Toujours sous le choc de la forme prise par Fumiaki, la Kozana comprend que, comme cet homme connaît son prénom, le fait qu'il a pu se transformer ainsi confirme l'hypothèse selon laquelle il avait accès à ses souvenirs. Il aurait pu adopter l'apparence du pire bourreau auquel elle a été confrontée mais non. La voilà de nouveau face à celui qui voulait en faire sa marionnette. Un profond dégoût lui irrite la gorge.
« Même si moi aussi je l'ai détesté, je lui dois mon retour. Après tout, qui d'autre qu'un bon descendant comme lui pouvait nourrir une telle curiosité pour me retrouver ? »
Comment peut-il encore lui adresser de tels compliments ? Bien que le vrai Alnor n'a jamais réellement su à qui il avait affaire, il voulait surtout s'approprier ce pouvoir à sa manière. La morale des Zigriks ne possède décidément pas de limites lorsqu'il s'agit de ce qu'ils appellent de l'exploration. Cette remarque passée, une flamme noire apparaît dans le creux de la main droite de l'ancien fondateur de Kigen. Tout de suite, la Kiyuza se met en garde, s'apprêtant au pire. Alors qu'elle s'attendait à un simple tir de sa part, c'est une rafale de projectiles noirs qui vient la menacer. Grâce au surplus d'énergie neutre déjà présent à cause de son talent au niveau de ses yeux, elle parvient à en décrypter la trajectoire et ainsi les esquiver de justesse. Après d'autres tentatives, le Zigrik commence à perdre patience. La cadence et la taille de ses tirs augmentent.
« Bétaram ! »
Un ki dense et fin recouvre sa peau, comme pour constituer une sorte de carapace. Lorsqu'ils la touchent, elle ne ressent aucune douleur physique. Cependant, le symbole d'œil inversé apparaît à chaque fois, accompagné de quelques paroles de son paternel lui rappelant à chaque fois la pression qu'il exerçait sur elle.
« Tu dois, à ton tour, perpétuer notre héritage. Je suis chef de notre société. Le guide. Le porte-parole. Mon sang est dans tes veines. Tu dois le devenir aussi. »
Les chocs suivants imitent les innombrables et incessants coups qu'elle avait subis. Une souffrance atroce. Même si les traces de ces derniers étaient facilement estompées grâce au talent de reconstitution possédé par l'un de ses semblables, rien ne peut effacer la pire des cicatrices : le traumatisme. La salve de torture s'arrête. Malgré les quelques tremblements ici et là, Fraya a tout encaissé, embarrassant grandement Fumiaki.
« Je n'ai pas demandé à naître ici... A porter le poids de l'histoire sur mes épaules... J'ai été battue... Insultée... Sous-nourrie... Maltraitée... On exigeait de moi des efforts irréalisables... On m'avait foutue une date limite pour décider si oui ou non je devais encore exister. »
Se fichant royalement de ce qu'elle commence à raconter, il cherche la raison pour laquelle ses attaques ne l'ont pas ne serait-ce qu'amoché. L'énergie neutre, de par sa nature simpliste et sa facilité d'accès, ne possède aucune caractéristique pour ne pas être dévorée. Avant, il la dégustait sans résistance de sa part. Alors, pourquoi n'est-ce plus le cas maintenant ?
« Un jour, la venue d'un homme sur nos terres perturba le cours inéluctable de la venue ma mort imminente. J'ignorais ce qui l'avait poussé à apprendre tout de nous. Sa démarche me toucha. Sa sincérité aussi. Bien qu'il voulait par tous les moyens m'aider à m'échapper des griffes de cette ordure, je n'avais pas le choix que de partir loin de cet enfer... Un sale coup de ma part envers lui… Je dois me racheter en te vainquant ! »
Un petit silence.
« C'est bon, tu as fini ? Tes mots ne changeront rien. Tu n'es qu'un grain de poussière dans ce qui constitue ce monde. Ta vie n'a aucune importance ! »
Le Zigrik amplifie son aura. Une seconde sphère, plus incandescente que les précédentes, apparaît dans sa main gauche.
« Meurs ! »
Alors que cette dernière arrive à vive allure, les yeux de la Kiyuza prennent une teinte grise. Une importante quantité d'énergie neutre est concentrée dans son poing droit avec lequel elle parvient à pulvériser l'attaque de Fumiaki. Une telle réponse exacerbe l'incompréhension qui animait ses pensées. Sans plus attendre, Fraya dévie les forces encore présentes sur sa main vers ses jambes.
« Zéréyon ! »
Grâce à un relâchement soudain et massif de son ki, avec des bons répétés et millimétrés, elle évite de multiples tirs. L'agilité et la vivacité avec lesquelles elle parvient à réaliser cet exploit lui permettent d'arriver à la hauteur de son adversaire. Ne pouvant pas se défendre, il se mange un enchaînement dévastateur de coups qui, au fur et à mesure, le font reculer. Une fois l'être du Kirioku sonné, la Kiyuza rassemble son ki dans sa main droite. Le symbole en forme de lotus distinctif de l'apparition de son talent réapparaît sur le haut de sa poitrine.
« Péopar Ki ! »
Elle le frappe en plein torse. L'onde de choc qui en découle le propulse sur quelques dizaines de mètres avant qu'il ne se fracasse au sol. L'impact fait naître quelques fissures sur son apparence. La flamme noire incandescente qui constituait son aura a pratiquement disparu. A l'image de l'état désastreux dans lequel il se trouve, la confiance qu'il avait en lui-même s'effondre. Désormais, c'est une certaine peur qui s'installe en lui. Un sentiment si allergique pour lui que la dernière fois qu'il l'avait ressenti c'était face à son ancien collègue : Densetsu. Fraya reprend une posture issue des multiples leçons reçues jeune. Pour Fumiaki, hors de question qu'une sans élément ne la surpasse. Elle n'est rien ! En engageant plus de forces dans la bataille, une partie des craquelures se comble.
« Tu n'es pas comme nous ! Tu ne peux pas nous battre ! Votre unique raison d'exister est d'être soumis à Sa Majesté ! »
Peu importe ce qu'il baragouine, Fraya, plus confiante que jamais, s'avance vers lui, le pas ferme. Plus elle s'approche, plus le halo gris l'entourant prend de l'ampleur. Plus elle progresse, plus l'effroi enfoui dans la mémoire du Zigrik grandit.
« Ne t'approche pas ! Sale Kiyuza ! »
Rien ne la forcera à reculer. Dans un élan d'orgueil cachant en réalité la terreur qui l'envahit, Fumiaki, en sautant d'un seul coup, s'élève en l'air.
« Il ne peut y avoir qu'un vainqueur ! Et ce sera moi ! »
Impliquant toute sa puissance entre ses mains, il crée un immense amas de feu noir au-dessus de lui. Fraya s'arrête.
« Essaye donc de contrer ça ! » hurle-t-il avant de la lui envoyer.
Malgré ce qui la menace, elle garde son calme, l'esprit entièrement focalisé sur tout son parcours d'apprentissage. D'un mouvement lent et ample qu'elle réalise avec ses bras, elle rassemble tout son ki éveillé.
« Bétaram ! »
Une nouvelle couche d'énergie, plus concentrée que la précédente, vient l'envelopper. Grâce à ça, elle bloque l'attaque désespérée de son adversaire. Bien qu'il n'y a aucune interaction physique ou dégâts, le contact lui cause une apparition forcée de ses souvenirs les plus douloureux. Désorientée, elle recule. Face à cette situation, la peur chez l'être du Kirioku laisse place à une euphorie exacerbée.
« Tu ne peux gagner face à ça ! Tu vas périr ! »
Désormais complètement convaincu qu'il va l'emporter, il augmente à distance la taille déjà démentielle de sa masse de feu noir, comme ça ne suffisait pas. Tout à coup, la paume des mains de la Kozana scintille. Une onde émise depuis celles-ci fait le contour de l'attaque. Puis, soudainement, elle éclate. Une seconde, provenant du phénomène qui vient de se produire, parvient à toute vitesse vers Fumiaki. Le choc est si violent qu'il le propulse au sol. Une fois remis de ça, le Zigrik ne comprend plus rien. L'a-t-elle annulé ? Inconcevable ! Impossible ! Rien ne surpasse un don de Sa Majesté ! Revanchard, il se relève avec difficulté, la tête courbée vers le sol.
« Tu vas voir… »
Lorsqu'il aperçoit Fraya, dans la même position qu'avant l'éclatement, il remarque la paume de ses mains est légèrement recouverte par de l'énergie noire. Au bout de quelques secondes, elle s'incruste dans sa peau. En résulte un noircissement du symbole en forme de lotus. Elle ne semble pas s'en rendre compte. Cependant, pour son auteur, c'est une toute autre histoire. Sa pire ennemie en ce moment est en train de s'approprier le don de Sa Majesté.
« C'est impossible ! » s'offusque-t-il.
Lentement, tout en ressentant un gain de puissance en elle-même, la Kozana prépare sa contre-attaque, les jambes fléchies, bras tendues, haut du corps tourné vers l'avant, sous les yeux encore médusés du Zigrik. Sans crier gare, elle disparaît. A peine deux secondes plus tard, il se prend un violent direct du droit, amplifié par la vitesse vertigineuse que Fraya vient d'atteindre, qui le propulse sur des dizaines de mètres. Fumiaki n'a point le temps de s'en remettre qu'elle réapparaît dans son dos et lui inflige un brutal coup de coude qui le paralyse un instant. Son apparence se craque sur plusieurs endroits. Tout de suite après, elle se téléporte face à lui, le poing gauche chargé.
« Péopar Ki ! »
Un fracassant direct en plein ventre plie Fumiaki en deux. Jamais il n'avait ressenti une telle douleur. Même Densetsu n'était pas allé aussi loin.
« Nokzoler Ki ! »
Un destructeur coup de pied droit circulaire en plein visage, qui pourrait lui décrocher la mâchoire, le recule d'une vingtaine de mètres. Une fois étalé pitoyablement au sol, les esprits retrouvés, d'innombrables insultes lui brûlent les lèvres. Comment une énergie primitive, arriérée, futile comme la sienne peut l'affecter à ce point-là ? L'entité qu'il vénère tant lui aurait-il caché quelque chose ? Non, c'est impossible. Pourquoi l'aurait-il choisi pour recevoir une telle puissance ? Maintenant incapable de combler les fissures, il se relève difficilement.
« Je te déteste... »
Le feu noir présent au niveau de ses pieds semble vouloir dévorer tout ce qui se trouve à proximité.
« Je te déteste !! »
Son aura explose. Les craquelures qui parsemaient son apparence s'agrandissent. Fumiaki joint les bas de ses paumes pour viser la seconde personne qui a réussi à le pousser dans cet état. Toute son énergie y converge. Cette fois-ci, cela commence à affecter l'espace spirituel de la Kozana. Malgré tout, elle ferme les yeux tout en prenant une grande respiration. L'ancien fondateur de Kigen balance un énorme rayon noir incandescent. Voici le moment où elle doit tout donner. Pas pour les siens. Non. Aucun d'entre eux n'est venu l'aider lorsqu'elle en avait besoin. Pas pour le peuple Shirenai non plus. Même si elle a pardonné à Rai car il n'était qu'un pion, ils ne méritent pas plus de clémence. Il est facile de deviner pour qui elle s'engage de cette manière.
« Bétaram ! »
Une quantité plus importante de ki vient renforcer l'impressionnante couche protectrice déjà en place. En découle une teinte grise plus prononcée. Ce qu'elle dégage pourrait presque la compresser, vu que son corps n'a jamais été habitué à une telle pression énergétique.
« Tu ne sortiras pas d'ici ! »
Ainsi, elle intercepte le rayon à mains nues.
« Meurs ! Saleté de Kiyuza ! »
Malgré son indéniable résistance, il semble que, pour cette fois, Fraya ne parvient ni à le repousser ni à en absorber une partie de sa puissance. Tout à coup, comme pour représenter une sorte de réponse face à la situation d'urgence à laquelle elle est confrontée, le symbole en forme de lotus qu'elle arbore se met à briller. La chaleur qui en émane perturbe particulièrement le Zigrik.
« Je ne dois pas mourir sans avoir rejoint Kenshiro ! »
La paume des mains de la Kozana scintille de gris. Grâce à ce phénomène lui conférant un gain de puissance à la hauteur de l'événement, le rayon balancé par Fumiaki perd du terrain.
« Impossible ! »
Enfin, elle se rend compte de ce qu'il se passe au niveau de ses mains. Comprenant que désormais elle en est comme immunisée, elle avance, tout en absorbant de plus en plus.L'apparence de Fumiaki se craque de partout.
« Voleuse ! Rends-moi ça tout de suite ! Le don de Yamos ne s'adresse qu'aux êtres portant en eux un élément ! »
Peu importe si ces propos sont vrais ou non, Fraya tient le rayon avec sa main gauche, tout en préparant un coup avec l'autre. Le feu noir continue à s'incruster en elle. De légères lignes de la même teinte commencent à apparaître sur sa peau.
« Péopar Ki ! »
Grâce à un coup de poing sur l'attaque du Zigrik, elle en inverse le sens. Fumiaki se le prend de plein fouet. Lorsque l'assaut renvoyé de ce dernier est totalement dissipé, la victime se tient encore debout. De l'apparence insultante qu'il avait prise ne reste plus grand chose : l'œil droit et l'avant-bras gauche. Tout le reste n'existe plus que sous une forme de brume.
« C'est... Impossible... » parvient-il à prononcer malgré l'absence de bouche.
Les paumes de la Kozana dégagent des flammes noires qui finissent par s'infiltrer dans son corps. Deux traits noirs, plus larges que les lignes, sont tracés au milieu de la base de ses yeux.
« Comment oses-tu ?! Comment oses-tu me la prendre ?!
- Dit celui qui avait volé mon ki. »
Elle s'avance de nouveau vers lui. L'allure avec laquelle elle progresse provoque chez lui une peur indescriptible, comme s'il voyait Densetsu vouloir l'achever.
« Va-t-en ! »
Ses interjections tombent à l'eau. Rien ne semble pouvoir l'arrêter. De nouveaux chuchotements viennent renforcer le sentiment de mal-à-l'aise qui l'accable. Poussé dans ces derniers retranchements, l'ancien fondateur de Kigen active son aura et s'éloigne le plus loin possible. Cependant, il est intercepté quasiment aussitôt et se mange un dévastateur direct dans l'œil restant. L'impact désintègre le dernier avant-bras existant.
« Cette énergie est à moi ! Rien qu'à moi !... Une merveille pareille... J'ai atteint l'immortalité... Je transcende le temps... Comment oses-tu me la prendre ?!... Au fond, tu es comme ces Shirenais ! Tu voles les résultats des autres !... Décidément, aucun être vivant ne mérite de vivre sur cette foutue Faironne !... Ni toi, ni ton pathétique Kenshiro, personne !... Vous verrez... Yamos... Il vous anéantira... Rien ne pourra l'arrêter ! Ni toi, ni ton pathétique Kenshiro ! Ni personne ! Yamos me vengera ! Il vous tuera ! Tous ! Jusqu'au dernier ! Pathétiques utilisateurs d'énergies pathétiques ! Êtres amers ! Infâmes ! Primitifs ! »
Quelques secondes de silence témoignant de l'absence totale d'attention de la part de son interlocutrice qui voit en ses paroles qu'un simple défouloir verbal sans aucune valeur.
« Désormais, tu n'existes plus. » lui adresse-t-elle, d'un calme olympien.
Progressivement, toute l'énergie noire s'incruste dans Fraya. Pendant le processus, Fumiaki entend Yamos lui chuchoter quelque chose. Le dernier œil se dissout. Le symbole en forme de lotus, témoin de son talent, se noircit entièrement. Les deux traits sur son visage se prolongent jusqu'en bas du menton, comme pour tracer deux sillons de larmes. Pendant ce temps, dans la Chambre des Éléments, suite à la longue possession dont ils ont été victimes, Denki et Hotto viennent seulement de reprendre connaissance.
« Qu'est-ce qu'il s'est passé ? demande le mentor de Tencubo.
- Le Kirioku vous a possédé. répond Densetsu.
- Pardon ? s'étonne la foudre.
- Vous êtes rentrés en contact direct avec lui. Tout d'abord vous. complète Rai en pointant cette dernière.
- Qu'est-ce qui t'a poussé à te préoccuper de cette femme ? s'interroge Suisei.
- Quelque chose qu'apparemment vous étiez incapables de percevoir. Peu étonnant vu tout ce que vous avez donné.
- Qu'est-ce que tu sous-entends là ?! s'énerve Hotto.
- Pitié. Calmez-vous... Rai, étais-tu au courant de cette étrange propriété ? Car, lorsque je l'avais affronté de mon vivant, ce n'était pas du tout le cas.
- Oui. Il avait pris le contrôle de l'homme que vous aviez formé à cette technique de libération. Je n'ai toujours pas compris comment ça fonctionne.
- Il est vrai que, tant que nous ignorons comment elle a été créée, nous ne pourrons jamais contrer cette bizarrerie. Densetsu, n'as-tu vraiment aucune idée là-dessus ? demande Suisei.
- Non. A l'époque, mes amis étaient chargés d'espionner les Zigriks afin de percer le secret de l'apparition de l'énergie noire. Dans l'urgence, nous nous sommes contentés de copier sans trop y réfléchir. Il était impossible pour nous de prédire tout ce qui allait se produire par la suite. »
Sans aucune autre piste à explorer, plus personne n'ose enchérir le débat, marquant ainsi un petit silence.
« Bon, nous l'éjectons ? engage la terre.
- Oui. Réactivons une autre porte. Qui est d'accord ? » répond Hotto.
Aussitôt, les deux éléments les plus calmes du quatuor lèvent la main en guise d'approbation. Tous les trois se tournent vers leur collègue encore hésitant par rapport à cette proposition.
« Denki ?
- Bon... J'ai compris... C'est d'accord. » finit-il par lâcher en levant timidement la main à contre cœur.
Tous tendent leurs mains vers la porte affectée au Continent du Sud. L'apposition de leurs énergies enclenchent son ouverture.
« Rai ? Tu veux l'éjecter ? demande Suisei.
- Vous ne voulez pas le faire ?
- C'est que... Maintenant que nous avons vu de quoi elle est capable...
- Nous n'osons pas s'en approcher. complète Densetsu.
- Je comprends. Laissez-moi m'en occuper. »
Le sauveur de Faironne s'approche du corps de Fraya quand, soudain, l'aura noire revient, prenant tout le monde par surprise.
« Elle est increvable ou quoi ?! » s'étonne Hotto.
Elle se relève. Rai se met immédiatement en garde.La Kozana prend plusieurs respirations. Plus elle le fait, plus son aura rétrécit et plus les traits noirs vus dans son espace spirituel apparaissent en partant du milieu de ses yeux pour arriver en bas de son visage. Rai, en les découvrant, s'interroge.
« Son signal a encore changé. » affirme Denki.
- Ainsi que la nature de son flux énergétique. C'est très curieux.
- Même sa chaleur n'est plus la même.
- Qu'est-ce qu'il s'est passé ? »
La manifestation concrète d'énergie a totalement disparu.Quelques mots, quasiment imperceptibles, provenant de la langue employée dans les techniques des affiliés ainsi que dans les sortes de messes tenues par son paternel, se glissent à ses oreilles. Elle ouvre les yeux et aperçoit Rai. Son regard est perçant. Personne n'arrive à en déceler quoique ce soit. Puis, sentant l'activité en cours, elle tend un bras vers la porte sous le contrôle des éléments.En une seconde à peine, elle y impose une flamme noire qui la comprime et l'annule sur le champ, clouant le bec à l'autorité suprême, y compris Denki.
« Personne d'autre à part nous ne peut le faire... » confirme Suisei, complètement estomaquée par ce qu'il vient de se produire.
Ensuite, tranquillement, elle ramène le bras vers elle et regarde la paume de sa main. Visage impassible.
« Tu n'en as pas eu assez ? Combien de temps il te faudra pour comprendre que tu ne peux me battre ? Tu auras beau vouloir changer d'apparence ou jouer avec ce corps autant de fois que tu le désires, ça ne changera rien. » avance Rai, un peu agacé d'un tel retour.
A l'intérieur d'elle-même, tant de choses circulent. Un feu qui crépite, un orage qui gronde, un sable qui s'écoule, un torrent qui déferle, tant de bruits qu'elle peut entendre dans son corps.
« Laisse-la tranquille ! »
Toute la nourriture de cet homme lui appartient maintenant. Quelle étrange sensation. Depuis combien de temps et depuis combien de victimes a-t-il pu ingurgiter tout ça ? Un appétit à la hauteur des ambitions qu'il désirait tant poursuivre.
« Kirioku, je ne me répéterai pas ! »
Alors qu'elle l'ignorait depuis tout ce temps, interloquée par cette appellation, elle se tourne vers le sauveur de Faironne. D'ailleurs, elle n'est pas la seule à être intriguée par ça. Chez les éléments, on discute discrètement.
« Pardon ?
- Oui c'est de toi dont je parle. Si tu ne veux pas la relâcher, d'accord. Mais dans ce cas va-t-en d'ici tout de suite. »
Pour les quatre spectateurs, il n'y a plus aucun débat possible. L'être qui sévissait avant et qui s'est sauvagement servi d'eux n'existe plus. Apparemment, leur poulain ne s'en aperçoit absolument pas. Fraya, qui n'a rien perçu de la bataille précédente à la sienne, ne comprend pas pourquoi il tient tant à ce qu'elle parte. Au contraire, être ici est une chance incroyable. Lassé par son attitude, en copiant ses mentors du moment, Raitend un bras vers la porte, y impose une lumière blanche, forçant ainsi sa réactivation.
« Et ne reviens pas ! »
Toujours aucune réaction de sa part. Le porteur de l'Hoshaku disparaît soudainement. Sentant l'assaut imminent, la Kozana ferme les yeux. Une légère brise soulève ses cheveux.Un petit moment d'inaction. Les éléments analysent son comportement, à l'affût de la moindre activité énergétique suspecte.Un calme imperturbable. Soudain, après quelques secondes d'un silence glacial, Rai réapparaît, poing droit dégainé. L'impact paraît inévitable, inéluctable. Mais, à la dernière seconde, elle le saisit. Malgré l'émergence d'une onde de choc capable de donner des frissons aux éléments les plus jeunes du quatuor, Fraya n'a pas bougé d'un centimètre. Sur le moment, Rai se demande si elle a lu son mouvement. Pour en avoir le cœur net, ilrecommence à de multiples reprises. Toutes échouent. Toutes bloquées avec une facilité déconcertante. Arrivé sur la dernière parade, le sauveur de Faironne s'arrête, intrigué par l'absence totale d'énergie active chez son adversaire. Ellelâche son poing, sans agressivité, sans pointe d'arrogance de sa part. Rien.
« Rai, c'est inutile. affirme Densetsu.
- Quoi ?
- Tu te confrontes à un mur.
- Mais... »
Aveuglé par le conflit qui l'opposait avec le Kirioku qu'il a toujours connu, Rai ne comprend pas de quoi ils parlent. En même temps, le long combat de presque un an contre ce dernier a ancré solidement cette idée dans son esprit.
« Qui es-tu ? demande la terre en s'adressant à Fraya.
- Pourquoi cette question ? Vous voyez bien qui est-ce, non ? S'il vous plaît, humbles éléments, laissez-moi vous débarrasser d'elle afin que nous puissions poursuivre mon entraînement. Je n'ai pas de temps à perdre.
- La personne qui est en face de toi n'est pas le Kirioku, n'est plus le Kirioku. » lui déclare sobrement Denki.
Choqué par cette affirmation, Rai ne veut pas y croire. Pour lui, c'est sans doute une énième tactique douteuse de sa part. Après tout, avec l'exemple de la possession, qui sait de quoi il est réellement capable ? Toujours sur ses gardes, il ne prête guère attention aux propos de celui qui fut son élément de naissance. Avec le comportement qu'il a démontré, il ne peut clairement pas lui donner raison. Kirioku, tu ne le tromperas plus. Tu es l'ennemi ultime de l'intégrité de ce monde. Tu n'as aucune raison d'être ici !