Ale gravissait les pavés de la grande route qui menait au château du vicomte, situé sur une colline dominant Eldoria, Le froid mordant de l'hiver se faisait sentir, et une fine couche de neige recouvrait les pavés et les toits de la ville. Le panorama qui s'étendait sous ses yeux était à couper le souffle.
Depuis cette hauteur stratégique, il pouvait voir toute la ville s'étendre, couverte d'une mince couche de neige, scintillait sous la lumière hivernale. Les quartiers populaires grouillaient encore d'activité, tandis que les tours des quartiers riches se dressaient comme des silhouettes figées dans le paysage, leurs toits blanchis par la neige. Au loin, il distinguait le bidonville, où la neige, moins uniforme, se mélangeait aux débris et à la boue. Mais l'imposante silhouette du château captait toute son attention.
Bâti comme une forteresse, le château du vicomte ne se contentait pas de refléter l'opulence de la noblesse ; il projetait également une force et une autorité indéniable. Les murs épais de pierre grise semblaient infranchissables, et des tours de guet se dressaient fièrement à chaque coin, observant la ville et ses habitants avec une vigilance constante. C'était à la fois un bastion militaire et un palais luxueux, orné de sculptures délicates et de vitraux colorés qui laissaient filtrer une lumière d'un autre monde.
Un coup de vent hivernal lui ramène son attention.
Alors qu'il finissait d'ajuster son manteau pour se protéger du froid, Ale glissa machinalement la main dans sa poche pour en sortir un petit objet familier. Il s'agissait de la Solisphère, une petite sphère de verre légèrement opacifiée, gravée de runes. Elle avait appartenu à son grand-père, et Ale l'utilisait depuis toujours pour garder un œil sur le temps.
Il injecta un peu de mana au contacte de l'artefact, et la sphère s'illumina doucement. Une source lumineuse à la surface représentait le soleil se projetait sur le cadran miniature à l'intérieur. Ale observa brièvement l'artefact dans sa main. Il était 15h45. Encore quinze minutes avant qu'il ne doive se rendre au château du vicomte.
Ale s'approcha de la vaste cour centrale. L'entrée principale, massive et ornée de ferrures dorées, donnait le ton de la grandeur de la famille Montclair. Un tapis rouge s'étalait sous les pas des invités de marque, menant directement vers les portes monumentales. Des gardes en armure scintillante encadraient l'entrée, rigides et imposants, surveillant les allées et venues avec une vigilance presque cérémoniale.
Cependant, Ale, comme tous les autres employés, ne passerait pas par là. Il observa un instant les préparatifs autour de l'entrée principale, où des nobles et des personnalités importantes seraient accueillis avec tous les honneurs. Puis, discrètement, il se dirigea vers l'arrière du château, où une petite porte de service était réservée aux travailleurs. Contrairement à l'entrée majestueuse des convives, celle-ci était modeste, presque cachée entre les cuisines et les zones de stockage. Deux gardes y étaient postés, mais ils semblaient bien moins impressionnants que ceux à l'avant.
Après avoir montrer son contrat, les gardes l'ont fait entrée.
Ale poussa la porte discrète et pénétra dans un long couloir sombre, faiblement éclairé par des torches murales. Cette petite entrée, loin des regards nobles, était tout ce qui reliait le cœur battant du château à ceux qui se chargeaient de son bon fonctionnement. Il franchit le seuil et fut immédiatement plongé dans une atmosphère de travail acharné. Des serviteurs et des travailleurs allaient et venaient rapidement, chargés de préparer la réception. L'agitation était palpable.
Dans une grande salle de préparation, Ale rejoignit les autres travailleurs sélectionnés pour la soirée. Ils furent rapidement pris en charge par un sous-majordome, un homme rigide et sec, vêtu de l'uniforme de la maison Montclair. Son manteau, d'un rouge profond avec des broderies dorées, portait les armoiries de la famille : un aigle et une montagne, symboles de leur domination sur la région.
« Écoutez bien, » lança le sous-majordome d'une voix autoritaire. « Vous allez tous être divisés en groupes de cinq, chacun supervisé par un membre du personnel de château. . Vos tâches sont simples : préparer la salle de banquet, dresser les tables, préparer des boissons, et vous assurer que tout soit en parfait état pour l'arrivée des invités. Et si quelqu'un vous demande quoi que ce soit, obéissez sans poser de questions. C'est clair ? »
Le groupe d'Ale acquiesça silencieusement. Il n'y avait pas de place pour l'erreur dans ce genre d'événement. Ale observa les autres travailleurs, tous dans le même état de nervosité contenue que lui.
Les groupes furent formés rapidement. Ale se retrouva avec quatre autres personnes, dirigées par une femme au regard perçant, visiblement membre du personnel du château. Elle arborait la tunique rouge et or de la famille Montclair, signe de son autorité sur eux. Elle les mena directement à la salle de banquet, un espace immense qui contrastait brutalement avec les couloirs ternes des serviteurs.
C'était le cœur du château. Un immense espace décoré de tapisseries somptueuses aux couleurs de la famille Montclair, chaque détail respirait la richesse et le pouvoir. Au plafond, des lustres en fer forgé suspendus par des chaînes étincelaient sous la lumière des bougies. De longues tables étaient alignées dans la salle, prêtes à accueillir les invités de marque, et une estrade centrale était réservée au vicomte et à sa famille.
Ale et son groupe furent chargés de dresser les tables. Chaque serviteur avait une section spécifique, et leur tâche était simple mais exigeante. Les tables étaient ornées de couverts en argent, d'assiettes en céramique précieuse, et de verres en cristal d'une transparence éclatante. Rien ne devait être mal placé ; tout devait refléter la perfection et l'opulence du château.
Pendant qu'Ale disposait les assiettes, d'autres groupes étaient occupés à accrocher des draperies et des bannières aux couleurs de la famille Montclair. Ils disposaient également des fleurs fraîchement coupées sur les tables, ajoutant une touche de beauté naturelle à l'ambiance fastueuse. Des chandeliers en argent étaient placés au centre des tables, chaque bougie allumée créant une lumière douce et chaleureuse dans cette salle grandiose.
Ale fut ensuite conduit, avec son groupe, vers les cuisines du château, un autre point névralgique des préparatifs. Là, l'odeur des mets en préparation envahissait l'air, saturé de chaleur et d'effervescence. Les cuisiniers, habillés de blanc, s'affairaient autour de marmites bouillonnantes et de fours massifs, préparant les plats somptueux qui seraient servis aux invités d'honneur. Le bruit du métal et des ordres lancés résonnait dans la pièce, alors que des serviteurs transportaient des plateaux remplis de mets prêts à être disposés dans des salles adjacentes.
Ale jeta un coup d'œil aux cuisiniers qui, malgré la pression, travaillaient avec une précision impressionnante. La nourriture était tout aussi importante que les décorations ; rien n'était laissé au hasard pour cette grande célébration.
Dans une salle adjacente à la cuisine, quelques groupes furent conduits vers les celliers, où de grands tonneaux de vin étaient soigneusement entreposés. Les vins avaient été sélectionnés avec soin pour correspondre à la qualité du banquet. Des tonneaux de différentes tailles étaient étiquetés avec les noms des meilleurs vignobles de l'empire.
Les serviteurs avaient pour tâche de remplir les carafes de vin, qui seraient ensuite placées sur les tables des invités. Chaque carafe devait être remplie avec la plus grande précision, car il ne fallait pas qu'une goutte soit gaspillée. Le vin rouge rubis s'écoulait des tonneaux avec une lenteur presque cérémoniale, et les serviteurs, concentrés, remplissaient les carafes avec un respect évident pour ce liquide précieux.
Lorsque tout fut prêt, Ale et les autres serviteurs retournèrent dans la salle de banquet. L'ambiance changeait déjà : l'attente des convives se faisait sentir, et les derniers ajustements étaient apportés.
Le sous-majordome revint peu après pour faire une dernière inspection. Son regard sévère passa sur chaque détail de la salle, de l'argenterie étincelante aux fleurs délicatement disposées.
« Vous avez fait du bon travail. Maintenant, restez en retrait et attendez vos ordres pour servir lorsque les invités arriveront. »
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Le soleil commençait à se coucher, teignant le ciel d'or et de pourpre, alors que les premiers invités arrivaient à l'imposant château du vicomte Alaric de Montclair.
La grande cour pavée résonnait du bruit des sabots des chevaux et des roues des carrosses. Les nobles et les personnalités influentes de la région faisaient leur entrée par la porte principale du château, un imposant portail de bois orné de ferrures dorées. Valets et serviteurs s'activaient, prenant en charge les chevaux et les voitures, tandis que des gardes en armure resplendissante montaient la garde avec un professionnalisme rigide.
Les invités étaient annoncés à haute voix, chacun présenté selon son titre et ses distinctions. Les vicomtes des villes voisines, des barons et des dignitaires locaux, ainsi que le duc de la région, faisaient leur entrée, sous le regard vigilant des convives. Mais c'est l'arrivée d'une personnalité particulière qui capta l'attention de tous : la princesse Ismérie, la troisième fille de l'empereur Hedès, en visite dans la région. Son carrosse doré, décoré de motifs royaux, fit une entrée remarquée, et tous s'inclinèrent respectueusement lorsqu'elle apparut.
Ale, posté à l'écart parmi les autres serviteurs, observait en silence cette mise en scène de prestige. Bien qu'il fût ici pour servir, il ne pouvait s'empêcher de remarquer les jeux de pouvoir qui se dessinaient déjà entre les invités. Chaque sourire, chaque inclination de tête, chaque parole échangée semblait soigneusement étudiée, cachant des intentions sous-jacentes.
Outre les nobles et personnalités politiques, plusieurs hauts dignitaires religieux faisaient également leur entrée. Les prêtres, habillés de robes somptueuses aux couleurs de l'ordre, symbolisant leur statut, arrivaient dans des calèches portant le blason de l'église. Leur présence signifiait l'importance de la religion dans l'empire, mais pour Ale, elle rappela également les avertissements que lui avait donnés Chance à propos de la corruption qui rongeait les institutions religieuses, en particulier dans le bidonville.
Avec eux, des aventuriers de haut rang faisaient également leur apparition, accompagnant certains nobles en tant que gardes personnels. Ces guerriers et mages, souvent de classe élevé, étaient facilement reconnaissables à leurs armures éclatantes et à leurs armes finement forgées. Ils étaient là pour assurer la protection des plus hautes personnalités, mais aussi pour afficher leur puissance et leur statut. Leurs présences imposaient un respect silencieux dans la foule des serviteurs et des invités.
Les invités prirent place dans la grande salle de banquet. L'immense pièce était décorée avec une somptuosité à couper le souffle. Des tapisseries représentant les grandes victoires de la famille Montclair pendaient aux murs, tandis que des chandeliers en fer forgé projetaient une lumière douce et chaude sur les tables richement ornées. Les nappes brodées d'or couvraient les longues tables où étaient disposés des couverts en argent, des verres en cristal et des assiettes de porcelaine.
À une extrémité de la salle, la table d'honneur surélevée attendait le vicomte, son fils Aldric, et les invités les plus prestigieux, dont la princesse Ismérie. Les autres convives prenaient place selon leur rang et leur importance, dans un ordre bien défini qui reflétait les hiérarchies sociales de l'empire.
Ale et les autres serviteurs s'assuraient que tout soit parfaitement en place, ajustant discrètement les couverts, remplissant les verres et répondant à la moindre demande.
Avant que le festin ne commence, le vicomte Alaric de Montclair se leva pour prononcer un discours. Sa voix forte et assurée résonna dans la salle, remerciant les invités pour leur présence en l'honneur des 18 ans de son fils Aldric. Il parla avec fierté de cet anniversaire marquant la transition d'Aldric vers l'âge adulte, un moment crucial pour la lignée Montclair.
« Aujourd'hui, nous célébrons non seulement la majorité de mon fils, mais aussi l'avenir de notre famille et de notre région. Je suis honoré de pouvoir compter sur la présence de la princesse Ismérie et de tous les nobles qui ont répondu à notre invitation. » Ses paroles étaient mesurées, mais chaque phrase semblait soigneusement étudiée pour renforcer son statut et sa loyauté envers l'empereur Hedès.
Certains invités hochèrent la tête, murmurant entre eux, et Ale perçut quelques regards furtifs qui en disaient long sur les tensions politiques sous-jacentes.
Le festin commença peu après les discours. Ale et son équipe de serviteurs s'activèrent pour servir les convives avec une précision parfaite. Le repas était divisé en plusieurs services, chacun étant plus raffiné que le précédent, des soupes parfumées, des pâtés et des salades de gibier en entré, des viandes rôties comme le chevreuil, le sanglier et le poulet, accompagnées de légumes et sauces en plat, et le dessert, des fromages locaux, tartes au miel, fruits confits furent présentés. Tout au long du repas, chaque serviteur avait pour mission de s'assurer que les verres des invités ne restaient jamais vides.