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Chapter 95 - Arc 5 – Épisode 14 : Mobilisation.

Kenshiro et Rajik arrivent devant la même porte que la dernière fois où la foudre la plus rapide du Continent Central a rendu visite à Fraya. Il ouvre doucement la porte. Ils voient la Kozana, toujours allongée et endormie. Le Shirenai détache son arme et vient la poser délicatement sur la table pour ne pas briser le sommeil de sa protégée. Son ami ne bouge pas, le regard fixé sur elle.

« Qu'est-ce qu'il y a ? »

Le Kiyuza ne répond pas, les poings serrés.

« Inutile de t'énerver. Tu peux voir qu'elle ne l'a plus. Je comprends ta réaction mais tu ne dois plus y penser. Viens, je t'en prie.

- Qu'est-ce que je dois faire ?

- Parmi les cours que j'ai suivi à l'Ouest, j'ai eu le droit à quelques leçons faisant référence à ce qu'ils appellent points énergétiques. Sur nos corps se trouvent des zones plus sensibles que d'autres aux variations. La plus importante d'entre elle se trouve entre la gorge et le haut de la poitrine. Tout ce que tu vas devoir faire est d'y poser ta main. »

Rajik exécute la manœuvre comme indiqué.

« Et maintenant ?

- Fais ressortir ton ki comme quand tu attaques mais cette fois-ci sans l'attention de frapper. Tu peux le faire ?

- C'est que... Je me suis jamais servi de mon ki autrement quoi.

- Et bien tu vas apprendre là. »

Il ferme les yeux et se concentre. Le Shirenai de foudre observe attentivement la situation. Grâce aux aptitudes conférées par la maîtrise de son élément, un son semblable à un vent s'intensifie au niveau de ses oreilles alors que, là où ils se trouvent, la fenêtre est bien fermée.

« C'est bien. Maintenant, relâche doucement ton ki. Pour t'y aider, imagine que quand tu attaques, une puissante bourrasque vient te décoiffer. Puis, tout de suite après, imagine maintenant que tu dois la ralentir. Quand tu attaques, tu es excité et vif. Là, tu dois être apaisé et concentré. »

La paume de la main du Kiyuza chauffe graduellement en fonction de l'énergie transférée. Ce que perçoit son ancien mentor se mue en un bruit un peu difforme, signe distinctif de la transformation d'un ki d'abord présent dans un corps en un ki à mi-chemin entre matérialisé et invisible. A peine les premières secondes du phénomène écoulées que Rajik ressent un léger vertige.

« C'est dur... Je m'affaiblis.

- Tiens le coup. C'est normal. Tiens encore un peu je t'en supplie. Fais ça pour moi.

- Pourquoi vous ne lui avez pas donné de votre élément plutôt ?

- Nous ignorons toujours comment un corps se comporte lorsqu'il accueille une énergie étrangère. Et puis, par logique, comme elle s'est éveillée à la même énergie que toi, elle doit pouvoir en recevoir. Comme lorsque je t'ai transféré mon ki. »

Malgré les tremblements de plus en plus insistants, Rajik poursuit le processus, avec le soutien du Shirenai. Soudain, sa main retrouve une température normale. Un son strident secoue le manieur de foudre pendant une seconde. Le Kiyuza, excédé par la fatigue que tout ceci implique, recule.

« Ça va ?

- Oui oui...

- Ça va passer. Tu vas vite récupérer. Merci Rajik.

- De rien... Et maintenant ?

- Attendons.

- Pas moi. J'ai besoin d'action. Je repars chasser. Et si je retombe sur ces deux-là, je ferai en sorte de les capturer pour vous cette fois. Je le promets.

- Je te fais confiance. Juste un dernier conseil : reste sur tes gardes en toute circonstance. »

Après s'être serrés la main, les regards remplis de détermination pour l'un et de remerciement pour l'autre, Rajik s'en va. Kenshiro s'assoie auprès de sa protégée.

« J'espère que ça t'aidera... Il me tarde d'entendre à nouveau ta voix et de voir tes jolis yeux, ma Fraya. »

La tête encore bien remplie des responsabilités qui deviendront les siennes une fois toutes les patrouilles de retour, tous les projets qu'ils aimeraient développé avec elle sont malheureusement retardés. Mais voilà, devoir de Shirenai avant tout. Pendant ce temps, dans un village plutôt proche du quartier général, comme d'habitude, les habitants s'affairent à leurs taches quotidiennes. Quand, soudain, Lyn et deux patrouilleurs entrent. Immédiatement, les locaux arrêtent tout.

« Que viennent-ils faire ? » se demande l'un d'eux.

- Patrouilleurs, sortez les détecteurs.

- Hé ! T'as pas d'ordre à nous donner ! s'indigne un des collègues de Lyn.

- T'as le même statut que nous !

- Ah oui ? »

Elle se tourne vers eux et leur dévoile une légère aura plus rouge et flamboyante qu'auparavant, léger aperçu du résultat obtenu lors du rude entraînement passé avec Tencubo. La puissance qui s'exprime devant eux suffit largement à ce qu'ils ne remettent pas en cause ses propos.

« Sortez-les avant que je ne m'énerve. »

Un peu sous pression, l'un des deux patrouilleurs se met à sortir les quatre pierres qu'il possède. De peur de finir carbonisé, il faut peu de temps au second de suivre le mouvement. L'élève de Tencubo met fin à son aura.

« Mesdames ! Messieurs ! Nous sommes ici pour une opération de contrôle ! Mettez-vous en rangs, homme ou femme, peu importe. Ce ne sera l'affaire que de quelques instants si vous obtempérez. » annonce-t-elle.

Sans présenter quelconque forme de protestation, les villageois suivent les ordres et forment les rangs demandés.

« Merci pour votre coopération. Voyez notre peuple reconnaissant. Nous allons passer parmi vous. Les questions que vous vous posez actuellement trouveront leurs réponses en temps voulu. »

Les patrouilleurs arrivent à la tête des rangs et mettent les pierres, une à une, devant les premiers à subir cet étrange contrôle. Rien ne se passe. Aucun élément ne dort en eux.

« Aux suivants. »

Même action, même conséquence. Dans la tête des deux soldats, un doute s'installe. Le maître-conseiller se serait-il trop enflammé sur la question de recrutement ? Le vice- conseiller n'aurait pas fait exprès d'amener cette idée ? Jamais les Shirenais et les descendants des Zigriks ont collaboré ensemble. Il y a bien une raison, non ? Tout ça contrarie bien Lyn qui croyait tant aux convictions de son modèle ainsi qu'à une évolution suffisamment convaincante pour remettre en cause la philosophie de son paternel.

« Rien non plus ici.

- Pareil.

- Continuons. »

Défilent ainsi les échecs. Ceux qui ont passé le contrôle ne comprennent toujours pas ce qu'ils viennent de vivre.

« Ces trucs ne fonctionnent pas ou quoi ?

- C'est de la camelote ! On s'est fait arnaqué oui !

- Fermez-la ! »

Face à la réaction virulente de la Shirenai pyromancienne, ses collègues désirent plus que tout de la recadrer. Entre celle qui ne vient pas de chez eux et qui ose prendre le pas, l'idée d'associer Shirenai et Zigrik et cette histoire de détecteurs, tout ceci ressemble à une énorme blague de mauvais goût.

« Les ordres sont les ordres. Nous devons poursuivre la mission. Peu importe le résultat. Notre maître conseiller exige de nous que nous la menons à son terme. Vous voulez vraiment aller contre lui ?!

- Bien sûr que non !

- Cherche pas. Depuis qu'il l'a entraîné, elle a pris la grosse tête. »

Excédée par cette remarque gratuite, elle dégaine son arme et la pointe vers son auteur.

« Encore un mot et on règle ça maintenant ! »

Les spectateurs ne peuvent qu'observer avec effroi un signe évident de changement auprès de l'autorité suprême. Qu'est-ce qu'il peut bien se passer pour que de telles querelles naissent auprès de ceux qui sont sensés veiller à leur protection ? En tout cas, vu l'image qu'ils transmettent, ça ne sent pas bon selon eux.

« Il ne reste plus grand monde à contrôler alors faisons ça vite. Si nous n'avons rien ici, nous irons au village suivant et ainsi de suite jusqu'au littoral. Nous devons finir le travail le plus vite possible avant que l'ennemi ne se décide à attaquer. » récapitule-t-elle.

Malgré l'attitude belliqueuse qu'elle vient d'adopter, ses propos restent crédibles. Ainsi, aucun des deux soldats n'ose rétorquer. Il reste trois personnes.Deux hommes et une femme.Chez les deux premiers, même issue. Aucun élément. Ils rejoignent tous les autres. Lyn et la dernière candidate se regardent.

« Il ne reste plus que vous.

- Il faudrait une sacrée dose de chance pour qu'elle ait quelque chose en elle. » avoue à voix basse l'un des deux patrouilleurs.

La Shirenai s'approche d'elle. L'angoisse qui l'habite provoque des tremblements au niveau de ses mains.

« N'ayez pas peur madame. Nous ne vous voulons aucun mal. Et ce même si comme chez vos amis, frères, sœurs ou parents, nous ne trouvons rien en vous. Votre village ne sera pas réduit à néant. Vous reprendrez tous vos vies de manière normale. »

Elle passe les pierres de terre, de feu et de foudre, l'une après l'autre. Aucune réponse. La pyromancienneregarde le dernier détecteur un instant. Tout le monde, pour des raisons diverses selon la personne, retient son souffle. Puis, vient le moment attendu.Lyn pointe la dernière pierre face à la femme. Soudain, deux secondes à peine après, son objet clignote bleu.

« Non... s'étonne le patrouilleur.

- Impensable. »

Un choc de surprise s'empare de tous, surtout de celle qui est concernée. Qu'est-ce que ça veut dire ? Une joie indescriptible envahit l'être de la Shirenai. Enfin, l'espoir que tout puisse se concrétiser semble de plus en plus tangible. Ravie que leur nouveau matériel fonctionne, elle range illico le détecteur qui a fonctionné.

« Madame, j'ai l'honneur de vous annoncer que vous êtes une affiliée à l'élément de l'eau !... Ce qui signifie que vous êtes apte à être des nôtres !

- Pardon ? »

Cette nouvelle fracassante bouleverse tous ses concitoyens qui n'avaient pourtant assisté à aucun événement particulier la concernant. Elle cachait un élément en elle ? Depuis quand ? Et pourquoi elle ?

« Votre vie peut changer radicalement si vous acceptez de nous rejoindre. Nous serons au moins deux dans ce milieu plutôt masculin. Pour des raisons purement personnelles, j'ai rejoint le corps armé Shirenai. Madame, je comprends ce qui vous arrive. Je vous rassure. Vous n'avez pas à vous inquiéter pour eux. Au contraire ! Si vous nous suivez, vous pouvez nous aider à protéger les vôtres. »

Touchée par cette affirmation, elle ne peut s'empêcher de tourner la tête vers ses compatriotes.

« Vous êtes libre de faire votre choix. Mais il serait plus juste pour vous d'accepter. Nous vivons sous une menace actuellement et nous ne voulons pas que des vies innocentes soient incluses. » appuie Lyn en lui tendant la main droite.

Après un instant d'hésitation ponctué par quelques échanges avec tous ceux avec qui elle a passé sa vie, elle lui donne une réponse positive.

« Bonne décision. »

Pendant ce temps, devant l'ancienne demeure du grand Kigzir, Yoru patiente. Sort alors Calibak. Il se place entre son professeur et une colonne de glace encore présente depuis la dernière fois. Sur son bras droit, un prototype d'arbalète artisanale est accroché.

« Le moment est venu. Hâte de voir ce que tout notre travail va donner. N'oublie pas tout ce que je t'ai enseigné et tout devrait bien se passer. »

Sans plus attendre, le nouveau Zigrik charge son Obujepawa improvisé avec une sorte de munition, sculptée à partir d'une pierre identique à celles utilisées lors de la confection des détecteurs, et la pointe vers la formation créée par son mentor.

« Firai... » entame-t-il.

A peine la formule prononcée, une légère aura jaune émane depuis son bras. Grâce aux aptitudes conférées par sa maîtrise de l'élément de l'eau, Yoru perçoit un flux dont la circulation semble plus régulier qu'avant. Son hypothèse à propos du matériel utilisé pour déclencher ses techniques se confirme.

« Zer ! »

L'éclair qu'il tire est si puissant qu'il parvient à transpercer de part en part sa cible. Tous les deux s'enthousiasment d'un tel résultat, un poil plus impressionnant que ce qu'ils avaient planifié.

« Oui... Oui !... Oui !!... J'ai réussi ! Génial !

- Bon, nous pouvons conclure que le test est concluant.

- C'est trop bien ! » s'extasie Calibak, complètement euphorique.

Comment la société dans laquelle il vivait pouvait-elle ignorer volontairement que de telles prouesses sont possibles ? Si uniquement la peur de l'Interdit motive ce point de vue insensé, ceux qui furent ses confrères sont pires que ce qu'il pensait. Tant de choses restent à découvrir, à expérimenter.

« J'ai envie de faire plus !

- Plus fort ?

- Oui mais... Pas seulement.

- Explique-toi.

- C'est bien beau tout ça... Mais il faut entrevoir plus de possibilités. Prévoir le plus de situations possibles.

- Euh... Oui... En effet.

- Je... Je vais créer un moyen de me défendre au corps-à-corps. Ainsi, je ne serai pas considéré comme un simple tireur. D'ailleurs, dans cette optique, il faudrait que je surprenne mon adversaire avec différents moyens d'attaquer. Peut-être en modifiant les propriétés des arcanes... Oui, bonne idée. Comme ça je n'aurais pas qu'une seule attaque dans mon attirail et […]

- Attends ! »

L'intervention du vice-conseiller surprend l'ancien Kiyuza.

« Ce sont de bonnes idées mais... Apprends à mieux contrôler ton énergie d'abord. Tu auras beau avoir la meilleure panoplie possible, si tu n'as pas les bases de la maîtrise de ton élément, ça sera inutile. Développe les avantages que t'offre la foudre. Tu gagneras en fluidité. Tu peux me croire.

- Entendu.

- La première étape consisterait à t'entraîner à tirer vite, bouger très vite, dans des angles différents sur mes colonnes. J'en augmenterai la solidité au fur et à mesure que tu progresseras. Après un certain stade, je te laisserai mon atelier pour que tu puisses donner vie à toutes tes idées. Cela te contient-il ?

- Oui. Vous avez raison, maître Yoru. Comme ça je pourrais mettre à l'épreuve la résistance de ma création.

- Tout à fait. Je te laisse tranquille. Essaye juste de ne pas tirer en direction de ma très chère demeure. Ce sera mon unique exigence. Et puis, concernant les Shirenais, tu n'as pas à t'inquiéter. Ils ne détecteront aucune de tes activités grâce à la barrière que j'ai installé. » lui déclare-t-il avant de rentrer chez lui.

L'apprenti Zigrik de foudre se remet à viser une autre formation de glace. Yoru se surprend à avoir sous son aile un tel être, imprévisible comme Rajik. Cependant, vu qu'ils sont du même bord, contrairement à son ancien compagnon de voyage, il doit être plus attentif à son encadrement. Sinon, l'hypothèse d'un Alnor numéro deux se concrétiserait à son tour. Pendant ce temps, dans la maison de Tomoharu, le porteur de l'Hoshaku et Jomei sont assis par terre, face à lui, derrière une table basse. Une femme leur apporte une théière et trois tasses sur une soucoupe décorée de vagues.Elle place chaque petit contenant devant chacun des trois concernés et les remplit avec délicatesse. Lorsque vient le tour de Rai, il regarde le liquide loin d'être familier pour lui.

« Qu'est-ce que c'est ?

- Des plantes de chez nous que nous faisons infuser dans de l'eau bouillante.

- Lépazav.

- Buvez, s'il vous plaît. »

Les deux locaux en ingurgitent un peu.Puis, Rai, rassuré par l'absence de réaction de leur part, les imite, plus lentement qu'eux. Le goût qu'il capte, totalement inhabituel pour lui, arrive presque à lui faire tirer une grimace.

« C'est... C'est spécial.

- Mé réyotaza zvé lé ortumazat zokozer. » conseille l'interprète.

Le guide spirituel du Continent de l'Est fait signe à celle qui les a rejoint d'apporter ce que Jomei a relevé. Celle-ci revient quelques instants plus tard et place une sorte de morceau de sucre brun à côté de la tasse de Rai. Ignorant totalement ce qu'il faut faire, l'interprète l'aide en utilisant un qu'il dissout avec une sorte de cuillère dans sa boisson. Rassuré, il suit le mouvement.

« Ah c'est mieux ! Qu'est-ce que c'est ?

- Un produit bien de chez nous. Nous ne le vendons pas à l'extérieur. De ce que j'ai pu voir avec les marchandises provenant du sud, je ne veux pas que le fruit de nos efforts finisse pareil. »

Le porteur de l'Hoshaku, point intéressé par ce genre de problématiques, ne relève pas. Dehors, à travers la fenêtre, des personnes font des mouvements lents et synchronisés, presque identiques à certains gestes effectués par les Kiyuzas.

« Que font-ils ? demande Rai.

- Un art que nous pratiquons depuis plus de cent ans. A travers nos danses, nous témoignons de notre volonté d'être en harmonie avec l'environnement.

- C'est vraiment joli... Bon, je ne veux pas érafler cette douce ambiance mais, comme j'ai tenté de vous l'expliquer, je suis venu pour une bonne raison. Je cherche des traces de ma famille.

- Ah oui ?

- J'ai perdu la mémoire. J'en ai récupéré qu'une partie durant mon périple. Tout ce que je sais c'est la raison pour laquelle je fus envoyé dans le Continent Central. Ce que je veux savoir maintenant c'est où se trouvent les miens.

- Notre chef peut peut-être vous renseigner. »

Jomei se tourne vers ce dernier.

« Feyroner, améam kiltaner ivazat kotaz zing léama dentalar fayarat.

- Mé intaza... Léama denstar... Mé réyotaza zvé laé witalazat Faytom-Sepak-Der.

- Il vous conseille aller au Continent du Nord.

- Ah oui ? C'est par où ? » demande l'être abritant l'énergie blanche en se levant d'un seul coup.

Aussitôt l'annonce d'une nouvelle piste délivrée, excité, Rai tente de partir.

« Attendez !

- Quoi donc ? Vous venez de me donner un indice. Je dois y aller.

- Notre guide a quelque chose à vous dire à ce propos.

- Za mé oraza luxnar, virtobyam, Sepak nuntaler omazat nanzakutilé syé shitokaz. Kach omazat vublokar ilwai.

- Ah mais oui ! En effet, vous avez raison !

- Quoi ?

- Le passage maritime qui relie notre terre à celle du Nord est impossible à emprunter. C'est la période glaciale. Pendant un cycle, trois fois par an, des énormes masses de glace, venues du Nord, se détachent régulièrement et le rendent impraticable. »

L'enthousiasme qui débordait dans le corps de Rai s'évapore d'un seul coup. Le rêve qu'il entretenait depuis sa victoire face au Kirioku ne peut se concrétiser tout de suite. La déception qui accompagne cette nouvelle habite son visage.

« Soyez rassuré, vous n'avez qu'à attendre la fin du cycle et vous serez libre de circuler. Restez avec nous pour le moment.

- Oui... C'est tout ce que je peux faire. »

En guise de consolation, Jomei l'invite par un geste à observer les personnes dehors, toujours en train d'effectuer leur étrange chorégraphie.

« Accoutumez-vous à nos pratiques. Vous êtes désormais le bienvenu parmi nous. Peut-être que vous vous réconcilierez avec notre langue originelle. »

Malgré l'approche amicale qu'il a engagé, Jomei n'obtient pas de réponse de la part de son interlocuteur. Le guide le regarde alors droit dans les yeux et incline brièvement la tête. Un instant de silence. Les propos de Shiki encore bien ancrés dans son esprit, Rai réfléchit sur la raison de son existence, aussi bien en tant que Shirenai, en tant qu'individu et en tant qu'hôte d'une force qui ne provient pas de Faironne. Il serait peut-être temps maintenant de penser un peu à lui. Poussé par cette idée, c'est alors qu'il pose genoux à terre devant eux.

« C'est un réel honneur de partager votre vie... Je ferai tout pour ne pas vous déshonorer. »

Après la traduction de sa déclaration, Tomoharu, touché par sa sincérité, vient jusqu'à lui et pose sa main sur son épaule gauche. Surpris par ce geste, Jomei s'incline, souriant. Finalement, ce qu'il avait découvert en visitant le Continent Central ne se vérifie pas totalement. Se pourrait-il que juste sa présence suffira à secouer les lignes établies depuis le triste événement survenu il y a longtemps ? Plus que jamais, tout repose sur les épaules sur les principaux acteurs du changement qui se profile.