Cher Journal,
Oui, je veux aimer et être aimée, malgré ce que ma condition me fait endurer.
Je voudrais, rien qu'une fois, ressentir la passion, l'amour et la joie de vivre des héroïnes de mes livres. Ces personnages qui, à chaque page, me font frissonner de bonheur, de douleur et de plaisir. Ces scènes qui me laissent le souffle coupé, me font me sentir vivante, presque comme si j'étais une d'entre elles, dans ce monde rempli de promesses.
Je n'ai jamais été normale. Depuis que je suis malade, c'est comme si ma vie s'était arrêtée à ce moment-là. Le temps s'étire, s'étire encore, et moi je l'observe depuis ma fenêtre, entre les murs de ma chambre. Mais parfois, je ferme les yeux et je rêve d'un autre monde, d'un monde où je serais celle que je veux être. Où un garçon pourrait m'aimer comme il aime les autres filles.
Je prie. Pas pour guérir, mais pour un miracle. Pas pour sauver ma vie, mais pour qu'un jour, quelqu'un me regarde comme j'ai toujours rêvé d'être vue. Peut-être que ce n'est pas ce que je devrais désirer, peut-être que cela ne se fait pas, de vouloir ça quand on sait que la fin est proche. Mais ça me permet de tenir, d'espérer, de croire qu'il y a encore quelque chose pour moi, avant que tout ne s'arrête.
Lauriane me dit que je dois être forte, que je dois continuer à me battre, mais la vérité, c'est que je ne me bats plus. Je sais que mon corps me trahit. Je sais que je vais mourir. Et, curieusement, cette idée ne me fait plus peur. Au contraire, elle me libère de la douleur quotidienne.
La fin me semble inéluctable. Mais je m'accroche encore à ce rêve... Avant de mourir, j'aimerais ressentir l'amour. L'amour que je n'ai jamais eu. L'amour qui fait trembler, qui fait vibrer le cœur. L'amour comme dans les livres. Comme dans ces romans que je dévore, espérant un jour y trouver un peu de ma propre vérité.
Mais quel jeune homme pourrait m'aimer, moi ? Celle qui est condamnée. Celle dont le corps est déjà une tombe.
Les médecins disent que je partirai avant la fin de l'année, juste avant le 31 décembre.
Mais moi, j'ai envie de vivre. Même juste un peu. Juste assez pour toucher du doigt ce que c'est que d'être vivante, d'être aimée.