DANS LE PETIT VILLAGE
À table, dans une modeste maison au centre du village, l'ambiance était calme, on entendais que le bruits des bols, des baguettes et des oiseaux qui chantaient.
- Dis Basushi, le monde en dehors du village, il ressemble à quoi ? demanda Hikaru en posant ses baguettes.
Basushi, un homme dans la quarantaine, au regard fatigué mais bienveillant, leva les yeux de son assiette et sourit doucement.
- Très bonne question, Hikaru. Il prit une profonde inspiration avant de continuer.
À vrai dire, la dernière fois que j'y ai mis les pieds, c'était il y a environ quinze ans. À l'époque, le monde était en pleine crise : les gens disparaissaient du jour au lendemain, sans explication. Et puis… un jour, je me suis retrouvé dans ce petit village et j'ai décidé de m'y installer.
Basushi s'interrompit un instant, fixant ses deux protégés.
- Ce qui est sûr, c'est que je ne vous laisserai pas y mettre un pied. Le monde extérieur est bien trop dangereux.
Taiyo, assis en bout de table, croisa les bras avec un sourire espiègle.
- Eh bien, Basushi, tu as beau être notre tuteur, tu n'es pas notre père. Si un jour nous décidons de partir, alors nous le ferons.
Basushi éclata de rire, un rire rauque et chaleureux.
- Haha ! Taiyo, toujours aussi direct. C'est vrai. Mais n'oubliez pas que vous restez sous ma responsabilité.
Taiyo baissa la tête, fixant son assiette vide. Ses pensées dérivèrent.
"Je m'appelle Taiyo. Juste Taiyo. Je ne sais pas d'où je viens, ni qui je suis vraiment. Mais ce que je sais, c'est que je compte bien le découvrir.
Depuis quelques semaines, un rêve me hante, encore et encore.
Dans ce rêve, je me tiens au milieu d'une grande ville, sombre et oppressante. Devant moi, trois silhouettes indistinctes. Elles n'ont pas l'air menaçantes… mais quelque chose en elles me terrifie.
À chaque pas dans cette ville, mon corps brûle de l'intérieur, jusqu'à ce que je me réveille en sueur.
Ce rêve… il revient toutes les nuits. Et je sais qu'il signifie quelque chose. Je dois comprendre. Je dois savoir.
Mais, ce n'est pas dans ce petit village de 300 habitants, que je serai capable de découvrir ca signification
Il releva la tête, observant Hikaru, assis en face de lui. Ce garçon c'est Hikaru, je le considère comme mon frère . Basushi nous a élevés ensemble, et pour rien au monde Taiyo je ne le laisserait.
- Vous avez bien mangé ? demanda Basushi en se levant.
- Merci encore, c'était excellent ! répondit Hikaru avec enthousiasme.
- Pas dégueu, comme d'habitude, ajouta Taiyo avec un sourire moqueur.
Hikaru se tourna vers lui, les yeux brillants.
- Taiyo, ça te dirait un combat de bâtons ?
"Basushi nous a appris à nous battre très jeunes. Il disait que c'était essentiel pour notre survie. 'Le combat est le B.A.-BA d'un homme,' disait-il toujours. Mais jusqu'à présent, je n'en ai jamais vu l'utilité."
À l'extérieur
Sous le ciel qui commençait à s'assombrir, les deux garçons s'affrontaient avec intensité, leurs bâtons s'entrechoquant dans un échange de coups puissants.
- Tiens, le ciel commence à s'assombrir, remarqua Hikaru en bloquant une attaque rapide de Taiyo.
- Peut-être un orage, répondit Taiyo en ripostant avec un coup rapide vers le flanc.
Un groupe de villageois passa non loin, leurs paniers remplis de légumes fraîchement récoltés.
- Regarde, c'est encore Hikaru et Taiyo qui se battent, murmura l'un d'eux.
- Ces petits m'impressionneront toujours, répondit un autre en les observant. Ils sont si rapides.
- Ne tardons pas, ajouta un troisième. Ramenons les récoltes avant qu'il ne pleuve.
Dans le ciel, à quelques kilomètres
À bord d'un dirigeable en métal sombre, une jeune femme aux longs cheveux noirs se tenait, une main sur la hanche. Sa cape flottait légèrement sous l'effet du vent. Elle observait les arbres à perte de vue en contrebas avec une expression d'agacement.
C'était la capitaine Aki
- Vraiment ? C'est cette zone qu'ils veulent que je "track" des gens ? Elle souffla bruyamment. Ils se foutent de moi ? Il n'y a que des arbres, à perte de vue. Et en plus, il pleut. Mes cheveux vont prendre l'eau.
Un soldat se tourna vers elle, nerveux.
- Capitaine, nous y sommes bientôt.
Elle fit un geste de la main.
- Ouvrez l'arrière du dirigeable.
- Oui, à vos ordres ! répondit-il en s'inclinant légèrement avant d'exécuter l'ordre.
Elle tendit le bras en avant, une lueur sinistre dans les yeux.
- Si ce village est bien là… je vais devoir me débarrasser de quelques arbres. Un sourire malicieux apparut sur ses lèvres.
- Un rayon de 10 kilomètres devrait suffire.
De sa main droite, une flèche violette se matérialisa, scintillant d'une énergie menaçante.
- Flèche déchue.
Avec une précision implacable, elle décocha la flèche. Celle-ci traversa les nuages à une vitesse fulgurante avant d'atteindre la forêt en contrebas.
- BROUMM !!!
Une explosion assourdissante secoua les alentours, réduisant tout sur un rayon de 10 kilomètres à des cendres fumantes. Des flammes se répandirent, léchant ce qui restait des arbres encore debout.
Au village
Basushi se précipita hors de la maison, son visage marqué par l'urgence.
- Qu'était-ce que ce bruit ?!
Il tourna les yeux vers Taiyo et Hikaru, toujours à l'extérieur.
- Taiyo ! Hikaru ! Rentrez immédiatement !
Au cœur du village
Elthor, le chef respecté du village, sentit la vibration dans le sol avant même que l'explosion ne parvienne aux oreilles des habitants. Il se tenait immobile dans sa modeste demeure, une main posée sur un pilier de bois usé. Ses yeux aveugles étaient clos, comme à son habitude, mais son visage se crispait légèrement.
- Ça ne vient pas d'ici… murmura-t-il d'une voix grave.
Cet homme, musclé et imposant malgré son âge avancé, était bien plus qu'un simple chef. Privé de la vue depuis des années, il la compensait par ses sens décuplés, capables de percevoir ce que d'autres auraient ignoré.
Elthor se redressa soudain, il inspira profondément, un air lourd et chargé de fumée remplissant ses narines.
- ÉCOUTEZ-MOI, TOUS ! Sa voix, puissante, résonna dans tout le village comme un coup de tonnerre.
Les habitants, alertés par son cri, interrompirent leurs activités et se tournèrent vers lui, certains déjà secoués par les répercussions de l'explosion.
- Avertissez vos familles ! C'est un code ROUGE… Notre petit village n'est plus en sécurité. Nous avons été découverts.
Un silence lourd s'abattit. Puis, un brouhaha de panique monta parmi les villageois, chacun réalisant la gravité des mots d'Elthor.
- Faites attention. Cachez-vous. Partez par le sud. Prenez de quoi vous nourrir. Et surtout… ne vous faites pas attraper. Si cela arrive, alors tout sera fini pour vous. Ces gens… ces monstres… n'ont aucune pitié. Ils vivent pour eux-mêmes, semant le chaos sur leur passage.
Habitants… ceci sont mes derniers mots en tant que votre chef. Nous avons partagé quinze ans de vie commune, paisible et joyeuse. J'ai été honoré d'être à vos côtés. Maintenant, partez. Protégez ce qui reste de votre liberté.
Les mots résonnèrent comme un glas dans les cœurs des villageois. Certains laissèrent échapper des sanglots, d'autres se précipitèrent pour avertir leurs familles et préparer leur fuite.
À proximité d'Elthor
Zaru, un homme mince au visage juvénile, accourut vers Elthor, le souffle court.
- Elthor ! Qu'est-ce que tu fais ? Il se passe quoi ?! cria-t-il, l'inquiétude visible dans son regard.
Elthor ne tourna pas la tête, mais ses traits s'assombrirent encore.
- Je le savais. L'atmosphère était différente ces derniers jours. Je pouvais le sentir.
Il inspira profondément, ses narines frémissant. Ces secousses…
- Ce ne sont pas de simples tremblements. Elles sentent la fumée, Zaru.
Zaru fronça les sourcils, déconcerté.
- De la fumée ?
Elthor hocha la tête lentement.
- Oui. Zaru… accroche-toi. Car nous sommes de retour… chez les hommes.
Ces derniers mots glacèrent Zaru. Il recula d'un pas, sa gorge serrée.
- Tu racontes quoi ?! C'est impossible. Le monde oublié nous aurait recrachés ?
Elthor tourna lentement sa tête dans sa direction, son visage impassible.
- Nous n'avons pas le temps de discuter. Range tes affaires et commence à fuir. Sa voix devint encore plus grave.
- DÉPÊCHE-TOI !
Zaru resta figé un instant, les lèvres tremblantes. Puis, réalisant la gravité de la situation, il s'élança vers sa maison.
Dans le dirigeable
À plusieurs kilomètres au-dessus des forêts, Aki, observait les dégâts depuis la rambarde ouverte du dirigeable. Ses longs cheveux noirs ondulaient sous l'effet du vent tandis qu'elle croisa les bras avec un sourire satisfait.
- Oups, dit-elle avec un ton moqueur. J'y suis peut-être allée un peu fort.
Elle plissa les yeux, apercevant quelque chose à l'horizon. Un village, caché derrière une fine couche de brume.
- Oh, mais qu'est-ce que j'aperçois là-bas ? On-t-il survécu après une telle explosion ? Un sourire malicieux étira ses lèvres. Hihi… intéressant.
Elle pivota brusquement, s'adressant au groupe de soldats derrière elle.
- Préparez une cinquantaines d'hommes ! Nous descendons immédiatement.
Un soldat se redressa, confus.
- Un rayon de 10 kilomètres, madame… Il n'y a plus rien. Pas même une trace.
Elle haussa les épaules avec nonchalance.
- Figure toi au contraire, il semble rester un village en parfaite état.
Elle bondit avec excitation, pointant l'horizon.
- Youpi ! Direction tout droit !
Les soldats se mirent en action, préparant leur descente. Aki, quant à elle, s'étira légèrement, comme si elle se préparait à un jeu.
- C'est l'heure de jouer à chat.