Épisode 2 : Fuir la France, retrouver NianiL'enterrement de ma mère fut une épreuve insoutenable. La pluie tombait, comme pour partager ma douleur. Elle avait été mon pilier, mon guide, et maintenant, elle reposait sous terre, emportant avec elle des secrets que je ne pouvais plus ignorer.Après la cérémonie, j'ai fait mes adieux à Ousman. Il avait du mal à retenir ses larmes, et moi, je faisais tout pour masquer les miennes. Avant de partir, je lui ai laissé tout l'argent que j'avais gagné. Avec cette somme, il pourrait construire un avenir stable et poursuivre ses études, comme il en avait toujours rêvé.— Prends soin de toi, petit frère, lui ai-je dit en le serrant dans mes bras.C'était la dernière fois que je le verrais avant longtemps.
Une fuite précipitée
Mon meilleur ami, était catégorique : je devais quitter la France immédiatement. Le meurtre de mon beau-père faisait la une des journaux, et la police ne tarderait pas à remonter jusqu'à moi. Ma carrière de rappeur, ma célébrité... tout cela était fini. Désormais, je n'étais plus qu'un fugitif.J'ai pris le premier vol disponible pour la Guinée. Huit heures de voyage, avec plusieurs escales. J'avais tout fait pour brouiller les pistes. Arrivé à l'aéroport de Conakry, je devais encore éviter les contrôles. Mon cœur battait si fort que j'avais l'impression que tout le monde pouvait l'entendre.J'observai les files d'attente, cherchant une faille. Une foule agitée se rassembla près d'un guichet, et je profitai du chaos pour glisser parmi eux, j'ai réussi, par miracle, à sortir de l'aéroport sans attirer l'attention. Mais je savais que ce n'était que le début. Mon objectif était clair : atteindre Niani, ce village dont ma mère avait parlé. Là-bas, je trouverais peut-être les réponses que je cherchais.Un nouveau visage
Avant d'aller plus loin, je devais changer d'apparence. Je me suis arrêté dans un bureau de change pour convertir 5 000 dollars en francs CFA, puis dans un petit salon de coiffure. Je me suis rasé la barbe et j'ai opté pour une coupe courte, plus discrète.Assis sur la chaise du coiffeur, la télévision diffusait les informations. Mon visage s'affichait à l'écran, accompagné du titre— Le rappeur Winsman, recherché par la police française, est suspecté dans une affaire de meurtre...Mon cœur s'arrêta un instant. Le coiffeur s'arrêta aussi, me regardant dans le miroir.— Vous ressemblez un peu à lui, dit-il en riant.Je me forçai à rire avec lui, mais l'envie de fuir me brûlait.Tout le monde dans le salon regardait l'écran, mais heureusement, ma nouvelle apparence me rendait méconnaissable. Pourtant, je savais qu'il fallait partir au plus vite.Sur la route – Une série de péripéties
Quitter la capitale ne fut pas une tâche facile. J'avais acheté une vieille voiture dans un quartier populaire, mais les routes étaient surveillées. Je devais traverser plusieurs barrages policiers, et à chaque contrôle, mon estomac se nouait.Lors d'un premier barrage, un agent m'a demandé mes papiers.— Où allez-vous ? a-t-il demandé, méfiant.— Je vais voir ma famille à l'intérieur des terres, ai-je répondu calmement, espérant ne pas trahir mon anxiété.L'agent a scruté mon visage un long moment, puis m'a rendu mes faux papiers. Je suis réparti, les mains moites.Plus tard, la voiture m'a lâché en pleine campagne, au milieu de nulle part. J'ai dû continuer à pied, sous le soleil de plomb. Chaque pas me rapprochait de Niani, mais chaque pas me coûtait aussi des forces.Dans un petit village où je m'étais arrêté pour acheter de l'eau, un groupe de jeunes m'a reconnu.— Tu ressembles à Winsman, le rappeur, a dit l'un d'eux.— Winsman ? a répondu un autre en riant. Non, impossible, lui, il est recherché !J'ai ri nerveusement et suis parti avant qu'ils ne puissent poser plus de questions.Après plusieurs heures de marche, je tombai sur un vieil homme avec une charrette.— Où allez-vous, jeune homme ? demanda-t-il.— Niani, répondis-je.Il me fit monter et m'emmena jusqu'à un petit village où je pus trouver un transport de fortune.Un périple dangereux
Les routes poussiéreuses de Guinée n'étaient pas faites pour les âmes faibles. À un moment donné, j'ai accepté de monter dans un bus bondé pour continuer ma route. Assis à côté d'une vieille femme qui portait un panier rempli de mangues, j'ai écouté les conversations autour de moi. Tout le monde semblait parler de l'homme qui fuiyait : WinsmanUn policier en civil était également monté dans le bus, son regard scrutant les passagers un par un. Je sentais son regard s'attarder sur moi. J'ai pris une profonde inspiration et me suis levé, prétendant devoir descendre à l'arrêt suivant. Il m'a regardé d'un air suspicieux, mais n'a rien dit.Enfin, après plusieurs jours de voyage, j'ai rejoint une camionnette qui m'a déposé à proximité de Niani. Le chauffeur, un homme aimable, m'a demandé où j'allais.— Je vais voir ma famille, ai-je répondu.Il m'a lancé un regard étrange, comme s'il devinait que je mentais.Arrivée à Niani – Un nom qui résonne
Quand j'ai enfin mis le pied dans ce village perdu au milieu de la brousse, je sentais un mélange d'épuisement et d'anticipation. Les maisons étaient modestes, les rues poussiéreuses, mais il y avait une atmosphère particulière, presque mystique.Alors que je cherchais un endroit où me reposer, un vieil homme m'a interpellé.— Shekmar ? a-t-il dit, incrédule.Je me suis figé. Shekmar. C'était le nom de mon père.— Vous... vous connaissez mon père ? lui ai-je demandé, stupéfait.L'homme m'a regardé longuement, presque comme s'il voyait un fantôme.— Oui. Mais pour l'heure, viens avec moi.Fin de l'épisode 2