Chereads / Le Baiser du Crépuscule [Girl x Girl] / Chapter 2 - [✓Chapitre 1✓]

Chapter 2 - [✓Chapitre 1✓]

Le parfum entêtant du jasmin flottait dans l'air, se mêlant aux senteurs sucrées des figues rôties et du vin épicé. La salle du banquet, vaste et somptueuse, était éclairée par des centaines de chandeliers suspendus aux voûtes d'or et de marbre. La lumière, douce et chatoyante, se reflétait sur les coupes d'argent et les assiettes richement décorées où s'entassaient viandes tendres, fruits confits et pains aux épices.

Le murmure des conversations nobles se mêlait aux tintements des couverts, formant une mélodie raffinée et feinte. Tout ici respirait le luxe, le pouvoir… et l'illusion.

Elena étouffait.

Assise à la place d'honneur, au centre de la longue table d'ébène, elle se sentait aussi piégée que si l'on avait enchaîné ses poignets. Son dos était droit, son sourire étudié, et pourtant, chaque mot échangé autour d'elle lui donnait la nausée.

Elle baissa les yeux vers son assiette. Un repas parfait. Un festin préparé par les meilleurs cuisiniers du royaume, comme pour célébrer la veille de son union. Mais elle n'avait pas faim. Elle ne ressentait rien.

Une duchesse aux boucles poudrées prit la parole, son éventail battant mollement l'air.

— La duchesse: "Le prince Adrian est un parti exceptionnel. J'ai eu la chance de le voir lors d'un tournoi. Un homme fort et charismatique !

Une autre homme extrêmement riche ne pu s'empêcher de donner son avis sur le prince: — "Un homme qui a conquis plus de cœurs que de bataille." murmura t'il d'une voix moqueuse un peu plus loin.

Quelques rires étouffés éclatèrent, et la princesse sentit son estomac se nouer davantage.

Ils parlaient d'elle comme si elle n'était pas là. Comme si elle n'étais qu'une pièce d'échiquier, un atout à échanger contre une alliance. Elle serra la coupe de vin entre ses doigts fins, tentant d'ignorer le regard pesant de sa mère, assise à l'extrémité de la table.

La Reine Isabella ne parlait pas. Elle n'en avait pas besoin. Son silence était une mise en garde plus efficace que n'importe quel discours.

Un homme d'une quarantaine d'années qui avait été nommé conseiller par la reine depuis maintenant 7 ans, posa son regard vers la princesse.

—Le conseiller: "Votre Altesse, vous devez être impatiente, non ?" lança t'il, un sourire curieux au coin des lèvres.

Le cœur de la jeune femme se serra. Elle ressentait plusieurs émotions mais l'impatience n'en faisait guère partie.

Elle devait mentir. Encore. Comme toujours. Alors, elle leva lentement les yeux et esquissa un sourire gracieux.

—Elena: "Bien sûr. C'est un grand honneur pour moi." répondit-elle d'une voix mesurée.

Un soulagement parcourut la table. Comme si le moindre doute de sa part pouvait ternir cette soirée parfaite. Mais dans son esprit, un cri silencieux résonnait.

"Je ne veux pas de cet honneur. Je ne veux pas de cette vie." répéta t'elle en boucle dans son esprit, un cri de désespoir coincé au fond de sa gorge qu'elle ne pouvait libérer, pas dans cette salle et pas au milieu de cette assemblée. Ils ne se soucient guère de ce qu'elle désire. Elle était venue au monde que pour un but bien précis après tout: Assurer la pérennité du royaume.

Elle se força à porter la coupe à ses lèvres.

Elle laissa le vin glisser sur sa langue, mais au lieu d'apaiser son malaise, l'amertume du breuvage sembla l'ancrer encore davantage dans cette prison dorée. Son regard se perdit dans les flammes vacillantes des chandeliers, leurs reflets dansant sur les assiettes d'or et les étoffes luxueuses. Chaque éclat de lumière lui rappelait l'éclat du piège qui se refermait inexorablement sur elle.

Elle était promise au prince Adrian. Une alliance scellée par le devoir et la raison d'État. Une union où l'amour n'avait pas sa place, où elle n'était qu'un instrument politique, une pièce essentielle sur l'échiquier du royaume. Depuis sa naissance, on lui avait enseigné l'art de l'obéissance, du sacrifice et du silence. Pourtant, ce soir, alors que les conversations mondaines glissaient autour d'elle comme un poison sucré, une révolte sourde s'éveillait dans sa poitrine.

Elle aurait voulu se lever, briser cette coupe entre ses doigts, crier à tous ces visages impassibles qu'elle refusait cette destinée. Mais la seule chose qu'elle briserait, c'était elle-même.

Une main se posa délicatement sur son poignet.

—La duchesse:« Ma chère, vous êtes bien silencieuse. »

La duchesse aux boucles poudrées lui adressait un sourire poli, ses yeux scrutant le moindre de ses mouvements, à l'affût d'une réaction déplacée, d'une faille dans ce masque qu'elle devait porter sans relâche.

Elena ravala son trouble et redressa légèrement le menton.

—Elena: "Je profite simplement de l'instant, Duchesse."

Un mensonge de plus. Un de ceux qu'on attendait d'elle. La noble dame sembla satisfaite de sa réponse et se détourna pour commenter la coupe d'un jeune chevalier assis non loin.

Mais la pression sur elle ne faiblissait pas.

De l'autre côté de la table, sa mère, la Reine Isabella, n'avait pas cessé de l'observer. Son visage était d'une sérénité glaciale, un masque parfait d'autorité et de maîtrise. Depuis son enfance, Elena avait appris à redouter ce regard. Il ne trahissait ni colère ni tendresse, seulement une attente inébranlable.

Une seule erreur, une seule hésitation, et elle sentirait la réprobation de la reine s'abattre sur elle comme une lame invisible.

Le conseiller, lui, savourait visiblement l'échange. Il fit tourner son vin dans sa coupe, l'observant avec ce sourire en coin qui lui donnait des airs de prédateur.

—Le conseiller : "Il est normal d'être un peu nerveuse, bien sûr. Après tout, demain marque le début d'une ère nouvelle pour le royaume. Votre mariage unira deux des plus grandes puissances de cette région. Quelle bénédiction pour notre peuple !"

Elena hocha la tête avec une lenteur mesurée, sans se permettre le moindre signe de contrariété. Elle savait que ce n'était pas à elle qu'il parlait vraiment. C'était un rappel déguisé, une manière subtile de s'assurer qu'elle ne dévierait pas du chemin tracé pour elle.

—Elena: "Une bénédiction, en effet."

Sa propre voix lui sembla étrangère.

Le reste du banquet se poursuivit dans un tourbillon d'échanges élégants et de flatteries voilées. Les mets défilaient sous ses yeux sans qu'elle y touche, et chaque sourire échangé autour d'elle lui paraissait plus faux que le précédent.

Puis vint le moment qu'elle redoutait.

Les musiciens s'étaient installés sur l'estrade dorée, et les premières notes d'une mélodie gracieuse s'élevèrent dans l'air embaumé. Le silence tomba progressivement dans la salle, et les regards se tournèrent vers elle.

—Le conseiller : "Votre Altesse, votre fiancé n'est pas présent ce soir, mais cela ne devrait pas vous empêcher d'ouvrir le bal." déclara t'il avec une fausse bienveillance.

Un murmure d'approbation parcourut l'assemblée. Son cœur se serra. Elle ne voulait pas danser. Pas ce soir. Pas pour eux. Mais son refus n'existait pas.

Elle se leva avec une grâce étudiée et s'avança vers le centre de la pièce. Le silence devint presque oppressant.

Un chevalier s'inclina légèrement devant elle et lui tendit la main. C'était un homme aux traits avenants, dont le nom lui échappait, mais qui avait déjà dû être choisi avec soin pour ne pas froisser les convenances.

Elena posa sa main dans la sienne, et le bal commença. Les premières secondes, elle se força à suivre les pas avec la précision qu'on lui avait inculquée. Mais peu à peu, la réalité se distordit.

La musique s'effaça, remplacée par le grondement de ses pensées. Son souffle lui semblait trop court, son corsage trop serré, la salle trop étouffante. Elle vit les visages tourner autour d'elle, observer, juger, attendre.

Un futur déjà écrit. Une cage dorée. Son cœur battait violemment contre sa poitrine, mais personne ne le voyait. Personne ne l'entendait.

Elle souriait toujours. Et pourtant, au fond d'elle, quelque chose venait de se briser. Demain, elle deviendrait l'épouse du prince Adrian. Et demain, elle mourrait un peu plus.

Mais ce soir, alors que la danse l'emportait dans un tourbillon d'ombres et de dorures, une idée dangereuse germa en elle. L'espoir. Un espoir minuscule, insensé.

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Baiser

Du

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Alors qu'Elena tournoyait sous les lustres étincelants, offrant au monde l'image parfaite d'une princesse disciplinée et gracieuse, un autre bal, bien plus subtil, se jouait à l'extrémité de la salle.

Autour de la Reine Isabella, un cercle de nobles et de dignitaires s'était formé, comme des planètes gravitant autour d'un soleil trop puissant pour être ignoré. Ils étaient là, les courtisans, les opportunistes, les stratèges et les ambitieux, tous unis par la même danse invisible : celle des mots, des flatteries et des alliances tissées dans l'ombre.

La Reine, assise dans un fauteuil sculpté aux armoiries du royaume, était immobile. Son maintien était impeccable, son dos droit, ses mains croisées avec une élégance qui frôlait l'austérité. Son visage, figé dans une expression de calme absolu, ne laissait paraître ni émotion ni lassitude. Et pourtant, elle régnait ici autant que sur le trône.

Chaque noble qui s'approchait savait qu'il devait choisir ses mots avec soin.

Le premier à parler fut le Duc de Veldran, un homme imposant au ventre rond, dont la richesse provenait des mines d'argent du Nord. Son ton était mielleux, sa voix faussement humble.

—Le Duc: Majesté, quelle brillante soirée ! Votre fille est le joyau du royaume, et quelle danseuse exquise !"

La Reine inclina légèrement la tête, acceptant le compliment comme on accepte un tribut dû depuis longtemps.

—Reine Isabella: "Elle a été élevée pour représenter son sang."

Une simple phrase, énoncée avec une neutralité parfaite. Mais le message était clair : Elena n'existait pas en tant qu'individu. Elle était une extension du royaume, un pion soigneusement façonné pour servir.

Le Duc acquiesça avec empressement avant d'ajouter, sur un ton plus intéressé :

—Le Duc: Je suis certain que cette union avec le prince Adrian apportera la prospérité que nous espérons tous… Il est vrai que les tensions avec l'Empire voisin inquiètent certains marchands."

Un piège déguisé en question. Une tentative d'évaluer la position de la Reine sur un sujet épineux.

Isabella eut un sourire imperceptible.

—Reine Isabella: "Les marchands s'inquiètent toujours. Et pourtant, nos coffres restent pleins."

Une réponse tranchante, qui ne laissait aucune prise. Le Duc comprit qu'il n'obtiendrait rien de plus et s'inclina légèrement avant de se retirer.

Vint ensuite la Marquise de Lierne, une femme d'un âge avancé, à l'éventail de soie toujours en mouvement. Son regard acéré balayait la salle comme un faucon scrutant ses proies.

—La Marquise: "Votre Majesté, votre fille est d'une beauté éclatante ce soir. Une future Reine qui inspirera autant qu'elle régnera."

La Reine posa un regard froid sur la Marquise, évaluant l'intention derrière ces mots.

— Reine Isabella: "Elle saura remplir son rôle."

La Marquise sourit derrière son éventail.

—La Marquise: "Naturellement. Mais je dois avouer une petite curiosité… J'ai entendu dire que le prince Adrian est… disons, un homme à l'esprit libre."

C'était une provocation à peine voilée, un test pour voir si la Reine exprimerait la moindre inquiétude sur la fidélité ou le caractère du prince.

Mais Isabella ne cilla pas.

— Reine Isabella: "Les hommes puissants ont souvent des distractions. Ce qui importe, c'est qu'ils connaissent leur devoir. "

Une réponse implacable, qui balaya toute tentative d'insinuer que cela pourrait être un problème.

La Marquise comprit qu'elle n'obtiendrait rien d'autre et s'éloigna avec un sourire satisfait.

D'autres nobles s'approchèrent, chacun essayant d'obtenir une faveur, une information, une promesse voilée. Certains murmuraient des inquiétudes sur la politique, d'autres offraient des compliments destinés à masquer leurs propres intérêts.

Mais la Reine Isabella ne cédait jamais rien sans le vouloir. Elle donnait toujours aux gens ce qu'ils voulaient entendre, et pourtant, ils repartaient sans avoir rien obtenu de plus que ce qu'elle consentait à offrir.

Sous son masque de courtoisie se cachait une intelligence redoutable. Elle ne croyait pas aux émotions inutiles, aux caprices de la jeunesse ou aux rêves romantiques. Pour elle, seule comptait la stabilité du royaume. Seuls comptaient les devoirs que chacun devait remplir. Et sa fille, Elena, en faisait partie.

Son regard s'attarda un instant sur la jeune femme qui continuait de danser, un sourire figé sur les lèvres.

Elle savait que cette enfant n'était pas née pour être heureuse. Elle était née pour être utile.