Le départ de V'athē marqua la fin d'une tension latente, mais une autre, plus insidieuse, couvait encore dans l'enceinte du palais. Aria, ayant représenté Esme pour lui faire ses adieux, errait désormais sans but précis dans les couloirs. Son cœur était lourd, ses pensées confuses.
Sans s'en rendre compte, ses pas la menèrent à la cour d'entraînement. Là, son regard se posa immédiatement sur Adam et Sina, qui riaient et se taquinaient comme s'ils étaient seuls au monde. Une amertume qu'elle ne voulait pas reconnaître s'installa dans sa poitrine.
— Adam ! lança-t-elle en s'approchant.
Les deux s'arrêtèrent net, surpris par son ton sec. Sina haussa un sourcil tandis qu'Adam lui adressa un sourire innocent.
— J'ai besoin de toi. Viens avec moi.
Adam fronça légèrement les sourcils.
— Désolé, Aria, mais Sina et moi devons nous entraîner.
Aria croisa les bras, piquée au vif.
— Ah oui ? C'est vraiment pour l'entraînement ou plutôt pour que tu restes avec elle ?
Sina, qui avait jusque-là gardé un air amusé, perdit son sourire.
— Pardon ? demanda-t-elle en arquant un sourcil.
— Oh, tu as très bien compris, répliqua Aria, son ton trahissant son irritation.
Adam soupira, sentant l'atmosphère s'électriser.
— Aria, ne commence pas…
Mais c'était trop tard.
— Non, mais sérieusement ! s'exclama Sina. C'est quoi ton problème avec moi ? Depuis quand est-ce un crime de passer du temps avec Adam ?
— C'est ton attitude mon problème ! rétorqua Aria, froide.
— Mon attitude ?! Sina écarquilla les yeux. C'est toi qui cherches constamment à me provoquer !
La tension grimpa d'un cran. Adam, perdu, regarda tour à tour les deux jeunes femmes, incapable d'intervenir.
— Tu es insupportable, Sina ! Toujours là à vouloir te faire remarquer !
— Et toi, toujours en train de te mêler de ce qui ne te regarde pas ! répliqua Sina.
Le ton montait, les mots devenaient plus tranchants, et bientôt, les éclats de voix résonnèrent dans toute la cour.
Les bruits de leur dispute attirèrent plusieurs personnes.
Esme et Luna arrivèrent rapidement, suivies d'Ander et Bullet qui s'arrêtèrent en retrait, observant la scène avec un air désabusé.
— Qu'est-ce qui se passe ici ? s'exclama Esme, les bras croisés.
Luna balaya la scène du regard et comprit aussitôt. Elle s'avança vers Sina et la saisit fermement par le bras.
— Ça suffit. Tu viens avec moi.
Sina ouvrit la bouche pour protester, mais le regard sévère de Luna lui fit ravaler ses mots.
De son côté, Esme attrapa Aria sans douceur et l'entraîna dans la direction opposée.
Adam, quant à lui, resta figé sur place, totalement perdu.
— Attendez… Pourquoi elles se disputaient même ? demanda-t-il après un moment de silence.
Un soupir exaspéré retentit derrière lui.
— Tu es vraiment naïf, Adam, lança une voix moqueuse.
Il se retourna et trouva Ander et Bullet, bras croisés, le regard blasé.
Bullet haussa un sourcil, un rictus amusé au coin des lèvres.
— Elles se disputaient à cause de toi, abruti.
Adam resta interdit. À cause de lui ?
Dans une pièce isolée, Esme relâcha enfin Aria, qui fulminait encore.
— Non mais tu as vu comment elle m'a parlé ?! s'exclama Aria. Sina dépasse vraiment les limites !
Esme croisa les bras, impassible.
— Elle, ou toi ?
Aria cligna des yeux, confuse.
— Qu'est-ce que tu veux dire ?
Esme la fixa droit dans les yeux.
— Le problème n'est pas Sina, c'est toi. Tu es jalouse d'elle.
Aria recula d'un pas, comme si ces mots l'avaient frappée de plein fouet.
— C'est faux ! Pourquoi je serais jalouse d'elle ?!
— Parce qu'elle est proche d'Adam. Parce que tu as peur qu'il puisse être amoureux d'elle. Parce que toi, tu l'aimes.
Le silence tomba dans la pièce. Aria détourna le regard, refusant d'admettre la vérité, mais son corps la trahissait.
Oui, c'était vrai.
Esme soupira, mais soudain, elle fronça les sourcils.
— Tu sens ça ?
Aria inspira et grimaça.
— C'est… bizarre. On dirait une odeur de…
Elle n'eut pas le temps de finir sa phrase.
Une étrange sensation l'envahit. Un mélange d'étourdissement et de lourdeur pesait sur ses membres.
— Esme… Je…
Esme porta une main à sa tête, prise de vertiges.
— Quelque chose ne va pas…
Le monde tourna autour d'elles. L'odeur âcre s'intensifia, leur vision se troubla, et en quelques secondes, leurs corps s'effondrèrent au sol.
Une silhouette en noir entra discrètement dans la pièce. Sans un bruit, elle traversa la salle, s'arrêta dans un coin et alluma un feu. Les flammes commencèrent à danser, se propageant lentement.
L'individu jeta un dernier regard aux deux jeunes femmes inconscientes avant de sortir et de bloquer la porte derrière lui.
Puis il disparut dans l'ombre.