Julian avait une grande journée qui l'attendait aujourd'hui. Debout au premier cri de l'aurore, il se prépara rapidement. Tout droit sorti des profondeurs de la cuisine, des odeurs à couper le souffle se baladaient.
"Mère a sûrement déjà commencé à cuisiner. Je me demande ce qu'elle nous a préparé pour aujourd'hui ?" Julian salivait déjà. Sa mère, Noël Barns, était digne d'un chef de la cour royale. Julian n'avait pas besoin de savoir ce qu'elle cuisinait pour en saliver.
Julian enfila rapidement un shirt et un pantalon. À la maison, ils ne voyaient aucune raison d'afficher leur statut. Ils étaient tous très simples dans la famille.
Une fois prêt, Julian descendit les escaliers, ses mouvements guidés par les odeurs de la cuisine. Sans le remarquer, une figure agile bloqua son passage. Du haut des marches, elle semblait beaucoup plus petite.
Une petite figure féminine digne d'un conte de fées, des yeux si attrayants qu'ils vaudraient des centaines de pièces d'or. C'était Lelia Barns, la cadette de Julian. Contrairement à Julian, avec qui on aurait du mal à déterminer son statut d'un simple regard, Lelia était totalement opposée. En un seul regard, on devinait tout de suite.
"Qu'est-ce que tu veux encore, toi ? Tu bloques le passage, Leli."
Elle avait cette fâcheuse tendance à l'agacer le matin.
Telle une petite fille un peu trop capricieuse, Lelia répondit :
"Bonjour, petite sœur. Comment tu vas ? Qu'est-ce qui t'est arrivé hier... ce serait la moindre des politesses, Julian."
Julian leva les sourcils, un sourire moqueur en coin. "Tu prends vraiment tes rêves pour des réalités."
Julian était bien trop occupé à rêver apropos des héritiers. D'un bâillement paresseux, Julian dit :
"Vas-y, je t'écoute, quoi de neuf ?"
À chaque fois qu'elle venait si tôt, c'était qu'il y avait quelque chose dont elle voulait parler. Déjà habitué, Julian écouta simplement tout en suivant ses narines vers la cuisine.
Le regard de Lelia scintilla. Se rapprochant de son frère, le duo se déplaça vers la cuisine.
"Tu imagines ?"
Les épaules de Julian se raidirent. Il se tourna lentement vers elle et fit exactement ce qu'elle attendait.
"Quoi ?"
Seulement là, Lelia continua de parler :
"Un de mes camarades a osé dire à ma copine qu'il l'aime ? Ahhh... J'arrive pas à comprendre où ils prennent un tel courage. Mais le plus bizarre, c'est qu'elle pense qu'il dit la vérité. Et me demande mon avis. Tu penses qu'il est sincère, Julian ?"
Julian fit un pas de travers, un moment si maladroit qu'il dut s'appuyer sur le rebord du mur pour ne pas tomber. Se tournant, frustré et un peu étonné, il dit :
"Comment suis-je censé savoir ça, Leli ? Ce sont tes camarades, pas les miens !"
"Mais tu es mon grand frère. Tu as sûrement déjà vécu quelque chose comme ça ?" Elle était du genre têtu.
Julian sourit bêtement, scannant ses pensées. "Si elle pouvait savoir que je n'ai jamais eu ce privilège. Même Leck était plus chanceux que moi à ce niveau." Cela dit, il ne pouvait clairement pas lui dire une chose pareille.
"Je pense que ton amie devrait poser la question elle-même. Ce serait plus sage."
"Oui, t'as raison." Lelia hocha la tête, semblant plonger dans ses pensées.
Puis une voix presque angélique les surprit :
"Bonjour, mes amours. Déjà collés l'un à l'autre. Je suis si fière que vous vous entendiez si bien."
Julian leva la tête vers sa mère. Une femme frêle dans sa trentaine. Noël Barns était carrément la plus belle femme qu'il ait jamais vue. Malgré les marques de l'age sur le visage, son sourire était toujours aussi brillant.
Maman Barns semblait être pleine d'énergie. "Allez tous à table, j'ai préparé votre repas préféré. Vous asseyez, votre père arrive et hop !"
Julian et sa sœur se mirent à table tandis que leur mère servait. Des plats à en perdre la tête. Julian avait le tournis à force de sniffer les odeurs.
"Hummm... de la viande." Julian n'en pouvait plus d'attendre.
Quelques minutes plus tard, Jules les rejoignit. Ses cheveux blancs comme neige étaient toujours la première chose qu'on remarquait. Bien que son visage semblait être sérieux, il arborait un sourire touchant.
"Vous n'avez plus besoin de m'attendre, vous savez. Je me dois de prendre soin de mes vieux os," finit-il par dire.
"T'es pas si vieux que ça, papa. Notre maître d'armes est beaucoup plus vieux que toi. Il arrive à peine à marcher. Mais ses connaissances sont immenses," Lelia ajouta, laissant échapper des rires entre chaque mot.
Tous se mirent à rire. Julian, cependant, semblait inquiet. Depuis plusieurs années, son père devait faire une routine matinale pour guérir son corps. Il avait été grièvement blessé il y a plusieurs années, le laissant avec de nombreuses cicatrices. Julian avait essayé de comprendre pourquoi et comment, ce qui s'était exactement passé. Mais son père était resté muet à ce sujet.
Ne voulant pas gâcher l'ambiance, Julian se retint de poser des questions. Jules avait la capacité de sentir ce que ses enfants ressentaient et changeait de sujet.
"Alors, Leli, qu'est-ce que le maître d'armes vous a appris ? As-tu choisi ton arme de prédilection ?"
Noël s'interposa. "On va pas parler de ça à table, chéri."
Lelia parla avec enthousiasme et détermination, des flammes brûlant presque dans ses yeux.
"Une épée, tout comme toi, père. Je serai la meilleure épéiste du royaume. Et je deviendrai si forte que la maison des Barns sera importante pour tout le royaume, y compris la famille royale."
De son côté, Julian se replia dans sa chaise. "Pour de l'ambition, cette petite, elle en a," il ricana dans son coin.
Ce n'était pas une surprise qu'elle ait choisi cette arme. Leur père, Jules Barns, avait pour surnom le Lion Écarlate. Beaucoup le respectaient pour sa maîtrise des arts martiaux. Certains nobles s'arrêtaient même par ici juste pour le défier en combat. Julian n'avait pas connu cette partie de la vie de son père, mais il était certain que ça avait dû être une période incroyable.
"Puisqu'on en est là... Et toi, Julian ?"
La voix de sa mère le sortit de sa transe. Se redressant sur sa chaise, il respira un bon coup. Il avait longuement réfléchi à la question et avait finalement pris sa décision. Julian ouvrit la bouche et répondit :
"Une lance."
Sa voix, telle une cloche, résonna avec conviction. Le regard de son père ne montra aucun changement visible, mais il finit par demander, curieux :
"Pourquoi une lance ?"
Julian répondit, non par arrogance, mais avec assurance :
"La portée de la lance est beaucoup plus importante. Avec la bonne technique, je ne serai en rien inférieur aux autres."
"Foutaise ! Tu perdras face à moi. J'aurai qu'à esquiver tes attaques. Et une fois rapprochée, je te trancherai avec mon épée en un seul coup !" rétorqua Lelia presque comme si elle se sentait attaquée.
Julian croisa le regard de sa sœur, un sourire en coin. Puis il se tourna vers son père, curieux de savoir ce qu'il en pensait.
Jules prit la parole, son ton méditatif laissant planer un certain mystère : "Un bon épéiste n'a pas toujours besoin de s'approcher. Mais ce sont des choses que tu apprendras par toi-même."
Bien qu'il comprît la logique de son père, Julian était convaincu de son choix.
"Je verrai bien ce que l'avenir me réserve," dit-il, à la fois excité et anxieux.
Noël intervint alors, brisant la tension : "Bon, maintenant mangez avant que tout ne refroidisse."
Tous se mirent à table, savourant un moment de calme et de convivialité en famille.