les problèmes mathématiques que, dans son ancienne vie, l'humanité considérait impossible à résoudre.

Outre la découverte de ses capacités cognitives améliorées, le réincarné découvrit autre chose. Ses émotions étaient bridées. Ils ressentaient moins ses émotions par rapport à sa vie précédente. Ce qui l'aurait énervé dans son autre existence ne lui faisait rien. Se souvenir de la tragédie lui ayant coûté la vie ne déclenchait aucune réaction. Il était émotionnellement bridé. Et ce n'était pas que lui. Tous les Kzhan'La était comme cela. Il s'agissait de la compensation pour les capacités de calcul surdéveloppées. C'était la conclusion à laquelle était arrivé le jeune démon après s'être souvenu de films de science-fiction.

Ces dernières années, tous les prisonniers avaient principalement travaillé dans des mines, qui venaient juste d'être rouvertes. Juste avec des pioches et des sacs pour porter les minerais, tout en étant sous-alimenté. Il y avait déjà eu des centaines, depuis que cela avait commencé. La journée était très simple. Au lever du soleil, Asgorath et les autres prisonniers devaient se lever et aller à la mine, où ils extrayaient des minerais, des gemmes et des cristaux sans arrêt. Par chance pour eux, les gardes étaient trop laxistes pour descendre dans les mines, laissant les démons se gérer par eux-mêmes. Ils pouvaient donc se reposer et se nourrir et laisser les plus faibles récupérés pendant que les autres travaillaient. Les prisonniers ne pouvaient cependant pas échapper à toutes les brimades. Dès qu'ils mettaient le pied en dehors de la mine, les gardes ne se privaient pas de les fouetter et de les frapper. Lorsque le soleil se couchait, ils les laissaient remonter et retourner dans leurs baraquements. Avec leurs dernières forces, ils mangeaient leur ration de l'infâme gruau quotidien. Et le lendemain, tout recommençait, la même journée se répétant sans fin.

Mais ils s'en fichaient puisque, après tout, ils n'étaient que des «pourritures démoniaques».

Selon les plus anciens prisonniers, la mine avait été rouverte à cause de la guerre entre les hommes et les démons. Les humains avaient besoin de plus de minerais pour faire des armes et des armures afin de se battre. D'autres affirmaient que les humains avaient découvert un gisement d'un nouveau type de métal et le groupe dirigeant la prison en voulait l'exclusivité. Les deux théories se valant, personne ne savait ce qui était vraie ou faux, ni quoi penser.

Toujours était-il qu'après avoir renvoyé les prisonniers à la mine, nous recevions régulièrement des convois de prisonniers venant du monde entier, remplaçant ceux qui étaient morts dans les mines. Cela indiquait que personne ne s'intéressait aux nombres de morts tant que les quotas de minerais étaient remplis. C'était assez inquiétant pour Asgorath sans être vraiment étonnant. Les humains considéraient les races démoniaques comme des êtres abominables qui devaient être détruits pour le bien-être de la population ainsi que la gloire des dieux. Il espérait néanmoins pouvoir ainsi profiter d'un moment où les gardes ne feraient plus attention à lui et ainsi s'échapper. Cependant, en attendant d'avoir une idée lumineuse ou une chance en or, il avait décidé d'attendre et d'endurer. Après tout, que valait quelques années pour quelqu'un qui avait le droit à une seconde vie ?

Un jour, le chef du camp ordonna à la majorité des gardes de se réunir. Le nombre de gardes restant, dont le rôle était de surveiller les démons manquaient affreusement de prudence. Les colliers de soumission rendaient presque inutiles leurs présences. Les démons ne pouvaient qu'obéir, sans espoir de rébellion ou de fuite pour eux. Grace à ça, Asgorath put s'éclipser pour aller voir ce qu'il se passait. Il aurait pu tenter de s'échapper, mais il aurait dû abandonner sa mère et les quelques personnes qu'il appréciait, et la durée de la réunion lui était inconnue. Il décida donc de découvrir ce qui poussait les gardes à se réunir. Savoir ce qui faisait bouger le chef des matons, qui passait ses journées à boire et à manger, et seulement parce qu'il n'y avait pas de femmes humaines dans le coin, donnerait peut-être à Asgorath des idées sur quoi faire. Pour le jeune Kzhan'La, cela valait qu'il prenne le risque de s'éclipser. Il les suivit donc sur quelques centaines de mètres ; peut-être un peu plus qu'un demi-kilomètre. Là, le chef, un fainéant de 150 kg, le visage semblable à celui d'un porc, et le comportement et le physique qui vont avec, commença à parler.

« Ecoutez-tous. La semaine prochaine, le Général-Commandant des Brigades d'Exterminations va venir en personne observez notre prison. Vous avez tous entendu parler du général et de ses méthodes. Aucune erreur et aucun laxisme ne seront tolérés. A la première erreur, vous perdrez votre tête. Je vous que vous soyez particulièrement vigilant et dure envers ces engeances démoniaques. Compris ? »

Bien que le directeur de la prison se contente de parler normalement, tous les gardes entendirent ce qu'il disait. A la mention du Général-Commandant des Brigades d'Exterminations et de leur commandant, les visages pâlirent, les corps se raidirent et un frisson traversa les rangs. Ils étaient effrayés, non, pire que ça, terrorisées comme si leurs phobies prenaient vies devant eux. Bien qu'Asgorath ne sache pas qui cette personne était, il comprit que le personnage était quelqu'un d'important et craint. Il écoutât encore un peu, mais après la petite introduction, ils se contentèrent de parler des préparatifs pour accueillir l'éminent personnage, Asgorath décida que cela ne vaille pas la peine de rester, et il retournât donc auprès des autres.

Cela lui prît quelques minutes pour les retrouver, puis il se remît au travail dans la mine, comme tout le monde. Il agît de la même manière que d'habitude, attendant le soir pour demander à sa mère qui était cet homme. Mais bien qu'il travaille, il réfléchissait à son sujet. 'Général-Commandant. Dans mon ancien monde, d'après les mots utilisés, ce serait un haut poste, genre dans le top 5. Et les Brigades d'Extermination, hm ... ... ... probablement une unité spéciale dont le but est de massacrer tout ce qui ressemble à un démon de près ou de loin, ainsi que ceux qui les aident. S'il a une profonde haine envers les démons, quelque en soit la raison, cela pourrait mal tourner, très mal si je suis malchanceux.' Et pendant qu'il ruminait, la journée passât comme toutes les autres, en se tuant au travail pendant que des gardes l'insultaient, le fouettaient et le rossaient à chaque fois qu'il ramenait du minerai de la mine. Une journée habituelle, pour lui tout du moins.

Le soir arrivé et l'esclavage fini pour la journée, Asgorath retournât dans ce qu'il appelait sa maison, un simple cabanon où lui et sa mère devait s'entasser. Il fut le premier à arriver, et attendit donc sa mère pour discuter de ce qu'il avait découvert. Son attente ne durât pas très longtemps, une dizaine de minutes.

« Maman, tu as vu qu'aujourd'hui les gardes se sont tous rassemblés pour parler de quelque chose. Eh bien, je les ais suivis et j'ai appris qu'ils devaient se préparer pour accueillir un haut gradé de l'armée. Son titre était Général-Commandant des Brigades d'Exterminations. Ils ont tous été effrayés lorsqu'ils ont entendu son nom. Je me demandais si tu savais qui il est. »

A mesure qu'Asgorath parlait, sa mère devenait de plus en plus pâle. Alors qu'au début elle avait juste eu peur que des gardes l'aient vu désobéir à un ordre et espionner, lorsqu'elle entendit parler du Général-Commandant des Brigades d'Extermination, une vraie terreur l'étreignît. Cet homme était après tout connût dans sur le territoire des démons comme un être cruel qui massacrait tous ceux qui avaient un lien avec les démons.