(Point de vue de Kayla)
J'avais aperçu plus tôt trois garçons se faufiler discrètement dans le bâtiment. Pas besoin d'être devin pour savoir de qui il s'agissait : Killyan et sa bande. Qu'est-ce qui leur avait pris de venir ici ? Ils n'étaient pas au courant du passage régulier de la surveillante ? Elle était déjà passée dans notre chambre il y a une heure à peine, un contrôle de routine. Bientôt, elle ferait sa ronde dans le couloir, et inévitablement, elle arriverait devant la porte d'Estelle.
Une vague d'inquiétude m'a envahie. Pourquoi est-ce que je stressais autant pour lui ? Après tout ce qu'il m'avait fait subir, il ne méritait aucune de mes attentions. Son silence, sa complicité passive… cette blessure était encore vive. Pourtant, l'idée qu'il se fasse prendre me mettait mal à l'aise. C'était irrationnel, je le savais, mais je ne pouvais pas contrôler ce sentiment.
J'étais assise sur mon lit, essayant de me concentrer sur mes cours, mais mon esprit était ailleurs. Je guettais le moindre bruit provenant du couloir. Tessa dormait profondément dans son lit, son souffle régulier emplissant la pièce plongée dans l'obscurité. Je n'avais même pas allumé la petite lampe de chevet pour ne pas la réveiller.
Soudain, j'ai entendu des pas précipités et étouffés qui se rapprochaient. Mon cœur s'est mis à battre plus vite. Sans réfléchir, je me suis levée et j'ai ouvert la porte de notre chambre d'une fraction. J'ai vu une silhouette masculine débouler du couloir, visiblement à bout de souffle. Instinctivement, je l'ai attrapée par le bras et l'ai tirée à l'intérieur de notre chambre, refermant la porte derrière nous aussi silencieusement que possible.
L'obscurité était totale. Je distinguais à peine les contours des meubles dans la pièce. Mais je n'avais pas besoin de lumière pour savoir qui j'avais devant moi. Son odeur, la chaleur de son corps… je l'aurais reconnu entre mille. C'était lui. Killyan.
Je l'ai plaqué contre le mur, me plaçant face à lui, mon corps presque collé au sien. L'obscurité rendait notre proximité encore plus palpable. Je pouvais sentir son souffle court sur mon visage. Je lui ai mis un doigt sur les lèvres pour lui intimer le silence. "Chut," ai-je murmuré à voix basse, presque inaudible.
Le silence est retombé, lourd et pesant. J'entendais mon propre cœur battre à tout rompre, et je sentais la respiration saccadée de Killyan juste devant moi. J'ai retenu mon souffle, attendant le passage de la surveillante. Chaque seconde me paraissait une éternité. Je le tenais fermement en place, mon corps servant de bouclier entre lui et le couloir. L'obscurité amplifiait nos sens, chaque son, chaque respiration, chaque contact devenant plus intense. Pourquoi faisais-je ça ? Je n'en savais rien. Tout ce que je savais, c'est que je ne voulais pas qu'il se fasse prendre. Pas aujourd'hui. Pas comme ça.