Chapitre 7
Le soleil d'Ibiza baignait encore la villa d'une lumière dorée, mais une tension palpable flottait dans l'air. Après la tempête médiatique du matin, Elena avait passé la journée à éviter Alejandro, trouvant refuge dans les recoins de la villa ou sur la plage privée. Pourtant, l'heure du retour approchait, et avec elle, l'inévitable confrontation.
Assise sur un transat, Elena observait l'horizon. La mer scintillait sous les derniers rayons du soleil, et une brise chaude caressait sa peau. Elle sirotait un cocktail, espérant calmer le tumulte de ses pensées.
Mais bien sûr, Alejandro n'allait pas lui laisser ce luxe bien longtemps.
— Tu comptes m'éviter jusqu'à notre départ ?
Sa voix grave la fit sursauter. Elle tourna la tête et le vit, vêtu d'un short blanc et d'une chemise légèrement entrouverte, une bière à la main. Il s'installa sur le transat voisin, les yeux plissés d'amusement.
— Je ne t'évite pas, répliqua-t-elle en haussant les épaules.
— Ah bon ? Il haussa un sourcil. Donc c'est un hasard si, depuis ce matin, chaque fois que j'entre dans une pièce, tu en sors ?
Elena détourna les yeux vers la mer.
— On a juste eu une… mauvaise journée.
— Ou une très bonne nuit, selon le point de vue.
Elle soupira. Toujours aussi arrogant…
— Alejandro, on rentre à Madrid demain. On doit être professionnels et gérer cette situation intelligemment.
— Professionnels ? Il rit doucement. Tu veux dire, comme deux parfaits inconnus qui se contentent de sourire pour les caméras ?
— Exactement.
Il la fixa un instant, puis secoua la tête en souriant.
— Dommage. Je trouvais que ça devenait intéressant.
Elena sentit son cœur rater un battement.
— Ce qui s'est passé hier soir… c'était une erreur.
Alejandro posa sa bière sur la table entre eux et se pencha légèrement vers elle.
— Tu étais bien plus convaincue que ça hier soir, Moreau.
Elena croisa les bras, refusant de céder à la provocation.
— J'avais bu.
— Moi aussi. Mais bizarrement, je me souviens parfaitement du goût de tes lèvres.
Son ton était bas, presque intime, et elle sentit une chaleur désagréable lui monter aux joues.
— Tu joues avec le feu, Alejandro.
Il haussa les épaules.
— Ça tombe bien, j'aime les défis.
Elena se leva brusquement.
— J'ai besoin d'air.
Elle s'éloigna vers la plage, mais elle savait qu'elle n'échappait pas vraiment à lui.
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Le soir venu, le personnel de la villa avait préparé un dernier dîner sur la terrasse, avec une table élégamment dressée sous un ciel étoilé. Des bougies parsemaient la balustrade, et une douce musique flottait dans l'air.
Elena s'était résignée à partager ce moment avec Alejandro. Après tout, ils devaient maintenir les apparences.
Il l'attendait déjà, vêtu d'un costume décontracté. Lorsqu'il la vit approcher, il se leva et tira sa chaise, un sourire en coin.
— Tu es magnifique.
Elle leva un sourcil.
— Arrête de jouer avec moi.
— Et si j'étais sincère ?
Elle choisit de ne pas répondre et s'installa. Le dîner se déroula dans un calme relatif, entre quelques échanges taquins et des silences remplis de sous-entendus.
Puis, au moment du dessert, Alejandro posa sa fourchette et la fixa.
— Pourquoi tu te bats autant contre ce que tu ressens ?
Elena resta interdite.
— Je ne me bats pas, parce que je ne ressens rien.
— Tu refuses juste d'admettre qu'il y a quelque chose entre nous.
Elle posa ses couverts lentement.
— Écoute-moi bien, Alejandro. Ce mariage est un contrat. Rien de plus. Peu importe ce qui s'est passé hier ou avant-hier, ça ne change rien.
Il sourit.
— On verra.
Elle soupira. Ce mec est infernal…
Mais au fond, elle savait qu'il avait semé le doute en elle.
Et à Madrid ça va allait être encore plus compliqué qu'elle ne l'avait imaginé.
Le soir venu, ils font un dernier dîner sous les étoiles.
Le dîner touchait à sa fin. Installés sur la terrasse de leur villa, Alejandro et Elena profitaient de leur dernière soirée sur l'île. Les vagues en contrebas venaient s'échouer doucement contre les rochers, apportant une brise salée agréable.
Elena poussa son assiette légèrement sur le côté et se cala contre le dossier de sa chaise.
— Je dois admettre que le chef a fait un excellent travail.
Alejandro, qui sirotait son verre de vin, leva un sourcil, amusé.
— Enfin un compliment, Moreau. Je devrais le noter quelque part.
Elle leva les yeux au ciel.
— Ne te méprends pas, c'est le chef que je félicite, pas toi.
Il esquissa un sourire et posa son verre.
— Dommage, j'aurais aimé croire que tu commençais à apprécier ma compagnie.
Elena croisa les bras, le regardant avec défi.
— Profite bien de cette illusion, Vasquez. Elle ne durera pas.
Alejandro rit légèrement et s'étira dans sa chaise.
— On verra.
Le silence s'installa un instant, uniquement troublé par le bruit des vagues. Malgré leurs joutes verbales, il y avait une certaine facilité dans leur dynamique. Comme s'ils s'étaient habitués à se chercher sans jamais réellement se heurter.
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Elena se réveilla avec cette sensation étrange d'être en transit, entre deux mondes. L'île d'Ibiza, avec son soleil éclatant et son air de vacances, contrastait avec Madrid, où les apparences et la presse allaient reprendre leurs droits.
Après une douche rapide, elle s'habilla d'un jean taille haute et d'un chemisier crème, une tenue confortable pour le voyage. En descendant, elle trouva Alejandro déjà prêt, vêtu d'un pantalon beige et d'une chemise bleu nuit, assis sur le canapé, son téléphone à la main.
— Tu es enfin prête ? demanda-t-il sans lever les yeux.
— Je ne suis pas aussi lent que toi le matin.
Il esquissa un sourire moqueur avant de se lever.
— Le chauffeur nous attend. On y va.
À l'aéroport privé, le jet d'Alejandro les attendait, prêt à décoller. Contrairement à la première fois où elle avait pris un vol de ce genre, elle ne ressentait plus cette légère fascination. Après tout, travailler avec le Real Madrid lui avait déjà permis d'expérimenter ce genre de luxe.
L'équipage leur souhaita la bienvenue avec un professionnalisme impeccable. Alejandro la laissa monter en première, posant une main distraite dans le bas de son dos, un geste qui l'a fit un peu frisonner.
À l'intérieur, Elena s'installa sur l'un des fauteuils en cuir beige, décrochant son téléphone pour consulter les dernières nouvelles.
— Tu veux quelque chose ? demanda Alejandro en ouvrant le minibar.
— Un café.
— Tu es décidément la personne la plus ennuyeuse que je connaisse.
— Et toi la personne la plus agaçante. On est quittes.
Il rit légèrement et lui tendit une tasse avant de s'installer face à elle.
— Tu es prête à affronter la presse madrilène à notre retour ?
Elena souffla sur son café et haussa les épaules.
— Ce n'est pas comme si j'avais le choix.
Alejandro la fixa un instant avant de poser sa tasse sur la table.
— Si ça devient trop difficile, tu me le dis.
Elle fronça les sourcils.
— Pourquoi ? Tu serais inquiet pour moi, Vasquez ?
Il haussa un sourcil, un sourire énigmatique aux lèvres.
— Je suis inquiet pour notre contrat. Tu es mon épouse aux yeux du monde, et j'ai besoin que tu joues ton rôle à la perfection.
Elena roula des yeux avant de détourner le regard vers le hublot.
Madrid les attendait, avec tout ce que cela impliquait.
Le jet privé atterrit en douceur sur le tarmac de l'aéroport de Madrid. À peine les roues avaient-elles touché le sol qu'Elena sentit son téléphone vibrer dans sa main. Des notifications en cascade défilaient sur son écran : articles, photos, commentaires… Leur voyage à Ibiza n'était pas passé inaperçu, et leur baiser au club faisait encore parler.
— On dirait que notre retour est attendu, fit-elle remarquer en relevant la tête vers Alejandro.
Il jeta un bref coup d'œil à son propre téléphone, haussa les épaules avec indifférence et rangea l'appareil dans la poche intérieure de sa veste.
— Laisse-les parler. Ça ne fait que renforcer notre crédibilité.
Elena retint un soupir et attacha sa ceinture alors que le jet roulait jusqu'au hangar privé. L'équipage ouvrit la porte, laissant entrer l'air madrilène, plus frais que celui d'Ibiza.
À l'extérieur, un SUV noir aux vitres teintées les attendait. Alejandro descendit le premier, remerciant brièvement le pilote avant de lui faire un signe de tête. Elena suivit, ajustant la lanière de son sac sur son épaule avant de monter à l'arrière du véhicule.
La voiture quitta l'aéroport en direction du quartier ultra-privé de La Finca, où résidaient les plus grandes stars du football et les hommes d'affaires influents de Madrid. Alejandro habitait à quelques rues de la demeure de Sergio Ramos. Elle connaissait bien ce quartier pour y avoir déjà été invitée à des événements en tant qu'avocate collaborant avec le Real Madrid.
Les rues étaient calmes, bordées de villas modernes aux immenses portails sécurisés. Elena regarda le paysage défiler, sentant une étrange sensation l'envahir. Ce n'était pas la première fois qu'elle venait ici, mais cette fois, c'était différent. Cette fois, c'était chez elle.
Elle tourna la tête vers Alejandro, qui semblait parfaitement détendu, comme si ce moment était anodin.
— Tu réalises que c'est officiel, maintenant ? dit-elle en croisant les bras.
Il tourna la tête vers elle, un sourire amusé aux lèvres.
— Officiellement mariés, officiellement installés. Tout se passe comme prévu.
— C'est effrayant à quel point tu prends ça avec détachement.
Alejandro haussa un sourcil.
— Tu préférerais que je joue le mari éperdument amoureux et que je t'écrive des poèmes ?
Elle secoua la tête avec un rire sarcastique.
— Non merci, je préfère encore ton cynisme.
Le chauffeur ralentit devant un portail imposant, équipé d'un système de sécurité dernier cri. Alejandro appuya sur un bouton de son téléphone, et les portes s'ouvrirent lentement, révélant une vaste allée menant à une villa contemporaine aux lignes épurées.
Elena observa l'endroit avec un mélange d'admiration et de scepticisme.
— J'ai l'impression que c'est plus grand que la dernière fois que je suis venue, murmura-t-elle encore impressionné.
Alejandro sourit.
— Tu vas t'y habituer.
Une fois la voiture garée, ils descendirent et entrèrent dans la demeure. Le hall était spacieux, décoré avec goût, mêlant le marbre blanc, le bois sombre et des touches minimalistes. Elena posa son sac sur une console et fit un tour d'horizon.
— Bien. Où est ma chambre ? demanda-t-elle en croisant les bras.
Alejandro s'appuya contre le mur, les mains dans les poches.
— Notre chambre est à l'étage.
Elle leva les yeux au ciel.
— Je parlais de la mienne.
Il haussa un sourcil, amusé.
— On en discutera après. En attendant, tu dois récupérer des affaires dans ton appartement.
Elena fronça les sourcils.
— Tu veux que j'emménage ce soir ?
— Ça fait partie du contrat, Moreau. Tu es censée vivre ici avec moi, et tu sais très bien que si la presse découvre qu'on ne partage pas le même toit, toute notre mascarade tombe à l'eau.
Elle soupira et se passa une main dans les cheveux.
— D'accord, mais je choisis ce que j'amène. Pas question que tu me forces à adopter ton style de vie.
Alejandro sourit en coin.
— J'ai hâte de voir ce que tu considères comme essentiel.
Elena lui lança un regard noir avant de saisir son sac.
— Tu viens avec moi ?
— Je te laisse une heure. Si tu n'es pas revenue d'ici là, je viendrai te chercher moi-même.
Elle souffla d'agacement et se dirigea vers la porte.
— Ne tente même pas.
Alejandro la regarda partir, un sourire énigmatique au coin des lèvres.
Elena roulait des yeux en montant dans le SUV qui la conduirait à son appartement. Elle ne savait pas ce qui l'agaçait le plus : le fait qu'Alejandro décide pour elle, ou le fait qu'elle ait accepté sans discuter.
Elle tapota nerveusement sur l'accoudoir en regardant Madrid défiler à travers la vitre. Son appartement était son sanctuaire, un espace où elle n'avait de compte à rendre à personne. Maintenant, elle allait devoir cohabiter avec Alejandro Vázquez, un homme aussi arrogant que séduisant.
Elle poussa un soupir.
— Ça va être un enfer.
Lorsqu'elle arriva devant son immeuble, elle descendit rapidement et pénétra dans le hall. Son appartement était situé au dernier étage, offrant une vue magnifique sur Madrid. En entrant, elle sentit un pincement au cœur.
Tout ici respirait son indépendance : ses livres entassés sur la table basse, son ordinateur encore ouvert sur des dossiers d'affaires, les coussins en désordre sur son canapé. Cet endroit était son refuge.
Elle attrapa une valise et commença à y ranger l'essentiel : quelques vêtements, ses affaires de toilette, ses dossiers les plus importants. Pas question d'emmener toute sa garde-robe. Elle refusait de donner l'impression qu'elle s'installait définitivement chez Alejandro.
Au bout d'une trentaine de minutes, son téléphone vibra.
Alejandro : Ton temps est écoulé. Tu veux que je viennes te chercher ?
Elle serra la mâchoire avant de répondre.
Elena : J'arrive.
Elle referma sa valise et jeta un dernier regard à son appartement. Elle reviendrait. Elle en était certaine.
Le trajet jusqu'à La Finca se fit en silence. Alejandro l'attendait sur le perron, adossé contre la porte d'entrée, un sourire moqueur sur les lèvres.
— Tu as pris ton temps.
— Je voulais m'assurer de ne pas oublier quelque chose, répliqua-t-elle sèchement en passant devant lui.
Il haussa un sourcil en apercevant la taille de sa valise.
— C'est tout ? Je pensais que tu allais faire livrer plusieurs cartons.
— J'ai pris ce qui me semblait nécessaire.
— Intéressant, murmura-t-il en refermant la porte derrière elle.
Elena traîna sa valise jusqu'au salon, mais Alejandro l'interrompit.
— L'étage, Moreau. Ta chambre est là-haut.
Elle le foudroya du regard.
— Tu veux dire ta chambre.
Il eut un sourire en coin.
— C'est aussi la tienne maintenant.
— On avait dit que je choisirais mon espace.
— Et tu peux le faire, tant que c'est dans notre chambre.
Elle croisa les bras, exaspérée.
— Tu comptes vraiment m'imposer ça ?
— Disons que si quelqu'un passe à l'improviste et découvre que nous dormons séparément, ça pourrait éveiller des soupçons.
Elena serra les dents.
— Très bien. Mais ne compte pas sur moi pour jouer la femme amoureuse entre ces murs.
Alejandro rit doucement avant de hausser les épaules.
— On verra bien.
Elena monta à l'étage et ouvrit la porte de la chambre principale. La pièce était spacieuse, décorée avec goût dans des tons neutres. Le lit king-size trônait au centre, avec une immense baie vitrée donnant sur la piscine et le jardin.
Elle laissa tomber sa valise près du dressing et s'adossa au mur. Elle était chez lui, mais elle n'avait pas l'intention de se sentir à l'aise.
Alejandro entra à son tour, observant sa posture rigide.
— Détends-toi, Moreau. Tu es chez toi.
Elle le fixa avec froideur.
— C'est ce que je crains.
Alejandro sourit, amusé par son entêtement.
— Tu veux que je t'aide à déballer tes affaires ?
— Non merci. Je m'en sortirai.
— Parfait. Dans ce cas, tu devrais aller te changer. Nous avons un dîner ce soir.
Elle plissa les yeux.
— Un dîner ? Sitôt ? Avec qui ?
— Des coéquipiers. Et leurs femmes.
Elena sentit un frisson lui parcourir l'échine.
— Donc, je vais devoir jouer mon rôle dès ce soir ?
Alejandro s'approcha légèrement, plongeant son regard dans le sien.
— C'est ce que font les couples mariés, non ?
Elle soutint son regard avant de détourner les yeux.
— Ça va être une longue soirée.
Il rit doucement avant de sortir de la chambre.
— Bienvenue dans ta nouvelle vie, mi amor.
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Elena fixa son reflet dans le miroir. Elle avait opté pour une robe noire élégante, sobre mais sophistiquée. Pas trop tape-à-l'œil, mais assez classe pour s'intégrer au milieu des femmes de footballeurs. Elle se passa une main dans les cheveux, inspirant profondément. C'était son premier vrai test dans ce mariage arrangé.
Lorsqu'elle descendit au salon, Alejandro était déjà prêt. Il portait un costume bleu marine parfaitement taillé, une montre de luxe à son poignet. Il la regarda de haut en bas, un sourire appréciateur au coin des lèvres.
— Tu es superbe.
Elle haussa un sourcil.
— Toi aussi, tu fais des efforts.
— Toujours. Surtout quand il s'agit de paraître parfait aux yeux du monde.
Elle sentit une pointe de sarcasme dans sa voix, mais ne releva pas.
— Alors, qui sera là ce soir ? demanda-t-elle en attrapant sa pochette.
Alejandro ajusta ses boutons de manchette avant de répondre.
— Quelques coéquipiers et leurs épouses. Antonio et Laura, Luka et Vanja, Dani et Daphne…
Elena hocha la tête. Elle connaissait certains d'entre eux de loin. Mais ce serait différent de les côtoyer en tant que "madame Vázquez".
Alejandro lui tendit la main.
— Prête ?
Elle hésita une fraction de seconde avant de la prendre.
— Autant que possible.
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Le restaurant choisi était un établissement chic de Madrid, privatisé pour l'occasion. Dès qu'ils descendent de la voiture, les flashs des paparazzis illuminèrent la nuit. Elena sentit la pression monter en elle, mais Alejandro resserra légèrement sa prise sur sa main.
— Souris, Moreau, murmura-t-il près de son oreille. Ce serait dommage que notre belle histoire d'amour paraisse fausse.
Elle força un sourire tandis qu'ils traversaient l'entrée sous les regards curieux.
À l'intérieur, l'ambiance était plus détendue. Les joueurs et leurs compagnes discutaient autour de coupes de champagne, riant de temps en temps. Antonio Rüdiguer les accueillit avec un sourire chaleureux.
— Alejandro ! Elena ! Content de vous voir.
Il la salua avec une accolade amicale.
— Ça fait un moment qu'on ne t'a pas vue, Elena.
— Le boulot me prend pas mal de temps, mais c'est un plaisir d'être là.
Laura Rüdiguer, la femme d'Antonio, lui lança un regard complice.
— Et maintenant, tu es officiellement l'une des nôtres. Félicitations pour votre mariage.
Elena esquissa un sourire poli.
— Merci, Laura.
Alejandro passa un bras possessif autour de sa taille.
— Elle fait de moi l'homme le plus chanceux du monde.
Elena lui lança un regard en coin. Il jouait son rôle à la perfection.
Le repas se déroula sous un flot constant de conversations et de plaisanteries. Elena gardait un sourire maîtrisé, répondant aux questions avec assurance. Elle savait que chaque regard était une évaluation, chaque mot analysé.
À un moment, Vanja Bosnić se pencha vers elle.
— Alors, comment ça se passe, la vie avec un joueur du Real Madrid ?
Elena afficha un sourire amusé.
— Intense.
— Oh, crois-moi, on connaît toutes ça, rit Daphne Carvajal.
Alejandro, assis à côté d'elle, jouait parfaitement son rôle de mari dévoué. Il lui servait du vin, effleurait sa main de temps à autre. Elena se demandait jusqu'où il était prêt à aller pour convaincre tout le monde.
Vers la fin du dîner, Antonio lança :
— Alors, c'est quoi la suite pour vous deux ?
Elena allait répondre, mais Alejandro prit les devants.
— On verra. Pour l'instant, on profite de chaque moment.
Il tourna la tête vers elle et ajouta doucement :
— Pas vrai, cariño ?
Elena se força à hocher la tête.
— Bien sûr.
Vanja lui adressa un regard curieux, comme si elle percevait quelque chose.
— Tu ne bois pas beaucoup ce soir, Elena.
Elena baissa les yeux vers sa coupe à peine entamée.
— Je préfère rester sobre.
Vanja sourit, mais son regard s'attarda un instant sur elle avant qu'une autre conversation ne prenne le dessus.
Elena sentit son estomac se nouer. Est-ce qu'elle soupçonnait quelque chose ?
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Après le dîner, Alejandro et Elena quittèrent le restaurant sous les flashs des photographes. Dans la voiture, un silence tendu s'installa.
Finalement, Elena soupira.
— Ce sera toujours comme ça ?
Alejandro la regarda du coin de l'œil.
— Comme quoi ?
— Ce jeu. Ces regards. Cette pression.
Il haussa légèrement les épaules.
— C'est le prix à payer pour être dans ce monde. Tu t'y habitueras.
Elle croisa les bras.
— Et si je ne peux pas m'y habituer ?
Un sourire en coin apparut sur les lèvres d'Alejandro.
— Alors, tu vas souffrir, mi amor.
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La chambre était plongée dans une obscurité presque totale, seule la lueur tamisée des réverbères madrilènes filtrant à travers les rideaux donnait un semblant de clarté. L'atmosphère était lourde, comme chargée d'une tension électrique.
Elena s'assit au bord du lit, les bras croisés, observant Alejandro qui, de son côté, déboutonnait lentement sa chemise, imperturbable.
— Tu comptes vraiment dormir ici ? lâcha-t-elle, plus sèchement qu'elle ne l'aurait voulu.
Alejandro arqua un sourcil, amusé.
— C'est aussi mon lit, non ?
Elle soupira.
— Je peux prendre le canapé.
— Et laisser les employés jaser sur le fait que "madame Vasquez" refuse de dormir avec son mari ? Mauvaise idée.
Elle serra la mâchoire. Elle savait qu'il avait raison. Chaque détail de leur vie conjugale serait scruté, analysé, et dormir séparément éveillerait des soupçons inutiles.
— Tu veux que je dorme où, alors ? demanda-t-elle avec irritation.
Alejandro haussa les épaules en jetant sa chemise sur une chaise.
— Le lit est assez grand. Tu restes de ton côté, je reste du mien. Ça devrait aller, non ?
Elena plissa les yeux.
— Pourquoi j'ai l'impression que tu t'amuses beaucoup trop de cette situation ?
Il lui adressa un sourire en coin.
— Parce que c'est le cas.
Elle leva les yeux au ciel et se leva pour aller dans la salle de bain. Une fois la porte refermée derrière elle, elle souffla bruyamment. Comment allait-elle supporter ça ?
Lorsqu'elle ressortit, vêtue d'un short et d'un t-shirt ample, Alejandro était déjà allongé, torse nu, ses cheveux encore humides après une douche rapide, dans un autre salle de bain. Il était allongé sur le dos, un bras replié sous sa tête.
Elena hésita un instant avant de se glisser sous les draps, aussi loin de lui que possible.
— Tu peux te détendre, Moreau, je ne vais pas te manger.
— Rien que ta présence est déjà une épreuve.
Il rit doucement.
— Tu dramatises.
Un silence pesant s'installa. Aucun des deux ne trouvait le sommeil. Elena fixait le plafond, le cœur battant. C'était absurde. Ils étaient adultes, et pourtant, partager ce lit lui semblait presque… intime.
— Tu respires fort, fit remarquer Alejandro.
— C'est parce que je suis tendue.
— Pourquoi ?
Elle se tourna vers lui, le trouvant déjà en train de l'observer dans la pénombre.
— Peut-être parce que je partage un lit avec un inconnu ? répliqua-t-elle.
Alejandro laissa échapper un rire amusé.
— On est mariés, tu sais.
— Sur le papier.
— C'est déjà un bon début, et on s'est déjà embrasser, plus d'une fois.
Elle soupira et se retourna, lui tournant le dos.
— Dors, Alejandro.
— Bonne nuit, cariño.
Mais aucun des deux ne ferma réellement l'œil cette nuit-là.