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Chapter 2 - Chapitre 2 : Le prisonnier de la tour

Domgis marcha longtemps. Très longtemps. Il ne croisa rien ni personne. Finalement, à bout de souffle et d'espoir, il fit demi-tour pour rentrer.

Il avait passé beaucoup de temps à avancer, à explorer ces souterrains obscurs, pour finalement ne rien trouver.

La porte qu'il avait découverte était scellée, impossible à ouvrir. Partout ailleurs, la grotte n'était qu'un dédale de chemins qui menaient à des impasses. Les rares endroits dignes d'intérêt ne lui offraient aucune véritable avancée.

La déception devenait son compagnon quotidien.

Certes, il y avait des moments de joie. Quand il faisait de petites découvertes, il ressentait une brève satisfaction. Mais ces trouvailles, en fin de compte, n'avaient aucune utilité. Elles ne changeaient rien à son existence.

En arrêtant son exploration, il se retrouvait face à un vide encore plus grand : celui de l'absence de but.

Domgis en venait à penser qu'il ne serait jamais heureux. Une nouvelle aventure, une découverte qui lui redonnerait espoir, semblait désormais improbable.

Il ne voulait plus déambuler dans ces cavernes sans fin, uniquement pour récolter encore et encore des déceptions.

Ce n'était pas tant l'absence de grandes découvertes qui le désespérait. Non, le problème était plus profond : il n'avait même plus d'espoir pour les petites choses. Et surtout, il ne voyait aucun sens, aucun but, à tout cela.

"Est-ce vraiment ce que je pense?" murmura-t-il avant de sombrer dans le sommeil, allongé sur son lit de feuilles.

À son réveil, il reprit son chemin vers le grand hall, là où convergeaient des centaines de galeries.

Il m'avait surpris. Un bon sommeil semblait lui avoir fait du bien.

***

Sans que je ne m'en rende compte, le temps passa. Beaucoup de temps.

Domgis avait exploré plusieurs galeries du grand hall.

Il avait découvert des tonnes de pierres précieuses, des objets étranges de toutes tailles et formes, dont l'utilité lui échappait souvent. Parmi tout cela, il ne gardait que ce qui lui plaisait ou semblait pratique : des contenants, des ornements.

Peu à peu, son abri devint un véritable sanctuaire.

Des chandeliers en or illuminaient son espace, des assiettes finement décorées s'empilaient ici et là. Mais l'objet le plus fascinant était sans conteste un tableau.

Une peinture qui représentait un simple champ de fleurs.

Le ciel y était d'un bleu éclatant, ponctué de nuages vaporeux. À l'horizon, des montagnes majestueuses ajoutaient une touche de mystère.

L'artiste avait un talent indéniable : chaque coup de pinceau semblait insuffler de la vie à cette scène.

On aurait dit qu'il était possible d'entrer dans ce tableau, de fouler l'herbe tendre, de sentir le parfum des fleurs, de respirer l'air pur.

Domgis passait des heures, les yeux rivés sur cette toile.

Peut-être s'imaginait-il y vivre, loin des souterrains sombres et vides, dans un monde baigné de lumière et de liberté.

***

Le temps passa. Lors d'une exploration, Domgis aperçut une pièce d'or abandonnée au sol. Intrigué, il la ramassa.

Un symbole mystérieux y était gravé, mais avant qu'il ne puisse l'analyser, la pièce se transforma soudainement. Sous ses yeux, elle prit la forme d'un insecte, semblable à celui qui l'avait attaqué autrefois.

Pris de panique, Domgis lâcha la pièce changeante. Avant que la créature ne comprenne ce qui se passait, il l'écrasa violemment contre le sol froid de la grotte.

Il resta figé, abasourdi.

Ces créatures… Pouvaient-elles vraiment se transformer en objets ? Ou bien avaient-elles été transformées par quelque pouvoir inconnu ?

Curieux, j'observai le corps inerte de l'insecte. À première vue, il semblait être composé d'éclat d'or, mais ce n'était qu'une apparence trompeuse.

Ses ailes, au nombre de huit, étaient fines et vibrantes, produisant un léger bourdonnement lorsqu'elles s'activaient. De longues antennes, mesurant environ deux centimètres chacune, ornaient sa tête. C'était une taille impressionnante pour une créature aussi petite.

En repensant au premier spécimen que Domgis avait croisé, je me demandais ce qui avait déclenché sa transformation cette fois-ci. Était-ce un hasard, ou ces créatures avaient-elles la capacité de se métamorphoser à leur guise ?

Une seule certitude demeurait : elles étaient sans aucun doute liées à cet endroit.

Pour s'assurer de sa mort, Domgis écrasa à nouveau l'insecte. Ses restes gisaient désormais parmi d'autres pièces éparpillées au sol. Avec une certaine hésitation, et sous mon regard attentif, il en saisit une. Rien ne se produisit.

Il fronça les sourcils et tenta sa chance avec une autre. Puis une autre encore. Finalement, il passa toute la petite montagne de pièces au peigne fin, mais aucune ne révéla quoi que ce soit.

Aucune créature ne se manifesta.

Était-ce un simple hasard la dernière fois ?

Non, cela semblait peu probable. Il devait forcément y avoir un lien.

"Peut-être… peut-être que ces insectes n'apparaissent que depuis des pièces portant ce symbole étrange," murmura-t-il pour lui-même.

Il se remémora l'image qu'il avait aperçue sur la première pièce : un arbre aux branches tombantes.

Dès lors, ses journées furent consacrées à la recherche de ce symbole mystérieux.

Il arpenta d'anciennes cités souterraines en ruines, autrefois sûrement animées par des civilisations disparues, aujourd'hui réduites à de vastes nécropoles de pierre et de poussière. Les fresques effacées sur les murs murmuraient des légendes que seuls les échos osaient répéter.

Il s'aventura dans des temples maudits, aux colonnes fissurées et aux autels souillés par d'antiques rituels. L'air y était chargé de murmures indistincts, de promesses insidieuses et d'une odeur métallique qui évoquait le sang séché. Chaque pas soulevait des volutes de cendres et réveillait des gravures, tapies entre les statues brisées d'anciens dieux oubliés.

Plus loin, il longea les rives de lacs souterrains aux eaux d'un noir abyssal, où nul reflet n'osait danser à la surface. L'humidité accrochait sa peau, glaciale et oppressante, et chaque goutte d'eau qui tombait résonnait comme le glas d'un avertissement funeste.

Enfin, il se retrouva au bord de gouffres mortels. Un vent venu de nul part s'y engouffrait en hurlant, comme si les abysses elles-mêmes soupiraient de faim. Des ponts fragiles de pierre s'étiraient au-dessus du vide, menaçant de s'effondrer sous le poids d'une seule hésitation.

Ses recherches le menèrent à une découverte aussi étrange qu'inattendue. Alors qu'il progressait prudemment dans les profondeurs des tunnels oubliées, son regard fut attiré par une faible lueur vacillante, presque imperceptible, dissimulée sous un amoncellement de pierres. Le spectacle était d'autant plus troublant que ces roches, hautes comme lui, formaient un véritable écrin autour de cette lumière fantomatique, comme si elles tentaient de l'emprisonner.

Intrigué, Domgis s'approcha avec précaution, sentant sous ses doigts la froideur rugueuse des pierres accumulées par le temps. Chaque déplacement de roche s'accompagnait d'un craquement sinistre, d'un grincement résonnant dans l'espace clos, comme si la terre elle-même protestait contre son intrusion. Après un effort considérable, il parvint enfin à dégager l'objet qui captait son attention : une bouteille de verre ancienne, couverte de poussière et de suie, abandonnée là depuis des siècles, peut-être plus.

Mais ce n'était pas une simple bouteille. À l'intérieur, une lueur mouvante s'agitait frénétiquement, tourbillonnant comme une minuscule tempête de lumière prisonnière d'un bocal. Tantôt bleutée, tantôt dorée, elle pulsait au rythme d'une respiration invisible, cognant parfois contre les parois de son étrange prison. Était-ce une créature vivante ? Une énergie condensée ? Une flamme éternelle volée aux dieux ?

Domgis sentit un frisson parcourir son échine. Tout en essuyant la surface encrassée du verre d'un revers de manche, il tenta de mieux discerner ce qu'il tenait entre ses mains.

Le garçon resserra ses doigts autour du goulot de la bouteille et tenta de le tourner. Rien ne bougea. Le verre froid et lisse glissa légèrement sous sa paume moite. Il grimaça, resserra sa prise et força un peu plus. Toujours rien.

"Sérieusement ?" marmonna-t-il en soufflant un peu de poussière de son visage.

Il s'agenouilla, coinça la bouteille entre ses genoux et tenta une nouvelle approche. Il tira, poussa, fit pivoter. Le bouchon ne bougea pas d'un millimètre. Il était scellé avec une obstination presque insultante.

"Très bien… Tu veux jouer à ça ?"

Fronçant les sourcils, il utilisa le pan de sa tunique pour améliorer sa prise et tira de toutes ses forces. Ses bras tremblaient sous l'effort, ses phalanges blanchirent… puis, soudain, un bruit de succion se fit entendre.

"Oui !"

Mais l'instant de triomphe fut bref. Car si le bouchon céda, il le fit d'un coup sec… et Domgis bascula en arrière. Il atterrit lourdement sur le sol, la bouteille toujours en main, mais désormais grande ouverte.

Un instant de silence suivit, seulement troublé par son propre souffle. Puis, dans un éclat de lumière aveuglant, la petite lueur jaillit de son ancienne prison.

Elle voltigea autour de lui, décrivant des cercles erratiques comme si elle reprenait ses repères après une éternité d'enfermement. Elle crépitait doucement, laissant derrière elle un sillage lumineux, vibrant d'une énergie mystérieuse.

Domgis, toujours allongé, la suivait des yeux, hébété. Il ouvrit la bouche pour dire quelque chose, mais aucun mot ne lui vint.

La lumière s'arrêta brusquement devant son visage. Elle sembla l'observer, suspendue dans l'air.

Il leva une main, espérant peut-être la toucher, mais elle l'évita avec malice avant de disparaître au loin.