Chereads / J'ai prétendu être la Mort, mais elle m'a tenu tête. / Chapter 60 - L'espace d'un instant, elle m'a paru familière.

Chapter 60 - L'espace d'un instant, elle m'a paru familière.

Le temps qu'Hana rentre dans le hall de Marline, la pluie avait commencé à tomber à l'extérieur, détrempant tout et refroidissant l'air.

Se précipitant à l'intérieur pour éviter l'eau qui tombait à grosses gouttes, elle s'arrêta toute essoufflée juste à côté des portes automatiques.

Dans sa hâte, ses cheveux trempés avait en partie recouvert son visage ; dissimulant momentanément ses yeux et son nez, et lui masquant la vue.

« Hana-chan ? » Dit une voix étonnée.

La jeune femme leva la tête et écarta légèrement ses mèches de cheveux mouillées pour voir qui venait de l'appeler, et vit que Mari s'était dirigée vers elle.

« Qu'est-ce qui s'est passé ? Tu es toute trempée ! » S'inquiéta la femme plus âgée en venant à sa rencontre et en posant ses mains sur les bras d'Hana.

« Je n'avais pas de parapluie... » Répondit avec gêne Hana.

« Tu vas attraper froid comme ça ! » Continua Mari. « Tu devrais te sécher les cheveux avant de rentrer chez toi, et récupérer un parapluie au bureau de la sécurité... »

« Le bureau de la sécurité ? »

« Oui, au premier étage. Ils ont pleins de parapluies que les gens ont oublié et que tu peux emprunter, » expliqua Mari. « Mais dis-moi, tu ne reviens que maintenant ? »

Hana hocha de la tête, peu sûre de savoir ce que l'autre femme voulait dire par cette question.

« Chiho est déjà rentrée chez elle depuis une petite heure. Elle ne t'as pas prévenue ? »

« Non… Et je n'avais pas son numéro de téléphone... » Répondit Hana.

« Qu'est-ce qu'elle fabrique, à laisser une interne seule dehors aussi tard… La nuit n'est pas encore tombée, mais avec la pluie, on pourrait le croire... » Maugréa Mari avec un air insatisfait.

Puis, Mari adopta un sourire réconfortant.

« Je rentre déjà, mais Ren et Yuuto sont encore en haut, si jamais tu veux les voir. » Dit-elle en saluant de la main l'autre femme.

Beaucoup d'employés étaient sûrement rentrés plus tôt à cause du mauvais temps, seuls ceux faisant des heures supplémentaires restant sur place.

Hana lui retourna sa salutation, et tandis que Mari quittait le hall, la jeune femme se dirigea vers les portiques de sécurité en laissant derrière elle une traînée de gouttes d'eau sur le sol brillant et net. Ensuite, elle prit les escalators menant au premier étage, et entrant dans le bureau de la sécurité, leur demanda si elle pouvait emprunter un parapluie pour la nuit.

Un des gardes lui fit signe de fouiller dans une grande corbeille en métal où plusieurs parapluies étaient proprement rangés.

Nul doute qu'ils avaient dû être abandonnés ou oubliés il y a longtemps et jamais réclamés ni utilisés, au vu de la couche de poussière qui en recouvrait certains. Elle s'empara d'un parapluie gris foncé, et remerciant les deux employés de la sécurité qui continuaient de surveiller un mur couvert d'écran diffusant les images de vidéosurveillance de tout le bâtiment, elle décida de prendre l'ascenseur pour aller récupérer son écharpe ; restée posée sur le dossier de sa chaise.

Il allait sûrement faire aussi froid que ce matin, ou peut-être plus, avec l'humidité ambiante qui s'était imposée, et si elle souhaitait éviter d'attraper un rhume, cette écharpe ne serait pas superflue.

Elle entra donc dans l'ascenseur – ses vêtements laissant échapper encore des gouttes d'eau - et appuya sur le bouton du huitième étage.

Il fallut quelques secondes pour rejoindre sa destination, personne n'ayant fait s'arrêter la cabine pendant son trajet, et tandis que les portes s'ouvraient, elle sortit avec précipitation avant de percuter quelqu'un.

Elle poussa un petit cri surpris, n'ayant pas vu que quelqu'un venait en face d'elle à cause des mèches de cheveux humides encore plaquées sur son front et devant ses yeux.

Avec confusion, elle écarta les cheveux qui lui obstruaient la vue en les poussant sur les côtés, et vit avec étonnement que la personne qu'elle avait percuté de plein fouet était le Chef Kobayashi.

Ce dernier la regardait également avec un air confus, sans dire un mot, et Hana se demanda si elle n'avait pas fait une autre bêtise, ou mis en colère l'homme sans s'en rendre compte.

Cependant, pour Shinsuke, c'était plus la stupeur qui l'avait momentanément immobilisé ; le choc physique soudain résultant de leur collision s'étant mêlé au choc émotionnel de ce qu'il avait cru voir devant lui.

Sur le moment, il n'avait pas reconnu Shinohara Hana, ne voyant qu'un visage dont la partie haute était dissimulée par de moyens et longs cheveux noirs. Ce simple élément avait pourtant réussi à le surprendre : il avait trouvé ce visage étrangement familier, et ne comprenait pas pourquoi.

Cette tête aux cheveux mouillés, ce menton fin, ces petites lèvres délicates… Il avait la sensation qu'il avait déjà vu cela quelque part ; mais où ?

Aussitôt s'était-il posé cette question, qu'un souvenir avait fait irruption dans son esprit, en même temps que son bras droit s'était mis à lui faire encore plus mal. Cette jeune femme ressemblant étrangement à la jeune fille qu'il avait rencontrée il y a cinq ans de cela ; et cela le troubla.

Shinsuke pensait l'avoir soudainement eue devant lui, ne comprenant pas comment elle avait pu se retrouver ici ; et seule Hana dévoilant elle-même son visage put le sortir de cette étrange illusion.

« Chef ? » Dit doucement Hana.

Elle regardait avec crainte la tâche d'humidité qui s'était formée à l'avant du costume marron de l'homme, là où sa tête mouillée avait heurté son torse ; et craignait qu'il ne lui crie dessus.

Face au silence de son supérieur hiérarchique, elle se retrouva bien vite déstabilisée.

« Chef Kobayashi ? » Appela-t-elle une nouvelle fois avec une expression inquiète.

Le fait d'entendre son nom dût certainement le sortir de ses pensées, car il arrêta enfin de regarder le vide pour la dévisager, elle.

Il n'aurait pas osé l'admettre, mais cette soudaine vision avait choqué Shinsuke ; le replongeant dans les événements qui s'étaient produits cinq ans en arrière. Malgré lui, il s'était souvenu de la pluie s'abattant avec la force d'un torrent sur les passants et les voitures, et de la raison pour laquelle il détestait tant ce gente de météo. C'était la même raison qui lui causait toujours des douleurs dans le bras droit, quand le temps se mettait à changer.

Inconsciemment, il posa sa main gauche sur son avant bras droit. Même s'il ne sentait rien à travers le tissu de sa chemise et de sa veste, il savait parfaitement que la large cicatrice qui parcourant son bras de l'épaule au poignet était toujours là.

'Qu'est-ce que vous faisiez pendant ce temps !?'

'Si vous étiez arrivé à l'heure, rien de tout ça ne se serait produit !'

Les reproches qui lui avaient été faits à l'époque tournoyaient dans son esprit, mais les voix qui les prononçaient se mirent à changer pour imiter la sienne.

'Qu'est-ce que tu faisais, Kobayashi Shinsuke ?'

'C'est de ta faute. Entièrement de ta faute.'

'Tu n'aurais pas dû te mêler de ce qui ne te regardais pas !'

Sa propre voix le tourmentait, et lui causa une soudaine migraine.

« Tout… Va bien ? » S'enquit Hana.

Cette fois, elle était plus inquiète par le comportement inhabituel de l'homme plus âgé en face d'elle, que pour son propre sort. Il semblait vraiment dans un autre monde, l'espace d'un instant ; comme s'il s'était perdu dans ses propres pensées.

« S… Shinohara ? » Dit-il d'une voix enrouée, quelques secondes plus tard.

La jeune femme en face de lui hocha silencieusement de la tête, pensant que parler plus ne ferait que brusquer l'homme qui s'adressait à elle.

Shinsuke fronça les sourcils, réalisant qu'il s'était mépris sur l'identité de la personne lui faisant face, et avait paniqué pour rien.

Ce n'était pas quelque chose qui lui arrivait souvent, surtout avec sa manie d'éviter de traîner dehors par temps pluvieux ; mais les rares fois où cela se produisait, il avait toujours du mal à parler et à reprendre ses esprits. Il se murait dans un mutisme dépressif, et ne voulait plus qu'une seule chose : rester seul.

D'un air absent, il poussa doucement la jeune femme sur le côté, et la dépassant, il entra sans un bruit dans l'ascenseur.

Hana se laissa faire, et observa l'homme plus âgé appuyer sur un des boutons du panneau de contrôle, puis les portes se refermer pour les séparer tous les deux.

Inquiète et troublée, Hana jeta un œil aux numéros qui décroissaient au-dessus des portes de l'ascenseur, puis décida de se tourner pour continuer sa route vers son bureau.

Comme Mari l'avait dit, Ren et Yuuto étaient encore là, à être tellement concentrées à taper du texte sur leurs claviers qu'ils ne remarquèrent même pas leur collègue en train de s'approcher d'eux.

Il fallut qu'elle entre dans leur champ de vision en récupérant son écharpe, toujours posée sur sa chaise, pour que les deux hommes la remarquent enfin.

« Shinohara-san ? Vous n'est pas encore rentrée ? » Demanda Ren avec une pointe d'étonnement.

« Tu es revenue nous voir exprès, pas vrai ? » S'exclama Yuuto.

« J'avais juste oublié mon écharpe, » s'excusa-t-elle en montrant le vêtement pour couper court l'enthousiasme de Yuuto. « Vous compter rester longtemps ? »

« Hasami-san est partie plus tôt parce qu'elle avait déjà quelque chose de prévu, sans quoi elle serait probablement restée avec nous, » expliqua Ren. « Mais vu qu'elle n'est pas là, je pense rester jusqu'à au moins 20h. »

« Idem ! » Renchérit Yuuto. « Même si ça me chagrine un peu de voir Mari partir aussi vite… À croire qu'elle a un petit ami... »

À ces mots, Ren toussa bruyamment pour montrer son mécontentement, et Yuuto leva un sourcil.

« Quoi ? J'ai encore faux ? » Demanda-t-il.

« Je ne penses pas que vous ayiez besoin de le savoir, Yamamoto-san, » le contra Ren.

« Pourquoi ? C'est un secret d'État ? » Le provoqua Yuuto.

« Non. Juste une information inutile pour votre petit cerveau, » le réprimanda Ren.

« P… Petit cerveau ?! Alors que j'ai les meilleurs chiffres de ventes de ce semestre?! » S'offusqua l'autre homme. « T'entends ça, Shinohara-chan ? »

« Je dis juste que vous avez une vision trop étroite des choses. Je n'attaque en rien vos capacités mentales, » se défendit Ren.

Non loin de là, la jeune femme ne les écoutait déjà plus.

Elle réfléchissait à son altercation quelques minutes avant avec Kobayashi Shinsuke, et se demandait pourquoi il avait fait une tête pareille en la voyant arriver.

Qu'avait-il bien pu voir en elle pour se montrer soudainement aussi vulnérable et blessé ?

Ça ne lui ressemblait pas du tout, comme attitude. Ni à son tempérament actuel, ni à son comportement de l'époque, et cela continua de troubler Hana tandis qu'elle prenait le chemin du retour vers son appartement sous une fine pluie.

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