« Mamie, pourquoi est-ce que je ne peux pas sortir ? chuchotai-je
- Ne sois pas curieuse et obéis à ta mère. C'est pour ton bien. »
Je baissai le regard, déçue.
« D'accord... »
Elle me caressa la tête et commença à chanter.
« Dans la maison de bois~
Au fond du jardin~
Passer par le portail~
Traverser la rivière~
Et au bout du pont~
Faire 20 pas en direction~
Du soleil de midi~
Tu trouveras une petite boîte~ »
Ma grand-mère m'appelait "Winter". Elle disait qu'elle avait toujours voulu avoir une petite fille appelée Winter.
Mes parents m'avaient nommé Élizabeth.
« Et dedans il y aura~
L'esprit d'un démon~
Ton vœu il exaucera~
Mais ton pays périra~
Tourne 7 fois sur toi-même~
Puis tape dans tes mains~
La formule tu réciteras~
Celle des livres du grenier~ »
Dans mes souvenirs, mamie était toujours assise dans son fauteuil. Elle était aveugle.
Non, il y a bien une fois où elle s'est levée :
« Cough. Cough. »
Quelque chose tomba sur le sol.
Du sang ?
Elle tenta de se tenir debout mais s'effondra sur le sol.
Les larmes aux yeux, je criai :
« Mamie !
- Élizabeth ! Va dans ta chambre ! » me réprimanda ma mère
Ce jour-là, ma grand-mère est morte.
Badaboum !
Une douleur aiguë me frappa le genou.
Je le touchai et retrouvai du sang sur ma main.
Je me relevai difficilement et vis que l'os était cassé.
« Mère.
- Quoi ? répondit-elle froidement
- Mon genou est cassé.
- Et alors ?
- Vous... vous ne inquiétez pas pour votre fille même si elle a le genou cassé ? » demandai-je
Elle me fusilla du regard avant de se remettre à lire son livre.
Je baissai la tête.
Des larmes se mirent à couler le long de mes joues.
Je pris un grande inspiration et sourit.
« Je suis désolée, mère. J'ai sali mes habits. » m'excusai-je
Je boitai jusqu'à l'évier et saisis une éponge. Je devais nettoyer le sang avant de me faire gronder.
"Ce n'est normal, mais pour ces gens, ça l'est." disait ma grand-mère
"Le monde dans lequel on vit est cruel. Il va falloir l'accepter."
« Tu avais raison, grand-mère... Tu avais raison... »
Je suis restée enfermée dans cette maison jusqu'à mes 9 ans.
Ce manoir plein de poussière, de larmes et de sang, peut-être même des fantômes maintenant.
Je me rappelle de sa voix quand il a poignardé mes parents.
« Tu es une gentille. Merci de m'avoir conduit jusqu'ici. »
Ils étaient morts par ma faute. Parce que j'étais sortie. Parce que je leur avais désobéis.
« Petite. m'avait-il dit, Que dirais-tu de venir vivre chez moi ? »
Et je l'avais suivi, comme hypnotisé par cet inconnu qui m'avait tout pris.
« Ta-dah ! s'exclama-t-il, Ce palais sera ta maison. Puis-je savoir ton nom ?
- Élizabeth. avais-je répondu
- Eh bien, Élizabeth. Tu seras la reine de cœur. Ce pays est le tien. »
Lui qui m'avait tout pris, lui qui m'a tout donné, il s'appelait le Chapelier fou.
« Chapelier ! Chapelier ! Il y a quelqu'un dans le jardin ! »
C'est arrivé l'hiver de mes 10 ans.
Point de vue de XXX :
Déboussolé, je regardai autour de moi.
Un paysage inconnu s'étendait devant moi.
Une végétation d'un bleu légèrement foncé, des maisons en bois couleur rouge sang, trois lunes dans un ciel violet, je pensais que c'était un rêve.
Une semaine est passée.
Puis deux.
J'ai compris que j'étais dans un autre monde.
Je ne pouvais pas accepter la réalité.
Je voulais revoir ma famille, mes amis, rentrer chez moi.
Puis un mois est passé.
Puis deux.
J'ai fini par accepter la réalité.
Puis le printemps toucha sa fin.
Au début, j'ai marché. J'étais dans un désert, puis une forêt, avant de tomber sur un village. J'ai continué malgré la faim et la fatigue car je savais que, si je m'arrêtais, je ne me réveillerais plus jamais. Je me nourrissais de toutes les plantes que je trouvais sur mon chemin.
Épuisé, je boitai jusqu'au trottoir le plus proche et m'endormis.
« Revenez ici, sales garnements ! »
Les cris d'une dame m'aidèrent à reprendre mes esprits.
Un groupe d'enfants me dépassèrent.
Soudainement, la femme me prit par les cheveux et s'adressa à moi.
« Toi aussi, hein ? Petit voyou, tu es avec eux ! »
Je me libérai de son étreinte et fuis dans la même direction que les responsables de cette situation.
Tandis que les gardes se mirent à nous poursuivre, je suivis les enfants.
Dans une allée, nous reprîmes notre souffle. L'un d'eux me demanda :
« Au fait, qui es-tu ? »
Je tentai de répondre mais aucun son ne sortit alors je fermai la bouche et baissai la tête.
« On t'a posé une question » insista un autre.
Le garçon arrêta son camarade et reprit, un sourire aux lèvres :
« Moi c'est Suho et voici Jain et Clara. »
Après avoir s'être présenté, il continua :
« Et toi ? »
Je haussai les épaules.
C'est ainsi que je me suis fait mes premiers amis dans ce monde.
Étant pauvres, nous survivions en volant.
Contre un bâtiment, j'aperçus une épée. Un garde l'avait sûrement oubliée ici.
Je la pris dans ma main et imitai les chevaliers que j'avais vu à plusieurs reprises.
« Pas mal. Tu pourrais faire des spectacles à la capitale. » remarqua Suho
Je me tournai vers lui et l'interrogeai :
« On se ferait beaucoup d'argent ?
- Oui.
- Allons-y alors. »
Et c'est ce qu'on a fait.
Nous squattions un immeuble abandonné où personne ne venait.
« Kof. Kof. »
Inquiets, nous regardâmes Clara tousser.
« Je vais bien... » murmura-t-elle
Elle était malade depuis quelques jours.
« Ta fièvre a encore monté. » déclara Suho, la main sur son front
Cela faisait déjà 4 ans que nous nous connaissions.
« Je vais chercher des médicaments. » affirmai-je
Malheureusement, Clara ne survécut pas au froid de l'hiver.
Ayant chacun différents objectifs, nous nous séparâmes.
De nouveau seul, il ne me restait que mon épée.
Je levai la tête, me servant de l'objet comme d'une canne.
Il neigeait.
Je m'allongeai dans la neige et fermai les yeux, me laissant emporter par le froid de l'hiver.
La nuit tombée, j'entendis une voix :
« Hey. »
Au moment où j'avais perdu tout espoir...
« Ce jardin est à moi. Je ne veux pas de cadavre ici. »
...J'ai rencontré Élizabeth.
J'observai la petite fille de 10 ans, vêtue tout de blanc, son teint pâle et son air sérieux, qui se fondait dans la neige.
« D'accord. Je m'en vais. répondis-je avant de me lever
- Attends ! » m'arrêta-t-elle
Je la regardai.
« Je suis la reine de ce pays. Je peux tout faire. Que veux-tu ? Que fais-tu ici ? reprit-elle
- Pouvez-vous même ressusciter les morts ?
- Bien sûr ! » affirma-t-elle, confiante
Le visage impassible, je commençai à partir, les yeux vides.
« Je pourrais te faire couper la tête pour avoir pénétré cet endroit, tu sais ? »
Je me tournai vers elle.
« Alors, fais-le. annonçai-je, Tue-moi. »
Elle retira sa capuche.
« Si tu ne veux plus de ta vie, donne-la moi. »
Ses yeux noirs me fixaient.
« Je m'appelle Élizabeth. Tu seras mon épée et, en échange, je ferai tout mon possible pour ramener cette personne à la vie, ça te va ? »
Une petite fille égoïste et son chevalier. C'est ainsi que tout a commencé.
« D'accord. »
Je posai un genou à terre et dis :
« À partir d'aujourd'hui, je jure d'être loyal et fidèle à Élizabeth et d'être son chevalier peut importe ce qui nous attend. »
Un sourire apparut sur ses lèvres.
« Tu as un nom ? me demanda-t-elle
- Non.
- Alors tu t'appelleras "Le lapin". »
La petite fille vivait dans la luxure et se croyait supérieure aux autres.
J'étais à ses côtés à chaque instant et suivais ses ordres, quels qu'ils soient.
Elle était égoïste mais n'était pas cruelle.
Elle était avare mais ce n'était pas un tyran.
Tout ça, je l'ai compris en l'observant.
J'ai compris que l'ennemi de tous les habitants de l'empire œuvrait derrière les scènes pour les protéger sans que personne excepté moi ne soit au courant.
J'ai compris que ce n'était qu'une enfant naïve qui essayait de protéger sa position. Durant ces 4 dernières années, je l'ai vue grandir et je me suis peu à peu attaché à elle, tandis qu'elle respectait sa part du marché, mais les autres n'avaient pas le même avis.
C'était un jour d'hiver, comme quand je l'ai rencontrée. Ils se sont alliés pour la tuer mais je me suis sacrifié pour la sauver.
Pour la première fois, je l'ai vue pleurer.