Le matin à Faylon était paisible, comme toujours. Les champs s'étendaient à perte de vue, parsemés de fleurs sauvages, tandis que la brise légère portait les senteurs d'herbe fraîche. Oren travaillait depuis l'aube, les mains dans la terre, tentant d'ignorer l'étrange malaise qui le hantait depuis plusieurs jours.
Ce sentiment d'agitation semblait s'intensifier chaque fois qu'il se retrouvait seul. Ce n'était pas une douleur, ni une peur, mais une sorte de tiraillement. Quelque chose, quelque part, semblait l'appeler.
Il s'arrêta un instant pour essuyer la sueur de son front. En regardant autour de lui, il aperçut Alya, sa mère adoptive, dans les champs voisins. Elle semblait concentrée, le visage illuminé par le soleil matinal. Marlo, son père adoptif, travaillait plus loin, chantonnant un air ancien que les habitants du village semblaient tous connaître.
Oren tenta de se concentrer à nouveau sur son travail, mais son esprit dérivait vers cet arbre qu'il avait vu il y a peu de temps. Un arbre immense, aux feuilles d'un bleu éclatant, dont le tronc portait des inscriptions qu'il n'avait jamais vues auparavant. Ce n'était pas seulement sa taille ou sa beauté qui le troublaient : c'était l'énergie qu'il dégageait.
Là-bas, près de cet arbre, Oren avait ressenti une chaleur étrange, une force vibrante qui semblait se répandre dans l'air autour de lui. Il avait voulu croire que c'était un rêve, une illusion née de la fatigue, mais au fond de lui, il savait que ce n'était pas le cas.
Après le déjeuner, Oren s'éclipsa discrètement. Il savait que Marlo et Alya n'approuveraient pas qu'il retourne là-bas, surtout avec tous les récits mystérieux qui entouraient cet endroit. Les anciens du village disaient que cette colline était maudite, que ceux qui s'en approchaient revenaient changés, hantés par des visions ou des voix.
Il emprunta le chemin sinueux qui menait à la colline. Le paysage semblait devenir plus sombre à mesure qu'il avançait, comme si la lumière du soleil peinait à traverser les branches des arbres. Une sensation oppressante s'empara de lui, mais il continua d'avancer.
Après plusieurs minutes de marche, il arriva enfin devant l'arbre. Sa beauté était saisissante : ses feuilles scintillaient doucement, d'un bleu profond, comme si elles étaient imprégnées d'une lumière intérieure. Le tronc blanc, marqué de runes anciennes, semblait presque vivant, pulsant légèrement, comme s'il respirait.
Oren s'approcha lentement.
— Qu'est-ce que tu es ? murmura-t-il, fasciné.
Lorsqu'il tendit la main pour toucher l'écorce, une énergie brûlante parcourut son corps. Il recula brusquement, mais il était trop tard. Une série de visions s'imposèrent à lui.
Il vit un monde autrefois rempli d'énergie pure : une force vitale que les anciens appelaient l'Essence. Cette énergie, omniprésente, permettait aux êtres vivants de prospérer, de créer et de vivre en harmonie. Mais au fil du temps, l'Essence fut corrompue. Une énergie sombre, impure, s'était immiscée dans ce monde, apportant chaos et destruction.
Les visions se firent plus claires : des combats dantesques entre des êtres d'une puissance inimaginable, maniant des forces de lumière et d'ombre. Ces guerres avaient laissé des cicatrices profondes sur le monde, des plaies que le temps n'avait jamais pu refermer.
Puis il vit une silhouette. Un homme aux cheveux noirs comme la nuit, ses mains illuminées par une énergie lumineuse, se tenant devant un trône immense. Cet homme avait un visage familier, mais Oren ne parvenait pas à comprendre pourquoi.
Une voix puissante résonna alors dans son esprit, grave et solennelle :
— Tu es l'héritier de ce pouvoir, le dernier gardien de l'Essence. Mais chaque lumière a son ombre. Prépare-toi.
Oren tomba à genoux, essoufflé. Les visions disparurent aussi rapidement qu'elles étaient venues, mais l'impact qu'elles avaient laissé en lui était profond.
Il fixa l'arbre, le souffle court.
— Héritier ? murmura-t-il. Mais héritier de quoi ?
Le sol sous ses pieds commença à trembler, le tirant de ses pensées. L'arbre semblait réagir à sa présence, ses feuilles scintillant de plus en plus fort. Soudain, une colonne de lumière jaillit du tronc, montant haut dans le ciel.
Le jeune homme recula, effrayé, mais incapable de détourner les yeux. Une sphère d'énergie pure apparut devant lui, flottant au-dessus du sol. Elle semblait à la fois paisible et terriblement puissante.
Oren tendit une main tremblante vers elle.
— Qu'est-ce que tu veux de moi ? demanda-t-il à voix basse.
La sphère d'énergie sembla pulser doucement, comme si elle comprenait ses paroles. Une chaleur douce l'enveloppa, chassant la peur et le doute de son esprit.
— Le destin t'attend, mais le choix te revient. Pars, Oren. Trouve la vérité.
Avant qu'il ne puisse répondre, la sphère se désintégra, libérant une vague d'énergie qui balaya la colline. L'arbre cessa de briller, redevenant silencieux, comme s'il n'avait jamais été éveillé.
Oren se releva lentement, le cœur battant. Rien ne serait plus comme avant.
En retournant vers Faylon, il sentait que quelque chose avait changé en lui. Une énergie qu'il ne comprenait pas encore circulait dans ses veines. Mais une chose était certaine : ce pouvoir était lié à l'Essence, et son lien avec l'arbre allait bien au-delà de ce qu'il imaginait.
Pour la première fois de sa vie, Oren se demanda qui il était vraiment.