Quelques jours après l'événement de la grotte de la cité Kiyuza, dans la salle du Conseil. Les conseillers Tencubo et Calibak sont à leurs places. Quelques parchemins sont présents sur le côté de leur bureau. Rai ainsi que Lyn, les Shirenais et Zigriks en activité sont présents devant eux. Le propriétaire de l'Hoshaku est légèrement en avant. Le retour un peu précipité et inattendu de ce dernier constitue une partie des discussions basses présentes dans la foule.
« Rai, je ne m'attendais pas à te revoir de si tôt. Peux-tu nous raconter ce qu'il s'est passé ? entame Tencubo.
- Chers conseillers, j'allais effectuer ma mission de reconnaissance à l'Ouest lorsque, soudainement, une énorme masse de ki m'a violemment renvoyée ici. J'ai tentée de la contrer mais je n'ai pas pu. »
Une telle annonce étonne tout le monde. Notamment Tencubo. En effet, lorsque le ki fut utilisé contre le Kirioku, celui-ci prouva son efficacité parce que Fraya avait éveillé une énorme quantité d'énergie neutre. Pourquoi ceci a affecté Rai alors qu'il n'avait développé que la foudre avant d'accueillir l'énergie blanche ?
« Étrange... Ceci tend à confirmer que le fugitif Renko est bien là-bas et qu'on veut nous empêcher d'y accéder.
- Si lui ne peut y aller, qui le peut ? » répond Lyn.
Un petit silence. Après tout, ce que vient de raconter le sauveur de Faironne est bien resté dans les esprits. Le seul un peu en retrait émotionnellement à tout ça est Calibak. Il sait qui est derrière ça.
« Vous croyez vraiment qu'il est là-bas ?
- Aucun doute. affirme Calibak.
- Nous avons diffusé une annonce pour le retrouver à travers tout notre territoire ainsi que sur celui du Continent du Sud. Nous n'avons eu aucun retour. souligne le maître-conseiller.
- Je me suis rendu personnellement avec au Nord et à l'Est. précise Rai.
- Ce qui élimine quatre territoires sur cinq. La déduction est évidente. appuie le vice-conseiller.
- Qu'est-ce qu'il peut bien manigancer ? Vous pensez qu'il va revenir et retirer les énergies de tout le monde ? demande celle qui fut pendant un temps la gardienne de l'énergie noire.
- C'est hautement probable. Mon mentor Yoru l'aurait également supposé.
- Cette force était de même niveau que les deux hommes que Fraya et moi avons combattu.
- Donc ce n'est pas lui qui a pu vous repousser, noble Rai.
- Nous ne pouvons être sûrs de rien... S'il veut vraiment réutiliser Safaiatera comme l'ont fait ses maîtres, je pense que nous devrions remettre une surveillance là-bas. Mais, cette fois-ci, tu t'en chargeras, Rai. Avec ta rapidité hors norme, nous serons vraiment prêts à tout, contrairement à la fois où ces deux Zigriks t'avaient ouvert le chemin.
- A vos ordres, maître-conseiller.
- D'ailleurs, ils sont où ? »
Personne ne peut délivrer de réponse. Une légère panique atteint tous ceux qui les ont côtoyé. Connaissant leur aspect d'électron libre, le simple fait de savoir qu'ils sont capables de tout les dérange.
« Où est Rajik ? s'interroge Calibak.
- Il est dans le Continent de l'Ouest. Nous sommes sans nouvelles de lui. avance Lyn.
- J'espère qu'il n'a rien. »
Avis partagé avec Tencubo, celle qui fut son apprentie et surtout Rai. Si les habitants de l'Ouest se rendent compte qu'il n'est pas des leurs, il risque d'y laisser la vie, surtout avec l'aventure transmise oralement.
« Est-ce que tu peux contacter Yoru ? » demande le futur successeur d'Hotto.
- Le contacter ? Il est en vie et on ne me l'a pas dit ? s'étonne le Zigrik affilié à la foudre.
- Non, ce n'est pas ça. Moi aussi, sur le moment, j'ai cru la même chose. Mais non. L'autre jour, il m'a parlé. Je ne sais pas comment il l'a fait. Il ne m'a pas recontacté depuis.
- Peut-être que ça ne peut se faire que dans un seul sens. suppose le vice-conseiller.
- Vous pouvez deviner que, à cause de tout ça, j'ai du mettre la tâche qui m'avait été confié sur pause. Je repars chez Kenshiro.
- Va. Nous ne te retenons pas plus. Ton témoignage a été d'une grande utilité. Merci beaucoup, Rai. »
Ce dernier ne perd pas plus de temps pour quitter les lieux. La seule connaissance d'un contact établi par l'Hoshaku et Yoru réconforte un peu celui qui lui a succédé. Après ce soulagement, il repense à la confirmation de la présence de Rajik sur le Continent de l'Ouest. Vu ce qu'il a découvert sur lui, il craint réellement pour sa vie. Et, vu le niveau avancé du développement de son talent, ses chances de survie sont grandement amoindries.
« Qu'est-ce qu'on peut faire ? s'inquiète Lyn.
- Je n'en sais rien. Calibak, aurais-tu une idée ?
- Pas la moindre. »
Tout ça n'augure rien de bon du point de vue des manieurs d'éléments.Tout repose désormais sur les épaules de Rajik et de ce qu'il observera sur place. Justement, au même moment, pile en face de l'entrée de la Cité Kiyuza, les éléments perturbateurs qu'incarnent le duo fraternel entrent en scène.
« Oh... Mon... amorce Korit.
- Ça claque ! s'extasie sa sœur.
- Et ça là, ça existait sous le nez des Shirenais !
- Incroyable !
- Là, y a de quoi bien se remplir les poches. Le patron va être content. Grâce à notre deuxième version du sceau de camouflage, on sera insaisissable.
- A nous la belle vie ! »
Tout de suite après l'exclamation de Tekina, après la révélation de leur outil d'infiltration, ils disparaissent. Quelques instants plus tard, ils se trouvent à l'intérieur de la fabuleuse cité, sous la forme de silhouettes floues, quasiment imperceptibles. Leur technique de dissimulation est si efficace qu'aucun Kiyuza ne ressent leur présence. Les Zigriks sont émerveillés par l'architecture qu'ils découvrent.
« Les baraques... Y a pas à dire, ça claque... »
Les habits portés par les citoyens enchantent la sœur. Un habitant la frôle, la déstabilisant sans le savoir.
« Hé ! Fais gaffe ! »
Le peu d'élévation de voix que Korit effectue pousse un local à s'arrêter. De peur que leur présence soit soupçonnée, le duo cesse de bouger. Un bref échange de regard entre la sœur et le frère suffit pour que ce dernier s'excuse auprès d'elle. Un petit moment d'inaction avant que celui qui suspecte quelque chose ne reprenne sa marche quotidienne. Les Zigriks lâchent un soupir de soulagement. C'est à ce moment-là que leur attention se tourne vers l'unique tour surplombant tout le reste.
« Tu vois ça ? C'est le seul bâtiment à atteindre une telle hauteur. Il doit être très important. Si on veut mettre la main sur un bon butin, ce que tu veux, je suis persuadé que c'est là-dedans qu'il y en a un.
- Y a intérêt ! Allons tout en haut et fouillons jusqu'en bas. Comme ça, s'il y a un pépin, ce sera plus facile pour nous de nous barrer. »
Plus tard, ils s'infiltrent dans la plus haute salle de la tour, celle où se trouve notamment l'imposante statue de Faironne. A la seconde où ils la découvrent, une fascination sans pareille les berce. Son visage, si doux, si harmonieux. Ses courbes, si gracieux mais non provocants.
« Quelle... beauté. complimente-t-elle.
- On ne pourra pas la démonter. Et crois-moi bien que nous épuiser à la découper m'embêterait beaucoup. »
Une fois l'admiration passée, tous les deux prennent un peu de temps pour observer les alentours. Le bureau du vénérable ? Invisible à leurs yeux tant qu'il n'est pas présent.
« Y a rien de valeur ici... Descendons. »
Soudain, à leur grande surprise, Ki-Igno entre. Le duo le remarque. Aussitôt, ils ressentent une puissance remarquable provenant de lui. Paniqués, ils font tout pour retenir leur respiration. L'entrée de sa pièce privée apparaît. Dès que ce phénomène se produit, les deux intrus pensent qu'ils peuvent en tirer quelque chose.
« Que faire ?... Que faire ? » marmonne le vénérable avant de se mettre en tailleur face à la statue.
Cependant, leur appétit est vite refoulé par une pensée plus que judicieuse. En effet, si, par le plus malheureux des hasards, cet homme décide de quitter l'endroit alors qu'ils fouillent allégrement ses affaires alors ils se retrouveront enfermer jusqu'à son retour. Du coup, ils seront pris en flagrant délit. Et s'enfuir grâce à une explosion ou tout autre moyen spectaculaire facilitera leur capture.
« O Mère nourricière... J'implore votre écoute... Guidez-moi... Récemment, nous avons eu une intrusion. »
A la seconde où ils entendent ces mots, Korit et Tekina croient que quelqu'un les a repéré dehors.
« Nous avons réussi à le repousser au prix d'un lourd tribut. Cependant, je crains qu'il revienne encore et encore. Il va nous affamer. Aujourd'hui, nous avons deux volontaires à la succession. Un Kiyuza à l'ambition profonde mais dont je ne suis pas absolument certain de l'équilibre mental. Il s'appelle Renko. »
Malgré leur totale incompréhension par rapport aux propos du vénérable, le nom évoqué dit quelque chose à l'oreille de Korit. Malheureusement, pas moyen de remettre le doigt dessus.
« En ce qui concerne le second, arrivé il y a peu de temps... Comment dire... Pour être honnête avec vous, ô grande Faironne, il présente un caractère très belliqueux et impulsif. Un comportement parfois compliqué à dompter. Ce Kiyuza turbulent se prénomme Rajik. »
La réaction ici est totalement opposée à la première. Que fait ce fou furieux ici ? Voilà une information dont ils auraient bien voulu se passer. Désormais, ils devront redoubler d'efforts pour ne pas être repérés. Décidément, le sort s'acharne bien sur eux deux.
« O Mère nourricière... Je vous en prie... Aidez-moi. »
Il ferme les yeux et joint les mains, priant du plus profond du cœur pour que ses mots aient pu atteindre leur destinataire. Le duo en profite pour quitter aussi discrètement que possible la pièce.
« Renko... Renko... C'est pas le nom du type qu'ils cherchent à Kigen ? relance Korit.
- Je crois. Qu'est-ce qu'on fait ? On le capture ? On pourrait en demander beaucoup de fairos ! Comme ça, les Shirenais ne se poseront pas de questions sur nous. T'en penses quoi ?
- Rappelle-toi. Kigen n'est plus notre patron. Le Négociant nous a dit de chercher des trucs. On lui obéit. On a une belle vie.
- Pardon frérot, t'as raison. Cherchons. »
Pendant que les deux fanfarons cherchent un moyen pour quitter la Cité en toute discrétion, en même temps, dans la Chambre élémentaire, Hotto et Tetsuo sont face à face. Denki et Yoru sont en plein travail sur l'interface. Sur ce qui est sensé représenter le Continent du Nord, une lueur rouge prend de plus en plus d'ampleur. Dès qu'il l'aperçoit, le nouveau venu ne sait absolument pas quelle action réaliser.
« Regarde là. Le climat s'est trop réchauffé. Tu dois le faire revenir à un état normal. Envoie une vague de froid. » conseille la foudre.
Rassuré par la marche à suivre, l'élément de l'eau se concentre un instant et pose sa main droite au-dessus.
« Olowar Ilwaner. » prononce-t-il, avec une voix calme mais traduisant à la perfection l'effort mental engagé.
De la glace, produite en solidifiant une partie de l'humidité présente dans l'air du Continent d'où est issu Rai, presque aussi fine que de la neige, est envoyée vers le territoire concerné.
« Très bien. Hotto !
- Oui ?
- Tu peux arrêter tes efflux de chaleur ? Tu dérègles tout !
- Dois-je rappeler à monsieur qu'il y avait un déficit vital ?
- Toute vie doit pouvoir dormir aussi ! Alors, laisse la main à Yoru !
- Oui oui... »
D'un simple mouvement de main de sa part, combiné à ce que vient d'enclencher l'ancien vice-conseiller, la lueur rouge s'efface en quelques secondes. Une fois le problème réglé, l'élément du feu retourne sur l'activité en cours avec le nouveau venu. Yoru retire sa main de l'interface. Depuis son intégration, il semble de plus en plus apprécier le précieux rôle qui lui a été confié. Son mentor aurait été si fier. Du côté de celui qui vit ici depuis plus longtemps que les trois autres, il se réjouit du bon comportement du Zigrik. Son avis commence à changer, doucement mais sûrement.
« Après tout, nous sommes les garants de la vie. relève le successeur de Suisei.
- C'est l'héritage que nous avons reçu. L'écho du sacrifice qu'elle a dû faire pour préserver notre monde. Il a failli ne plus exister. Un jour... Une autre entité, toute aussi omnisciente, l'a défiée. Malheureusement, Faironne, face à la menace qu'elle représentait, a du se sacrifier pour la bannir.
- Où ? Vers cette étrange dimension où Rai fut enfermé pendant presque un an ?
- Exact. »
Voilà des informations hautement intéressantes. Riche de celles-ci, Yoru les met mentalement en adéquation avec celles obtenues lorsqu'il vivait de l'autre côté.
« A quoi penses-tu ? »
Avant de délivrer une réponse, le vice-conseiller repense aux techniques de Rai, ainsi qu'aux actions de Fumiaki sous les traits de Fraya. Aucune formule prononcée. Deux capacités totalement opposées mais pourtant conçues pour qu'elles soient complémentaires. Denki, conscient de la capacité intellectuelle de son interlocuteur, est tout ouïe.
« Ma théorie, c'est que les énergies noire et blanche viennent en fait de là-bas. Elles ont été envoyées par cette entité. Les propriétés de ces deux énergies sont complètement différentes des propriétés des énergies élémentaires ou de l'énergie neutre. Ça ne peut pas être qu'une simple coïncidence. »
Un simple échange de regard suffit pour déterminer l'acquiescement de celui qui a formé Kenshiro au Kuwanoren. Une simple indication du doigt pour demander s'il peut de nouveau utiliser l'interface. Un hochement vertical de tête. Le voilà à se ruer dessus, cherchant presque frénétiquement les flux de Rai et Fraya.
« Rai !... Rai !... Tu m'entends ? »
Malgré ses multiples tentatives d'établir la même communication opérée entre lui et son ami, aucune réponse.
« Qu'est-ce qu'il se passe ? »
Denki vient à son secours et analyse pendant quelques secondes leurs signaux respectifs.
« Ils sont comme connectés... C'est peut-être à cause de ça que tu ne peux pas lui parler. »
En effet, le Zigrik ne peut que confirmer ses propos. Une situation plus qu'embêtante pour lui. Sans doute voulait-il transmettre ses impressions ? Constatant qu'il tient quelque chose, la foudre réfléchit quelques secondes. Pour le moment, aucune solution ne vient. Afin que le Zigrik ne se braque pas encore plus, il faut s'occuper sur autre chose. Revient alors la remarque de l'élément du feu par rapport au déficit vital. Après un bref mais vif envoi d'un signal quasiment imperceptible, la foudre sent que d'autres vies sont sur le point d'éclore.
« Hé ! Vous deux ! »
Hotto et Tetsuo se retournent.
« Qu'est-ce qu'il y a encore ? demande le feu, la voix traduisant une certaine irritation.
- Tout le monde à son poste. Tetsuo, vu que l'état de ta porte, utilise celle d'Hotto. »
Sans poser plus de questions, les éléments qui s'étaient isolés pour une activité encore inconnue se dirigent vers la porte du Sud, Yoru vers l'Est et Denki vers le Nord. Une fois placés, ils tendent les mains vers elles. Les membres de l'autorité suprême enclenchent leurs auras.
« Lemtolar ! » prononcent-ils simultanément.
Les failles s'ouvrent dans la seconde. Leurs manifestations physiques de l'activation de leurs puissances s'engouffrent à l'intérieur.
« Qu'est-ce qu'on fait exactement ? demande Tetsuo.
- Ah oui, je n'ai pas eu le temps de te l'expliquer. C'est le moment où nous donnons des parties de nous-mêmes. Des êtres naissants vont les recevoir.
- D'accord. Dans ce cas... »
C'est alors que le nouvel élément de la terre engage plus d'aura à l'intérieur de la porte cardinale.
« Je veux que quelqu'un puisse être mon égal ! »
Une action et une réponse qui font sourire son collègue trois petites secondes avant qu'il pose sa main gauche sur son épaule, lui indiquant ainsi d'arrêter ce qu'il fait. En un regard, celui qui a succédé au grand Densetsu comprend que ça ne sert à rien. Le phénomène se produit encore pendant cinq secondes avant que, une fois le niveau d'énergie à distribuer atteint, les éléments désactivent leurs auras. Les failles se referment quasiment aussitôt. Les deux plus anciens du quatuor, Denki et Hotto, habitués depuis longtemps à cet exercice, s'accroupissent. Celui qui fut partenaire du maître-conseiller se sent saisi d'une certaine fatigue. Le nouvel élément de la terre est pris de vertiges assez sérieux.
« Ça pique hein ? relève le feu, avec une petite pointe de moquerie plutôt innocente dans la voix.
- Oui... Je peux me reposer auprès de ma porte même si je ne m'en suis pas servi ?
- Euh... Oui... Bien sur. Ne t'inquiète pas. Cet état va vite s'estomper. »
Rassuré, Tetsuo se place devant la sienne et s'accroupit. Alors qu'en tant que Shirenai, même avec l'acquisition du Kuwanoren, il avait besoin de temps pour récupérer, là, à peine assis qu'il sent ses forces revenir. Quelle agréable sensation ! Ravi, il pose ses yeux sur sa porte. C'est alors qu'il se rend compte qu'elle présente comme d'étranges anomalies. En effet, le peu de lueur qu'elle est sensée émettre en permanence apparaît de manière discontinue. L'élément ressent également d'inexplicables petites ondes sismiques provenir d'elle.
« On dirait... Que ça vient de l'autre côté. »
Intrigué, il pose sa main gauche dessus. Aussitôt, ses yeux deviennent aussitôt verts. En même temps, de l'autre côté, Renko, yeux fermés, est assis en tailleur. Certains sceaux ont disparu.La faille présente devant lui se met soudainement à se teinter de vert. Les lignes la liant aux sceaux sont progressivement envahies par cette teinte.La vibration obtenue force le Kiyuza à ouvrir immédiatement les yeux.
« Qui es-tu ? entend-il de la part de Tetsuo.
- Qui êtes-vous ?
- Je suis l'élément de la terre. »
Une telle révélation le perturbe. Pourquoi un élément parvient-il à accéder à ce lieu sacré ? Ceci n'a jamais été mentionné par Ki-Ramen !
« C'est toi qui influence ma porte ? Elle émet des ondes étranges. Est-ce toi le responsable derrière elles ? »
Avec tout ce qu'il a pu observé à travers le temps, l'épéiste pense qu'il s'agit d'une autre conséquence directe des dérives Shirenais. Fort de cette idée, il active son aura. La couleur verte perd du terrain.
« Arrête ça ! ordonne l'élément.
- Je n'ai pas d'ordre à recevoir d'un ennemi !
- Un ennemi ? Absolument pas ! Tu es là pour quoi ? Obtenir le Kuwanoren ? »
Le phénomène chromatique s'arrête.
« Je suis l'un des quatre garants de l'équilibre énergétique de Faironne. Mon nom est Tetsuo. Si tu es là, c'est que tu veux avoir plus de puissance. Eh bien, sache que je peux te l'enseigner. Il s'agit de la libération totale de la part d'énergie élémentaire présent en toi. Ainsi, tu éveilleras celui concernant la terre. »
Comprenant qu'il s'agit ici du sujet principal pour lequel Fumiaki cultivait une jalousie féroce envers son homologue Shirenai, Renko augmente brutalement son aura. Le vert n'est plus présent dans les lignes.
« Hé ! Qu'est-ce que tu fais ? Je peux t'aider !
- Vous n'êtes ni Ki-Ramen, ni Faironne ! Vous êtes une représentation de la corruption ! Porte-parole de ces menteurs ! Je n'ai jamais été l'un des vôtres ! Faironne ira mieux sans vous ! »
La teinte représentative de l'élément de la terre n'est presque plus présente dans la faille. Tetsuo fait tout ce qu'il peut pour la garder active. En vain.
« Qui es-tu ?
- Le prochain Ki-Ramen ! Et je terrasserai Kigen ! »
La puissance dégagée atteint son summum. Le vert disparaît complètement. Des frissons parcourent les Kiyuzas les plus proches de la grotte. Dans la Chambre, Tetsuo se fait violemment propulser vers Hotto. L'élément du feu, qui était rentré dans une phase de méditation, ne peut pas s'écarter. Seul le Zigrik du quatuor se rend compte de ce qu'il se passe.
« Filoler Ilwaï ! »
Yoru parvient à le bloquer à temps grâce à un bloc de glace. La force qui a projeté son collègue géomancien réussit à fracturer la structure créée à la va-vite. Hotto reprend ses esprits.
« Merci.
- Qu'as-tu fait ? lui demande le pyromancien.
- Quelqu'un... S'est accaparé ma porte !... Il m'a pris pour un ennemi ! explique-t-il, encore sous le choc.
- C'était qui ?
- Je ne sais pas... D'après ce que j'ai compris, il a dit qu'il serait le prochain Ki-Ramen, un truc du genre. »
Son affirmation interpelle particulièrement celui qui porta le titre de vice-conseiller. Pour l'élément du feu, seul le fait qu'apparemment un être extrêmement puissant a pu repoussé l'un de ses collègues le stupéfie.
« Je croyais que c'était le nom du bâtisseur de Safaiatera. Ça doit être un titre. Vous le saviez ? interroge Tetsuo.
- Depuis plus de deux cents ans, la porte de l'Ouest est dans cet état-là sans que nous sachions comment ni pourquoi. répond Denki.
- Je n'ai pas pu savoir ce qu'il était en train de faire. Il ne m'a rien dit de plus.
- Les conseillers que tu as connu n'ont rien suggéré à ce sujet ? relève Yoru.
- Rien du tout. »
Grâce à ce qui était inscrit dans son grimoire, Yoru se souvient qu'un certain Ki-Ramen scella les énergies noire et blanche. Puis, il se remémore le fait que Daigaku et Aritsune avaient qu'ils voulaient finir ce qu'ils avaient commencé. S'il ajoute à ça le phénomène étrange du cimetière du Nord auquel il a été témoin, l'existence de cette autre dimension, ça ne peut pas être qu'une simple coïncidence.
« Il a menacé Kigen.
- Nous devons avertir Tencubo. propose le Zigrik.
- Pourquoi ? Tu as compris quelque chose ? suppose la foudre.
- Je crois en effet. Avec ce que tu viens de vivre Tetsuo, ça devient évident. J'ai bien peur qu'une menace supérieure à celle de la neutralisation générale planifiée et perpétrée par ceux que Tencubo et moi avons succédé à Kigen. Hotto, essaye de le contacter.
- C'est impossible. Sauf s'il se rend sur le volcan.
- Mince... Mince... Mince... Réfléchissons... Rai est injoignable. On ne peut pas utiliser les portes comme moyens de communication.
- Détends-toi. Tu n'aboutiras à rien dans cet état-là.
« Je trouverai une solution. La vie de mes amis en dépend. La pérennité de Kigen et de Faironne toute entière est en jeu. »
Hanté par cette idée, il part s'isoler un petit moment. L'élément de la foudre semble un peu dépassé par les événements, attendant impatiemment de nouvelles déductions de son collègue manieur d'eau.
« Il a raison... J'ai vu cette dimension avaler un fantôme... Comme si ce n'était pas fait de manière hasardeuse... Et lorsque je me suis fait possédé... J'avais senti la même onde faire écho en moi... Nous devons trouver une solution. Nous sommes les éléments, les régisseurs de Faironne. Nous devons la protéger. délivre Tetsuo.
- Tu as raison. Mais pour être franc, je ne vois pas ce qu'on peut faire à part attendre que ça soit les tiens qui trouvent la solution. » répond Hotto.
Pour la première fois, aucun membre du quatuor ne sait pas ce qui est possible ou non de faire vu l'aspect exceptionnel de la situation. En même temps, Renko a encore son aura active. Ainsi, avec l'expérience qu'il vient de vivre avec cet inattendu interlocuteur, il comprend la nature de l'endroit où il se trouve. Soudain, le sceau transmis par Daigaku et Aritsune, alimenté par tout ce qu'il a pu intégré avant, s'active sur tout son corps. Aussitôt, les quelques sceaux restants dans la grotte disparaissent d'un trait et filent vite vers lui.
« Salutations, jeune Kiyuza.
- Ki-Ramen ? C'est vous ? Expliquez-moi ce qu'il se passe !
- Tu es sur le point d'entrer dans une nouvelle phase de ton existence. Tu as atteint le stade ultime de développement de ton énergie. Désormais, tu possèdes tous les talents de notre peuple. Tu es la dernière barrière pour sauvegarder l'héritage de notre chère mère. L'exilé et ses enfants doivent absolument être écarté.
- Et j'y arriverai !
- Ta tâche sera lourde.
- Je n'ai pas peur !
- Tu es désormais l'émissaire de Faironne. Assiste à la dernière étape de ton voyage. »
Son corps tout entier se met à briller. Une imposante lueur émerge de l'entrée de la grotte. Tous les Kiyuzas se tournent vers elle. Le vénérable comprend immédiatement ce qui en résulte. Aussitôt, ses mains tremblent. Renko, sous une forme astrale, flotte dans l'espace, tourné vers la planète.
« Où suis-je ?
- Félicitations, mon enfant. » répond une voix féminine, douce et chaleureuse.
La figure féminine aperçue dans la Cité apparaît devant lui. Une émotion indescriptible saisit les tripes de l'épéiste. Si prenante que des larmes commencent à s'échapper. Ses jambes tremblent. Il se décompose sur place. Ki-Ramen a donc été son représentant ? Quel honneur ! Quel bonheur !
« Fai... Fai...
- Mon enfant, tu as passé l'épreuve avec succès. Tu es sur le point d'endosser un lourd rôle. Sois à la hauteur.
- Je le ferai ! J'ai été trompé par ceux qui prétendent vous protéger ! J'ai découvert un peuple incroyable et juste ! Le votre ! Je vous promets que je serai votre protecteur ! Votre gardien ! »
Le tout nouveau émissaire de la déesse suprême du peuple Kiyuza est propulsé depuis l'espace jusqu'à revenir dans la grotte. Des lignes grises translucides parcourent alors tout son corps, comme les Kuwanorens déployés par les manieurs d'éléments avec un niveau suffisamment élevé. Un symbole composé de deux spirales, assemblées pour recréer le symbole de l'infini, de manière verticale, emboîtées et entourées d'un cercle, apparaît sur son front. En même temps, Ki-Igno, perturbé par ce qui vient de se produire, est bouche bée. Maintenant, son titre peut être disputé. Une sorte de terreur le paralyse.