Jamais Faironne n'a connu une telle situation. Tous les manieurs d'éléments proches de Kigen ont perdu leurs pouvoirs. Conséquence : trois des quatre éléments ne savent plus se contrôler, incapables de gérer l'arrivée soudaine et massive d'autant d'énergie. Ne reste plus qu'Hotto qui retient comme il peut sa propre porte. Parmi ceux encore aptes à battre, ne subsiste plus que Rai et Fraya. Le porteur de l'Hoshaku cède de plus en plus à la colère après la perte de l'un de ses amis les plus chers. C'est alors qu'un bref souvenir qu'il avait partagé avec le Zigrik de glace lui revient : la fois où, malgré la situation périlleuse dans laquelle lui et ses compagnons se trouvaient, il avait réussi à garder son calme et trouver une solution. S'en inspirant, il reprend une respiration contrôlée.
« Nous prendrons une faille pour aller à la Chambre élémentaire et rétablir l'équilibre. Tout vient de là bas.
- D'accord mais la priorité c'est de battre ces types là.
- Je sais. »
Du côté des spectateurs, Lyn regrette de ne pas avoir atteint le niveau du maître-conseiller. Si c'était le cas, sans doute elle aurait pu faire quelque chose. Sa frustration se reflète dans son poing. Calibak a les yeux rivés sur Rajik, écroulé au sol et sur le corps sans vie de Yoru. Intérieurement, il avoue que, depuis qu'il vit parmi les manieurs d'éléments, il s'est fait des amis, pas comme à l'Ouest. Un peu d'électricité émane de lui.Tekina, Korit et Lyn ressentent une montée en énergie provenir du mercenaire.Son regard est maintenant rivé vers les deux surpuissants Kiyuzas. Sa colère, traduite par l'apparition d'une aura jaune intense, le pousse à sortir une munition et la charger. Énormément d'électricité se dégage de son Obujepawa. Il vise Daigaku et Aritsune, qui ne s'inquiètent guère de ce qu'il prépare. Son aura migre alors vers son arbalète.
« Arrête ! Une telle quantité d'énergie concentrée pourrait te causer des dégâts ou te tuer ! supplie Lyn.
- Je m'en tape ! »
Son arbalète se fissure à plusieurs endroits.
« C'est mon dernier recours...
- Ne te loupe pas alors ! » répond Tekina.
Soudain, énormément de petits éclairs en sortent. Son attirail frôle le point de rupture.
« Kenar Bombamaél ! »
Le tir effectué détruit intégralement son arme, le blessant au bras. Il hurle de douleur. La munition, qui pourrait s'apparenter à un obus, fonce à une vitesse phénoménale vers les Kiyuzas. Rai et Fraya, grâce à leur appartenance énergétique, parviennent à l'apercevoir. Une telle attaque les stupéfie. Cela semble ne pas suffir pour déstabiliser Daigaku qui, en tendant son bras, sans même regarder ce qui se dirige vers lui et son collègue, laisse échapper un peu de sa puissance.
« Nektilyon ! »
Comme toutes les tentatives précédentes, l'assaut du manieur d'élément s'évapore en un instant. Énième échec qui plante un dernier clou dans le moral de Calibak.
« C'est impossible... »
Rai reste stupéfait que, même contre une telle quantité d'énergie concentrée en un point, cet homme soit capable de l'annuler. Comment contrer une telle technique ? Apparemment, à en juger l'expression sur les visages de Korit et Tekina, ils ont une petite idée. Surs de leur coup, le duo fait exploser son aura à quatre couleurs. Phénomène qui interpelle les Kiyuzas.
« Maintenant qu'il n'y a plus que nous, on peut briller ! s'exclame Korit.
- Euh... Vous êtes surs de ce que vous dîtes ? leur demande Lyn.
- Bloquons les. » avance la sœur.
Un de leurs sceaux favoris apparaît sur sa main droite. Les deux derniers adversaires l'identifient instantanément. Irrité par cet affront, Aritsune relâche son aura au même niveau que son partenaire. Fraya et Rai, craignant le pire, se mettent aussitôt en garde. Quand, soudain, sans prononcer le moindre mot, les Kiyuzas se téléportent instantanément dans le dos du duo de Zigriks. Un déplacement qui choque tout le monde.
« Galbomer ! »
Ils les assomment grâce à une décharge d'énergie. Leur aura disparaît dans la seconde. Puis, ils reviennent à leur point de départ l'instant d'après. Lyn, comprenant que, si elle se lance dans une tentative désespérée, elle connaîtra le même sort, recule un peu, refroidie.
« C'est pour l'affront que leur peuple a osé faire envers le nôtre en nous copiant ! » précise Daigaku sous un ton agressif.
Ailleurs, les perturbations s'accélèrent et s'intensifient. La mer se déchaîne, attaquant des littoraux. Le volcan d'Irn entre en éruption, crachant de multiples boules de feu. La terre s'ouvre sur plusieurs endroits. Des éclairs d'une extrême violence sèment la panique sur certains villages. Sur le champ de bataille de Kigen, devant ce déluge, Renko arbore un sourire effrayant.
« Magnifique ! Toute cette puissance ! C'est démentiel ! » s'exclame-t-il.
Tencubo, malgré l'incapacité de créer une quelconque protection pour la cité historique de son peuple, tient bon. Il a une promesse à honorer. La seule option restante est de gagner du temps, dans l'espoir que Rai puisse régler la situation.
« Pourquoi tu fais ça ? Qu'est-ce qui t'a poussé à le faire ?
- Vous avez refusé que je fasse mes preuves. Il était hors de question pour moi d'attendre. J'ai vu quelques-uns d'entre vous à l'action avant de vous rejoindre. J'étais tellement impressionné que j'ai voulu faire de même. J'avais entendu que, dans les villages proches de chez moi, certains avaient été admis. J'ignorais comment et pourquoi. J'ai tenté ma chance. Mais, lorsque j'ai découvert ce que vous cachiez, j'ai changé d'avis.
- Justement, c'est pour ça que je veux changer tout ça.
- Faux ! Il n'y a qu'un seul moyen pour que ça cesse ! Tous vous tuer ! Le temps est enfin venu pour vous de payer ! Kiyuzas ! A l'attaque ! » hurle-t-il en brandissant sa lame.
Les Izniens et Braliens se ruent sur l'armée du maître-conseiller.
« Repli immédiat ! »
Les Shirenais et les Zigriks encore reviennent vers la base. C'est alors que Renko attaque Tencubo, lame chargée. Son adversaire parvient à le parer mais rencontre beaucoup de difficultés.
« Gibar Ki ! »
La lame de Faironne lui balance une onde à bout portant qui le force à lâcher son arme et le fait tomber en arrière. Le Kiyuza épéiste en profite pour le viser avec la pointe de sa lame.
« Pour Faironne ! »
Alors qu'il allait l'achever, une boule de feu vient le percuter. Les patrouilleurs et les soldats Kiyuzas s'arrêtent. Tous voient alors un groupe de guerriers alignés, habillés de rouge. Tencubo les reconnaît immédiatement : les Shirenais du Sud, le père de Lyn a leur tête. Pourtant, selon les clauses convenues entre Kigen et la capitale du Sud, ils se sont coupés de toutes les activités autres que commerciales. Que font-ils ici ? Comment ont-ils pu être au courant de la bataille en cours ? Qui les a informé ? Le maître-conseiller se tourne vers Shiki pour lui réclamer une réponse. Le Négociant fait mine de ne pas savoir de quoi il parle. Après un son ressemblant à celui d'un cor, ils lancent l'assaut vers l'envahisseur.
« Il en existe d'autres ? Bordel... » blâme Renko.
Vu que la menace réside désormais ailleurs, il laisse Tencubo en vie pour le moment. Pendant ce temps, du côté des ruines, Daigaku et Aritsune, décontractés, jubilent, pour le plus grand malheur des derniers remparts qui se dressent devant eux.
« Comme prévenu, les éléments sont réveillés. La principale force militaire neutralisée, nos fidèles vont les massacrer. Nous avons réussi, mon ami. se réjouit le premier.
- Cette fois-ci, il faudra vraiment prendre soin d'effacer toute trace de maîtrise des éléments. Écrite, j'entends. Même si que, j'avoue, pour cette fois, c'était plutôt profitable.
- Chère Faironne, votre ennemi de toujours se dresse devant nous, se cachant sous ses créations. Aujourd'hui, nous allons réparer la faute commise par votre dernier émissaire !
- Il ne fallait pas les confiner ! Mais les éliminer !
- Pour le bien de tous ! »
Excédé par leurs convictions, Rai, avec les images de la mort de son ami en tête, émet beaucoup de lumière. Lyn, la seule spectatrice apte à suivre le combat, au contact de la chaleur émise par le sauveur, attrape des sueurs. S'apercevant que leurs paroles tapent dans le mille, voilà une occasion en or pour le déstabiliser.
« Adieu la mauvaise herbe ! »
L'hôte de l'énergie blanche charge. Daigaku vient l'intercepter. A la seconde où il l'aperçoit, le conseiller lui décoche un petit sourire moqueur avant de toucher son aura : chose normalement impossible.
« Dismiser ! »
Une violente onde de choc le repousse brutalement auprès de sa partenaire de combat.Le coup fut si bien placé qu'il crache du sang.
« Qu'est-ce qu'il s'est passé ? se demande-t-il, accusant difficilement ce qu'il vient de se passer.
- Si ma mémoire ne me trompe pas, j'ai déjà entendu parler de son talent. La personne qui en bénéficie peut entrer en contact avec n'importe quelle énergie. J'ignorais que ça concernait tout type de manifestation.
- Je vengerai Yoru...
- Calme-toi. J'ai pu mieux observer son mouvement et je crois savoir comment les contrer. Un jour, j'ai assisté à l'initiation de Kenshiro à la maîtrise du ki. L'homme qui l'a accompagné dans cette démarche affirmait que tout le monde peut s'éveiller au ki et apprendre à le maîtriser. Cela développe les sens de son utilisateur, sa force, sa vitesse ou sa résistance selon la technique employée. Ce qu'on appelle talent varie d'un être à un autre. Pour l'hypothèse de plusieurs talents développés, je n'en ai jamais entendu parler. Tout ce que je sais, c'est qu'il y a deux cents ans, un être unique sur Faironne a pu le faire. Il s'agit du grand Ki-Ramen qui avait une telle maîtrise qu'il éveilla des capacités transcendant les règles de Faironne. Cependant, pour Kenshiro, malgré tous les bénéfices qu'il en tirait, ce n'était pas suffisant. Un être élémentaire ne se repose que sur son élément. Un utilisateur du ki peut appeler toute l'énergie autour de lui, se l'approprier et dépasser un affilié. Il n'y a pas de limite connue au développement de ces capacités. En gros, nous ne savons pas les limites de nos propres énergies. Donc, logiquement, il y a moyen de les battre. »
Les conséquences du chaos régnant dans la Chambre des éléments poursuivent leurs cours : les fissures se créent, des arbres abattus par des éclairs, transformés en brasiers.
« C'est vraiment ce que vous vouliez ?! Tout détruire ?! Répondez !! hurle Rai, les yeux presque exorbités.
- Ils retrouvent leur aspect sauvage ! Ils ne sont plus manipulables ! Quitte à amener ce que vous considérez comme un désastre, il fallait bien ça ! répond Daigaku après un petit silence.
- Vous êtes complètement tarés... Vous êtes prêts à sacrifier des populations entières pour votre idéologie d'allumés ?! rétorque Fraya.
- Faux ! Car nous épargnerons nos semblables ! Toi qui est l'une des nôtres, tu es sensée représenter notre mémoire. Tu es sensée connaître tout ce qui nous concerne. Et tu sais ce que nous pouvons faire avec le ki. Et pourtant...Tu oses porter ça... Tu nous insultes ! s'insurge Aritsune.
- Tu... Tu faisais partie des Kiyuzas ? s'étonne Rai.
- Oui... Je devais devenir la prochaine vénérable. Mon talent ne se manifestait pas. J'étais menacée de mort juste pour ça... Alors, je me suis enfuie... La suite tu la connais.
- Je... Je me sens encore plus coupable de t'avoir conduit à tout ça.
- C'est derrière moi. Le plus important, c'est de les éliminer.
- Une fois que nous vous aurons vaincu, un nouvel équilibre s'installera. Tout le monde naîtra avec la même énergie, de manière égale. Tout le monde sera soumis aux forces supérieures de Faironne... Il ne reste plus qu'à effacer la dernière trace de son plus grand détracteur : vous. »
Tout juste après le résumé réalisé par Daigaku, les prédécesseurs de Tencubo et Yoru relâchent plus de puissance. Les vents qui en découlent balayent la zone.En même temps, sous les yeux ébahis des forces militaires de Kigen,les Shirenais du Sud n'utilisent pas leurs lames pour affronter les Izniens et les Braliens. Leurs coups à mains suffisent amplement pour le moment. Une humiliation pour Renko.
« Si prêt du but... Je ne les laisserai pas interférer ! » braille-t-il.
Soudain, un jet d'eau à haute pression vient le percuter en pleine face, le coupant totalement dans son élan de rage. Il se relève juste après.
« Qui a fait ça ?! »
Le Négociant s'avance vers lui, à l'étonnement du maître-conseiller et de son armée. Par quel miracle peut-il encore utiliser son élément ? Le moment propice pour dévoiler de mystérieuses pierres bleues. A leur aspect, Tencubo les reconnaît immédiatement : des arcanes similaires à ceux qu'il avait observé lors de sa première mission en tant que mercenaire.
« Toi... Tu n'as pas été affecté ?! s'étonne Renko.
- Ces petits bijoux ne sont pas des êtres vivants. Donc, ils ne peuvent être affectés par une neutralisation. Seulement, les fabriquer est très complexe, d'où l'assistance d'un certain Zigrik spécialisé dans le domaine. Je pense que je n'ai point besoin de rappeler de qui il s'agissait, n'est-ce pas ? »
Une brève image d'Arito lui revient en tête. Sur le moment, le maître-conseiller est obligé d'admettre que quelque chose qui était catégorisée comme illégale se trouve plus utile qu'un Kuwanoren. Une configuration qui le met un peu mal à l'aise vu tous les efforts fournis pour l'atteindre.
« Fumier ! »
Le Kiyuza épéiste lui envoie une onde verticale de ki. Peu après l'avoir esquivé, de l'eau vient se condenser au-dessus de l'ami de Kenshiro. Une forte pression est exercée à l'intérieur.
« Izinaraé Olaï ! »
Elle tombe sous forme d'aiguilles. Quelques unes atteignent l'envieux du poste de patrouilleur. Accusant cette technique plus qu'étrange à ses yeux, il recule. Cependant, la haine qu'il a nourri depuis reprend le dessus sur la douleur. Enragé, Renko fonce vers le Négociant. Sa cible semble un peu désorientée.
« Contre le ! crie Tencubo.
- Elles ne sont pas encore assez développées pour que je fasse appel à des attaques plus massives !
- Quoi ? »
Par réflexe, le Négociant sort deux dagues et tente de bloquer l'épée de son adversaire avec.
« Gibar Ki ! »
Une brusque projection de ki brise à la fois les petites lames et les pierres de Shiki avant de le projeter lourdement au sol.
« Maudit tricheur... Ce renfort-là, c'est de votre initiative ?!... Vous ne faites que retarder l'échéance ! » leur vocifère-t-il en titubant.
De retour du côté de ses maîtres, absolument convaincus qu'ils sont supérieurs à leurs opposants, s'avancent. A chaque pas, ils relâchent un peu plus d'énergie neutre. Les vents se transforment en véritables bourrasques. Avec la longue explication offerte par sa partenaire de combat, Rai cherche inlassablement une ruse, une tactique, une stratégie pour renverser la vapeur. Qu'aurait trouvé Yoru à sa place ? En ce qui concerne Fraya, elle se sent coupable au plus haut point d'être incapable de dompter l'énergie noire aussi bien que son homologue manie l'énergie blanche.
« Personne ne veut bouger maintenant ? Que c'est pitoyable ! amorce Daigaku.
- Vous étiez plutôt chauds auparavant, non ? Allez ! Vous pouvez encore faire quelque chose ! Vous êtes les envoyés de l'Interdit ! »
Leurs provocations n'y changent rien. Peut-être faudrait-il passer par la force ? Dans un temps normal, ils pourraient en rire.
« Qui y passe en premier ?
- Celui aux cheveux blancs. C'était un Shirenai. Tu ne t'en souviens plus ? propose Aritsune.
- Bonne idée. Pardon pour ma maladresse. »
Afin de se rectifier, Daigaku se téléporte pile devant Rai avant de lui asséner un coup de ventre. Fraya ne s'en rend pas compte de ses manœuvres.Des frissons la parcourent.L'ancien conseiller enchaîne quelques directs.
« Hufokyon ! »
Ce fracassant assaut se termine par une violente projection qui envoie Rai sur une vingtaine de mètres. La chevelure du porteur de l'Hoshaku ternit un peu. Aritsune se tourne vers la fille du vénérable actuel.
« A ton tour. »
Elle subit alors une série de coups au visage, au ventre et sur les côtés, sous les yeux horrifiés des spectateurs encore conscients.
« Galbomer ! »
Le Kiyuza finit son combo par un violent uppercut fortement chargé. Fraya est envoyée dans les airs avant d'atterrir à côté de Rai. Les traits noirs sur le visage de la Kozana s'amincissent. Ils perdent en puissance. Bonne nouvelle pour Daigaku et Aritsune. Dans l'optique de les achever, le premier concentre énormément d'énergie dans sa main droite. Pendant les quelques secondes où il réalise ça, ni Rai ni Fraya n'arrivent à se relever. Ils sont à leur merci.
« Nekzaryon ! »
Il les soulèvent à distance. Ses proies tentent de bouger mais ne trouvent pas la force de se libérer. Aritsune s'approche de Rai. Rajik, Korit et Tekina reprennent conscience à ce moment-là. Lorsque l'amoureux des combats se rend compte de la situation, il tente de porter au secours de son ami. Malheureusement, son corps ressent encore les effets de la migration forcée. Quelques crampes sont à déplorer au niveau des jambes et des bras.
« Laissez-le ! » crie-t-il malgré la souffrance.
Fraya voit le chef Kiyuza continuer de se diriger vers Rai. Lui viennent alors des bribes de souvenirs de combat entre le Kirioku et lui. S'imaginant Kenshiro mort, la conviction ultime de ne pas les laisser faire grimpe à une vitesse vertigineuse. Aritsune pose son poing au niveau du cœur de l'hôte de l'énergie blanche. La détermination de la Kozana se manifeste sous la forme de flammèches noires. Un phénomène qui interpelle Daigaku. Au bout de quelques secondes à peine, pourtant entravée dans une technique d'emprisonnement sensée être imparable, Fraya commence à bouger. Preuve indéniable qu'elle supporte de mieux en mieux la pression exercée par l'ancien conseiller. Un peu égratigné dans sa fierté sans doute, ce dernier implique beaucoup plus d'énergie neutre.
« Non... » murmure-t-elle dans la souffrance.
Aritsune prend un peu d'élan et décoche son coup. Rai a tout juste le temps de fermer les yeux. C'est alors que, face à l'urgence, en ,une fraction de seconde, la Kozana réussit à tirer une sorte de flamme noire en plein sur la main du Kiyuza, empêchant ainsi le sort funeste qu'allait subir son partenaire de combat.
« Oh... Quelle surprise... »
Un petit détail attire son attention : il se trouve que de légères bribes de ce même feu noir, différent de celui produit par Fumiaki, restent actives là où il a été atteint. Aussitôt, il ressent une légère faiblesse à cet endroit. Une sensation très inhabituelle et inconfortable.
« Petite peste... Tu veux mourir avant ? »
Après avoir constaté qu'il est toujours de ce monde, Rai se rend compte de la situation : la femme qu'il devait traquer jadis vient de le sauver. Malgré l'efficacité de cette surprenante attaque, Fraya ne peut plus surpasser la technique de Daigaku. Si bien que le second chef Kiyuza arrive devant elle, plaçant son poing au même endroit où il voulait achever sa première cible.
« Après tout, tu as été la première à naître. Tu seras la première à mourir. »
Soudain, comme pour faire écho à l'action de sa partenaire, Rai émet une lumière si intense qu'elle aveugle les deux Kiyuzas, les forçant à reculer, libérant Fraya au passage.Sentant une opportunité en or massif pour leur rentrer dedans, la Kozana attaque l'homme qui désirait tant la tuer. Malheureusement pour elle, malgré la technique très déstabilisante de l'Hoshaku, sa cible parvient à lire son mouvement et l'évite.
« Bokfar ! »
Il lui inflige une rafale fulgurante, quasiment invisible, de coups se concluant par un coup de pied chargé permettant d'imposer un écart entre eux. La lumière disparaît.Les Kiyuzas retrouvent une vue normale.
« Bien joué Rai. complimente Lyn.
- Il ne fait que gagner du temps... Ils sont toujours trop forts pour eux. » répond Calibak, cassant le peu de joie présente chez la Shirenai.
Korit et Tekina seraient presque jaloux de la suprématie Kiyuza. Ses représentants semblent intouchables, invincibles. Tout ça en utilisant uniquement la source de puissance la plus dénigrée par leur peuple. Que pourraient-ils créer s'ils exploitaient plus l'énergie neutre ? Rajik espère au plus profond de lui que les deux derniers remparts encore debout malgré le chaos présent trouveront le moyen de les battre.
« Je n'avais pas anticipé ça... avoue Daigaku.
- Tu n'as rien senti venir ?
- Autant pour elle, oui. Pour lui, non. C'était trop bref.
- Donc... Si nous nous débarrassons de lui en premier, nous avons gagné.
- De grosses chances en tout cas. »
Fraya se relève difficilement, à deux doigts de cracher du sang vu la violence de ce qu'elle a mangé.
« Tu vas bien ?
- Tu crois que je respire la bonne humeur là ?... Comment a-t-il pu me voir ? Je ne comprends plus rien. »
C'est à ce moment-là qu'elle constate la présence d'un léger feu noir dans le creux de sa main gauche droite. Ce dernier se transforme en une sorte de brume avant de s'incruster dans sa peau. A la seconde où ce phénomène se produit, elle entend de nouveau les mots toujours impossibles à décrypter. Gêne vite effacée lorsqu'elle secoue légèrement la tête.
« Confirme moi quelque chose... A part nous, nous sommes les derniers détenteurs d'une énergie active sur Faironne ?
- Non. J'ai rencontré d'autres Shirenais dans les Continents de l'Est et du Nord. Bien que les seconds possèdent des qualités indiscutables dans le développement de leurs énergies ainsi que dans leurs méthodes de combat, ils ne seraient pas en mesure de leur causer des dégâts. Pourquoi me demandes-tu ça ? »
Se rappelant de la propriété principale du Kirioku, yeux fermés, elle rentre dans une phase de concentration, creusant dans les entrailles de l'énergie noire. Sa fouille aboutit à la découverte de réserves présentées sous la forme de petites sphères scintillantes, dont la couleur fait référence à l'élément associé. Après quelques secondes d'inaction, en ouvrant d'un coup sec les yeux,une aura dont la noirceur dépasse celle déployée par le précédent utilisateur, en forme de flamme grandissante, émerge d'elle. Une émanation qui surprend tout le monde.
« Cette chaleur... amorce Lyn.
- Elle est plus prononcée que celle du plus des Zigriks ! s'exclame Tekina, à la fois fascinée et terrifiée.
- C'est... C'est impossible. » complète son frère.
Même Rai ne peut rester impassible face à sa démonstration de puissance. Elle gardait ça en elle ? Avec les souvenirs de ses affrontements contre Fumiaki, à ce stade, il confirme qu'elle surpasse son ancien adversaire. De petites sphères multicolores, surgissant de l'environnement, s'approchent d'elle. Soudain, un fil noir en empale une avant de l'avaler, résultant en un bref sursaut d'énergie. De peur qu'elle n'engloutisse tout, le porteur de l'Hoshaku les repousse simplement grâce à sa lumière.
« Oh... Ça devient plus sérieux là. commente Daigaku.
- Vous ne faîtes que retarder l'inéluctable ! »
Après son exclamation de colère, presque à la vitesse de la lumière, Aritsune apparaît face à Fraya, poing décoché. A sa grande surprise, elle le bloque. Rai n'en prend conscience que deux secondes après. Lorsqu'il voit cette incroyable parade, il n'en revient pas. D'abord parce qu'elle a été plus rapide que son assaillant et, surtout, parce qu'elle est en train de creuser l'écart entre elle et lui. Serait-ce dû à l'infime quantité d'énergie qu'elle a ingéré ? Si cette hypothèse se confirme, si jamais la folie destructrice de Fumiaki venait à s'emparer, elle serait capable d'engloutir Faironne. C'est au tout des spectateurs de comprendre ce qu'il vient de se passer entre la Kozana et le Kiyuza.
« Comment ? s'interroge Korit, les jambes tremblantes.
- Elle a vu... entame Lyn.
- Son attaque. » complète Rajik.
Aux yeux de l'affiliée au feu, la chaleur de Fraya s'est comme téléportée. Phénomène impossible car, même si quelqu'un peut se développer à cette vitesse, il subsiste toujours une trace rouge derrière lui, témoignant de son déplacement. Les pupilles de la détentrice actuelle du Kirioku deviennent complètement noirs. En tout cas, pour le malchanceux attaquant, cette défense est tout simplement impossible. La Kozana profite de cet instant d'incompréhension de la part de son adversaire pour lui coller trois coups, un sur chaque flanc et un en plein ventre. Sous le coup de l'urgence, Daigaku dévoile l'un des sceaux qu'il utilise le plus.
« Téliponyon ! »
Grâce à lui, il ramène son partenaire auprès en le téléportant.
« Comment... Elle a fait ? s'interroge-t-il, toujours sous le coup de la panique, se tenant presque là où il a été atteint.
- Je l'ignore mais ce qui est sûr c'est que sa vitesse a fortement augmenté.
- Ainsi que sa force...
- Il va falloir être plus sérieux pour l'abattre. Ils seraient donc de même niveau ?
- Non. »
Tout d'un coup, tout devient plus clair pour le producteur de lumière. En se remémorant son attaque au ralenti, il constate la présence de courants noirs accélérant pile au moment où elle frappe avant de connaître à nouveau une circulation normale redevenir l'instant d'après. Cette accélération a permis à son corps de bouger plus vite et donc de bloquer son adversaire avant de passer à l'attaque. C'est exactement ce qu'il pratiquait depuis quelques temps. La différence réside dans le fait qu'elle le réalise avec plus d'intensité et de vitesse. Tout ça, juste en se relâchant ? Un procédé qui le laisse un peu perplexe. Qu'importe, désormais, il peut compter sur elle. La conviction de l'existence d'une victoire grandit de plus en plus dans son esprit. Une pensée le poussant à réenclencher son aura qui prend à son tour une allure flamboyante. Ses yeux se mettent à briller. Même engouement chez les spectateurs.
« Ils peuvent... entame Calibak.
- Oui... Ils peuvent gagner ! enchaîne Rajik.
- Éclatez leur la gueule ! » enchérit Tekina sous le coup de l'adrénaline.
Son vocabulaire brusque Lyn. Le mercenaire affilié à la foudre, avec la démonstration de puissance dont il vient d'être témoin, imagine Fraya en vénérable. Si les réglementations sur les talents considérés comme interdits avaient été différents, que se serait-il passé ? Son peuple régirait probablement Faironne. Cette volonté animerait-elle ces hommes-là ? Vu leur puissance, pourquoi être obligés de passer par tous ces événements ? Chose incompréhensible pour l'ancien citoyen du Continent de l'Ouest. Quoiqu'il en soit, la réaction de ceux qui les observent pourrait déclencher en temps normal un rire nerveux chez Daigaku et Aritsune.
« Quelle blague... Un sursaut et les voilà au bord de l'explosion... C'est pathétique. commente le second.
- En effet. Nous restons supérieurs. »
Rai et Fraya sont côte à côte. Leurs auras s'associent sans se mélanger. Le dernier rempart de Faironne, malgré les déboires passés, le chaos environnant, tient toujours. Tout comme Hotto qui, bien qu'à plusieurs reprises il a failli être déstabilisé par les pertes de contrôle de ses trois collègues, maintient sa porte comme il le peut. Il le sait. S'il cède, toutes les perturbations qui se déchaînent de l'autre côté s'en retrouveront exponentiellement amplifiés. Il se pourrait même que ça donnerait l'occasion parfaite à l'Interdit de sortir de sa prison dimensionnelle. En tant qu'héritier des dons de cette déesse, il ne doit pas abandonner. Chers sauveurs, faîtes vite.