« Une véritable amitié c'est lorsqu'on la confond avec la famille »
Un silence accueille ma réponse. La bonne humeur a quitté la pièce alors, je me lève et me dirige vers ce qui me semble être la salle de bain. Je me passe de l'eau froide sur le visage pour me rafraîchir et reprendre mes esprits.
En sortant de la petite salle de bain, je tombe sur Timothée qui était adossé au mur en face des toilettes. Dès qu'il me voit, il détache son grand corps du mur, se place en face de moi et me demande :
- Ça va ?
- Ça va aller...
- Vraiment ?
- Vraiment.
Je lui fais un petit sourire pour le rassurer mais son manque de réponse me fait comprendre qu'il n'est pas dupe.
- Allez viens, allons rejoindre Éric, Il doit se faire un sang d'encre.
Lorsque nous arrivons au salon, Éric fonce sur moi et me serre dans ses bras tout en me disant :
- Je suis désolée pequeñita, je ne savais pas...
- Ne t'inquiète pas, je ne t'en veux pas. Tu ne pouvais pas deviner...
Éric resserre son étreinte et ajoute :
- Je n'aime pas te voir triste...
- Oui et si tu ne veux pas me voir morte, tu devrais arrêter...
- Quoi ?
- Tu me sers trop fort, je n'arrive pas à respirer...
- « Ah merde ! » s'exclame Éric tout en me lâchant « Décidemment, je ne sais pas m'y prendre ! »
- Ne t'inquiète pas mon géant préféré, c'est comme ça qu'on t'aime ! Allez, arrête de stresser et profitons du reste de la journée, je n'ai pas dit mon dernier mot, je vais battre Timothée !
- Je ne te savais pas si compétitrice pequeñita !
- Il y a encore plein de choses que tu ne sais pas sur moi, mon petit Éric. Allez viens je vais montrer à Timothée de quel bois je me chauffe !
Une heure et cinq défaites plus tard, je m'avoue enfin vaincue. Je laisse tomber ma manette et m'exclame :
- Pourquoi es-tu aussi doué ?!
- « C'est peut-être juste toi qui es nulle pequeñita ? » me dit Éric
- Je ne pense pas que tu sois en position de parler toi...
- « Je pourrai t'apprendre quelques techniques si tu veux » me dit Timothée de sa voix posée.
Je suis sur le point de lui répondre quand la sonnerie de son téléphone s'élève et le visage de Tamara s'affiche sur l'écran. Timothée attrape son téléphone et va répondre dans le couloir.
- Oui ?
- ....
- Tu ne peux pas venir ?
- ....
- Pourquoi ?
Il nous lance un coup d'œil depuis le couloir puis continue :
- Tu pourrais l'emmener tu sais ?
- ....
- Tu sais bien qu'elle n'ait pas comme ça... Personne ici ne te jugera et tu le sais...
- ....
- Je ne vais pas continuer à lui mentir, tu sais bien que je déteste mentir.
- ....
- Ok. Nous t'attendons
Timothée revient dans le salon et nous annonce que Tamara arrive dans trente minutes. Les bribes de conversation que j'ai entendues me laissent deviner que c'est à cause de moi que Tamara n'est pas encore là... Je me demande pourquoi...
L'attente de Tamara se fait dans un silence tendu. Plus personne n'a la tête au jeu. J'ai l'impression que ce qui va se jouer à son arrivée va être déterminent pour notre amitié.
Environ trente-cinq minutes plus tard, le bruit de la sonnerie retentit dans l'appartement. Éric va ouvrir et revient avec Tamara accompagnée d'une petite fille qui doit avoir trois ou quatre ans. Elle est aussi rousse que Tamara mais contrairement à Tamara, la petite fille a des yeux bleus. Éric la prend dans ses bras et lui demande :
- Ça va mini Tam ?
Lorsque j'entends ces mots, tout prend sens. Tamara a une fille ! Elle est maman et c'est la raison pour laquelle elle a toujours quelque chose de mieux à faire après les cours ou pendant les weekends. En revanche, ce que je n'arrive pas à comprendre, c'est le secret qu'il y a autour de cela.
Depuis son arrivée, Tamara n'a pas détourné son regard de moi comme si elle s'attendait à être jugée. Je me lance alors pour la rassurer :
- Salut Tam ! Tu en as mis du temps ! Je commençais à croire que tu avais changé d'avis.
- Non, je n'ai pas changé d'avis c'est juste que ma voisine a eu un imprévu et ne pouvait plus garder Léa...
- Elle s'appelle Léa ?
La petite fille entendant son prénom se tourne vers moi et gigote dans les bras d'Éric comme pour lui demander de la laisser descendre. Celui-ci resserre son étreinte et déclare aussi joueur qu'à son habitude.
- Non ! Ne me quitte pas ! Ne m'abandonne pas Princesse Léa !
- Mais je veux descendre tonton Éric ! Je veux aller voir tonton Tae!
Éric prend un air offensé et laisse descendre Léa qui se dirige tout de suite vers Timothée qui s'est déjà baissé pour se mettre à la hauteur de la petite.
- Léa, annyeong* !
- Annyeong tonton Tae!
Léa le prend dans ses bras et lui chuchote quelque chose à l'oreille. Mais comme vous le savez sûrement si vous fréquentez souvent les enfants, ils ont du mal avec le concept du chuchotement. Je pense qu'ils ont du mal à gérer leur volume sonore alors toute la pièce entend :
- C'est qui la dame sur le canapé ?
- Timothée me jette un coup d'œil, un petit sourire espiègle étirant ses lèvres puis lui répond.
- Et si tu allais lui demander ?
- Tu penses que je devrais ?
- Oui ma puce elle est très gentille.
Léa se dirige alors vers moi et s'assied sur le canapé à côté de moi. Elle me demande ensuite de sa petite voix fluette :
- Comment tu t'appelles ?
- Moi c'est Tata Ana. Je suis une amie de ta maman et de tes tontons.
- Tu veux bien être mon amie aussi ?
- Bien sûr que je veux !
*Annyeong = « Salut » en coréen