Merde et merde ! Non content de m'avoir pourri ma soirée et voilà que nos bouchés de service en remettaient une couche. 5 heures du matin, un café noir en main j'étais dans la bagnole de Mick, il est venu me prendre, car on avait une autre scène de crime avec des similitudes, des tueurs en série c'est bien ma veine. Plongé dans mes pensées je revivais la rencontre avec ma vieille tante la veille. Selon elle, Ougou est un lwa du panthéon haïtien et que je devais prendre ses avertissements au sérieux. Cerise sur le gâteau Wu me fit savoir qu'elle n'avait pas pu retracer le numéro et que fait curieux c'est comme si je n'avais pas reçu d'appel à l'heure dite. Pour berner Wu il faut être vraiment balaise. Résumons, j ai des fous qui découpent des humains comme des porcs, un avertissement d'un autre monde, putain c est la ville qui devient folle ou moi qui perd pied.
Remarquant mon silence Mick me demanda si j allais bien, pour toute réponse je lui fis un hochement de tête. Il dut sentir ma nervosité, car il accéléra et dans une trentaine de minutes, on était arrivé. Ce fut le vieux Hernandez qui nous accueillit, il avait plus de 25 ans de service et c'était sa dernière semaine avant la retraite, un peu grassouillet, mais à l'esprit vif, il n'y avait pas deux comme lui pour confondre les gens lors des interrogatoires.
- Bonjour, les jeunes, c'est pour des vacheries comme cela que je suis heureux de foutre le camp, ce n'est plus de mon âge de voir cette merde,
- Vieux veinard. Lui lança Mick
On monta les marches qui grinçaient sous nos pieds, rien d'étonnant, car je me demandais comment un taudis pareil pouvait avoir l'autorisation de la mairie de rester encore debout et en plus de servir de motel. Quand on arrivait au deuxième étage, une odeur pestilentielle vint chatouiller nos narines. Nous découvrîmes un appartement à 2 pièces chichement meublé dont on croirait que la peinture des murs était faite de sang tant qu'on avait aspergé les murs de ce fluide. 3 cadavres déchiquetés se trouvaient dans le salon, c'étaient des hommes, je passai dans la chambre pour voir les restes d'un corps que sans peine j'arrivais à identifier comme celle d'une femme. À ce moment Mick posa une question de taille.
- Pourquoi, elle est la seule à avoir gardé sa tête ?
- Yes, mais on l'a éventré..
- C'est quoi ça ?en disant cela Mick indiquait une masse faite de tissus humains transparents d'une part et de grelots de sang et de chaire d'autre part.
- C'est un placenta… Lâchais-je d'une voix enrouée par l'effroi que me causait cette découverte
- Un quoi? Le vieux Hernandez détala et je ne pouvais l'en vouloir rien qu'avec l'état des macchabées on ne pouvait qu'imaginer le pire si un enfant s'était retrouvé dans cette chambre.
Mick me fit signe qu'il sortait et je lui emboitai le pas, c'est à ce moment que je remarquai les dessins sur le sol les mêmes que ceux dans l'autre maison, signifiant par là qu'effectivement les deux affaires étaient liées et moi j'étais dans la merde. Une fois dehors je me demandai, où se trouvait le bébé, était il seulement en vie, qui était cette femme. Je vois déjà le journal des vingt heures, le maire et même le gouverneur vont vouloir des réponses. Cela va être ma fête, je peux déjà oublier mes vacances qui théoriquement auraient dû démarrer dans 72 heures… La poisse. Bon autant me mettre au boulot.
- Hernandez, tu as des témoins ? Qui nous a contactés ?
- Des témoins il n'y en a pas. Pour comment l'enfer nous a fait parvenir ce colis exprès, c'est simple le gérant voyant que le feu locataire avait une semaine de retard s'est pointée pour réclamer son du et Bingo. Il a dû vider toute une bouteille de scotch avant de nous appeler.
- Il est où ?
- C'est ce vieux pépé là-bas.
Il nous indiquait un vieux monsieur qui devait être dans les 70 ans, à l'allure crasseuse et d'une maigreur presque maladive. On voyait encore la peur dans ses yeux. Comme la Coronaire dont je n'avais pas remarqué la venue sortait du motel je demandai à Mick devoir avec cette dernière et je me suis dirigé vers le vieux pépé.
- Bonjour, lieutenant Pierre François, de la police de New York. Je lui fis un sourire poli.
Il me tendit la main qui tremblotait un peu et on s'échangea une poigne. Sa voix par contre était ferme malgré le fait qu'elle porte peu.
- Petrovic Barov ....Gérant et propriétaire des lieux.
- Enchanté…
- Je ne vois rien d'enchantant moi.
- Vous avez raison, comment avez-vous découvert les corps ?
- Le type qui louait la chambre avait pour principe de me payer tous les premiers lundis du mois et cela faisait 4 mois qu'il était là. Quand j ai vu qu'il avait du retard j'ai voulu savoir de quoi il en retournait et cela faisait trois jours que je ne l avais pas remarqué donc je suis monté et là n'ayant pas de réponse et remarquant l'odeur qui en sortait j'ai ouvert avec mon double .....Vous savez le reste.
- Il s'appelait comment votre locataire ?
- James Davenport, mais selon moi c'est un faux nom.
- Pourquoi selon vous ?
- Parce que chez moi on vient pour se terrer ou s'envoyer en l'air avec une pute et dans les deux cas l'anonymat est salutaire. Son franc-parler me tira un sourire
- Je vois, vous dites qu'il est chez vous depuis 4 mois, avait-il des visites ?
- Monsieur le Lieutenant si j ai pu atteindre mes 73 ans c'est en me mêlant de mes oignons.
- OK, comment se fait-il que personne n'ait remarqué les cris ?
- Simple, dans cette baraque tout le monde crie. Les pétasses, les pédés, sans compter le vieux clodo du 3e qui gueule pour un rien.
- En résumé on a entendu les cris, mais tout le monde a conclu que des gens se payaient du bon temps.
- C'est un peu ça…
- Bon, il avait des voisins de palier ?
- Non, il était seul dans l'étage depuis une semaine. Il prit un air pensif puis me regarda comme s'il m'analysait. Avant d'ajouter. Votre tête me plait et contrairement à vos copains là vous m'avez parlé comme on parle à un humain et non comme un sac à merde. Il y a une fille, une femme de la rue qui loue l'appartement en face sauf qu'elle n'y vit pas. C'est la qu'elle amène ses clients.
- Vous savez comment elle s'appelle.
- Lily c'est tout ce que je sais. Elle aurait pu voir quelque chose.
Ma joie fut de courte durée, car comment trouver une Lily faisant le trottoir dans cette ville ou il doit y avoir des milliers de Lily. Le vieux pépé tira son cellulaire et me le tendit.
- Voici sa photo. Elle n'est pas mal non ?
Décidément ce pépé était un ange. Sur la photo je voyais une brune aux yeux noisette, pas une beauté, mais d'une sensualité certaine. Je fis le transfert de la photo sur mon cellulaire. Remercia Pépé en lui passant ma carte et un billet de 50 dollars pour qu'il puisse me rappeler s'il se souvenait de quelque chose de nouveau. Je retrouvai Mick qui n'en menait pas large et sautait dans tous les sens.
- Que t'arrive-t-il mon pote
- Apparemment ils sont morts depuis 2 à 3 jours et c'est la même chronologie pour ceux d'hier soir.
- Ce n'est pas cela qui te fout dans un état pareil.
- Pierre celui ou ceux qui ont fait cela ont extrait le bébé du sein de sa mère pendant qu'elle était vivante sans anesthésie, bordel et personne n'a rien entendu….
Je profitai pour lui faire part de ma discussion avec le vieux pépé, et on décida que cette Lily était notre meilleure chance.
- Cela dit tu ne m'as encore rien dit sur notre cas d'hier soir.
- J'ai rentré les noms indiqués sur leur carte d'identité ainsi que leurs empreintes dans notre base de données et aussi lancé une identification faciale, mais je n'ai pas encore les résultats j'ai demandé à speedy de m'appeler dès qu'on aurait une correspondance.
Le cellulaire de Mick se mit à vibrer et il décrocha. A le voir, ce ne fut guerre de bonne nouvelle. Il ne répondit qu'un simple : on est en route.
Par là je supposais qu'il voulait dire nous deux.
- C'était speedy, le chef veut nous voir le plus vite que possible
- Tu m'étonnes
- Il y a aussi deux agents fédéraux
- Putain…en plus de toute cette merde, il faut qu'on se tape les feds, l'interrogatoire de nos camés n'a rien donné ?
- Non rien de rien.
- Bon, espérons que l'identification donnera quelque chose.
On grimpa dans la bagnole et direction le central, cette affaire me plaisait de moins en moins ; pourquoi le FBI vient mettre son nez dans cette histoire …..La journée s'annonce longue et ardue.
Une fois arrivé au poste, j ai demandé à Mick d'aller voir avec les experts et de lancer le signalement de la petite Lily. Moi je me suis présenté au capitaine. C'était un homme de nature colérique sur les bords, bien conservé pour ses 55 ans, de taille moyenne, cheveux coupés courts, yeux sévères avec un menton carré qui serait parfait sur le visage d'un personnage de bande dessinée.
- Salut chef, comment se portent vos ulcères. Ce n'était pas le moment de faire des blagues, mais je ne pouvais pas m'en empêcher, de plus au regard du merdier que représente ce dossier il allait me sauter de toute façon
- qu'est ce que vous foutez ?
- Moi, je récolte des couilles sans queue.
Le chef vira au rouge et de sa voix de soprano il s'époumona à s'exploser les tympans.
- Ce n'est vraiment pas le moment de me foutre en colère Pierre, j'ai le maire qui n'arrête pas de m'appeler pour avoir une idée de l'évolution de la situation, les journaux parlent déjà de tueur en série. Sans compter les fédéraux qui veulent prendre l'affaire…
- Tant mieux… Où sont-ils je leur passe le dossier avec joie.
Là, j'ai cru qu'il allait exploser. Il s'est mis à gueuler.
- Bordel Lieutenant, c'est de notre carrière qu'il s'agit et de notre honneur, je veux que vous résolviez l'affaire dans le plus bref délai.
- Et si j'échoue. J'avais dit cela avec un sourire ironique
- Ce sera la circulation à vie pour vous.....Maintenant avant que je ne parte à 20 h00, je veux avoir un rapport écrit dont vous me ferez un résumé en me le remettant.
- OK chef, où sont les feds ?
- Ils parlent avec vos deux camés d'hier soir dans la pièce 12.
- Je vais leur présenter mes honneurs
- Pierre ne faites rien que vous pourriez regretter.
- Je regrette déjà d'être flic.
Je laissai le bureau du chef et mes pas me portèrent vers le mien pour retrouver un Mick qui se déchirait les cheveux.
- Qu'as-tu encore putain de merde.
- Je viens de parler avec speedy.
- Qu'est ce que ce petit con a encore fait
- Il a un cadavre sur le bras.
- Et ...
- C'est notre seule piste qu'il a retrouvée avec sa tête se baladant à plus de dix mètres de son corps.
Je restais sans voix, regardant devant moi sans voir grand-chose. Maintenant il était nécessaire et même vital pour nous que nos macchabées soient fichés pour qu'on puisse avoir quelque chose à travailler dessus, là on était dans le noir absolu. Speedy se présenta à ce moment avec une tête digne des meilleurs films d'horreur. Speedy de son vrai nom, Sergio Gambino, italien d'origine qui parlait l'anglais à la vitesse grande V, d'où son surnom. Il avait 26 ans et venait d'être promu inspecteur et ce cadavre en était sa première affaire, d'une certaine façon il me faisait pitié, car dans ce bourbier, où on jouait notre carrière, la sienne risquait de terminer avant même de commencer.
- Salut chef, j'ai l'identification des cadavres d'hier soir.
- Raconte
- Vous n'allez pas en croire vos oreilles, notre premier est Gallen Jhon Vander, âgé de 26 ans, sans fonction connue, sans domicile connu, avec un casier long comme le Nil, bagarre, braquage à main armée et le dernier 3 ans pour détention de stupéfiant.
Peter Willy 40 ans, avocat.
- Quoi tu te paies ma tronche, que vient foutre un avocat dans ce bordel ?
- Il travaille pour Waller et Pierce, domicilié a Manhattan, père et marié à Élisabeth Damon, ils ont deux enfants. Sa spécialité : les finances. Notre dernier client est Carl Hagger, celui-ci personne ne va le regretter, rechercher pour 3 homicides, 2 en Californie et le dernier à Washington. Cela va faire 3 ans qu'on essaie de l'épingler. On peut dire que maintenant c'est fait.
Il nous fallait des résultats et vite, toutes les pistes devaient être exploitées.
- Mick, on va rendre une visite à la femme de notre avocat et ensuite on passe voir à son travail.
- Et moi… Lâcha speedy.
- Toi mon pote, je veux que tu identifies nos quatre colis d'aujourd'hui et creuses du côté de nos criminels vois s'ils ont des connexions connues ici à New York. Le rapport de la scientifique doit être sur mon bureau à mon retour, voit cela avec eux. Maintenant la Lily comment es-tu pris pour la repêcher en pièces détachées ?
- En fait ce n'est rien de sorcier, un honnête citoyen répondant au nom de Paul Patterson, chirurgien au St Philibert faisant son jogging du matin est tombé dessus en plein central Park, il a fait le 911 et comme étant de service le cas m'est tombé dessus. Pas de témoin, à première vue la tête a été arrachée à l'aide d'une machette et la mort remonte à environ 6 heures selon la coronaire.
Encore un cul-de-sac. La chance nous fuyait décidément.
- Des parents ? Tu as son vrai nom ?
- Elle s'appelle effectivement Lily, Lily sherdwood pour être plus précis, elle a été portée disparue il y a de cela 10 ans à l'époque elle en avait 15 ans ; fille unique, le père est mort peu de temps après sa naissance et la mère est morte dans un accident de la route dans la ville de Jacksonville, il y a de cela 3 ans.
- Histoire de la parfaite petite Américaine en perdition.
- Selon toute vraisemblance elle était une prostituée, mais on ne l'a jamais épinglée.
- Bon changement de plan, Mick va voir du côté des gens de la rue et du milieu si tu peux savoir qui était le protecteur de cette gentille dame trouve moi son autre adresse. Moi je vais parler à la femme de l'avocat.
Mick me fit des yeux ronds tout en me demandant
- Et les feds ?
- Ils n'ont qu'à attendre, ils sont très doués pour cela.
Je sortis du poste et une sensation étrange me traversa ainsi qu'une question, comment ce fait il que la femme de Peter ne l'ait pas déjà signalé comme porté disparu cela faisait au moins deux jours qu'il soit mort. Encore un mystère qu'il m'allait falloir résoudre.