Le lendemain matin, Kael, Rin, et Nira se levèrent tôt, leurs esprits encore alourdis par la sensation que quelque chose clochait dans ce village apparemment parfait. Les ruelles pavées étaient calmes, mais les regards furtifs des nains qu'ils croisaient ne passaient pas inaperçus.
Faldur les accueillit avec son sourire habituel, mais son ton semblait plus tendu. « Dormi comme des pierres, j'espère ? Aujourd'hui, je vais vous montrer les trésors de notre forge et les merveilles de notre village. »
Bharrek apparut peu après, grognant comme à son habitude. « Des trésors, des merveilles… Toujours la même chose. Allons, Faldur, ils ont vu des forges avant, non ? »
Faldur le fixa brièvement avant de répondre avec un rire nerveux. « Ce n'est pas n'importe quelle forge, Bharrek, et tu le sais. »
Alors qu'ils suivaient les deux nains vers l'imposante forge centrale, Kael observait les détails du village avec attention. Il remarqua des zones où les pavés semblaient plus récents, comme si une partie du sol avait été récemment reconstruite. Les gravures sur certaines colonnes paraissaient plus anciennes que d'autres, et il devint évident que le village cachait quelque chose sous sa surface.
La forge de Bharrek était un chef-d'œuvre d'ingénierie. Les flammes dansaient avec intensité, alimentées par des soufflets gigantesques, et des armes étincelantes étaient alignées sur des présentoirs. Bharrek parla longuement de ses créations, expliquant avec fierté les techniques uniques qu'il utilisait.
« Chaque lame, chaque bouclier que je forge est une œuvre d'art, » déclara-t-il, frappant le métal rougeoyant sur son enclume. « Mais… pourquoi ai-je l'impression que vous avez l'esprit ailleurs, Kael ? »
Kael hésita, mais Nira intervint. « Votre village est fascinant, Bharrek, mais il y a des choses qui ne collent pas. Pourquoi vos habitants semblent-ils si tendus ? Que cache ce lieu ? »
Bharrek fronça les sourcils, clairement pris de court. « Caché ? Rien du tout ! Nous sommes un peuple simple, nos vies tournent autour de nos forges et de notre famille. »
Avant que Nira ne puisse répondre, un bruit sourd retentit depuis l'extérieur, suivi d'un cri étouffé. Bharrek se précipita vers la porte, suivi par Kael et les autres. Une scène troublante les attendait : deux nains semblaient s'éloigner précipitamment d'un bâtiment en traînant un lourd sac de toile.
« Hé ! Qu'est-ce que vous faites ? » rugit Bharrek, mais les deux nains disparurent dans une ruelle avant qu'il ne puisse les rattraper.
Kael et Rin échangèrent un regard, puis se mirent à les poursuivre, leurs pas résonnant sur les pavés. Ils débouchèrent dans une partie plus isolée du village, où se trouvait une trappe scellée par un lourd verrou. Les deux nains avaient disparu, mais la tension dans l'air était palpable.
Nira, les ayant rejoints, posa une main sur la trappe, murmurant une incantation. Le verrou sauta dans un éclat de lumière, et Kael souleva la trappe pour révéler un escalier descendant dans les entrailles du village.
« Bharrek, tu savais quelque chose sur ça ? » demanda Kael en se tournant vers le forgeron, qui les avait finalement rejoints, le visage blême.
« Par les flammes de ma forge… Non ! Je n'ai jamais rien vu de tel ! » jura-t-il, son ton mêlant colère et incompréhension.
Ils descendirent les escaliers, Bharrek en tête malgré son trouble évident. La lumière des torches révéla une vaste caverne souterraine, remplie de cages en métal où des créatures de différentes races étaient emprisonnées. Hommes-loups, elfes des montagnes, demi-elfes… tous étaient enfermés, affaiblis et silencieux.
Kael sentit sa rage monter en voyant ces visages hagards. « C'est… de l'esclavage, » murmura-t-il, ses chaînes frémissant d'eux-mêmes.
En passant devant une cage entrouverte, Kael s'arrêta brusquement. Sur le sol, il aperçut un morceau de tissu qu'il reconnaîtrait entre mille : un fragment de la cape de Lyss. À côté, une petite fiole vide qui portait les mêmes gravures runiques que celles qu'elle utilisait.
« Elle était ici, » souffla-t-il, sa voix tremblant d'un mélange de soulagement et d'inquiétude. Il se pencha pour ramasser le tissu, ses doigts serrant le fragment avec force. « Je le savais… »
Bharrek, intrigué, se tourna vers lui. « De qui parles-tu ? »
« Lyss, » répondit Nira à la place de Kael. « Une alliée précieuse. Elle a dû passer par ici. »
Kael se redressa, ses yeux fixant Faldur qui venait d'apparaître, accompagné de plusieurs gardes armés. Son sourire chaleureux avait disparu, remplacé par une expression glaciale. « Il fallait bien subvenir aux besoins du village. Nos échanges avec l'Empire sont ce qui nous permet de prospérer. »
« Où est-elle ? » demanda Kael d'un ton glacial. Faldur haussa les épaules avec une nonchalance feinte. « Si c'est de cette femme que tu parles, elle a quitté le village il y a plusieurs jours. Les derniers que l'Empire voulait récupérer ont été envoyés à la capitale. Elle en faisait partie. »
Les gardes de Faldur se mirent en position, mais Kael et Rin étaient prêts. Nira commença à incanter, et Bharrek, le visage déformé par la colère, ramassa un marteau de sa forge qu'il avait emporté.
« Trahir ton propre sang pour l'Empire… Tu vas le payer, Faldur, » grogna le forgeron.
Le combat éclata dans la caverne, les éclats de métal et les incantations de Nira illuminant l'obscurité. Bharrek, Kael, Rin et Nira luttaient avec acharnement pour mettre fin à cette horreur, prêts à dévoiler au grand jour le véritable visage du village des nains.