Après avoir achevé l'explication du plan, Habel se dirigea vers la sortie de la case de Hajim quand il entendit ce dernier courir après lui.
>> S'arrêtant devant lui, légèrement exténué par cette petite course, Hajim dit après plusieurs expirations :
<< Kric, puis-je vous demander quel type d'arme vous affectionnez le plus ?''
>> Surpris par la question, Habel répondit :
<< Je n'ai pas vraiment d'armes préférentielles, j'utilise la plupart des armes assez convenablement.''
<< Oh, très bien ! Veuillez patienter un moment.''
Après une petite période d'attente, Hajim revint avec un long coffre entièrement couvert par un tissu poussiéreux.
<< Je vous en prie Kric, veuillez accepter ce présent de ma part. Vous avez certainement une linkt de combat pour vous aider dans vos affrontements, mais s'il vous plaît acceptez-le, s'il pouvait vous aider d'une quelconque façon, j'en serai très heureux.''
Un cadeau inattendu… De surcroît, une arme et au vu de la longueur du coffre, ce sera une lance, l'arme de prédilection des Hall.
Habel, contrairement, à ce que pensait Hajim, il n'avait pas de linkt de combat.
Il utilisait des armes qu'il avait confectionné lui-même ou avec l'aide de son grand-père Vald.
Elles étaient peut-être meilleures que celles utilisées par la plupart des guerriers, mais resteraient inévitablement inférieures à une arme façonnée par un artisan de génie tel que Hajim.
Ouvrant le coffre, une lance d'une beauté rare s'épanouit devant ses yeux.
La lance était d'une longueur convenable et d'une légèreté surprenante, chose qui contrastait fortement avec la solidité qu'il pouvait sentir à son contact.
C'était une lance à une main, celle, la plus couramment utilisée par les guerriers Hall.
Sa manche était d'une solidité rare ainsi que d'une souplesse étonnante, dont la coloration noire profonde ressortait la splendeur.
La pointe était faite d'une pierre extrêmement belle et soyeuse, dont la forme et le polissage était d'une qualité qu'il n'avait jamais vu auparavant.
Il ne pouvait même pas commencer par imaginer la durée dont Hajim avait eu besoin pour façonner et polir une pierre aussi solide, rendant la pointe extrêmement perçante alors que les bords étaient aussi tranchants qu'une lame finement aiguisée.
Le détail qui accordait à cette lance une beauté encore plus unique était ce métal inconnu, jaune et resplendissant.
Habel pouvait apercevoir le reflet de son masque là-dessus, il servait de lien solide entre la manche et la pointe.
C'était un véritable travail d'artiste.
Hajim, voyant le Kric silencieux et continuant à contempler la lance pendant un long moment, se sentit très satisfait par sa réaction.
Après tout, c'était la plus belle de ses œuvres.
>> Hajim dit alors :
<< Vous tenez entre vos mains, la plus belle et aboutie de mes créations. Le bois servant de hampe est un des plus précieux que l'on puisse trouver sur Hallguna, on l'appelle ''le bois de mille ans''. Ce morceau provient directement d'un arbre ayant plus de mille ans que l'on trouve uniquement dans les profondeurs de la forêt sombre.
<< Le matériel servant de pointe est lui aussi une pièce d'exception. On ne trouve cette pierre précieuse que dans les profondeurs maritimes bordant l'île, on l'appelle ''la Rük''. Mettre la main sur une seule d'entre elle, est d'une difficulté sans nom.
<< Pour finir, un élément des plus importants dans la confection de cette lance, ce métal jaune et brillant appelé ''Or''. Un jour, un Ieruk arriva sur l'île avec ce métal inconnu. Intrigué, mon ancêtre essaya de savoir ce que c'était, c'est comme cela qu'il en reçu de la part du Ieruk. Depuis, de génération en génération, on améliore constamment notre utilisation de celui-ci. J'ai utilisé le reste de l'or que possédait notre famille pour fabriquer cette lance.
<< Au départ, je l'avais fait fabriquer pour l'offrir au précédent Kachi en guise de remerciement pour le surnom qu'il m'avait accordé, mais avant de la terminer le malheur le frappa… Je voulais créer une lance rivalisant avec 'Fulk', la lance transmis de génération en génération à chaque Kachi.
<< … J'ai toujours voulu que ce soit quelqu'un de digne qui la brandisse et vous répondez à mes critères, bien plus que quiconque. Je ne l'ai pas encore nommé, est-ce que vous pourriez me faire l'honneur de lui accorder un nom ?''
<<… Je ne suis pas très doué quand il s'agit de nommer, mais je vais essayer. Hum… Que diriez-vous de ''Falkor'' ?
<< 'Falk' pour sa souplesse et sa pointe perforante et 'Or' pour faire honneur à ce matériau d'exception.'' Dit Habel.
<< Quel nom merveilleux ! C'est un nom qui lui convient parfaitement. Merci beaucoup de m'avoir accordé cet honneur, kric.''
<< Non, c'est moi qui devrais te remercier pour m'avoir fait don d'une lance aussi exceptionnelle.''
Après cet échange, Habel et Hajim se dirent au revoir.
Une fois, dehors, le soleil était presque levé, il avait passé toute la nuit à répéter le même cycle chez chacun des personnages importants de la révolte.
<< Je n'ai plus de temps à perdre, je dois me dépêcher de rassembler toutes les aides nécessaires pour la réussite du plan.''
Après avoir retiré sa tenue de Kric à l'abri des regards, Habel se dirigea en dehors du village.
Il avança en direction de la forêt sombre.
<< Il ne me reste plus qu'à rencontrer 'cet homme'. ''
****
La forêt sombre.
Pour les Hall, cette forêt représente l'interdit, mais aussi l'inconnue.
S'aventurer seul dans cette forêt était la chose la plus stupide et inconsciente à faire pour un Hall.
Même pour un guerrier, c'était une invitation à la mort, tant la faune et la flore de ses bois étaient bien trop dangereux et mystérieux…
C'étaient les enseignements prêchés aux jeunes Hall dans leur jeune classe, et quand il le fallait, on les sensibilisait davantage à l'aide d'une histoire racontée par la griotte.
Habel, qui avançait silencieusement dans ses bois, était d'accord avec ces enseignements.
S'il le pouvait, il en rajouterait certainement une couche pour décrier la dangerosité de ses bois.
Mais alors, pourquoi allait-il lui-même à l'encontre de ses enseignements ?
Eh bien, même si l'on ne peut pas vraiment dire qu'il existe une route sûre dans cette forêt, Habel pouvait au moins assurer la fiabilité de son chemin de prédilection à environ… 30 % ?
Enfin, ce chemin était celui que son grand-père Vald prenait toujours quand il venait cueillir des arimauds et Habel l'avait à son tour adopter.
Autre chose à mettre au crédit de Habel pour justifier son initiative inconsciente, c'était sa connaissance approfondie des plantes et de leurs différents effets qui était sans équivalent parmi les Hall.
Cette science des plantes était la réelle source de confiance de Habel quand il pénétrait ces bois, bien au-delà d'un chemin prédéterminé.
Surtout que l'endroit où il se rendait cette fois-ci était un lieu où il n'avait jamais osé mettre les pieds.
Son grand-père y était déjà entré quelques fois et malgré sa force, il lui avait dit avoir failli mourir à de nombreuses reprises quand il explorait les profondeurs de cette forêt sombre.
Bien au fait des risques qu'il prenait, Habel décida d'opter pour une stratégie inédite.
Il s'était aspergé d'un concentré de solution puante, la même que celle utilisée contre les serans, mais 10 fois plus efficace, car elle n'était pas diluée.
Comment faisait-il lui-même pour supporter une telle puanteur ?
Eh bien, ce n'était pas très compliqué.
À force d'expérimentation des plantes et s'étant pris des vagues de parfum de toute sorte, son odorat était devenu « légèrement » dysfonctionnel.
Il sentait toujours les différents parfums, mais de façon beaucoup plus atténuée que les autres.
Armé de falkor, sa nouvelle arme, d'un manteau pour résister au froid et de son parfum puant, Habel commença son insertion dans la première moitié profonde de la forêt.
Le ciel était nuageux, assombrissant davantage ses bois familier de l'obscurité.
Le froid qui se dégageait était mordant, l'air était imprégné d'une forte humidité et le sol qui manquait habituellement de fermeté s'était presque transformé en marécage après le passage de la pluie.
C'étaient les conditions les plus extrêmes possibles et les moins accueillantes pour se lancer dans une excursion.
Habel avançait péniblement sur cette terre boueuse lui demandant des efforts physiques accrus, tout en étant fortement sollicité mentalement.
Il devait constamment prendre la peine de vérifier son entourage afin d'éviter tout danger possible.
Pour échapper à tout désagrément avec la flore de ses bois, il s'éloignait des chemins trop broussailleux et évitait les plantes qu'il trouvait magnifiques et suspicieuses par crainte de mauvaise surprise.
Toutes ces précautions l'épuisaient énormément, surtout qu'il atteignait ses limites physiques et mentales ne s'étant pas reposé une seule fois depuis hier.
Habel ne l'avait pas remarqué, mais il était plus fatigué qu'à l'accoutumer avant le début de son excursion.
Il n'avait pas fermé l'œil une seule fois durant une journée entière et ajouter à cela qu'il avait vécu énormément d'ascenseur émotionnel dans la même période, entre le fait d'être désigné comme sacrifice et sa rencontre avec Lesly, beaucoup de choses, c'était passé.
....
… Le temps coulait et cela faisait maintenant plus d'une heure que Habel avait pénétré la forêt sombre et il n'était tombé sur aucune bête durant toute la traversée.
Heureusement pour lui d'ailleurs, les bêtes habitants cette partie de la forêt étaient beaucoup plus fortes que les razors vivants à proximité des arimauds.
Cette chance s'expliquait par deux choses, premièrement l'odeur nauséabonde émanant de lui.
Instinctivement, les bêtes avec un excellent odorat ne voudraient pas venir à sa rencontre.
Secondement, il appliquait les consignes de son grand-père, l'ayant appris à éviter les chemins formés naturellement dans la forêt et de passer par des endroits quasiment impraticables.
Selon lui, dans la forêt, les chemins y apparaissant évidents comme un tracé et qui semblait logique de suivre pour faciliter l'exploration étaient à éviter absolument.
Ces chemins n'étaient pas formés naturellement, mais par des bêtes qui à force de les prendre produisaient un tracé au fil du temps et que suivre ses traces était une invitation à tomber sur eux.
...….
Quelques instants plus tard, le paysage devant Habel se trouva soudain parsemé de petites fleurs blanches, donnant à cette petite prairie un aspect enchanteur et féerique.
Habel savait qu'il devait se méfier de tous qui étaient beaux et s'en éloigner le plus rapidement possible, mais il ne put résister à cet air calme et reposant qu'il rencontrait après cette plongée pleine de tension.
La beauté des fleurs ainsi que le parfum agréable qui se dégageait de cette prairie lui permirent de se détendre légèrement.
Était-ce là une faille mentale qui lui arrivait, car jusqu'ici, tout s'était bien passé ?
…Lui permettant ainsi de se relâcher temporairement ?
Seul, lui avait la réponse, n'empêche que c'était un moment d'égarement qu'il allait devoir payer très cher.
Claquer !
Sans qu'il ne s'y attende, Habel sentit une puissante frappe dans le dos qui le propulsa au loin.
< Atterrissant violemment sur le sol après s'être écrasé contre un arbre, Habel se tordit de douleur, mais il savait qu'il ne pouvait pas se permettre de perdre du temps à se tortiller, il devait se relever rapidement afin d'identifier son agresseur. Il devait remercier son grand-père pour sa tolérance à la douleur. Il lui disait toujours, tout en appliquant physiquement ses préceptes sur son jeune corps : < Serrant les dents, Habel se mit à observer son environnement, cherchant à voir qui était son adversaire. Il ne fallut pas longtemps pour qu'il le trouve. C'était une bête à quatre pattes, elle n'était ni grande ni petite, qui de par son apparence ne donnait pas l'impression d'être une bête dangereuse et aggressive. Il comprit pourquoi il ne l'avait pas repéré plutôt, elle se mariait merveilleusement au paysage. Elle avait une peau blanche luisante, semblant lourde et épaisse, avec de nombreux plis sur l'entièreté du corps comme portant un excès de graisse, par contre ses quatre pattes semblables à des sabots étaient pour le moins musclés. Sa tête était… ? Une sorte de trompe et quatre petits yeux noirs étaient visibles, avec deux d'entre eux chaque côté de la tête. C'était une bête que Habel n'avait jamais vu nulle part. Il ramassa sa lance et se mit en position de combat. Par contre, il n'avait aucunement l'intention de combattre, il cherchait plutôt une échappatoire. Pour qu'une bête vive dans cette partie de la forêt, il fallait qu'elle soit très forte, et l'apparence non-agressive de celle-ci ne lui avait guère donné l'illusion qu'il pouvait se mesurer à elle. Mais alors qu'il songeait à un moyen de s'échapper, il se fit projeter au loin par la bête. Frapper ! Cette fois-ci, il eut la chance de ne pas se prendre un arbre, pourtant la douleur était beaucoup plus sévère que lors du premier coup. La cause ? Il l'avait pris de plein fouet dans les entrailles. << Bouaarrgh !! » Habel vomit énormément de sang, c'était la première fois qu'il versait autant de sang et connaissait une telle douleur. Il peinait énormément à maintenir sa conscience éveillée. Il voyait flou, n'arrivant presque plus à distinguer ceux qui l'entouraient. Sa respiration était quasiment coupée, arrivant à peine à engranger de l'air à l'aide de sa bouche, ses oreilles sifflaient et des orifices de ses narines coulaient du sang. Son corps entier semblait paralysé par la douleur. L'attaque avait été rapide, mais Habel avait pu lire le procédé cette fois-ci. La bête avait agité légèrement sa trompe et une langue fine, mais solide et totalement blanche, qui était assez longue pour couvrir les 5 mètres qui les séparaient, avait été projeté par la trompe et le frappa à une vitesse inimaginable. S'il n'était pas protégé par une protection faite de lianes en dessous de son manteau de laines, il aurait déjà perdu sa colonne vertébrale lors le premier coup et vomit ses entrailles avec le second. Habel entendit soudain la bête se rapprocher… Était-ce la fin ? Habel regretta son égarement temporaire. Qui aurait cru que le retour du bâton serait aussi sévère. Il était sonné et incapable de se relever. Non ! Ça ne pouvait pas se terminer ainsi, pas après avoir été aussi proche du but… Il venait d'apprendre des choses exceptionnelles sur le monde extérieur, tout ne pouvait pas s'arrêter là. Hurler ! Alors qu'il se débattait pour revenir à lui, Habel entendit la bête poussée un puissant cri. Il ne pouvait pas faire la distinction entre si c'était un cri de colère ou alors de douleur. Soudain, il sentit son corps être porté. Il ne comprenait pas ce qu'il se passait, mais il pouvait être sûr d'une chose, il était sauvé ! Et cela ne pouvait avoir qu'une seule signification. …'Cette homme' était venu à son secours ! Se relâchant complètement, Habel sombra dans l'inconscience, n'entendant même pas la plainte de cet homme. << Habel, ce sale gosse… Quel genre d'idiot est-il devenu pour avoir le courage de pénétrer si profondément dans cette forêt ?''