Bonjour à tous, voici une histoire qui me tient très à cœur, et me voici ici pour vous la faire partager.
Je vous rappelle que cette histoire est sortie tout droit de ma propre imagination, et que le plagiat est une violation de la propriété intellectuelle et des droits d'auteurs.
Selon l'article L335-2 et L335-3, toute contrefaçon est passible de trois ans d'emprisonnement et de 300000 euros d'amende.
Sisi
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Italie - Milan
Point de vue Ethan
Milan est un décor taillé sur mesure pour ceux qui, comme moi, vivent sous les projecteurs. Une ville où tout brille, où l'apparence est une religion. Ici, le luxe n'est pas un caprice, c'est une évidence. La Via Montenapoleone, avec ses vitrines éclatantes et ses voitures de collection garées devant les boutiques, est comme une scène où chacun joue son rôle. Les regards sont scrutateurs, les sourires mesurés, et derrière chaque poignée de main, une transaction implicite.
Je connais par cœur ces palais de verre et d'acier, ces hôtels où les draps sentent le jasmin et où le silence est acheté à prix d'or. Les dîners mondains sur les terrasses privées, le champagne servi dans des flûtes si fines qu'elles menacent de se briser au moindre geste.
Milan est une ville qui ne pardonne pas l'échec. On s'y élève ou on s'y efface.
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Je suis là, dans ce studio étouffant de lumière blanche, à poser comme un mannequin parfait. La chaleur des projecteurs me fait transpirer, mais il faut que je reste immobile, impeccable. Je sens mon visage figé, mon sourire poli, presque mécanique, comme un masque que je porte depuis trop longtemps.
- Photographe: Regarde un peu plus à droite, Ethan. Un peu plus. Voilà.
La voix du photographe, sèche, me coupe dans ma concentration. J'obéis. Une fraction de seconde de déviation, et je perds la ligne parfaite. Une imperfection. J'ai appris à anticiper ce genre de chose, à ne jamais laisser un instant d'hésitation me trahir.
- Photographe: Encore. Souris, mais plus doux. Tu as l'air trop sérieux. Plus naturel !
Je ravale un soupir et force mes lèvres à s'étirer, mais au fond, je sais que ce n'est pas la vérité. Ce n'est jamais naturel. Rien ici ne l'est. Mes dents blanches, ma peau sans défaut, mon regard figé dans un éclat de perfection qui ne correspond à rien de réel. Ce sourire... il a toujours l'air d'une promesse que je ne tiens jamais. Un compromis entre ce que l'on attend de moi et ce que je suis vraiment.
- Photographe: Un peu plus de charisme, Ethan ! On est là pour vendre du rêve, pas pour faire de la soupe !
Je me redresse et relève légèrement le menton. Un parfait cliché de mannequin riche et bien dans sa peau. Mais au fond, je me sens aussi vide que la pièce qui m'entoure. Ces photos sont des images de ce que je devrais être, pas de ce que je suis. Un décor derrière lequel je me cache, un masque que j'ai appris à revêtir pour survivre dans ce monde.
- Photographe: Ça va Ethan, mais tu peux faire mieux. Allez, encore, et plus de sourire !
J'incline légèrement la tête, je sens mes muscles se tendre sous la tension. Je suis là, mais je suis ailleurs aussi. Dans un coin de ma tête, tout ça me paraît si dérisoire. Mais je ne peux pas m'arrêter. Pas maintenant. Pas alors que la lumière brille si fort sur moi.
- Photographe: Parfait, c'est bon. On fait une pause.
Je me détends enfin, laissant le poids des projecteurs m'écraser un instant. Mais je sais qu'il reviendra bientôt, le photographe, pour me remettre dans le cadre. Pour me faire recommencer, encore et encore, jusqu'à ce que cette image parfaite prenne forme. Jusqu'à ce que je sois la version de moi-même qu'ils veulent vendre.
Je m'assois enfin sur la chaise, un soupir d'épuisement m'échappe. La chaleur des projecteurs continue de me brûler la peau, mais je m'en fiche maintenant. Je laisse mon dos se relâcher et je regarde mon reflet dans le miroir en face de moi. Ce visage. Ce masque que je porte à longueur de journée. Une ligne parfaite ici, une ombre maîtrisée là... Rien de naturel. Juste du travail.
- Jade: Tu t'en sors bien aujourd'hui, la mia bellissima modella. (mon beau mannequin.)
La voix de Jade me tire de mes pensées. Elle entre dans la pièce avec sa démarche assurée, son sac à maquillage pendu à l'épaule. Ses cheveux noirs bouclés, souvent en bataille, tombent sur ses épaules. Elle me sourit, un sourire complice, une lumière dans ce chaos de perfection. Jade, ma meilleure amie. La seule personne qui, je pense, me voit réellement.
Elle s'installe derrière moi, le bruit des pots de maquillage s'entrechoquant lorsqu'elle les sort de son sac. Je ne dis rien, je me laisse faire. Elle est la seule capable de me toucher sans que ça me dérange. De me rendre, d'une certaine manière, un peu plus humain.
- Jade: Tu as l'air d'avoir survécu à la séance, mais tu sais, tu pourrais sourire un peu plus sincèrement.
Me dit-elle en me lançant un regard dans le miroir. Je ris nerveusement.
- Ethan: Ah, tu sais bien que je suis un expert en sourires figés. Ça fait partie du boulot.
Elle secoue la tête, amusée.
- Jade: Sì, mais ça ne te fait pas briller, mon vieux. Il te manque... je sais pas... quelque chose. Un peu de chaleur de la vraie vie.
Je me laisse glisser un peu plus bas sur ma chaise, les yeux toujours rivés sur mon reflet.
- Ethan: Et pourquoi ce "quelque chose" me fuit-il toujours ?
Elle se met à retoucher ma peau, un pinceau effleurant doucement mon front.
- Jade: Parce que tu te caches, Ethan. T'es tellement obsédé par ce que les gens veulent voir que tu oublies ce que tu ressens vraiment. T'as un tas de gens qui te regardent comme si t'étais un diamant pur, mais au fond, t'es juste un homme comme les autres.
Elle appuie plus fort sur le pinceau, comme si elle voulait me faire sentir chaque mot.
- Jade: Tu te laisses perdre dans ce rôle. Et crois-moi ça se voit. Même quand tu sorridi (tu souris.)
Je fronce les sourcils, un léger sourire se dessinant sur mes lèvres.
- Ethan: Tu es la seule à le voir ça Jade. Mais tu sais, c'est plus facile de sourire quand tout autour de toi est aussi... lisse et parfait. Quand tout est sous contrôle.
Elle me jette un regard en coin, celui qu'elle a quand elle veut me faire comprendre qu'elle n'est pas dupe.
- Jade: Et tu crois vraiment que tout ça te comble ? Les sourires parfaits, les contrats, l'image...
Je hausse les épaules, presque malgré moi.
- Ethan: C'est tout ce que j'ai Jade.
Elle soupire en arrêtant de me maquillé quelques secondes.
- Jade: Nò, ce n'est pas tout ce que tu as. Mais ça te fait peur de te confronter à ce qu'il reste quand tout ça tombe. La solitude. Les regrets. La vraie vie, en fait.
Je détourne les yeux de son reflet dans le miroir, fixant un point vague dans la pièce. Elle a raison, mais je ne veux pas l'admettre. Parce qu'admettre cela, c'est reconnaître que j'ai perdu quelque chose que je n'arrive même pas à définir.
- Ethan: Ça va, sto bene. (je vais bien.) Il y a bien pire dans le monde, non ?
Lui dis-je, plus pour moi que pour elle.
Jade reprend son travail, ses doigts habiles effleurant ma peau avec soin.
-Jade: Il y a bien pire, oui. Mais toi, Ethan... tu mérites plus que cette façade. T'es pas qu'une image. T'es plus que ça.
Je ferme les yeux un instant, en silence. Elle a toujours eu ce don pour me faire réfléchir, me faire sortir de ma zone de confort. Mais aujourd'hui, je ne sais pas si je suis prêt à entendre ce qu'elle a à me dire. Parce que tout ce que j'ai construit, toute cette vie brillante, je l'ai faite pour me cacher. Et si je l'abandonnais, il n'y aurait plus rien à quoi m'accrocher.
- Ethan: Grazie, Jade.
Murmurais-je finalement sans vraiment savoir pourquoi.
- Ethan: T'as toujours les mots pour me faire réfléchir.
Elle sourit doucement, terminant les retouches sur mes joues.
-Jade: C'est ce que les amici (amis) font, Ethan. Ils te rappellent qui tu es vraiment. Même si tu préfères l'oublier.
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Point de vue Lila
Je passe une dernière couche de peinture sur la toile, puis je recule d'un pas pour observer. Le bleu s'étire en vagues nerveuses, des traits bruts, imparfaits, mais vivants. J'aime cette sensation, celle de voir quelque chose prendre forme sous mes doigts, quelque chose qui existe seulement parce que je l'ai voulu.
L'atelier est plongé dans un semi-désordre organisé : des pinceaux tachés d'acrylique, des toiles empilées contre le mur, des croquis éparpillés sur la table. L'odeur de la térébenthine flotte dans l'air, mêlée à celle du café froid oublié dans un coin. C'est mon refuge. Ici, personne ne me regarde, personne n'attend rien de moi. Je peins pour moi, pour ce qui déborde en silence à l'intérieur.
Je pourrais vendre mes toiles, les exposer, me faire un nom. Mais je n'en ai jamais eu envie. L'idée que mes œuvres puissent être disséquées, jugées, vidées de leur vérité pour être accrochées dans des salons luxueux m'écœure. L'art, pour moi, c'est intime. Ça ne s'explique pas, ça se ressent.
Alors je reste dans l'ombre. Je vis simplement, loin des regards, loin du bruit du monde. Je donne des cours de dessin dans un centre culturel du quartier, assez pour payer mon loyer et quelques tubes de peinture. Le reste, je m'en fiche. Je ne veux pas de plus. Plus, ce serait trop. Plus, ce serait être vue.
Je jette un regard à l'horloge : già alle (déjà) 19:00. Mon ventre gronde, mais je l'ignore. Je préfère finir ce que j'ai commencé. Mes mains effleurent la toile encore fraîche, les reliefs de la peinture sous mes doigts me donnent l'impression de toucher une émotion brute.
Parfois, je me demande si je ne suis pas lâche, comme si choisir l'ombre, c'est une manière de préserver ma liberté ou juste une façon de fuir.
Mais je chasse cette pensée. J'ai choisi cette vie, une vie où je peux être moi, où rien ne m'oblige à jouer un rôle, et ça me suffit, enfin, c'est ce que je me répète.
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Je relève enfin la tête et cligne des yeux, un peu déboussolée. L'horloge accrochée au mur indique presque 22h. Comment est-ce possible ?
Je n'ai pas vu le temps passer. Comme toujours, la peinture m'a happée, m'a enfermée dans ce monde où plus rien n'existe en dehors des couleurs et des formes qui naissent sous mes doigts.
Un léger frottement contre mes jambes me ramène à la réalité. Je baisse les yeux et souris malgré moi.
- Lila: Anche tu (Toi aussi,) tu trouves que j'exagère ?
Ma jolie boule de poils aux couleurs de feu me fixe de ses yeux verts perçants, puis miaule doucement avant de se frotter encore contre moi, exigeant son dû.
-Lila: Lo so, lo so, (Je sais, je sais,) j'ai oublié de te donner à manger...
Je pose mon pinceau et m'accroupis pour caresser son pelage soyeux. Elle ronronne aussitôt, me pardonnant déjà mon absence d'attention. Cette chatte, c'est mon ancre. Elle est là, toujours, sans juger, sans attendre autre chose que de la tendresse et un bol bien rempli.
Je me lève et me dirige vers la cuisine minuscule de mon atelier. J'ouvre un placard, attrape un sachet de croquettes et verse une portion généreuse dans sa gamelle. Aussitôt, elle se précipite dessus, engloutissant son repas avec un enthousiasme qui me fait sourire.
- Lila: Tu ne pourrais pas manger un peu plus lentement, Pyra ?
Elle ignore royalement ma remarque, et je ris doucement en me laissant tomber sur une chaise. Le silence m'entoure à nouveau, seulement ponctué par le bruit de ses croquettes qui craquent sous ses petites dents.
J'observe mon atelier baigné dans une lumière tamisée. Le chaos des toiles inachevées, les pinceaux abandonnés dans des pots en verre, les taches de peinture sur le sol. Cet endroit est mon monde, ma forteresse.
Et pourtant, ce soir, une étrange sensation me serre la poitrine. Comme si, malgré tout ce que j'ai construit pour me protéger, quelque chose manquait. Quelque chose que je refuse de nommer.
Je ferme les yeux un instant, inspirant profondément. Non, c'est juste la fatigue.
Demain, tout redeviendra normal.
A suivre...