Chereads / Le Baiser du Crépuscule [Girl x Girl] / Chapter 3 - [✓Chapitre 2✓]

Chapter 3 - [✓Chapitre 2✓]

Les festivités s'éternisèrent. La musique, les rires feutrés et les murmures conspirateurs emplirent la salle bien après que le vin eut cessé d'avoir le moindre goût. Les chandeliers perdaient de leur éclat, leurs flammes vacillant sous l'effet des courants d'air qui s'infiltraient à travers les immenses voûtes.

Elena dansa, sourit, échangea des mots creux avec des inconnus qui ne voyaient en elle qu'une promesse d'alliance. Elle joua son rôle jusqu'au bout, jusqu'à ce que la nuit semble s'étirer en une éternité étouffante.

Il fallut attendre des heures avant qu'elle ne soit enfin autorisée à regagner ses appartements.

Les couloirs du palais s'étendaient devant elle, déserts et silencieux sous la lumière vacillante des torches. Les murs de marbre, ornés de tapisseries d'un bleu profond, semblaient l'observer, immobiles et impassibles, comme des sentinelles figées dans le temps.

Elle avançait lentement, chaque pas résonnant sur le sol poli, mais son esprit, lui, courait dans toutes les directions.

Demain, elle serait fiancée à un homme qu'elle n'avait jamais rencontré, à un destin qu'elle n'avait pas choisi.

Elle sentit la cage se refermer un peu plus sur elle, chaque battement de son cœur marquant un compte à rebours invisible. Un frisson lui traversa l'échine.

Elle posa une main sur la poignée de sa porte, pressée de s'enfermer, ne serait-ce que pour quelques heures, loin des regards scrutateurs. Mais au moment où elle allait entrer, une voix froide fendit le silence, la clouant sur place.

—Reine Isabella: "Tu n'as même pas essayé de masquer ton malaise ce soir."

La princesse à la chevelure blonde se raidit. Elle n'eut pas besoin de se retourner pour savoir qui se tenait derrière elle: la Reine Isabella.

Le bruissement du velours accompagna l'approche mesurée de sa mère, chaque pas calculé, maîtrisé. Lorsque la souveraine s'arrêta à ses côtés, la lumière tremblotante des torches révéla son visage sévère, encadré par des boucles sombres relevées en un chignon impeccable. Son expression était aussi inébranlable que le marbre des murs, figée dans une neutralité glaciale.

Seul son regard parlait. Tranchant, perçant. Une lame dégainée dans l'ombre.

Elena se força à respirer profondément avant de répondre, la voix plus hésitante qu'elle ne l'aurait voulu.

—Elena: "Je… Je ne suis simplement pas encore habituée à l'idée."

Un silence tomba, lourd, pesant. Puis, la Reine s'approcha un peu plus, réduisant l'espace entre elles comme on resserre un piège.

—Reina Isabella: "Il ne s'agit pas de s'y habituer. Ils'agit de comprendre ton devoir." sa voix était mesurée, implacable.

Elena sentit une colère sourde monter en elle, brûlante et insidieuse. Toujours ce mot: Devoir. Comme si son existence entière se résumait à cela. Comme si elle n'était qu'un instrument au service d'une cause plus grande, sans pensées, sans désirs, sans voix.

Elle releva lentement ses yeux, d'un bleu aussi profond que les mers d'azur, et les planta dans ceux de sa mère avec une audace qu'elle-même ne se connaissait pas.

—Elena: "Mon devoir ? Est-ce tout ce que je suis pour toi ? Un pion à marier ? Une pièce sur ton échiquier ?"

Sa gorge était serrée, mais elle ne détourna pas le regard.

Un instant, il n'y eut que le silence entre elles. Puis un sourire imperceptible effleura les lèvres de la Reine. Un sourire qui n'avait rien de chaleureux.

—Reina Isabella: "Un pion ?" murmura-t-elle, presque amusée.

Elle inclina légèrement la tête, et son regard se fit plus perçant encore.

—Reina Isabella: "Non, Elena. Tu es bien plus qu'un pion."

Elle marqua une pause, laissant ses paroles s'imprimer dans l'air lourd du couloir.

—Reine Isabella: "Tu es une reine en devenir. Et les reines ne se plaignent pas de leur sort. Elles l'embrassent. Elles comprennent que leur vie ne leur appartient pas."

Elena sentit son souffle se bloquer dans sa poitrine. La Reine inclina légèrement le menton, l'observant avec une intensité glaciale.

—Reine Isabella: " Tu crois être prisonnière ?"

Elle fit un pas de plus, réduisant l'espace entre elles à un souffle.

—Reine Isabella: "Mais tu n'es pas enchaînée, Elena. Tu es ce qui maintient le royaume debout. Ce mariage est ta responsabilité. Ta mission. Et je ne permettrai pas que tu l'oublies."

La princesse voulut répondre, crier, dire que non, qu'elle n'avait jamais demandé à être cela. Qu'elle voulait exister pour elle-même. Mais aucun mot ne franchit ses lèvres. Il n'y avait rien à répondre parce que sa mère n'écouterait pas.

Parce que, pour la Reine Isabella, les désirs d'une fille n'avaient aucune importance quand un royaume était en jeu.

La souveraine observa Elena une dernière fois, puis recula d'un pas, sa silhouette redevenant une ombre souveraine sous la lueur tremblante des torches.

—Reine Isabella: "Dors bien. Demain, tu devras être parfaite."

Puis elle s'éloigna, laissant derrière elle un silence plus lourd encore.

Elena resta immobile devant sa porte, le cœur battant à tout rompre. Les murs semblaient se refermer un peu plus sur elle.

Et pour la première fois, elle comprit avec une clarté terrifiante : Ce n'était pas seulement un mariage qu'on lui imposait. C'était la fin de tout ce qu'elle aurait pu être.

Elle resta figée devant sa porte, le regard perdu sur les nervures du bois sculpté. Son souffle était court, ses pensées en chaos. Derrière elle, le couloir du palais avait retrouvé son silence sépulcral, comme si la présence de la Reine n'avait été qu'un mirage. Pourtant, les mots de sa mère vibraient encore en elle, résonnant avec la brutalité d'une sentence gravée dans la pierre.

"Une reine en devenir." "Les reines ne se plaignent pas de leur sort."

Elle serra la poignée, ses doigts tremblants sous la tension qui crispait tout son être. Finalement, elle entra et referma la porte derrière elle, s'adossant contre le bois massif dans un geste instinctif, comme si ce simple contact pouvait la protéger de l'inéluctable. Un soupir s'échappa de ses lèvres, mais il ne fit rien pour alléger le poids sur sa poitrine.

Sa chambre était spacieuse, presque trop vaste. Une prison déguisée en sanctuaire.

Les murs étaient recouverts de tentures bleu nuit, brodées d'argent, assorties aux tapisseries des couloirs. Sur le sol, un tapis épais étouffait le bruit de ses pas. Dans l'âtre, les flammes vacillaient doucement, projetant des ombres tremblantes sur les fresques ornant le plafond.

Une brise légère s'infiltrait par la fenêtre entrouverte, faisant onduler les rideaux de soie comme des spectres muets. Un parfum de cire fondue et de lavande flottait dans l'air. Un parfum familier, réconfortant. Mais ce soir, il ne parvenait pas à l'apaiser.

Elle se détourna, avançant lentement jusqu'au centre de la pièce. Ses jambes étaient lourdes, chaque pas pesait comme si elle marchait vers son propre échafaud.

Le poids du lendemain pesait sur elle. Demain, elle serait fiancée. Demain, elle jouerait son rôle à la perfection, comme on l'attendait d'elle. Et après-demain… Après-demain, elle ne serait plus qu'un souvenir de ce qu'elle aurait pu être.

Son regard se perdit dans la pénombre de la chambre. Tout ici témoignait du raffinement qu'on attendait d'une princesse.

Son secrétaire d'acajou, où elle n'écrivait que des lettres dictées par le protocole. Da coiffeuse d'ivoire, où chaque matin, des mains étrangères sculptaient son apparence comme on façonne une statue.

Sa garde-robe, regorgeant de robes somptueuses, toutes choisies pour servir un rôle, jamais selon ses envies. Tout était parfait. Tout était étouffant.

Un rire amer s'échappa de ses lèvres. Le monde entier la voyait comme une jeune femme privilégiée, une future reine au destin grandiose. On vantait sa grâce, son éducation irréprochable, l'alliance glorieuse qu'elle allait sceller. Mais personne ne voyait l'essentiel.

Elle n'était pas une princesse. Elle était une prisonnière. Sa cage était faite de soie et de velours, mais cela ne la rendait pas moins oppressante.

Elle s'approcha de la fenêtre, posant ses mains sur le rebord de pierre froide. La nuit s'étendait devant elle, vaste, infinie. Au loin, au-delà des jardins royaux baignés d'ombre, les lumières des villages scintillaient comme des étoiles tombées sur terre. Elle les enviait. Ces gens-là, inconnus, sans titres, sans richesses, mais libres. Ils pouvaient choisir où aller, qui aimer, comment vivre.

Et elle, Elena de Valoria, née princesse et future reine, n'avait pas même le droit de refuser une coupe de vin à un banquet.

Elle ferma les yeux, laissant le vent nocturne caresser son visage, soulever quelques mèches échappées de son chignon défait.

Elle aurait voulu disparaître. Se fondre dans l'obscurité, se libérer du poids de son nom, de son sang. Mais elle ne pouvait pas fuir.

Pas encore. Un jour, peut-être.

Mais demain, elle devait sourire. Demain, elle devait être parfaite.

Car une reine ne se plaint pas.

Une reine endure.

Et elle était née pour être une reine.

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Baiser

Du

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Un coup discret à la porte tira Elena de ses pensées.

Elle sursauta légèrement, arrachée au tourbillon silencieux qui s'agitait dans son esprit. Pendant une seconde, elle hésita. Était-ce encore sa mère ? Venait-elle s'assurer qu'elle ne faiblirait pas, qu'aucune pensée d'insoumission ne germait en elle ?

Mais la voix qu'elle entendit fut bien plus douce, plus fragile.

—???: "Votre Altesse ?"

Anna.

Un mince soupir s'échappa des lèvres d'Elena alors qu'elle se redressait légèrement.

— "Entrez."

La porte s'ouvrit dans un bruissement feutré, laissant apparaître sa dame de compagnie.

Anna était une jeune femme menue, aux traits fins, aux longs cheveux bruns tressés avec soin. Elle portait une robe sobre, comme toujours, mais impeccablement ajustée, révélant son rôle de servante au sein de la cour. Pourtant, derrière cette apparence discrète, son regard trahissait autre chose : une loyauté indéfectible, un attachement sincère.

—Anna: "Votre Altesse… Vous allez bien?" murmura Anna en refermant la porte derrière elle.

Une question simple, et pourtant si lourde.

Elena détourna les yeux, observant la lueur tremblante des bougies sur la coiffeuse d'ivoire. Elle ne répondit pas immédiatement. Pendant un instant, elle eut envie de dire la vérité, d'exprimer tout ce qui pesait sur son cœur, tout ce qui la consumait. Mais à quoi bon ?

Alors, elle força un sourire, un sourire qui ne toucha pas ses yeux.

—Elena: "Parfaitement bien. Après tout, demain sera un jour glorieux, n'est-ce pas?"

Le mensonge lui brûlait la gorge comme du poison.

La servante ne bougea pas. Elle resta là, debout, le regard fixé sur la princesse avec cette expression de douleur contenue qui la rendait si différente des autres courtisans. Contrairement à eux, elle voyait au-delà des apparences, au-delà des masques qu'Elena devait porter chaque jour.

Elle s'approcha, ses doigts fins se crispant sur le tissu de sa jupe.

— Anna: " Vous n'êtes pas obligée de me mentir, princesse."

La princesse à la chevelure blonde ferma les yeux un instant. Ce simple aveu, ce simple fait d'entendre quelqu'un lui rappeler qu'elle pouvait être autre chose qu'une marionnette lui fit plus mal encore. Une vague d'émotion menaçait de l'engloutir, une tempête qu'elle refusa de laisser éclater. Quand elle rouvrit les paupières, son regard était plus dur, plus froid.

—Elena: "Et que puis-je faire, Anna? Fuir?"

L'idée était là, tapie dans un coin de son esprit, insidieuse, brûlante, dangereuse.

Elle y avait pensé plus d'une fois ces dernières heures. Elle y avait pensé en dansant, sous les regards de ces nobles qui la voyaient comme une pièce d'échiquier. Elle y avait pensé en croisant les yeux impassibles de sa mère. Elle y avait pensé en sentant le poids invisible des chaînes qui l'entravaient.

Mais fuir… Où irait-elle ?

Chaque route, chaque ville, chaque sentier était surveillé. Elle était la princesse de Valoria, promise au prince Adrian. Son visage était connu de tous.

Elle n'avait aucune illusion. Elle serait retrouvée. Elle serait ramenée de force. Et la punition serait terrible. Pour elle et pour ceux qui l'auraient aidée.

Anna baissa la tête, serrant les lèvres comme si elle luttait contre ses propres pensées.

—Elena: " Il doit bien y avoir une autre voie…" souffla-t-elle.

Elena la fixa. "Une autre voie." Ce mot résonna en elle comme une promesse lointaine, un espoir fragile qui refusait de s'éteindre.

Mais quelle voie ? La porte de sa chambre était fermée. Pourtant, elle avait l'impression d'entendre encore le murmure du bal, le bruit des conversations feutrées, les rires mondains teintés d'hypocrisie. Elle pouvait presque ressentir le poids du regard de sa mère, cette mise en garde silencieuse qui lui rappelait son rôle, son devoir, son destin.

Et si elle échouait? Et si elle tentait de s'échapper et que le prix à payer était trop lourd ?

—Elena: "Si je pars, ils te soupçonneront immédiatement."

La servante releva brusquement la tête, ses yeux s'écarquillant de stupeur.

—Anna: "Moi ? Mais… Je ne vous laisserai jamais partir seule !"

La princesse sentit son cœur se serrer. Anna ne comprenait pas. Elle ne devait pas comprendre.

Elle était prête à l'aider, elle le ferait sans hésiter. Mais elle ignorait les conséquences, la cruauté de ceux qui dirigeaient ce royaume.

—Elena: "Ils te feront parler, Anna."

La voix d'Elena était plus basse, presque un murmure.

— Elena: "Tu ne connais pas la Reine comme moi. Elle n'a pas besoin de torture. Elle saura. Elle n'aura qu'à te regarder dans les yeux. Et alors…"

Elle s'interrompit. Elle ne voulait pas imaginer la suite.

Anna déglutit, visiblement bouleversée.

—Anna: "Alors… Alors, quoi?"

La princesse aux yeux bleus ne répondit pas immédiatement. Elle détourna le regard vers la fenêtre, vers cette nuit qui s'étendait au-delà du palais, au-delà des murailles, vers l'inconnu.

—Elena: "Elle ne tolérera pas la trahison. Elle fera de toi un exemple."

Les paroles tombèrent comme un couperet.

Anna recula d'un pas, les mains tremblantes.

Elle savait qu'Elena ne mentait pas.

—Anna: "Mais alors… que pouvez-vous faire ?" murmura-t-elle.

Elena inspira profondément. Elle l'ignorait encore. Mais cette nuit-là, alors que le silence enveloppait le palais, une certitude s'imposa à elle. Elle devait trouver un moyen d'échapper à ce destin

Et si fuir n'était pas une option immédiate… alors elle devait faire semblant, se plier aux attentes, laisser croire qu'elle acceptait son sort, jouer le rôle que l'on attendait d'elle… jusqu'au moment où elle pourrait briser les chaînes.

Elle reporta son regard sur Anna, qui semblait bouleversée.

—Elena: "Fais-moi une promesse, Anna."

La jeune femme hocha la tête, incertaine.

—Elena: "Ne fais rien d'imprudent. Ne me laisse pas t'entraîner dans ma rébellion… Pas encore."

Anna ouvrit la bouche pour protester, mais le regard d'Elena la réduisit au silence. Un long moment passa, puis enfin, la servante baissa les yeux et hocha la tête.

—Anna: "Très bien… Mais si jamais… Si jamais une vraie occasion se présente, vous savez que je serai là."

—Elena: "Je sais." un sourire triste étira les lèvres da la princesse

Cette nuit-là, Elena n'avait pas dormi à cause de l'angoisse.