Je n'ai jamais été quelqu'un de particulièrement remarquable. Si on m'avait demandé il y a quelques années où je me voyais aujourd'hui, je n'aurais certainement pas répondu : ici, sur une base de recherche en plein milieu de nulle part, à étudier un caillou venu de l'espace. J'ai commencé comme beaucoup d'autres, un étudiant en quête de réponses dans un monde rempli de questions. Mon domaine était la physique théorique, une branche dans laquelle je pouvais disséquer la réalité et la recomposer à volonté. Avec le temps, mes travaux ont attiré l'attention, et c'est ainsi que je me suis retrouvé à travailler pour la NASIO, une organisation vouée à explorer les mystères de l'univers.
Depuis quelques mois, nous étions tous obsédés par une découverte incroyable : une météorite d'une composition jamais vue auparavant. Nous l'avions baptisée H-T007. Pourtant, le plus étrange avec cette météorite n'était pas seulement sa nature, mais le fait qu'elle avait cessé tout mouvement. Après avoir traversé des années-lumière, elle s'était arrêtée, suspendue dans l'espace, juste là, devant nous, comme si quelque chose l'avait figée dans le temps.
Je passais mes journées à l'observer, noter des résultats qui ne faisaient jamais de sens. J'avais la sensation que cette roche me narguait. Mais aujourd'hui, quelque chose d'autre allait se passer. Une déchirure dans la monotonie de nos observations de routine.
BOUM !
Le bruit assourdissant de l'explosion me tira brusquement de mes pensées. Le laboratoire trembla violemment sous mes pieds, et en quelques secondes, la panique s'empara de la base.
— "Code rouge ! Code rouge ! Tous aux points d'évacuation immédiate !" hurla une voix à travers les haut-parleurs.
Les murs vibrèrent alors que des morceaux de métal se détachaient des plafonds. Des cris se faisaient entendre de tous côtés, les gens couraient dans tous les sens, cherchant à s'éloigner de l'épicentre du chaos. Le laboratoire, habituellement si calme et contrôlé, était devenu une scène de confusion totale.
— "Allez, vite, par ici ! On doit évacuer tout de suite !" cria l'un de mes collègues, tirant une scientifique éberluée vers la sortie.
Je suivis la masse de gens se précipitant vers l'extérieur. Une fois dehors, l'ampleur de la situation me frappa de plein fouet. L'alarme continuait de hurler, et, au centre de la base, un gigantesque cratère venait de remplacer ce qui avait été la salle d'étude principale. L'onde de choc de l'explosion semblait avoir tout soufflé.
— "C'est… la météorite ?" balbutia quelqu'un derrière moi.
En effet, H-T007, l'objet que nous avions scruté si minutieusement depuis des mois, s'était écrasée au cœur de notre base. Les scientifiques autour de moi chuchotaient, jetant des regards furtifs vers le cratère tout en gardant une distance prudente. La chaleur émanait encore de la météorite, et une épaisse vapeur s'élevait vers le ciel nocturne, obscurcissant en partie la vue.
Mais, sans comprendre pourquoi, je me sentais attiré. Quelque chose, au fond de moi, me poussait à aller voir de plus près. Mes pieds bougèrent avant même que mon esprit ne réalise ce qu'il faisait.
Je franchis la ligne de sécurité et commençai à avancer, seul, vers le cratère.
— "Attends ! Où est-ce que tu vas ?!" s'écria quelqu'un derrière moi.
Je les ignorai, mes yeux fixés sur la météorite encore fumante. Plus j'approchais, plus l'air devenait épais et lourd, presque palpable. Les voix des autres scientifiques s'estompèrent alors que la vapeur m'enveloppait, me séparant d'eux.
Le silence régnait désormais autour de moi, mais… pas tout à fait. Il y avait quelque chose, un murmure, une voix imperceptible au premier abord, mais qui s'intensifiait à chaque pas. Elle provenait de la météorite.
Je continuai à marcher, irrésistiblement attiré. Le cratère s'agrandit devant moi, et, au moment où je me trouvai à quelques mètres à peine de la roche, une lumière blanche, intense, jaillit brusquement de l'intérieur.
__________
Le vent soufflait doucement sur le champ où un garçon allongé dans l'herbe regardait le ciel.
Les rayons du soleil caressaient son visage alors qu'un papillon, d'un bleu éclatant, voletait près de lui. Kirito, les yeux à moitié plissés par la lumière, suivait des yeux l'insecte qui s'envola pour aller se poser plus loin, près de deux garçons qui s'agitaient dans une fausse bataille.
Non loin, Hikaru, le plus jeune des deux, riait bruyamment tout en attaquant avec vigueur son frère aîné, Taiyo. Armé d'un bâton qui lui servait d'épée, il frappait sans relâche, enchaînant des coups rapides, presque désordonnés, tandis que Taiyo, plus calme, parait chacun de ses assauts avec une aisance impressionnante. Le contraste entre les deux était frappant : Hikaru semblait insatiable d'énergie, chaque mouvement débordait d'enthousiasme, alors que Taiyo conservait une maîtrise posée, le regard concentré et les gestes fluides.
Kirito se redressa lentement, captivé par le spectacle. Il aimait observer ces deux frères.
Leur complicité était palpable, et leur énergie semblait presque contagieuse.
- "Hé, Kirito, tu veux te joindre à nous ?" s'exclama Hikaru en se tournant vers lui, essoufflé mais toujours avec ce grand sourire sur le visage.
Kirito sourit en retour, mais avant qu'il n'ait le temps de répondre, une voix grave et puissante résonna à travers le champ.
_ "Hikaru ! Taiyo ! Rentrez, il commence à faire nuit."
C'était Basuchi, leur tuteur, un homme imposant et respecté dans le village. Son ton ne laissait aucune place à la discussion.
_ "Viens manger avec nous, Kirito ! Ça te fera du bien !" proposa Taiyo avec une sincérité que Kirito ne pouvait pas refuser.
Ils se dirigèrent tous vers la maison de Basuchi, un petit foyer modeste aux abords du village. Autour d'une grande table en bois, l'ambiance était chaleureuse. Hikaru ne cessait de parler, racontant avec excitation chaque coup de leur bataille d'entraînement, tandis que Taiyo et Basuchi écoutaient avec amusement. Kirito, d'habitude plus réservé, se sentait bien parmi eux, riant aux éclats à plusieurs reprises.
Mais, l'heure tournait. Après le repas, Kirito se leva, remerciant chaleureusement ses hôtes avant de se diriger vers sa propre maison, une petite bâtisse en pierres au centre du village. La nuit était tombée, et le village, paisible, était seulement éclairé par quelques lanternes accrochées ici et là.
En entrant chez lui, il sentit immédiatement une tension dans l'air. Son père, Elthor, se tenait debout au milieu de la pièce, bras croisés. Musclé, imposant, les yeux fermés comme à son habitude, il semblait deviner tout ce qui se passait autour de lui malgré sa cécité.
- "Où étais-tu ?" demanda
Elthor d'une voix basse, mais dangereusement calme.
Kirito sentit une boule se former dans son estomac. Il savait que son père n'appréciait pas sa proximité avec Hikaru et Taiyo, mais il ne voulait pas mentir non plus. Hésitant, il ouvrit la bouche, mais avant même de pouvoir formuler une réponse, Elthor comprit.
— "Tu étais avec eux, n'est-ce pas ?"
D'un mouvement rapide, il attrapa Kirito par le col, le soulevant légèrement du sol.
Ses yeux fermés dégageaient une aura intimidante.
— "Combien de fois t'ai-je dit de ne pas traîner avec ces gamins?" gronda-t-il, la colère perçant dans sa voix.
Kirito, paniqué, tenta de bredouiller une réponse, mais son père le relâcha brusquement, le repoussant vers les escaliers.
- "Va dans ta chambre.
Maintenant !"
Kirito baissa la tête, honteux et frustré, puis se hâta de monter les marches sans un mot. Il ferma la porte derrière lui et s'assit lourdement sur son lit.
Une profonde tristesse le gagnait. Il aimait passer du temps avec Hikaru et Taiyo, mais son père ne comprenait pas, et cela rendait les choses d'autant plus difficiles. Épuisé, il finit par s'allonger, les yeux fixés sur le plafond, son esprit encore agité par les événements de la journée.
Quelques minutes plus tard, il sombra dans le sommeil.
Mais la tranquillité de son sommeil ne dura pas. Dans son rêve, Kirito se retrouvait dans un paysage qu'il n'avait jamais vu auparavant. Un vaste royaume, fait de pierres et de tours, s'étendait devant lui. Mais ce n'était pas un rêve paisible. Des flammes, intenses et vives, dévoraient tout sur leur passage. Le feu ravageait les bâtiments, les arbres, les routes. Le souffle brûlant des flammes semblait presque réel, comme s'il pouvait le sentir sur sa peau. Le ciel lui-même était teinté de rouge et d'orange, dans une scène de destruction totale.
Kirito se tenait au milieu de ce chaos, incapable de comprendre ce qui se passait.
Les flammes s'approchaient de lui, de plus en plus proches, brûlantes, si proches qu'il crut y être englouti.
Il se réveilla brusquement, haletant, les yeux écarquillés par la peur. Il regarda son bras, stupéfait. Une douleur lancinante le traversait : une brûlure, réelle, marquait sa peau.
- "Qu'est-ce que... ?" murmura-t-il, paniqué, en touchant la marque. Comment cela pouvait-il être possible ?
Ce n'était qu'un rêve... Non ?