Chereads / J'ai prétendu être la Mort, mais elle m'a tenu tête. / Chapter 112 - À l'époque, il n'était pas du genre à abandonner pour si peu.

Chapter 112 - À l'époque, il n'était pas du genre à abandonner pour si peu.

Après avoir discuté avec les anciens amis de Ryuji, Jun avait pu faire plusieurs constats : le premier était que Kaeri savait très bien jouer la comédie pour soutenir les rumeurs qu'elle propageait, et le second était que les gens se fichaient assez de tout pour ne pas aller contre elle.

Cela l'avait un peu déçu, mais pas surpris : les amis de Ryuji, comme tous les autres élèves de leur classe, ne connaissaient pas personnellement la recluse, et ne comptaient pas l'approcher dans le futur, notamment à cause des rumeurs que Kaeri avait répandues.

Jun non plus ne l'aurait pas approché en aucunes circonstances, rumeurs ou non, mais pour des raisons bien différentes. Il ne sortait pas spécialement de son cercle de personnes connues, parce qu'il ne faisait pas confiance aux gens en général, et ayant déménagé depuis à peine le début de l'année dans cette ville, il n'avait pas eu le temps de correctement juger les gens. C'était aussi sûrement pour cela qu'il était resté seul un bon moment, avant que Ryuji ne passe par hasard devant sa classe et le repère de loin. L'autre garçon, beaucoup plus social que lui, l'avait immédiatement approché et avait sympathisé avec lui. S'il n'avait pas été approché de la sorte, qui sait ce qui lui serait arrivé…

« De toute façon, elle veut jamais parler à personne, » dit l'un des garçons du groupe. « Même quand on lui parle, elle ne dit rien, alors pas la peine de se fatiguer avec elle... »

« Personnellement, je me mêle pas des affaires des filles, » dit un autre. « Et si la recluse voulait qu'on intervienne, elle aurait sûrement fini par dire quelque chose. »

Intervenir ? À propos de quoi ?

« Mieux vaut éviter de s'en mêler, » dit Hayato. « Si c'est pour encore provoquer une bagarre... »

« Ouais… Les profs nous ont déjà bien gueulé dessus à cause de ça... » Reprit l'autre garçon.

C'est comme cela que la conversation au sujet de la recluse fut terminée. En quelques secondes, tout était oublié, et les garçons parlaient à nouveau des cours de sport de l'après midi ou comment ils comptaient se rendre aux prochaines vacances dans la ville voisine pour voir des choses différentes.

Cependant, Jun ne put s'enlever la jeune fille de l'esprit. Elle continuait de manger avec calme sa brioche, et le jeune garçon se voyait lui, en début d'année.

Si Ryuji n'était pas venu vers lui, il aurait probablement été trop apeuré pour oser approcher les garçons, voire même les filles. S'il n'avait pas eu ce premier ami, il n'aurait pas eu le courage de s'ouvrir aux autres, au risque de voir certains aspects de sa vie personnelle être eux aussi révélés. Même maintenant, il restait prudent, et faisait en sorte de ne pas aborder certains sujets. Il pouvait tout de même parler avec les gens de sa classe, dans une certaine mesure, mais les gens des autres classes ne l'intéressaient pas. Il ne passait pas assez de temps avec eux pour les jauger et savoir s'ils valaient la peine de se rapprocher ou non.

Concrètement, Ryuji lui avait rendu un énorme service à Jun en l'approchant et en faisant le premier pas. Le jeune garçon ne pouvait donc pas fermer les yeux et ignorer le service que son ami lui avait demandé juste avant de partir. Cela aurait été comme rejeter tout ce que Ryuji avait fait pour lui ; et avec détermination, il regarda la jeune fille. Quand Ryuji avait parlé d'elle, il avait eu un petit sourire et une expression béate. Il devait vraiment avoir eu des sentiments pour elle, finalement, et peut-être avait-il vraiment pu avoir une conversation avec cette fille.

Résolu, Jun s'avança vers elle.

Il ferait l'effort de lui parler, au moins une fois.

Enfin… C'est ce qu'il s'était dit, parce qu'une fois arrivé devant elle, il était resté silencieux, à la regarder. Il pouvait sentir sur eux plusieurs regards indiscrets, et même entendre quelques éclats de rire étouffés. Il semblait que les élèves de sa classe se moquaient ouvertement de la jeune fille, et ne se préoccupaient même plus d'être entendus. C'était peut-être à cela que les anciens amis de Ryuji faisaient référence, quand il parlaient « d'affaires de filles » dans lesquelles ils ne devaient pas intervenir.

« Regardez-la, celle-là, elle a encore réussi à attirer un garçon jusqu'à elle... » Dit une des filles à quelques rangs de là.

Malgré la distance, on pouvait l'entendre très clairement, signe que la fille qui venait de parler avait fait exprès de parler à voix haute pour que la cible de sa moquerie l'entende parfaitement.

« Et dire que Ryuji s'est fait embobiner par elle... » Dit une autre fille, également à voix haute.

Jun serra les dents. Il n'aimait pas qu'on médise Ryuji en sa présence.

Sur le moment, il ne sut ce qui lui prit, et avant même qu'il puisse s'arrêter, sa main était tendue vers la jeune fille, et il prononçait ces mots :

« Hé, soyons amis ! »

Au départ surprise par la voix, la jeune fille avait ensuite lancé des regards inquiets et brefs vers sa main à lui. Comme si elle doutait de ce qu'elle voyait et de ce qu'elle entendait. Elle ne levait même pas les yeux vers son visage à lui, ce qui vexa un peu Jun sur le moment. Puis, elle avait alors rebaissé les yeux vers son jus de pomme et sa brioche entamée, comme si Jun n'avait jamais été là pour elle. Cela ne découragea pas Jun pour autant.

« Soyons amis ! » Répéta-t-il avec confiance et aplomb.

Même si elle ne le regardait pas, il ferait en sorte d'initier la conversation et de lui parler. Même avec les autres rigolant à côté. Ce n'était pas les moqueries qui le repousseraient.

Toutefois, il n'avait pas prévu qu'un des garçons de sa propre classe le chercherait. Il avait sûrement dû faire le tour des autres classes à l'étage, avant de s'aventurer dans celle-ci, et quand il vit enfin Jun, il se pressa d'entrer dans la pièce et d'aller vers lui.

« Qu'est-ce que tu fais, Jun ? » Demanda-t-il.

C'était parfait, comme ça. Il pouvait affirmer avec confiance ses intentions.

« Ah, j'essaie de devenir ami avec Hana, » dit-il avec entrain.

« Avec… Elle ? » Dit son camarade de classe, confus.

« Quoi, je devrais pas ? » Répliqua innocemment Jun.

Son camarade de classe était lui aussi au courant de toutes les rumeurs au sujet de la recluse. Qui ne l'était pas, dans ce lycée où l'information circulait aussi vite que sur les réseaux sociaux ? Le garçon aux côtés de Jun pensa que ce dernier avait dû manquer l'information, car il se donna pour objectif de le mettre au courant.

« Tu sais pas qui c'est ? C'est une mythomane qui vole les petits amis des autres, parce qu'elle se croit meilleure que tout le monde. » Dit-il sans douter une seule seconde de ce qu'il disait. « En plus de ça, elle accuse des gens juste pour leur attirer des ennuis avec les professeurs. Tu devrais vraiment l'éviter. »

Ah. Il semblait que la rumeur avait encore été modifiée et amplifiée, depuis la dernière fois qu'il avait vérifié. Mais Jun n'était encore une fois pas impressionné. Il pouvait très bien juger les gens lui-même, avec ou sans des rumeurs à leur sujet.

« Hum, tu dis qu'elle ment sans arrêt ? Comment tu sais ça ? » L'interrogea Jun.

« Comment je sais ça ? » Répéta avec confusion l'autre garçon. « C'est ce que tout le monde dit, alors ça doit être vrai. »

« Mais est-ce que tu lui as demandé à elle, si c'était vrai ? » Rétorqua Jun.

Cela sembla mettre dans l'inconfort son camarade de classe, car il ne parla pas pendant un moment. Avec une expression gênée, il se pencha vers Jun pour lui chuchoter quelque chose et que personne d'autre ne l'entende ; malgré les regards qui étaient tous braqués vers lui. Cela devait d'ailleurs le mettre mal à l'aise.

« Enfin… J'me fiche de ce que tu fais sur ton temps libre, hein, mais quand t'as fini, tu peux venir nous aide avec un monstre à abattre ? On a besoin de tes pièges. » Lui murmura-t-il.

Puis, satisfait d'avoir délivré le message, le garçon s'éloigna pour sortir de la salle et regagner leur classe.

Jun avait presque failli oublier que les otakus de sa classe étaient plus inquiétés par l'xp qu'ils recevaient contre une quête, que par le temps qu'il ferait demain ; d'où son manque d'insistance.

« Qu'est-ce que tu en dis toi, Takeuchi-san ? » Demanda-t-il alors à la recluse en face de lui.

À la mention de son nom de famille, la jeune fille leva un regard surpris vers lui. Elle devait sûrement se demander comment il savait son nom, alors qu'ils ne s'étaient jamais parlé avant. Peut-être était-elle aussi surprise de se faire interpeller aussi directement, car elle fixait Jun de ses yeux tremblants.

Jun se doutait aussi qu'il avait prit la jeune fille de court, et qu'elle ne savait pas trop quoi répondre dans pareille situation. Il entreprit alors de mener la conversation.

« Hein ? Qu'est-ce que t'en dis ? C'est vrai ce qu'on dit à ton sujet ? » Dit-il en la regardant amicalement.

Face à ces paroles, Hana fronça les sourcils. Il semblait qu'elle ne comprenait pas pourquoi Jun lui posait une question pareille. Pour elle, c'était sûrement grotesque de lui demander directement, alors que les rumeurs faisaient déjà le travail. Elle ne comptait probablement pas lui répondre non plus, sachant que c'était la première fois qu'ils se parlaient, et Jun prit cela comme une opportunité à saisir. Il venait de prendre une décision. Il ne laisserait pas cette fille toute seule, même si elle refusait de lui parler. Il ferait comme Ryuji avait procédé, et lui parlerait jusqu'à ce qu'elle lui réponde.

« Dans ce cas, soyons amis ! » Déclara-t-il.

Sa déclaration eut pour effet de provoquer des ricanements dans la classe, mais il s'en fichait.

Hana, quant à elle, écarquilla les yeux de surprise, avant de les baisser et de tourner sa tête vers son bureau. C'était sûrement la seule interaction qu'il pourrait avoir avec elle pour le moment, mais Jun savait se montrer patient pour obtenir ce qu'il voulait. Lentement mais sûrement, il insisterait jusqu'à ce qu'elle se décide à lui parler ; et sans plus attendre, regagna sa propre classe.

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