Aujourd'hui marquait une journée particulièrement spéciale pour Kurenaï, puisque c'était son anniversaire. Après les événements récents, l'empereur avait pris conscience de la" pression" immense sous laquelle elle se trouvait. Pour honorer cette femme pour qui il avait un amour indéfectible , il avait décidé de célébrer l'anniversaire de Kurenaï avec une fête d'une opulence sans précédent.
Tous les seigneurs de province ainsi que les ministres s'étaient déplacés spécialement pour l'événement, apportant des cadeaux somptueux dans l'espoir de gagner ses faveurs. Bien que Kurenaï ne fût pas impératrice de titre, elle exerçait une influence considérable sur l'empereur et, par conséquent, sur tout l'Empire. Cette influence profitait grandement à sa famille, et notamment à son père, le premier ministre. On ne pouvait qu'imaginer les bouleversements que provoquerait une éventuelle accession de Kurenaï au rang d'impératrice, plaçant l'Empire entier sous le contrôle de sa famille.
Le passage des heures semblait interminable pour l'Akari, dont l'esprit était préoccupé par cette somptueuse célébration.
— Majesté ? demanda Su, l'air empreint de sollicitude.
— Oui, Su ? répondit l'Akari, la voix teintée d'indifférence.
— Ne devriez-vous pas assister au banquet ? C'est l'événement du jour, après tout, observa-t-elle avec une pointe d'insistance.
— Peut-être... Cependant, l'enthousiasme me fait défaut, confia l'Akari avec un soupir lourd de désintérêt.
— Akari, si vous négligez cette occasion, l'empereur vous fera sûrement des remontrances. Je présume que cela ne fait pas partie de vos désirs, ajouta Su avec une note de préoccupation dans la voix.
— Su, pourquoi te soucies-tu ainsi ? L'Akari n'a guère d'obligations envers les maîtresses de l'empereur, répondit l'Akari en tentant de masquer son agacement.
— Certes, c'est vrai, mais vous savez comme moi que lorsqu'il s'agit de Dame Kurenaï, l'empereur perd toute objectivité, fit remarquer Su.
L'Akari soupira à nouveau, un mélange d'exaspération et de résignation se lisant sur son visage.
— Oui, je le sais. Néanmoins, je m'y rendrai plus tard. Pour l'instant, d'autres priorités m'appellent, conclut-il avec une détermination cachant une inquiétude croissante.
À tout juste quinze ans, Su possédait déjà la sagesse d'une adulte. Elle avait grandi dans un monde où les intrigues de la cour et les rivalités entre concubines étaient monnaie courante, ce qui avait façonné sa perception des relations impériales.
À cet instant précis, un garde de la reine mère impératrice frappa à la porte, le bruit des coups résonnant comme un rappel de la grandeur et de la complexité du palais impérial.
— Qui est-ce ? demanda Su avec un mélange d'impatience et de curiosité.
— Je suis l'un des gardes de Sa Majesté la reine mère impératrice. Elle vous demande expressément de vous joindre au banquet, répondit le garde avec une déférence respectueuse.
— Quoi ? Mère se rend au banquet d'anniversaire d'une concubine ? s'exclama Izumo, la surprise et l'incrédulité palpables dans sa voix.
Une telle intrusion était presque inconcevable. L'intérêt soudain de la reine mère pour l'anniversaire de Kurenaï éveillait une curiosité grandissante et amplifiait son inquiétude.
— Bien, j'arriverai dans quelques instants, répondit Izumo, son esprit déjà en proie à de nombreuses conjectures quant aux motifs de cette visite inattendue.
Le garde s'inclina avec respect puis se retire.
" Si ma mère est là-bas, il me faut également me rendre à cet événement", pensa-t-il , oscillant entre le respect dû à sa mère et un pressentiment grandissant de quelque chose de plus complexe en jeu.
— Su, aide-moi à me préparer, ordonna l'Akari d'un ton empreint d'une hâte mêlée d'appréhension.
— Mais Majesté, vous n'aimez guère vous maquiller, pourquoi ce changement ? demanda Su, visiblement perplexe.
— Aujourd'hui est un jour exceptionnel, ne l'oublie pas. Nous devons présenter l'image attendue à ce banquet, répondit l'Akari en cherchant à dissimuler son agitation sous une façade de détermination.
D'ordinaire, l'Akari privilégiait la simplicité en matière d'accessoires. Cependant, aujourd'hui était un jour exceptionnel, et il ne saurait se contenter de la discrétion habituelle. En cette occasion, il choisit de faire étalage d'un éclat digne de surpasser celui de Kurenaï, une décision motivée autant par le désir de se distinguer que par celui de susciter la jalousie.
Il n'était pas vaniteux de constater que, même sans maquillage, il possédait une grâce naturelle surpassant celle de toutes les concubines de l'empereur. Pour cette fête somptueuse, l'Akari opta pour des bijoux subtilement extravagants, chaque pièce conçue pour captiver les regards à chaque mouvement.
Les boucles d'oreilles en perles d'argent, délicatement ornées de motifs floraux, encadraient son visage avec une élégance raffinée. Son cou était orné d'un collier en or blanc, rehaussé d'un saphir rare, symbole de pureté et d'intelligence. À son poignet, un bracelet assorti complétait l'ensemble, chaque gemme scintillant avec l'éclat des étoiles d'une nuit claire, ajoutant une touche de splendeur discrète mais indéniable.
Su et l'Akari consacrèrent quelques minutes à choisir la tenue parfaite. Finalement, il sélectionna un kimono élégant d'un blanc ivoire, orné de délicates broderies dorées qui ajoutaient une touche de sophistication sans en faire trop. Le kimono épousait élégamment les courbes de son corps, soulignant sa silhouette avec une grâce sublime. Les bijoux raffinés complétaient le tout, conférant une touche d'éclat subtil qui rehaussait son apparence avec finesse et distinction.
— C'est parfait, Majesté. Vous êtes resplendissant, déclara Su, émerveillée par le résultat.
Après quelques minutes de trajet dans une chaise ornée, portée par des serviteurs, l'Akari arriva enfin dans la somptueuse salle des fêtes du palais. Cet espace majestueux était le théâtre des événements les plus importants de l'Empire. Bien qu'il fût l'Akari, il n'avait jamais eu l'honneur d'y voir une cérémonie organisée en son nom, tandis que les concubines favorites de l'empereur y étaient régulièrement honorées. Depuis son arrivée au palais, un tel honneur ne lui avait jamais été accordé. Sa mère se plaignait régulièrement de cet oubli. Chaque année, l'empereur semblait faire mine d'oublier l'anniversaire de l'Akari, et les cadeaux ne provenaient souvent que de sa mère et de ses amis.
Arrivé devant les grandes portes de l'édifice, après avoir monté plusieurs marches, l'Akari fut accueilli par les gardes postés. Ceux-ci ouvrirent immédiatement les imposantes doubles portes, laissant passer l'Akari avant de l'annoncer d'une voix forte et solennelle :
— Sa Majesté l'Akari fait son entrée dans la salle !
Un murmure d'étonnement et d'admiration parcourut la foule à la vue de l'Akari. Celui-ci sentit le regard perçant de l'empereur posé sur lui, teinté d'une pointe d'agacement et d'une émotion difficile à identifier. Les femmes, qu'elles soient de haut rang ou Omega mâles, semblaient toutes captivées par sa présence. Les regards les plus insistants émanaient principalement des concubines de l'empereur, tandis que les Alphas le dévoraient littéralement des yeux, leur fascination à peine
voilée.
— Nous saluons et souhaitons longue vie à l'Akari, répétèrent-ils à l'unisson, leur respect et admiration palpables dans leurs voix harmonieuses.
Dans ce moment, l'Akari prit pleinement conscience de la puissance qu'il détenait, du respect et de l'influence qu'il pouvait exercer, même avec le titre d'« impératrice fantoche ». En entrant dans la salle des fêtes, il fut ébloui par la splendeur et la magnificence de la décoration. Les lumières chatoyantes, les fleurs exotiques et les drapés luxueux ornaient les murs et les plafonds. Des musiciens jouaient des mélodies enchanteresses, tandis que des danseurs exécutaient des mouvements gracieux. L'atmosphère était festive et électrique, l'excitation palpait dans l'air.
L'immense salle était somptueusement décorée, des lustres étincelants suspendus au plafond aux tapisseries luxueuses qui ornaient les murs. Les convives étaient parés de leurs plus beaux atours, rivalisant de richesse et d'élégance. Kurenaï, au centre de l'attention, était entourée de seigneurs et de ministres cherchant à obtenir son approbation. Malgré son sourire, une légère tension était perceptible dans ses traits. Elle savait que la présence de l'Akari pouvait détourner l'attention et semer le doute dans l'esprit des courtisans.
Les courtisans se pressaient autour de l'Akari, désireux de lui offrir leurs hommages et leurs félicitations. Celui-ci répondait avec grâce, tout en observant discrètement la réaction de Kurenaï. Son visage affichait une expression contrariée et forcée, un mélange de jalousie et de déception. Le choix d'accessoires de l'Akari attirait particulièrement son attention, et l'Akari pouvait lire son incompréhension dans ses yeux.
Arrivé sur l'estrade réservée aux membres les plus éminents de la famille impériale, l'Akari s'avança d'un pas décidé vers sa mère, la reine mère impératrice. Un silence respectueux se répandit dans la salle alors qu'il s'inclinait avec grâce pour lui montrer le respect qui lui était dû. Sa mère, une femme d'une grande prestance malgré son âge avancé, le regarda avec fierté, mais l'Akari perçut une lueur de souffrance dans son regard.
L'Akari se dirigea vers le trône qu'il était censé occuper, et il se trouva face à un problème : Kurenaï était collée au bras de l'empereur et installée à sa place sur le trône, discutant avec les courtisans venus lui rendre hommage, arborant un large sourire innocent et mignon. Un mélange d'agacement et de surprise saisit l'Akari, mais il ne laissa rien paraître. Il fixa Kurenaï et l'empereur, qui, comme à son habitude, restait impassible, aucunement inquiet de la présence de l'Akari. La salle résonnait de murmures et d'échanges feutrés alors que les regards convergèrent vers cette scène inattendue. Certains s'interrogeaient, d'autres chuchotaient des
suppositions sur cette situation.
Les concubines de l'empereur semblaient partagées entre le malaise et l'intrigue, tandis que les seigneurs de province observaient attentivement, cherchant à déceler la signification de cet échange de places. L'Akari prit une profonde inspiration, s'efforçant de garder son calme et de ne pas laisser transparaître son irritation. C'était un affront, une provocation délibérée, mais il ne pouvait pas se permettre de réagir impulsivement. Il adopta un air serein, digne de sa position.
Soudain, Kurenaï s'exclama :
— Majesté, vous êtes là ! Nous pensions que vous
ne viendriez pas.
— Joyeux anniversaire, Kurenaï. Que cette journée vous apporte tout ce que vous désirez, répondit l'Akari d'un ton aimable.
— Merci, Majesté. Votre présence honore ce modeste événement, répondit-elle en essayant de dissimuler son irritation.
— Je ne pouvais pas manquer l'occasion de célébrer une telle journée avec vous, répliqua l'Akari, feignant la courtoisie.
Kurenaï sembla déstabilisée par la présence de l'Akari. Son jeu d'influence était affaibli en sa présence.
— Kurenaï, que faites-vous assise là ?
— Hein ? Comme vous le savez, aujourd'hui est mon anniversaire, répondit-elle d'une voix innocente.
— Oui, je le sais, mais je vous demande ce que vous faites sur mon trône ?
— Oh ! Majesté, puisque vous n'étiez pas là, je suis venue tenir compagnie à l'empereur.
— En vous asseyant sur mon trône ? demanda l'Akari, agacé.
Son regard glissa de Kurenaï à l'empereur, qui restait silencieux. L'agacement montait en lui. Kurenaï était douée pour pousser ses boutons et tester sa patience.
Les murmures de surprise et d'intrigue s'intensifient dans la salle. Les membres de la cour observent la scène avec avidité, chacun interprétant cette confrontation selon ses propres perceptions.
— Kurenaï, veuillez bien vous lever et céder ma place. Il y a un ordre établi que nous devons respecter, déclare l'Akari d'une voix calme, mais empreinte d'une autorité indéniable.
Le regard de Kurenaï trahit une vulnérabilité calculée, une tentative habile de détourner l'attention et de susciter la sympathie. Cependant, l'Akari ne se laisse pas prendre au piège.
— Kurenaï, je vous répète de vous lever du trône, insiste l'Akari, sa voix désormais ferme et résolue.
— S'il vous plaît, Majesté, juste pour quelques instants. C'est un jour spécial pour moi, implore-t-elle avec un regard suppliant.
— C'est inapproprié, réplique l'Akari, refusant de fléchir. Le trône est un symbole sacré de notre empire et ne doit être occupé que par l'empereur ou, en son absence, par l'héritier désigné et moi.
— Je ne voulais pas offenser votre autorité, Majesté, murmure Kurenaï, baissant la tête.
Les regards attentifs de l'assemblée suivent chaque mouvement, prêts à saisir le moindre détail de cet échange inattendu.
Elle hésite un instant, puis se lève lentement, un sourire narquois se dessinant sur ses lèvres.
— Majesté. Je ne voulais que tenir compagnie à Sa Majesté. Les anniversaires sont des moments pour partager, n'est-ce pas ? dit-elle, insinuant sa présence comme une forme de partage avec
l'empereur.
L'Akari prend une profonde inspiration, s'efforçant de calmer sa frustration croissante, et choisit de ne pas s'engager davantage dans cette confrontation publique.
— Êtes-vous donc satisfaite de votre pitoyable comportement ? Je n'ai jamais rencontré quelqu'un d'aussi...
— Assez, vous deux ! Et toi, n'as-tu pas d'autres personnes à saluer aujourd'hui ? s'adresse la reine mère impératrice à Kurenaï.
Cette dernière se décide immédiatement à partir, mais elle ne s'arrête pas là. Lorsqu'elle atteint le pied des marches de l'estrade, elle fait un geste subtil en direction de l'empereur, exprimant son désir qu'il la rejoigne. Cependant, la reine mère impératrice interrompt cette manœuvre en retenant son fils par le bras.
— Toi, pars. Lui, il reste ici aux côtés de son compagnon, comme le veut la morale, déclare-t-elle avec agacement.
— Oui, Votre Majesté, répond Kurenaï, s'éloignant rapidement.
— Non, mère... proteste l'empereur, visiblement partagé.
— Chut, chut, chut, ne dis rien, ordonne la reine mère impératrice.
Son regard se pose brièvement sur l'empereur, puis revient vers l'Akari. Il semble hésitant, déchiré entre l'autorité maternelle et sa propre volonté. Finalement, il prend la parole d'une voix ferme mais mesurée :
— Mère, je ne peux pas m'opposer à votre volonté, mais je vous demande de comprendre que cette situation est embarrassante pour tout le monde.
La reine mère impératrice conserve son calme, répliquant d'un ton autoritaire :
— Les traditions et la morale doivent être respectées, même dans des moments comme celui-ci. L'unité et la dignité de notre Empire en dépendent.
Des murmures d'approbation et de désaccord se font entendre parmi les haut dignitaires, révélant la division des opinions face à cette confrontation inattendue. L'empereur acquiesce finalement, laissant transparaître une pointe de frustration sur son visage. Il se tourne alors vers l'Akari et dit :
— Je vais rester ici, comme le veut la tradition. Nous pourrons ensuite discuter en privé de cette situation.