Arthon quitta l'atelier du potier avec un sentiment de renouveau, bien que ce ne soit pas un but précis ou une destination qui l'animait. C'était plutôt la sérénité de celui qui avait appris à faire confiance à chaque instant qui se dévoilait, convaincu que le poème qui prenait forme en lui trouverait son propre chemin. Il avait observé ce principe dans le martèlement minutieux du charpentier, dans les traits mesurés du calligraphe, dans la patience du pêcheur et dans le façonnage lent de l'argile par le potier. Chaque artisanat révélait une danse lente et délibérée avec le monde. De la même manière, l'art d'Arthon était une conversation continue entre observation et imagination.
Le chemin qu'il suivait serpentait doucement vers le haut, traversant une série de collines ondulées. L'air était vif, adouci par la chaleur discrète du soleil de l'après-midi. De gros nuages blancs traversaient le ciel, leurs ombres glissant sur le paysage comme des esprits errants. À chaque pas, Arthon ressentait la légère traction de l'ascension, le conduisant au-dessus des champs et des petites vallées qui avaient été jusqu'alors ses compagnons. Tandis qu'il montait, il jetait des regards en arrière pour voir comment le terrain se déployait en douces crêtes, parsemées de fermes et, parfois, de rivières sinueuses.
Une part de lui se demandait si ce sentier menait à un autre village, ou peut-être à un poste isolé sur la colline. Il avait vaguement en tête que de tels points de vue offraient parfois des panoramas saisissants. Cela faisait longtemps qu'il ne s'était pas tenu à un endroit suffisamment haut pour voir le monde dans toute son ampleur. L'idée d'admirer un paysage grandiose—champs, bois et routes lointaines—exerçait sur lui une certaine fascination. Peut-être, d'un sommet, pourrait-il apercevoir la direction que son voyage prendrait ensuite.
Au fil de l'après-midi, Arthon arriva à une bifurcation dans le sentier. L'une des routes s'orientait vers l'est, descendant dans un ravin peu profond où scintillait un filet d'eau. L'autre continuait à monter, plus raide mais plus directe. Sans hésitation, il choisit cette dernière. Quelque chose en lui aspirait à l'altitude, à la perspective élargie qu'on gagne en se tenant sur un sommet ou une crête. Il souhaitait voir comment les fragments de son voyage s'imbriquaient dans une tapisserie plus vaste : la menuiserie, la calligraphie, la pêche, la poterie, et tous les autres moments qu'il avait vécus.
L'air devint plus frais à mesure qu'il grimpait. Des éboulis de pierres rendaient le sol instable, et il dut planter ses bottes avec soin. Il s'arrêta une fois pour reprendre son souffle, contemplant un vaste panorama de terres agricoles verdoyantes. Loin en bas, il aperçut une fine ligne de route qu'il avait déjà parcourue, semblable à un fil cousu dans une courtepointe. Ce point de vue éveilla en lui une admiration silencieuse. Depuis cet endroit, ses jours de marche semblaient à la fois distants et proches, condensés en une seule image : une ligne sinueuse qui racontait un récit.
Il continua son ascension, le sentier finissant par contourner la colline. Près du sommet, il découvrit un petit bosquet d'arbres courbés par le vent, leurs troncs tordus par des années de bourrasques. Ils formaient une arche naturelle, s'ouvrant sur un plateau herbeux parsemé de rochers. L'herbe, courte et douce, semblait taillée par le souffle persistant du vent et, peut-être, par le passage occasionnel de chèvres de montagne.
En s'approchant, il remarqua que ce plateau n'était pas totalement vide. Une silhouette se tenait au bord, dessinée contre le ciel—une forme solitaire regardant au loin. Arthon hésita, se demandant s'il devait s'approcher ou contourner la personne. Finalement, la curiosité et un sentiment de camaraderie le poussèrent à avancer. Il traversa le plateau, ses bottes crissant doucement sur le gravier. La silhouette se tourna légèrement, révélant un homme d'une cinquantaine d'années, vêtu d'une tunique simple et d'un pantalon. Il s'appuyait sur un long bâton. Quelques mèches argentées parsemaient ses cheveux sombres, mais sa posture était droite, et son regard vif.
« Bonjour, » appela doucement Arthon en se rapprochant.
L'homme hocha brièvement la tête en signe de reconnaissance, sans se détourner immédiatement de la vue. « Bonjour, » répondit-il d'une voix calme, portée aisément par l'air ouvert. « Il y a longtemps que je n'ai vu quelqu'un grimper jusqu'ici. La plupart des voyageurs préfèrent les sentiers du bas. »
Arthon le rejoignit au promontoire, laissant une distance respectueuse entre eux. Depuis ce point de vue, la terre s'étendait dans toutes les directions. De petites collines ondulaient, se fondant dans des plaines lointaines où des routes convergeaient comme des ruisseaux se jetant dans un océan invisible. À l'ouest, une ligne brumeuse de montagnes formait l'horizon. C'était un monde en miniature, chaque parcelle de terre, chaque rivière sinueuse, chaque chemin poussiéreux rendu petit mais distinct sous l'immense voûte céleste.
« C'est magnifique, » murmura Arthon. Le vent jouait avec ses cheveux, envoyant un frisson doux sur ses joues. « On dirait une carte animée. »
L'homme expira doucement, son regard parcourant le panorama. « Je viens souvent ici pour me rappeler que le monde est plus grand que mes préoccupations quotidiennes. Je peux regarder les orages arriver, les voir traverser les champs. Parfois, je peux même deviner où la pluie tombera, bien que le vent me trompe souvent. » Il tapota un rocher de l'extrémité de son bâton. « Je m'appelle Garrin. »
« Arthon, » répondit le voyageur avec une légère inclinaison de tête. « Je suis en route pour un long voyage, mais sans hâte. J'apprends de chaque endroit et de chaque personne que je rencontre. Dernièrement, j'ai ressenti le besoin de voir une vue d'ensemble. C'est pourquoi j'ai choisi ce chemin. »
Garrin l'étudia avec une curiosité tranquille. De près, Arthon remarqua de fines lignes autour des yeux de l'homme—les marques de quelqu'un ayant passé de nombreuses heures à scruter le soleil, le vent, ou peut-être ses propres pensées profondes. « Vous avez trouvé le bon endroit, » dit Garrin. « Ce plateau offre une perspective rare. Restez un moment, si vous n'êtes pas pressé. La lumière change au fil de l'après-midi, et chaque angle révèle quelque chose de nouveau. »
« J'aimerais cela, » répondit Arthon, ressentant un mélange de soulagement et d'excitation à cette invitation. Il déposa son sac, sortit sa gourde et prit une petite gorgée. L'air frais, combiné à l'effort de la montée, le laissait agréablement fatigué mais aussi éveillé d'une manière plus profonde, comme si son esprit était plus ouvert.
Les deux hommes restèrent en silence, absorbés par le paysage. Arthon sentit les mots naître en lui, de petites lignes comme des graines prêtes à être plantées. Il ne saisit pas immédiatement son morceau de papier et son charbon. Il préférait laisser l'inspiration se déployer lentement, convaincu que les mots resteraient tant que son attention serait sincère. Quand le soleil se mit à descendre, Arthon écrivit :
Au-dessus des routes sinueuses,
Où les nuages dérivent dans un calme doré,
Nous voyons la tapisserie :
Le coucher du soleil tissant des histoires dans l'ombre,
Et chaque vie un fil,
S'illuminant, puis disparaissant dans le crépuscule.
Lorsqu'il lut les lignes à voix haute, Garrin hocha la tête avec approbation. « Vous avez l'âme d'un poète, » dit-il doucement. Arthon sentit une gratitude sincère grandir en lui, convaincu qu'il venait d'ajouter un fil précieux à sa propre tapisserie.