Alaya
Je restai cachée derrière la colonne, pétrifiée par ce que je venais de voir.
Kael n'était plus seulement l'homme imposant qui m'avait attirée dans ce royaume mystérieux. Devant moi se tenait une créature d'une puissance et d'une férocité écrasantes : un loup gigantesque, son pelage noir luisant sous la lumière rougeâtre, et ses griffes tranchant l'air comme des lames.
Il était magnifique et terrifiant à la fois.
Les créatures qui lui faisaient face – ces Ombres monstrueuses – grognaient et tournaient autour de lui, cherchant une ouverture. Mais Kael bougeait avec une maîtrise impressionnante, sa force brute mêlée à une précision presque surnaturelle.
L'une des Ombres bondit sur lui, ses griffes tendues vers son flanc. Kael pivota, attrapant la créature en plein vol avant de la projeter violemment contre un mur.
Un craquement sinistre résonna dans la pièce, suivi d'un hurlement qui s'éteignit rapidement.
Mais les autres monstres n'étaient pas dissuadés. Deux d'entre eux attaquèrent en même temps, forçant Kael à reculer sous leur assaut. Ses griffes lacérèrent la chair d'une Ombre tandis que l'autre réussissait à mordre son épaule.
— Non !
Le cri m'échappa avant que je ne puisse m'en empêcher.
Kael releva la tête brusquement, son regard doré se fixant sur moi.
— Alaya, reste où tu es ! rugit-il, sa voix déformée par sa transformation mais encore reconnaissable.
Son ordre résonna dans l'air, mais je ne pouvais pas obéir. Pas cette fois.
L'une des créatures avait remarqué ma présence. Elle tourna lentement la tête dans ma direction, ses yeux rouges brillant d'une lueur malveillante.
Mon corps se glaça.
— Non, non, non… murmurai-je, reculant instinctivement.
La créature grogna, puis bondit.
Tout se passa en une fraction de seconde.
Je tendis la main par réflexe, brandissant la petite pierre cristalline que j'avais gardée sur moi depuis la pièce secrète.
Un éclat de lumière jaillit, si intense qu'il illumina toute la salle. La créature hurla, son corps se contorsionnant avant de se désintégrer dans un tourbillon d'ombres.
La lumière s'éteignit aussi vite qu'elle était apparue, et je tombai à genoux, le souffle court, ma main encore serrée autour de la pierre.
Kael se débarrassa des dernières Ombres restantes en un tourbillon de griffes et de crocs. Une fois le combat terminé, il se tourna vers moi, ses yeux dorés brûlant d'inquiétude et de colère.
Il reprit lentement forme humaine, sa silhouette massive se réduisant jusqu'à redevenir l'homme imposant que je connaissais. Son souffle était rauque, et son torse était couvert de coupures superficielles.
— Je t'avais dit de rester en arrière, dit-il, sa voix basse mais chargée de reproches.
Je relevai la tête, encore tremblante, et je levai la pierre.
— Cette chose… elle a répondu à moi, dis-je, ma voix à peine plus qu'un murmure.
Kael s'agenouilla devant moi, tendant une main hésitante vers la pierre.
— C'est un fragment de la Lune, murmura-t-il, son regard se durcissant. Un artefact ancien, lié à la magie de notre créatrice.
— Pourquoi ça a réagi à moi ?
Kael me fixa, et pour la première fois, je vis une lueur de peur dans ses yeux.
— Parce que tu n'es pas qu'une humaine, dit-il enfin.
Le silence s'étira entre nous, ses mots résonnant dans mon esprit comme un écho.
— Alors qu'est-ce que je suis ? demandai-je, ma voix trahissant ma confusion et ma peur.
Kael détourna le regard, se levant lentement.
— C'est ce que nous devons découvrir, murmura-t-il.
Mais avant que je ne puisse poser d'autres questions, un nouveau bruit résonna dans la pièce : des pas.
Je me retournai brusquement, mon cœur se serrant à l'idée qu'une autre Ombre puisse apparaître. Mais ce n'était pas une créature.
C'était Lyanna.
Elle se tenait dans l'encadrement de la porte, impeccablement habillée, comme si elle n'avait pas traversé les mêmes événements que nous. Ses yeux brillants d'une lueur moqueuse passèrent de Kael à moi, avant de se fixer sur la pierre que je tenais encore.
— Fascinant, murmura-t-elle, un sourire cruel se dessinant sur ses lèvres.
Kael se redressa, son expression se durcissant immédiatement.
— Lyanna, que fais-tu ici ? demanda-t-il, sa voix grondante.
Elle haussa les épaules, avançant lentement dans la pièce.
— J'ai entendu des bruits, répondit-elle, son ton faussement innocent. Je voulais m'assurer que tout allait bien.
Elle s'arrêta à quelques mètres de nous, son sourire s'élargissant.
— Il semblerait que ta petite humaine ait plus de ressources que nous ne le pensions.
Je me levai, rassemblant le peu de courage qu'il me restait.
— Si tu insinues quelque chose, dis-le clairement, rétorquai-je, ma voix plus forte que je ne l'aurais cru.
Lyanna haussa un sourcil, visiblement surprise par ma réponse.
— Oh, je ne fais qu'observer, dit-elle doucement. Mais il est clair que tu es… spéciale. Peut-être un peu trop.
Kael s'interposa, sa posture protectrice.
— Assez, Lyanna, grogna-t-il.
Elle sourit, mais je pouvais voir la rage bouillonner sous la surface.
— Très bien, murmura-t-elle. Je vais vous laisser à vos secrets.
Elle tourna les talons et quitta la pièce, mais pas avant de jeter un dernier regard vers moi, un mélange de mépris et de curiosité dans ses yeux.
Lorsque nous fûmes seuls, Kael se tourna vers moi.
— Lyanna est une menace, dit-il, sa voix basse.
— Je l'ai remarqué, répondis-je avec un sarcasme involontaire.
Kael ne sourit pas.
— Tu ne comprends pas, dit-il. Elle fera tout pour te discréditer, pour te blesser…
— Pourquoi ? Parce que je suis humaine ?
Kael secoua la tête.
— Parce que tu es ma Luna, murmura-t-il. Et elle ne l'a jamais accepté.
Je restai silencieuse, incapable de répondre.
Kael posa une main sur mon épaule, son regard sérieux.
— Alaya, tu es plus forte que tu ne le crois. Mais tu es aussi en grand danger.
Je déglutis, sentant la gravité de ses paroles.
— Alors apprends-moi, dis-je, ma voix plus ferme qu'elle ne l'avait été jusqu'à présent.
Kael hésita, puis hocha lentement la tête.
— Très bien. Mais sache que les réponses que tu cherches ne seront pas faciles à entendre.
Je serrai la pierre dans ma main, sentant sa chaleur réconfortante.
— Je suis prête, murmurai-je.
Mais au fond de moi, je savais que rien ne pouvait vraiment me préparer à ce qui allait suivre.